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 Premiere Guerre Mondial

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Blackeu Viking
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MessageSujet: Premiere Guerre Mondial   Premiere Guerre Mondial EmptyMer 3 Mai - 0:30

Premiere Guerre Mondial Ypres_masques_gaz
Les gaz sont utilisés pour la première fois par les Allemands en 1917 à Ypres
La guerre industrielle vient d'élaborer l'arme chimique et d'achever la déshumanisation des combats. Le gaz n'est pas un ennemi totalement invisible car il émet une faible fluorescence verdâtre qui en augmente la dimension terrifiante.


La Première Guerre mondiale porte à leur paroxysme la mondialisation des ambitions, les tensions pour l'aménagement de la carte de l'Europe, et la concurrence militaire et idéologique entre les Etats, qui ont déjà fortement marqué l'histoire européenne après 1870.



Mais, pour la génération de 1914-1918, la Grande Guerre signe un changement d'époque, la disparition de l'ordre ancien, la véritable fin du XIXe siècle.



Dans bien des domaines, la guerre apporte brutalement son lot d'innovations - technologie militaire, place des femmes et des ouvriers dans la société, intervention étendue de l'Etat - et de bouleversements, avec la révolution prolétarienne, en Russie. La nouveauté tient aussi au fait qu'elle est, tout entière, la guerre des nations, ces nations que le XIXe siècle a consolidées et qui ont investi dans ce conflit leur identité et leur honneur.



Elle fut tout autant la guerre des patriotes, comme l'atteste l'ampleur des effectifs et des pertes subies, dans laquelle les peuples sont entrés résignés mais sûrs de leur bon droit, et parfois aussi enthousiastes, les familles accompagnant en chantant pères, fils et frères qui partaient.
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Blackeu Viking
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MessageSujet: Re: Premiere Guerre Mondial   Premiere Guerre Mondial EmptyMer 3 Mai - 0:32

Un conflit attendu

Premiere Guerre Mondial Alliances-en-1914
Les alliances européennes en 1914
Carte Alain Houot


La menace plane


Le conflit généralisé n'est pas une surprise pour l'Europe de 1914 : la menace plane depuis les crises de 1905 (Tanger) et de 1911 (Agadir) entre la France et l'Allemagne, puissances coloniales qui se disputent l'Afrique. Chaque pays a engagé une véritable course aux armements et au renforcement de ses effectifs militaires.



Ainsi, la Grande-Bretagne, dans le domaine naval, fait face à la montée en puissance de la flotte de guerre allemande de l'amiral von Tirpitz, laquelle doit être l'instrument de la Weltpolitik («politique mondiale») de Guillaume II. Ainsi, la France fait passer le service militaire à trois ans, en 1913. Cependant, le caractère limité des crises de Tanger et d'Agadir montre que l'Europe n'est pas prête à entrer en guerre uniquement pour le partage de l'Afrique.



Certes, des enjeux proprement impérialistes existent en arrière-fond, tel l'antagonisme anglo-allemand sur les mers et dans l'Empire ottoman, qui détermine le choix britannique de l'Entente cordiale avec la France, en 1904. Mais ils ne sauraient, à eux seuls, expliquer pourquoi les puissances européennes choisissent, en juillet 1914, de risquer la guerre généralisée.

Le jeu des alliances

En fait, le premier conflit mondial est déclenché par le jeu mécanique des alliances – Triple-Alliance, ou Triplice, entre l'Allemagne, l'Autriche-Hongrie et l'Italie, à partir de 1882, d'une part ; Triple-Entente, entre la France, la Grande-Bretagne et la Russie, à partir de 1907, d'autre part – contractées dans le double contexte de l'antagonisme franco-allemand issu de la guerre de 1870 et de la rivalité austro-russe dans les Balkans.



La France était demeurée isolée dans le système diplomatique élaboré par Bismarck jusqu'à ce que la Russie, frustrée par le congrès de Berlin des fruits panslavistes de sa victoire de 1878 contre les Turcs, en vienne à considérer comme irréductible la divergence entre ses intérêts et ceux de l'empire des Habsbourg. Le rapprochement franco-russe de 1891 résulte logiquement de l'échec de Bismarck à arbitrer et à équilibrer les expansionnismes autrichien et russe dans l'espace politique balkanique, où l'influence de l'Empire ottoman recule depuis un siècle – Moscou cherchant notamment à s'assurer la maîtrise des Détroits et une ouverture sur la Méditerranée. Les guerres balkaniques de 1912-1913 ont rendu l'initiative à la Russie, par le biais de la domination exercée pendant cet épisode par son allié serbe sur les petits pays de la région.



Lorsque l'archiduc héritier du trône des Habsbourg est assassiné, le 28 juin 1914, à Sarajevo – la Bosnie et l'Herzégovine sont alors sous administration autrichienne –, Vienne accuse immédiatement

les services secrets serbes et lance un ultimatum à la Serbie le 23 juillet, y réclamant notamment le droit de participer à l'enquête sur l'assassinat à Belgrade même. La Serbie ayant refusé, l'Autriche lui déclare la guerre, le 28 juillet. Si elle agit ainsi, sachant que la Russie a promis son soutien à la Serbie, c'est parce qu'elle a l'assurance d'un appui total de l'Allemagne, qui l'a d'ailleurs poussée dans le sens de la fermeté, prenant le risque calculé d'aller jusqu'à la guerre générale, même si dès le 27 juillet l'Italie a proclamé sa neutralité.



Dans l'autre camp, il est vrai que la France n'a pas tout fait pour empêcher l'éclatement du conflit : elle a au contraire resserré ses liens avec la Russie - Poincaré se rend à Saint-Pétersbourg, le 23 juillet -, ce qui a eu pour effet d'aggraver en Allemagne le sentiment d'un encerclement fatal.



D'autre part, ont pesé dans la balance la personnalité du président Poincaré, Lorrain particulièrement attaché à la récupération des «provinces perdues», et le sentiment que, étant donné le déséquilibre démographique croissant entre la France (40 millions d'habitants) et l'Allemagne (65 millions), la guerre de «revanche» ne devait plus être longtemps différée pour avoir des chances de réussir. L'Allemagne, après avoir déclaré la guerre à la Russie le 1er août 1914, la déclare à la France le lendemain.

La position britannique

La Grande-Bretagne est le seul pays à entrer dans la guerre (le 4 août) sans qu'on la lui ait déclarée : elle prend cette décision pour préserver l'équilibre européen, qu'elle considère menacé avant tout par l'Allemagne.



Ce choix, bien que dans la logique de sa politique des dix années précédentes, surprend le chancelier allemand Bethmann-Hollweg, qui s'indigne qu'une nation parente puisse entrer en guerre pour «un chiffon de papier» (le traité de 1839 garantissant la neutralité de la Belgique).



Les responsabilités directes sont donc plus diluées qu'il n'y paraît, même si l'Allemagne voit dans une «guerre d'hégémonie» sur le continent européen le moyen de mieux asseoir sa politique de puissance.
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MessageSujet: Re: Premiere Guerre Mondial   Premiere Guerre Mondial EmptyMer 3 Mai - 0:40

Les opérations militaires

Premiere Guerre Mondial Fronts-guerre-1919
Les fronts européens en 1918
Carte Alain Houot


Un conflit de courte durée

Tous les protagonistes entrent dans le conflit avec l'idée qu'il sera de courte durée, et que la décision sera rapidement forcée. Du côté des états-majors, des scénarios stratégiques ont été mis au point depuis longtemps, mais c'est le schéma allemand (plan Schlieffen de 1905) qui se révèle le plus réaliste et le plus efficace: invasion de la Belgique (en violation de sa neutralité), puis du nord de la France, descente vers Paris, et grande manœuvre d'encerclement des armées françaises massées à l'Est.

En effet, le plan français (le plan XVII) prévoyait de concentrer les troupes entre Vosges et Meuse. Le rapport des forces en présence est très favorable à l'Entente, dont la population est le double de celle des empires centraux (238 millions d'habitants contre 120). L'Entente peut aligner 167 divisions d'infanterie contre 147, et 36 divisions de cavalerie contre 22.


1914. La guerre de mouvement

L'offensive prévue par les Français en Lorraine est un cinglant échec et, tandis que les Allemands écrasent la résistance belge (Liège est prise le 16 août et Charleroi le 23) et font reculer les forces franco-britanniques rencontrées sur la Sambre, les armées françaises de l'Est se replient à marche forcée vers la Seine. Le plan Schlieffen se déroule selon les prévisions; la route de Paris paraît ouverte, et le 5 septembre, les troupes allemandes arrivent à la hauteur de Meaux. Mais Joffre, commandant des armées françaises du Nord et du Nord-Est, et le commandant britannique French profitent d'une initiative hasardeuse de l'aile droite allemande du général von Kluck (négligeant Paris, elle cherche à couper la retraite de l'armée française, présentant ainsi le flanc à l'armée couvrant la capitale) pour lancer une contre-offensive: c'est la fameuse bataille de la Marne (24 août-13 septembre), où, après plusieurs jours de combats acharnés, le général allemand Moltke est contraint d'ordonner un repli général, qui reporte le front 70 km plus au nord, sur l'Aisne, et entérine l'échec du plan de bataille allemand.

Le maréchal JoffreLes armées s'affrontent ensuite sur la Somme et dans le Nord lors des combats de la Course à la mer et de la mêlée des Flandres: les Allemands sont contenus au nord d'une ligne passant par Reims, Soissons, Arras, et aboutissant à la mer du Nord, sur la côte belge. Le front est stabilisé en décembre 1914; il forme un trait continu qui s'étire sur 750 km. La guerre des tranchées s'installe.

Parallèlement, les opérations commencent en Prusse-Orientale fin août - début septembre, et des troupes allemandes doivent être prélevées à l'ouest pour contenir l'avance russe sur le territoire du Reich, ce qui contribue à l'échec sur la Marne. La brillante victoire de Hindenburg à Tannenberg, les 26-29 août, permet cependant à l'Allemagne de pénétrer assez profondément en territoire polonais pendant l'hiver 1914-1915. Quant aux Autrichiens, ils prennent Belgrade en novembre mais en sont chassés par les Serbes le 13 décembre. Les Russes bousculent les Autrichiens en Galicie.

1915-1916. Une guerre de position et guerre d'usure

L'entourage de Joffre rêve de percer les lignes adverses sur un assez vaste secteur pour pouvoir obtenir le recul de l'ensemble du front et revenir à la guerre de mouvement. Plusieurs attaques infructueuses sont lancées en 1915, en Champagne, en Argonne, en Artois: le chiffre des pertes est si élevé (400'000 morts) que le crédit du commandant en chef est atteint. Le nouveau chef du grand état-major allemand, le général von Falkenhayn (qui a remplacé Moltke le 14 septembre 1914), reprend cette logique à son compte pour accélérer l'usure des effectifs français.

De février à octobre 1916, il fait porter l'effort allemand sur les défenses de Verdun, point avancé et isolé du front français. Des combats terribles s'y déroulent, l'état-major français ayant décidé de conserver la place coûte que coûte. Joffre choisit de lancer malgré tout le projet d'offensive sur la Somme qu'il préparait depuis plusieurs mois. Malgré quelques succès, en juillet 1916, l'engagement sur la Somme se transforme en boucherie, s'essouffle dès le 14 juillet et tourne court en novembre.

Le sauvetage de Verdun est, à ce moment, assuré au prix de pertes encore supérieures, et la situation apparaît plus que jamais bloquée. La stratégie de la guerre de position diffère totalement de celle de la guerre de mouvement. L'artillerie joue désormais un rôle fondamental, notamment en préparation à tout assaut d'une tranchée ennemie. Ces assauts se font souvent baïonnette au canon et sont d'une sauvagerie extrême, comme en témoigneront après la guerre de nombreux soldats des deux camps (Henri Barbusse, le Feu; Erich Maria Remarque, A l'ouest rien de nouveau). De plus, la guerre des tranchées est à l'origine de l'emploi des gaz asphyxiants, utilisés pour la première fois à Ypres par les Allemands, le 22 avril 1915. Le rôle des véhicules blindés ne fut jamais déterminant.

Le front russe

L'Allemagne continue de connaître le succès à l'est, arrivant à proximité de Riga et de Minsk, tandis que les troupes austro-hongroises et allemandes regagnent le terrain perdu en 1914 et reconquièrent la Galicie. Les Allemands sont accueillis sans déplaisir, voire très favorablement, par les populations des zones conquises, que ce soient les quatre millions de juifs polonais persécutés par le tsarisme, ou les Ukrainiens, dont ils flattent les aspirations à l'indépendance. La démoralisation des troupes russes, mal équipées et mal nourries, s'accentue.

La guerre dans les Détroits et dans les Balkans

L'ouverture de nouveaux théâtres d'opérations a pourtant fait naître l'espoir de changements décisifs pendant l'année 1915. Dès octobre 1914, l'Allemagne a poussé l'Empire ottoman à entrer en guerre contre la Russie, son adversaire traditionnel dans la région. Plus que les attaques turques dans le Caucase et contre les ports de la mer Noire, c'est le blocage des Détroits qui met en difficulté la Russie, l'empêchant d'exporter son blé et de recevoir le ravitaillement allié. La Russie déclare la guerre à la Turquie le 2 novembre 1914, suivie, le 3, par la France et la Grande-Bretagne. Les Britanniques conduisent d'abord seuls un débarquement au fond du golfe Persique, pour détourner les Ottomans du Caucase, puis réussissent à associer la France à une opération sur les Dardanelles, en mars 1915, mais c'est un cuisant échec (perte de nombreux navires et de 145'000 hommes).

La France et la Grande-Bretagne ont promis secrètement à la Russie le contrôle des deux rives des Détroits en cas de victoire contre les Ottomans. La perspective d'une redistribution des cartes dans les Balkans par les vainqueurs pousse alors les puissances secondaires, protagonistes des guerres de 1912-1913, à entrer dans le conflit. L'Italie, après des tractations avec les deux camps, s'engage en mai 1915 aux côtés des Alliés. Ses buts de guerre, dûment enregistrés par l'Entente, sont le rattachement des terres irrédentes (le Trentin et l'Istrie restés sous la domination de l'Autriche-Hongrie en 1866) et du littoral dalmate, mais elle a aussi des visées sur l'Albanie.

D'autre part, alors que la Serbie est menacée d'une invasion austro-allemande à l'automne 1915, l'Entente fait débarquer préventivement des troupes à Salonique (la Grèce est neutre et le restera jusqu'en 1917), précipitant l'engagement de la Bulgarie aux côtés des Allemands (octobre 1915), et l'écrasement conséquent de la Serbie. La Bulgarie souhaite récupérer la Dobroudja et la Macédoine, ce que lui promettent les Empires centraux. La Roumanie, entraînée dans l'Entente en août 1916, dans la foulée de la contre-offensive russe contre les Autrichiens, sera écrasée et occupée par les puissances centrales en décembre.

La guerre sur mer

Un domaine au moins paraît garanti à l'Entente: la maîtrise des mers. Les seuls engagements de 1914 ont lieu entre des unités basées dans le Pacifique (bataille du Coronel), avant que la Royal Navy détruise la flotte de l'amiral von Spee, aux îles Falkland, en décembre 1914. Dès lors, la marine allemande se confine dans ses ports.

Les Japonais - entrés en guerre aux côtés des Alliés le 23 août 1914 - peuvent sans coup férir s'emparer des îles allemandes du Pacifique, tandis que la Navy organise le contrôle du trafic commercial dans l'Atlantique. Le torpillage du paquebot britannique Lusitania, le 7 mai 1915, par un sous-marin allemand, provoque de telles protestations de la part des Etats-Unis (il y a 118 Américains parmi les victimes) que le chancelier Bethmann-Hollweg contraint l'état-major allemand à renoncer à la guerre sous-marine, ce qui permet à Londres de renforcer le blocus de l'Allemagne. Et lorsque, en mai 1916, la flotte allemande sort à la rencontre de la Royal Navy, la terrible bataille du Jutland dissuade la marine du Reich de renouveler l'opération.
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MessageSujet: Re: Premiere Guerre Mondial   Premiere Guerre Mondial EmptyMer 3 Mai - 0:40

1917. La guerre contestée et continuée

Cette année est un moment décisif du conflit. Dans les tranchées, les fantassins sont minés par les maladies, le froid et les poux; ils survivent dans l'attente angoissée d'une attaque ennemie, ou d'un ordre de leurs propres officiers de monter à l'assaut. La lassitude des troupes, déjà sensible lors de l'hiver 1916, face à l'énormité du coût humain et à l'absence d'issue prévisible sur le front ouest, est relayée à l'arrière par l'audience croissante du pacifisme et par des mouvements sociaux contestataires qui déstabilisent tous les gouvernements en place. En France, Joffre a dû céder la place en décembre 1916 au général Nivelle, le vainqueur de Verdun, qui prétend appliquer la même tactique qu'aux forts de Vaux et de Douaumont. Nivelle fait décider une nouvelle attaque massive sur le Chemin des Dames contre des défenses que les Allemands viennent de reculer et de consolider; l'échec de l'opération est tel qu'il doit se retirer, le 15 mai 1917.

Mais le mal est fait: des mutineries ont éclaté parmi les troupes placées en première ligne. Ces mouvements, qui ne vont jamais jusqu'à la fraternisation avec l'ennemi, sont d'abord l'expression d'une exaspération devant la conduite de la guerre et le mépris des généraux pour la vie des soldats (« Du sang pour des étoiles »). Les chefs y voient le résultat de la propagande ennemie, voire de celle d'agitateurs pacifistes d'extrême gauche. La répression est sévère: Pétain, qui vient de remplacer Nivelle, fait condamner à mort 554 mutins dont 75 seront exécutés, mais il a aussi l'habileté d'introduire des améliorations dans l'organisation des permissions et du cantonnement. Le mécontentement est ainsi désamorcé, d'autant que Pétain décide d'attendre les Américains, dont les premières troupes débarquent le 26 juin.

Le front italien

La situation de l'armée italienne, dont le front demeure immobile à travers le Trentin et la Vénétie, fait aussi craindre le pire. A partir de juin 1917, les désertions se multiplient et le moral des hommes, après deux ans de combats très meurtriers, est au plus bas. Avec l'appui de divisions allemandes, les Autrichiens passent à l'attaque, le 24 octobre 1917, à Caporetto, et provoquent une véritable débandade des Italiens, qui abandonnent près de 300'000 prisonniers, et ne réussissent qu'à rétablir une ligne de front sur la Piave, au nord-est de Venise. L'état-major franco- britannique se décide alors à apporter une aide réelle à son allié italien. Plusieurs divisions viendront donc, au début de 1918, renforcer son dispositif, pendant qu'une coopération plus étroite sera mise en place avec le Comando Supremo, pour améliorer la formation tactique des cadres.

Le front russe

L'évolution la plus catastrophique est cependant celle de la Russie. La décomposition de l'armée s'aggrave en 1917. Des bandes de déserteurs errent à l'arrière des lignes, pillant et terrorisant les paysans. Depuis l'abdication de Nicolas II lors de la révolution de Février, la Russie n'est plus considérée par ses partenaires comme un allié sûr, malgré les bonnes intentions déclarées du gouvernement provisoire. En juillet, dans la région de Tarnopol, des mutineries éclatent, réprimées par des centaines d'exécutions. Les officiers sont souvent massacrés par leurs propres soldats au lendemain de la tentative de putsch manquée du général Kornilov. L'obstination des autorités à maintenir le pays, exsangue, dans la guerre fait de l'armée un terrain très favorable pour la propagande bolchevique en faveur d'une paix immédiate. Les Allemands ne l'ignorent pas, et favorisent le retour de Lénine, jusque-là exilé en Suisse, en l'autorisant à traverser en train, dans un wagon plombé, le territoire du Reich.

Peu après la révolution d'Octobre, une proposition unilatérale d'armistice est faite par les bolcheviks le 26 novembre 1917. Les négociations piétinent cependant, compliquées par la formation d'une République ukrainienne autonome. Lorsque, le 18 février 1918, Kiev (capitale de l'Ukraine sécessionniste) est prise par les bolcheviks, l'Allemagne déclenche sa dernière offensive à l'est, pour ne pas laisser compromettre ses gains territoriaux, et ses troupes sont en quelques jours aux portes de Petrograd. Les bolcheviks signent alors le traité de Brest-Litovsk (3 mars 1918), aux termes duquel la Courlande et l'ensemble de la zone balte tombent sous influence allemande, ainsi que le nouvel Etat ukrainien, tandis que les deux Empires centraux se partagent la tutelle de la Pologne. Les buts de guerre du Reich, à l'est, sont atteints au-delà des espérances initiales. Il peut désormais reporter son effort à l'ouest.

Le tournant de la guerre

En réalité, l'Allemagne ne pourra atteindre cet objectif, car elle devra maintenir à l'est une forte proportion de ses troupes pour contenir les velléités d'indépendance de la Pologne et des Baltes, et surtout pour occuper l'Ukraine, dont les livraisons agricoles lui sont indispensables. Quant au front de l'ouest, la perspective de victoire y devient désormais problématique, du fait de l'entrée en guerre des Etats-Unis, conséquence de la reprise de la guerre sous-marine décidée par Guillaume II et son état-major en janvier 1917. L'objectif était d'affamer le Royaume-Uni, dont les réserves céréalières étaient faibles, en interdisant la navigation commerciale atlantique. Le risque de rupture diplomatique avec les Etats-Unis était connu et avait été accepté. La guerre sous-marine à outrance occasionne, les premiers mois, des destructions massives, mais est rapidement contrée par les Britanniques, grâce au système des convois escortés par des navires de guerre.

Des raisons moins conjoncturelles poussent les Etats-Unis dans le camp de l'Entente, comme les difficultés que connaît leur agriculture (blé et coton), dont les exportations vers l'Europe sont en baisse, et leurs engagements financiers auprès de Paris et de Londres. Vient s'ajouter à ce climat la crise diplomatique provoquée en mars 1917 par l'interception du télégramme Zimmerwald, dans lequel le ministre des Affaires étrangères du Reich enjoint à son chargé d'affaires à Mexico de pousser le Mexique à entrer en guerre contre les Etats-Unis. L'émotion est grande, et la déclaration de guerre est votée par le Congrès le 2 avril 1917. A la suite des Etats-Unis, nombre de pays latino-américains entrent en guerre contre l'Allemagne. Dans l'immédiat, la décision américaine a surtout des effets positifs dans le domaine maritime. Les renforts américains ne seront vraiment d'un poids significatif sur le front ouest qu'au milieu de 1918. Cela explique en grande partie les ultimes préparatifs stratégiques des puissances européennes: l'Allemagne a besoin pour l'emporter, ou tout au moins pour imposer une paix à sa convenance, d'une offensive décisive dès le printemps 1918.


1918. La reprise de la guerre de mouvement

L'attaque allemande, celle qui, dans l'esprit de Ludendorff (le quartier-maître général de l'armée allemande et le plus proche collaborateur de Hindenburg), doit conduire au triomphe, ou au moins à une paix de compromis avantageuse, est déclenchée le 21 mars 1918. Les Allemands comptent sur les soldats qu'ils ont pu ramener du front est, sur leur artillerie et sur leur aviation, qui joue un rôle important par les bombardements des lignes arrière. En plusieurs points stratégiques du front, les Allemands portent, jusqu'au début de juillet, des coups de boutoir, dont aucun ne sera vraiment décisif. A partir du 18 juillet, la première vraie contre-offensive française (deuxième bataille de la Marne), dans la région de Château-Thierry, parvient à annuler toute l'avance des Allemands, qui, harcelés, doivent se replier, le 6 août, derrière la ligne fortifiée Hindenburg.

L'équilibre des forces, en hommes comme en matériel, est alors en train de se renverser irrémédiablement en faveur de l'Entente, grâce aux renforts américains et à la fabrication en série des nouveaux armements (chars, avions, artillerie). Le coup de grâce vient des Balkans, où l'armée de Franchet d'Esperey écrase les troupes bulgares le 15 septembre: l'Autriche-Hongrie n'est plus défendue au sud, et toute possibilité de liaison avec le champ de bataille proche-oriental (où le général britannique Allenby triomphe des Turcs) est perdue pour l'Allemagne.

Fin octobre, c'est l'empire des Habsbourgs qui craque de toutes parts, enfoncé à Vittorio Veneto par les Italiens: Charles I er signe l'armistice le 3 novembre. L'Allemagne se disloque à son tour: mutinerie de la flotte à Kiel, émeutes à Cologne et Munich, insurrection spartakiste à Berlin. Pour rétablir le calme et éviter la victoire du bolchevisme, Guillaume II finit par consentir, le 10, à l'abdication. L'armistice est signé le 11 novembre au matin, alors que la république a déjà été proclamée à Berlin.
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MessageSujet: Re: Premiere Guerre Mondial   Premiere Guerre Mondial EmptyMer 3 Mai - 0:45

Les traités et le règlement de la paix

Premiere Guerre Mondial Traite_Versailles_1919
Les négociateurs du Traité de Versailles
De gauche à droite, Lloyd George (Angleterre), Vittorio Orlando (Italie), Georges Clémenceau (France) et Woodrow Wilson (Etats-Unis)



L'armée allemande devait se retirer jusqu'au Rhin, livrer la totalité de l'artillerie lourde et des sous-marins, son matériel ferroviaire, mais les Alliés lui laissaient assez de forces pour qu'elle pût maintenir l'ordre à l'intérieur.

Cette situation était en réalité lourde de conséquences: ayant demandé l'armistice avant le désastre militaire à l'ouest, l'armée allemande avait gardé inviolé le territoire national, et l'Allemagne pouvait refuser de se considérer comme vaincue. Cela contribua au développement d'un sentiment d'extrême injustice à l'égard des traités de paix, qui devait peser dans l'évolution politique de l'Allemagne.

Le traité de Versailles
Le traité de Versailles, signé le 28 juin 1919, après les longues et complexes délibérations du conseil des Quatre (Wilson, Lloyd George, Clemenceau et Orlando), attribuait à l'Allemagne la responsabilité morale de la guerre et lui imposait de dures conditions, sans discussion possible.

Sur le plan frontalier d'abord, le traité prenait acte du rattachement de l'Alsace-Lorraine à la France. La Sarre demeurait pour quinze ans sous régime international, tout en étant économiquement unie à la France, avant de choisir son avenir par plébiscite. C'est à l'est qu'on opéra un véritable démembrement pour constituer une Pologne indépendante avec un accès à la mer, tel que l'avaient promis les Français et les Quatorze Points de Wilson: l'Allemagne dut subir d'importantes amputations, de la Posnanie à la Baltique - la création du corridor de Dantzig (déclarée ville libre en 1920) isolant la Prusse-Orientale -, et plus tard l'humiliation du plébiscite qui, en 1921, coupera en deux la haute Silésie.

Le traité comprenait aussi des garanties de sécurité: l'armée était réduite à 100'000 hommes, la Rhénanie démilitarisée sur une profondeur de 50 km sur la rive droite du Rhin. Le traité fixait enfin le principe des «réparations», dont il n'établissait d'abord qu'un plancher (120 milliards de marks-or), qui devaient empoisonner toutes les relations internationales de l'après-guerre.
La déclaration des Quatorze Points (extrait)

Les autres traités
Dans les zones balkaniques, le démantèlement de l'Autriche-Hongrie, jugé irrémédiable, donna lieu à un partage territorial où le principe wilsonien des nationalités ne fut que très partiellement respecté.

Les traités de Saint-Germain-en-Laye (10 septembre 1919, avec l'Autriche), de Neuilly (27 novembre 1919, avec la Bulgarie), de Trianon (4 juin 1920, avec la Hongrie) laissaient de tous les côtés des motifs de mécontentement. L'Italie obtenait le Trentin et le Haut-Adige autrichiens, mais pas Fiume, et presque rien sur le littoral dalmate (pour ne pas frustrer le nouvel Etat yougoslave), en dépit des promesses du traité secret de Londres de 1915.

Le nouvel Etat tchécoslovaque était constitué dans la partie nord de l'empire des Habsbourgs, avec l'ancienne Bohême et une longue frange du royaume de Hongrie. La Roumanie récupérait la partie est de l'Empire, la Bucovine, mais aussi toute la Transylvanie hongroise.

La Petite-Entente
La sanction que subissaient les ex-Empires centraux était lourde de menaces pour l'avenir: dès 1920, un système de pactes d'assistance mutuelle, la Petite-Entente, s'établit entre les nouveaux pays d'Europe centrale (Tchécoslovaquie, Yougoslavie, Roumanie), pour prévenir les risques d'ambitions revanchardes de la Hongrie; quant à l'Autriche, le traité de Versailles avait pris soin de lui interdire toute réunion avec l'Allemagne. Les derniers perdants furent la Bulgarie, qui se vit retirer son accès à la Méditerranée au profit de la Grèce, et l'Empire ottoman, qui subit plusieurs démembrements. La révolution kémaliste reniera le traité de Sèvres, signé par le sultan, et déclenchera une lutte sans merci contre les Grecs pour la récupération de la Thrace orientale et de la région de Smyrne, qui seront finalement reconnues à la Turquie en 1923 par le traité de Lausanne. Des deux Etats ethniques qu'on avait prévus à Sèvres sur la bordure orientale de la Turquie, l'Arménie ne survécut pas, et le Kurdistan ne vit jamais le jour.

Les aspects proprement impérialistes de la Première Guerre mondiale apparaissent bien dans cette région, que les intérêts pétroliers allaient bientôt rendre vitale et où la toute neuve Société des Nations (SDN) distribue les mandats au couple franco-britannique, en prenant le risque de brimer le nationalisme arabe. En Afrique également, la SDN répartit de façon arbitraire, entre la France et le Royaume-Uni, les anciennes possessions allemandes (Togo, Cameroun, Tanganyika, Namibie).


Des enjeux futurs
Sur l'ancien front de l'Est, enfin, la paix ne réglait rien: il faudrait avoir encore recours aux armes pour que puissent se fixer les frontières de la Russie soviétique avec la Finlande, les pays baltes, la Pologne et la Roumanie. Malgré le soutien des vainqueurs aux Russes blancs, l'Ukraine et les Républiques caucasiennes seraient bientôt abandonnées aux bolcheviks. L'application même du traité de Versailles (non ratifié par le Sénat américain) était sujette à caution: au nom du vieux principe de l'équilibre européen, les Anglo-Saxons n'étaient pas prêts à appuyer inconditionnellement l'allié français d'hier dans une entreprise d'abaissement de l'Allemagne justifiée par des motifs de sécurité nationale. Lourde de frustration dans chaque champ, oublieuse de ses propres principes, la conclusion de la Grande Guerre portait en elle beaucoup des enjeux futurs du XX e siècle.
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MessageSujet: Re: Premiere Guerre Mondial   Premiere Guerre Mondial EmptyMer 3 Mai - 0:47

Les gouvernements dans la guerre


Premiere Guerre Mondial Millerand_Deuxieme_guerre
Alexandre Millerand visitant les tranchées
Alexandre Millerand (1859-1943) fut ministre de la Guerre en France de 1912 à 1915. Il visite les tranchées, coiffé du nouveau casque des «poilus».
Photo Hachette




Enracinée dans la durée, la guerre implique une mobilisation exceptionnelle de toutes les énergies nationales pour maintenir intact le moral, assurer le ravitaillement de la population dans un contexte de pénurie, faire tourner les usines d'armement à plein régime alors que manque la main-d'œuvre, rassembler les capitaux qui financeront l'ensemble. Parallèlement, les opérations militaires doivent prendre place dans un contexte optimal de rapidité, de coordination, de justesse de décision et de secret.

Les buts de guerre
La question des buts de guerre constitue l'enjeu essentiel de la diplomatie secrète conduite au long du conflit. Ils ne seront rendus publics que tardivement, sous la pression des opinions publiques, qui exigent des justifications plus précises des sacrifices imposés, et surtout lorsque Wilson, en décembre 1916, demande aux belligérants d'afficher «franchement» leurs objectifs.

Mais, en dehors de quelques exigences non négociables comme la récupération de l'Alsace-Lorraine pour la France, ou la vassalisation de la Belgique pour l'Allemagne, les buts de guerre évoluent au gré des rapports de forces entre ennemis et des dissensions entre alliés. Surtout, la plupart des détails en demeurèrent secrets. Par exemple, à propos de la Sarre (convoitée publiquement par le Comité des forges, groupe de pression de l'industrie lourde) et de la Rhénanie, le gouvernement français évitera toute prise de position officielle et tout débat parlementaire, bien que son intention de créer un Etat-tampon neutralisé sur la rive gauche du Rhin ait été communiquée aux Russes.

Pour Londres, la paix passe par deux exigences: la restauration de la Belgique comme Etat indépendant, et le désarmement de la marine de guerre allemande. Mais les ambitions des Britanniques sont grandes en Orient, où ils poursuivent la guerre contre les Turcs à partir de leurs bases égyptiennes et attisent, pour ce faire, le nationalisme arabe en laissant entrevoir la constitution d'un grand «royaume arabe unifié», alors que l'accord Sykes-Picot de 1916 a déjà prévu un partage de la région avec les Français.

Pour ce qui est de la Palestine, qu'ils comptent se réserver, les Britanniques font en novembre 1917 et par la voix de leur ministre des Affaires étrangères, lord Balfour, la promesse de créer un «foyer national juif». Enfin, du côté de l'Entente, on commence à parler en 1917 de réparations dues par l'Allemagne en dédommagement du pillage des ressources auquel elle se livre dans la France occupée et en Belgique. Dans les Balkans, les Empires centraux s'appuient sur les appétits de la Bulgarie, tandis que la France multiplie les promesses vagues de «libération» des nationalités afin d'attiser au maximum les forces centrifuges contre Vienne.

Cependant, pour sonder leurs adversaires sur un terrain d'accord possible, les gouvernements belligérants ne dédaignent pas de susciter des médiations. La plus connue a lieu à un moment clé de la guerre: monté sur le trône en 1916, l'empereur d'Autriche, Charles Ier, par l'intermédiaire de son beau-frère, le prince Sixte de Bourbon-Parme, propose une paix séparée à la France, mais sans obtenir des Allemands qu'ils renoncent à l'Alsace-Lorraine, et sans envisager de satisfaire les revendications de l'Italie. La portée de ces initiatives est donc, en général, très limitée: les points de vue des belligérants demeurent incompatibles.

Commandement militaire et pouvoir civil
Les généraux d'août 1914 avaient d'abord des plans à mettre à exécution et, seulement plus tard, peut-être, des comptes à rendre. La guerre se prolongeant, le problème de leur rapport au pouvoir civil - allégeance ou autonomie - va se poser, mais dans des termes différents pour les démocraties française et britannique ou pour les régimes autoritaires des autres belligérants.

En Allemagne
Les institutions parlementaires y sont de peu de poids face à un exécutif fort, où le Kaiser contrôle les décisions essentielles et éclipse nettement son chancelier. Ces tendances du temps de paix ne cesseront de se renforcer tout au long du conflit, le pouvoir se concentrant autour de l'empereur et des plus hautes figures de l'état-major, Hindenburg et Ludendorff. Ainsi, à la suite du vote d'une sorte de «résolution de paix» par le Reichstag, en juillet 1917, ils obtiendront du Kaiser le renvoi du chancelier Bethmann-Hollweg et, de même, en juin 1918, ils s'assureront de la démission du secrétaire d'Etat Kühlmann. Le haut commandement allemand sut ainsi neutraliser le pouvoir civil et imposer sa propre logique de guerre, pour au dernier moment se défausser sur lui et lui faire assumer la responsabilité de l'armistice (le «coup de poignard dans le dos de l'armée allemande») et des traités.

En Russie
L'incompétence et les échecs des responsables de l'armée russe, pourtant rapidement évidents, ne poussèrent pas Nicolas II à s'appuyer davantage sur la Douma et les forces représentant la société russe (l'Union des zemstvos et l'Union des villes) pour reprendre les choses en main. Après 1915, le tsar accumula les erreurs, laissant se développer l'ascendant de l'aventurier Raspoutine sur les affaires intérieures, et surtout se plaçant lui-même sous la coupe de l'état-major, en s'adjugeant, au début de 1916, le commandement suprême de l'armée et en allant vivre loin de la capitale, au quartier général de Moguilev.

En Italie
En Italie, les rapports du gouvernement Salandra avec le chef d'état-major, le général Cadorna, furent exécrables, et la situation ne s'améliora que lorsque ce dernier fut remplacé par le général Diaz, après Caporetto.

En Grande-Bretagne
L'équilibre des pouvoirs qui s'établit peu à peu dans les démocraties française et britannique est plus complexe et plus satisfaisant à la fois. Rien n'est changé au fonctionnement normal des institutions en Grande-Bretagne. Comme toutes les opérations ont lieu en dehors du territoire national, les tâches de gouvernement et la conduite de la guerre sont mieux et plus vite dissociées qu'ailleurs. A la fin de 1916, le gouvernement Asquith, affaibli par la révolte irlandaise d'avril, est renversé par ceux qui souhaitent établir un exécutif moins soumis au contrôle parlementaire, pour prendre en charge les affaires de la guerre avec plus d'énergie et d'initiative. Lloyd George, nouveau Premier ministre, met en place un comité de guerre restreint de cinq membres, se réunissant quotidiennement et disposant de toute l'autorité souhaitée face aux Communes.

En France
L'évolution est similaire en France, dans le sens d'un pouvoir de tutelle de plus en plus net des civils sur les généraux et, à partir de 1917, d'un renforcement de l'exécutif. Dès janvier 1915, le ministre de la Guerre, Alexandre Millerand, est critiqué pour la liberté d'initiative qu'il a laissée à l'état-major. A partir d'octobre 1915 (cabinet Briand) et jusqu'au début de 1917, on confie à un militaire (Gallieni, puis Lyautey) le portefeuille de la Guerre, mais les grandes opérations doivent faire l'objet d'un débat parlementaire en comité secret, et l'armée doit accepter les visites de «contrôleurs» au front. L'arrivée au pouvoir de Clemenceau en novembre 1917 installe une autorité incontestée: le Tigre réduit au silence le président Poincaré et à l'obéissance l'état-major.

Le soutien à la guerre: de l'Union sacrée à la division
La question du soutien des forces politiques organisées à l'entreprise guerrière proprement dite est posée dès l'été 1914. L'Europe vit en effet depuis au moins quatre ans sous la menace d'une guerre générale, et les forces socialistes ont discuté, dans le cadre de l'Internationale, des moyens dont disposait le prolétariat pour faire obstacle à la «guerre impérialiste», en premier lieu la grève générale. Le gouvernement français le sait si bien qu'il dispose d'une liste de noms de perturbateurs potentiels à faire arrêter ou à surveiller en cas de mobilisation générale, le fameux «carnet B», qu'en fait il n'utilisera pas.

Socialistes et syndicalistes
En France comme en Allemagne, socialistes et syndicalistes vont choisir de prouver leur solidarité envers la communauté nationale plutôt que de paraître la trahir en jouant la carte de l'internationalisme prolétarien. Malgré des tentatives de concertation désespérées avec leurs homologues allemands, après l'assassinat de Jaurès le 31 juillet, les dirigeants de la SFIO optent pour la loyauté envers la «patrie en danger», contre le «militarisme prussien» et l'«Europe des princes». Même réaction belliciste en Allemagne, où le SPD vote les crédits de guerre. En Italie, les dirigeants révolutionnaires du PSI ne pourront faire autrement que de suivre la violente pression nationaliste que le gouvernement Salandra exploite pour pousser le pays dans la guerre, en mai 1915.

Les limites de l'Union sacrée
Cependant, l'Union sacrée ne pouvait résister à l'allongement de la durée du conflit. En Allemagne, les premiers tiraillements se font sentir dès l'hiver 1914, autour de la gauche du SPD dirigée par Karl Liebknecht, noyau du futur spartakisme, puis en 1916, quand les partisans de la recherche d'une paix négociée font sécession et constituent l'USPD. Le désaveu de la guerre s'étend pendant l'année 1917, touchant notamment le Zentrum catholique et les progressistes: mais l'état-major réduit alors le Reichstag au silence en obtenant le départ de Bethmann-Hollweg.

En France également, la trêve des luttes partisanes est de courte durée: dès 1915, une tendance minoritaire se forme dans la SFIO, autour de Paul Faure, que l'on retrouve, avec quelques syndicalistes comme Monatte et Merrheim, aux conférences de Zimmerwald (5-8 septembre 1915) ou de Kienthal (24-30 avril 1916), qui condamnent les socialistes participant à l'effort de guerre. En 1917, les résistances s'étendent à des personnalités radicales comme Joseph Caillaux et provoquent le retour de l'instabilité ministérielle. Le gouvernement devra pratiquer la fermeté pour maintenir intacte la motivation de la nation: en juin, Alexandre Ribot refusera de laisser des représentants français se rendre à la conférence pacifiste de Stockholm et, en décembre, en accord avec Poincaré, Clemenceau engagera des poursuites judiciaires contre le «défaitiste» Caillaux, qu'il fera accuser de connivence avec l'ennemi.

Restriction des libertés publiques
A l'épreuve de l'état de guerre, les autorités durent cependant restreindre sérieusement les libertés publiques, au nom de la nécessité du secret des informations intéressant la défense nationale, ou de la lutte contre les tentatives de déstabilisation intérieure, réelles ou imaginaires, fomentées par l'ennemi.

Psychose de l'espionnage
On aboutit ainsi à une véritable psychose de l'espionnage. Des consignes de prudence, pour les propos tenus en public (ainsi le fameux: «Attention! Les oreilles ennemies vous écoutent!» affiché en France) ou pour le choix de ses fréquentations, sont régulièrement martelées aux populations. D'autre part, en vertu d'un vieux décret dépoussiéré par Poincaré, tous les pouvoirs ordinaires de police seront assurés par l'autorité militaire jusqu'en septembre 1915 - ce qui donnera lieu à de nombreux interrogatoires et arrestations arbitraires, particulièrement à proximité du front, ou dans les villages libérés dont les habitants avaient vécu quelque temps sous l'occupation allemande. Les autres pays, Grande-Bretagne comprise, n'étaient pas en reste. Partout, la surveillance des milieux ouvriers, foyers de subversion potentiels, des syndicalistes, et plus encore des étrangers (spécialement les allogènes des Empires russe et austro-hongrois), dont la loyauté n'est pas jugée sûre, mobilise les polices. Bien entendu, on découvre de véritables affaires d'espionnage, des journaux achetés pour diffuser des informations orientées, des députés corrompus.

La propagande
Les gouvernements tiennent à contrôler l'information qui parvient à l'opinion publique. Tous les pays, y compris la Grande-Bretagne, mettent en place une censure préalable de la presse par les services du ministère de la Guerre, ainsi que des lois réprimant les «indiscrétions» sur les plans de bataille. Cela n'empêche cependant pas les journaux français, britanniques et autrichiens d'entretenir un vrai débat. A partir de 1916, les commissions du contrôle postal aux armées lisent la correspondance des soldats, traquant les «impressions du front» qui pourraient choquer ou faire douter les arrières. Les rapports qu'elles dressent s'ajoutent à ceux des préfets sur «l'état des esprits dans les départements» pour donner aux autorités une photographie régulière du moral de la nation. La propagande gouvernementale cherche enfin à mobiliser les énergies, en alimentant la haine de l'adversaire (ainsi en dénonçant les «atrocités» commises par les Allemands en Belgique et dans les départements occupés), ou bien en exaltant le soutien économique et humain des Américains. Les dimensions psychologiques de la guerre sont donc connues et exploitées, y compris en direction des troupes ennemies (lâchers de tracts sur les tranchées).
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MessageSujet: Re: Premiere Guerre Mondial   Premiere Guerre Mondial EmptyMer 3 Mai - 0:49

Les économies dans la guerre


Premiere Guerre Mondial Femmes_fabriquant_obus
Femmes fabriquant des obus en France, 1917




L'adaptation des économies à une situation d'urgence et de pénurie de matières premières et de main-d'œuvre va conduire à un accroissement des domaines d'intervention de l'Etat et de ses instruments de régulation. Les crédits de guerre adoptés à l'été 1914 permettent de répondre aux besoins immédiats d'équipement des millions d'hommes mobilisés en quelques jours, en passant des commandes urgentes à l'étranger.

L'approvisionnement
L'armée française achète ainsi des centaines de milliers de paires de chaussures et des milliers de chevaux aux Etats-Unis, ainsi que du cuir, de l'avoine, de la viande en Argentine. Très rapidement, on aura recours à l'importation massive de denrées alimentaires en provenance du continent américain et de l' Australie. C'est le cas notamment de la Grande-Bretagne, dont la balance commerciale est depuis longtemps déficitaire pour les produits agricoles, mais qui avait su trouver sa place dans la nouvelle économie céréalière mondiale, où ses dominions tenaient une place essentielle depuis les années 1880. Les plans britanniques de préparation à une guerre éventuelle avaient intégré ce paramètre, et, depuis 1909 environ, l'Amirauté et le Comité de défense impériale avaient conclu qu'un adversaire comme l'Allemagne, dans le cadre d'un blocus naval, était plus vulnérable que le Royaume-Uni sur le terrain de l'approvisionnement.

S'étant d'abord contentée d'instituer le contrôle des prix, la France finit, en 1918, par constituer des consortiums ayant le monopole des importations (blé, coton, huile, pétrole), comme les Etats-Unis en avaient donné l'exemple dès leur entrée en guerre; de son côté, la Grande-Bretagne en vint, en 1917, à créer un monopole d'Etat sur la viande, puis, en 1918, à introduire les cartes de rationnement (pour le sucre, le thé, la viande et le beurre). Les Empires centraux réussirent à satisfaire leurs besoins jusqu'en 1916 en faisant leurs achats à l'étranger par l'intermédiaire des pays neutres, mais lorsque Wilson imposa, en 1917, le contrôle du trafic maritime des neutres voisins de l'Allemagne, la situation alimentaire s'aggrava considérablement.

Les matières premières industrielles
Pour les matières premières industrielles, la politique d'étatisation des achats connut de meilleurs résultats. Privée des deux tiers de son industrie lourde et de ses ressources minières, situés dans le Nord-Est occupé, la France dut importer massivement, mais elle pouvait compter sur la production britannique de fer et d'acier. L'Allemagne organisa dès 1914 un «office des matières premières de guerre», mais dut rapidement s'en remettre à la contrebande pour les métaux non ferreux (cuivre, nickel) et elle connut parfois des ruptures de stocks dans son industrie chimique. Elle sut aussi profiter des richesses des pays occupés (stocks des ports et des fonderies belges, pétrole roumain, blé ukrainien).

La production d'armes
La nécessité de produire des armements en grandes quantités et à un rythme très rapide posa deux types de problèmes indissociables: la mobilisation de l'appareil productif et celle de la main-d'œuvre.

En France
Les arsenaux français étaient très loin de suffire à tenir le rythme des 50 000 obus par jour réclamés par le commandement, et il fallut procéder à la reconversion immédiate d'industries métallurgiques diverses, y compris des structures artisanales, vers les fabrications de guerre. A cet égard, le gouvernement fut amené à encadrer étroitement l'activité privée, voire à la stimuler par des crédits et des primes.

En Allemagne
La concentration et la cartellisation des grandes firmes industrielles allemandes, voire la fusion institutionnelle avec l'appareil d'Etat, s'accrurent à la faveur des intérêts communs suscités par le travail pour la défense, comme dans la chimie, où se mirent en place les éléments du futur conglomérat IG Farben. L'état-major soutint le grand patronat dans la limitation des contrôles étatiques sur les conditions de travail et l'octroi de prix garantis (programme Hindenburg, 1916).

En Grande-Bretagne
Bien qu'une coordination étatique des industries de guerre ne fût pas, en principe, du goût des libéraux au pouvoir, la Grande-Bretagne institua, dès 1915, un ministère de l'Armement; celui-ci prit en charge directement les conditions de travail, les commandes et les vérifications de qualité des établissements sous contrôle. Les solutions françaises furent comparables: la nécessité de maximiser l'utilisation des ressources, d'uniformiser les modèles, notamment dans l'aéronautique dont les structures étaient très dispersées en 1914 et d'imposer d'étroits contrôles de conformité aux munitions - beaucoup des obus fabriqués en 1914 s'étant révélés défectueux - conduisit à un renforcement de la tutelle de l'Etat. Mais il fut plus lent et plus limité qu'ailleurs: il ne devint net qu'à la fin de 1916, et bénéficia, à partir de 1917, de l'exemple américain du War Industries Board. Les prix garantis permirent, ici comme ailleurs, aux industriels de réaliser d'énormes profits, qui alimenteront de vives rancœurs contre la classe des «profiteurs».

La main-d'œuvre
Mais ces mesures ne pouvaient être efficaces qu'accompagnées de véritables politiques de la main-d'œuvre, puisque la mobilisation des hommes créait une situation de pénurie (sauf en Grande-Bretagne, qui n'instaura la conscription qu'en 1916). A la suite de négociations entre le commandement et les ministères, on retira du front les travailleurs de l'industrie considérés comme indispensables du fait de leur spécialisation: les «affectés spéciaux». En Allemagne, Krupp fit rappeler 35 000 mécaniciens et ajusteurs. Ces mesures étaient cependant très insuffisantes, étant donné le volume de main-d'œuvre non qualifiée dont les usines de guerre avaient besoin pour tourner à plein régime: pour ne pas dégarnir le front, on eut recours dès 1915 au travail féminin, et même, dans le camp allemand, au travail des adolescents à partir de 1917. Toutes les puissances du continent utilisèrent aussi les prisonniers de guerre. L'Allemagne recourut également au travail forcé et n'hésita pas à déporter des dizaines de milliers d'ouvriers de Belgique et des départements français ou des territoires russes occupés. Les pays de l'Entente firent venir des travailleurs coloniaux (Maghrébins et Indochinois pour la France, Chinois et Indiens pour la Grande-Bretagne).

La paix sociale
Cette politique de main-d'œuvre eut des répercussions sociales dans le monde du travail. Il était vital, en effet, de préserver les industries de guerre de conflits sociaux intempestifs, et chaque pays était prêt à assouplir le régime du travail et à veiller à la bonne tenue des salaires. En France, Albert Thomas, ministre de l'Armement de 1916 à 1917, chercha à instaurer un fonctionnement contractuel des industries de guerre, avec, en 1917, arbitrage obligatoire des conflits par des comités paritaires patrons-ouvriers et médiation étatique. En Allemagne, les militaires achetèrent la paix sociale avec les syndicats en imposant au patronat des concessions sur les salaires et les droits des organisations ouvrières (loi de décembre 1916). La guerre accéléra la syndicalisation en Grande-Bretagne, où les trade-unions acquirent de nouveaux pouvoirs en matière de recrutement et de fixation des salaires, et s'imposèrent comme interlocuteurs directs du gouvernement, dans lequel entrèrent des représentants du Labour Party, comme Arthur Henderson.

Les emprunts


Le financement de cette gigantesque mobilisation des ressources fut, dans la plupart des pays, assuré, pour l'essentiel, par l'emprunt. Après avoir mis fortement à contribution les épargnants français («campagne de l'or», puis bons de la défense nationale, dont l'intérêt était de 5 %), le ministre français des Finances, Ribot, dut se tourner vers l'étranger pour couvrir le déficit provoqué par les énormes commandes d'armes et de matières premières. C'est Londres qui, jusqu'à la fin de 1915, prêta à Paris, contribuant ainsi pour près de la moitié au coût de la guerre du côté des Alliés.

Mais la Grande-Bretagne dut se tourner elle-même vers les capitaux privés américains et vers ceux des dominions. L'entrée en guerre des Etats-Unis vint donc à point nommé: en avril 1917, Wilson fit immédiatement émettre sept milliards de dollars de bons et d'obligations, dont trois étaient destinés à venir en aide à ses alliés. L'Allemagne, au contraire, ne pouvait guère compter sur le crédit étranger, et ne put couvrir que les deux tiers du coût de la guerre grâce aux emprunts patriotiques souscrits par la population: pour le reste, elle fut contrainte d'accroître l'émission monétaire, se condamnant à une inflation intérieure, forte surtout après 1917, et qui contribua gravement à faire baisser le pouvoir d'achat et le niveau de vie des classes populaires.
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MessageSujet: Re: Premiere Guerre Mondial   Premiere Guerre Mondial EmptyMer 3 Mai - 0:51

Les peuples dans la guerre


Premiere Guerre Mondial Paysannes_1914
La mobilisation des paysannes dans le Poitou




L'absence des hommes mobilisés avait poussé les dirigeants des pays en guerre à rechercher la contribution des femmes à l'effort patriotique.



Mais dans quelle mesure cet appel entraîna-t-il une modification de la condition féminine ?

La nouvelle place des femmes

La demande des usines de guerre a certes accéléré l'arrivée des femmes sur le marché du travail (qui n'était cependant pas négligeable en 1914), mais ce progrès n'a pas été durable (ces nouveaux emplois ont été réaffectés à la main-d'œuvre masculine dès la fin de la guerre), et elles n'y ont pas obtenu un traitement égalitaire sur le plan salarial. Il y eut des grèves dirigées contre cette discrimination, notamment en France, en 1917, souvent liées ou confondues avec la protestation contre la vie chère. Enfin, les nouveaux emplois féminins de l'industrie furent surtout occupés par des personnes qui exerçaient déjà un métier.



En Allemagne et en Grande-Bretagne, beaucoup de femmes quittèrent la domesticité pour l'usine, qui payait mieux. On vit aussi des femmes des classes moyennes, notamment britanniques, pour lesquelles avoir une vie active signifiait jusque-là déchoir de son statut social, occuper des postes de fonctionnaires, d'employées des assurances et des banques.



Mais, pour beaucoup d'autres femmes, la seule tâche de tenir une maison et d'élever des enfants, en l'absence du mari et sans soutien financier, dans le contexte économique de 1914-1918, pouvait se révéler écrasante. Les États furent amenés à reconnaître aux femmes de soldats le droit à une considération et à une aide particulière : elles étaient, en effet, en charge de la jeune génération, qui serait appelée à prendre la relève des poilus.



Comme la peur du déclin démographique national redoublait, les femmes furent invitées à considérer leurs grossesses comme un devoir patriotique. La propagande nataliste fut intense pendant la guerre, combinant l'incitatif et le répressif - les avortements clandestins augmentèrent, spécialement dans l'Allemagne de 1918. La prise en charge se traduisit par le paiement d'allocations aux épouses de soldats restant au foyer.



L'impact de la guerre sur la place des femmes dans la société est donc ambigu : il favorisa plus la reconnaissance de leurs aptitudes que celle de leurs droits. Mais il leur donna la conviction nécessaire pour les revendiquer : le mouvement des «suffragettes» put ainsi aboutir dans le Royaume-Uni de 1918.

Le sort de la paysannerie

La paysannerie forme le groupe social le plus sacrifié à la guerre. En France, on compta à peu près 600’000 paysans tués (1 mort pour 10 actifs). Pour les paysans, contrairement à certains groupes sociaux urbains, les moyens d'échapper au service armé étaient quasi inexistants.



L'existence quotidienne des familles restées à l'arrière fut profondément changée : comme à la ville, les femmes durent prendre de nouvelles responsabilités et, pour les travaux les plus lourds, le recours à une main-d'œuvre complémentaire s'imposa fréquemment : prisonniers de guerre, immigrés (Italiens et Espagnols dans le sud de la France).



Les mutations économiques ne furent pas toujours favorables : ainsi, les campagnes furent globalement enrichies par la hausse des prix agricoles, mais, à partir de 1917 en Allemagne, elles souffrirent de l'âpreté des réquisitions et des contrôles. En tout cas, devant l'hécatombe aux armées, c'est la résignation qui prévalut.


La classe ouvrière

La traversée de la guerre pour les milieux urbains en général et ouvriers en particulier posa d'autres problèmes. Le rappel à l'arrière des ouvriers, au début du conflit, avait privilégié les spécialistes, mais, en Grande-Bretagne, les syndicats durent accepter, en 1915, la politique de la «dilution» voulue par Lloyd George, c'est-à-dire le remplacement des spécialistes par d'autres travailleurs, moins qualifiés mais plus nombreux.



Les avantages salariaux que les ouvriers français et allemands purent obtenir, s'ils constituèrent un progrès notable, s'avérèrent insuffisants à contenir la hausse du coût de la vie, très sensible à partir de 1916.



En Grande-Bretagne, de grandes grèves de revendications salariales eurent lieu en 1915 (dans le bassin de la Clyde et dans le pays de Galles) et, malgré l'aggravation du rationnement consécutive à la guerre sous-marine en 1917, le niveau de vie des classes populaires put être maintenu légèrement au-dessus de celui de 1914.

En France, le mécontentement ouvrier face à la vie chère éclata en 1917 : les grèves de mars-juin, lancées en dehors du contrôle de la CGT à Paris et en province, purent cependant être stoppées par les concessions salariales du gouvernement.

Pénurie et agitation urbaine

La situation, beaucoup plus grave en Allemagne et en Autriche, ne cessa de se dégrader à partir de l'hiver 1916 : malgré les produits de substitution, malgré les soupes populaires et les cantines, la pénurie alimentaire créa un état de malnutrition chronique qui influa fortement sur les capacités de résistance physique et morale de la population citadine.



Un indice indiscutable en est le développement sensible de la morbidité : avitaminoses et anémies chez les enfants, dysenteries, typhus famélique, surmenage ou épuisement chez les ouvrières, pour qui la recherche de la nourriture au marché noir mobilise plusieurs heures par jour.



La lassitude et l'exaspération devant la misère donnèrent lieu, dans les villes allemandes, à une agitation régulière, du printemps 1917 à l'armistice : désobéissance et désertions dans l'armée et la flotte, grèves contre la baisse des rations alimentaires, qui tournent à l'émeute de la faim à Leipzig en mai 1917. Ces mouvements protestataires furent réprimés mais, exploités par les spartakistes, ils favoriseront l'organisation des ouvriers d'usine. Le sort des familles de fonctionnaires, d'employés ou de petits rentiers mobilisés ne fut pas meilleur.



Sans avoir rien de comparable avec la misère qui sévissait dans les départements occupés, ou avec l'abandon dans lequel furent laissés certains prisonniers de guerre, notamment les Russes en Autriche, les difficultés de plus en plus lourdes des populations de l'arrière constituèrent un élément capital dans l'issue du conflit.
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MessageSujet: Re: Premiere Guerre Mondial   Premiere Guerre Mondial EmptyMer 3 Mai - 10:18

super je suis denouveau en cours d'histoire lol
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MessageSujet: Re: Premiere Guerre Mondial   Premiere Guerre Mondial EmptyVen 12 Mai - 0:16

c'est sublime si les cours d'histoire étaient aussi bien fait tu pourrait devenir prof
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MessageSujet: Re: Premiere Guerre Mondial   Premiere Guerre Mondial EmptyMar 30 Jan - 23:55

Il n'y a rien a redire tout est dis et mis. C'est tout simplement magnifique!!! Surprised Wink
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