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 Grèce antique

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Blackeu Viking
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MessageSujet: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:24

Grèce antique ANT_GRE_000


Citoyenneté, débat politique, mathématiques pures, sciences humaines, tragédie, comédie, sport professionnel, éthique médicale, toutes ces découvertes de la Grèce antique subsistent dans de nombreux aspects de notre civilisation contemporaine.

L'histoire grecque connaît quatre périodes :

L'époque mycénienne de 1500 à 800 avant J.-C.
Des tribus indo-européennes, les Ioniens et les Achéens investissent peu à peu la Grèce, les premières villes s'organisent autours de palais fortifiés comme Mycènes. C'est au début du XIII e siècle que les Grecs placent traditionnellement la guerre de Troie, qu' Homère rendra légendaire.

L'époque archaïque de 800 à 500 avant J.-C.
C'est à cette époque que se développent les cités de Sparte et d' Athènes. L'influence grecque s'étend sur le pourtour nord du bassin méditerranéen. L'époque archaïque est celle de la création de l'alphabet grec, des jeux olympiques et du sanctuaire de Delphes.

L'époque classique de 500 à 350 avant J.-C.
Elle couvre l'apogée d'Athènes au plan militaire, politique et culturel. La Cité joue un rôle déterminant lors des guerres Médiques contre les Perses. Le siècle de Périclès est celui de l'apogée de la culture classique : les grandes tragédies, le théâtre d' Aristophane, Platon, Thucydide et le Parthénon datent de cette époque.

L'époque hellénistique de 350 à 27 avant J.-C
Elle est marquée par l'empreinte d' Alexandre le Grand. A travers son empire, il diffuse la culture hellénistique jusqu'en Asie. Les échanges commerciaux se multiplient entre la Méditerranée et le monde antique. C'est aussi à cette époque que Rome monte en puissance.
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:25

Chronologie de la Grèce antique


Grèce antique ANT_GRE_42
Le masque d'or dit d'Agamemnon


L'histoire grecque se présentée en quatre époques, d'ampleur et d'importance très différentes.

L'époque mycénienne et les siècles obscurs
Mise en place en place du peuplement grec
1500 à 800 avant J.-C. A partir du début du second millénaire av. J.-C., les premiers Grecs se sont installés en Grèce continentale, où ils ont constitué, en relation avec la population préexistante et avec les habitants des îles, une civilisation florissante.

Tirynthe, Pylos et surtout Mycènes, associée à la royauté mythique d'Agamemnon, sont fondées. La civilisation mycénienne est guerrière, paysanne et commerçante. Hautement organisée, très hiérarchisée, elle possède une bureaucratie dont les « archives» sont en partie conservées. Ce sont des tablettes d'argile, rédigées dans une langue grecque en utilisant une écriture syllabique (le linéaire B).

Au milieu du 2 e millénaire av. J.-C., conquête probable de la Crète (destruction de Cnossos). Vers 1200 av. J.-C., destruction massive et simultanée des palais mycéniens, suivie d'une période d'occupation des ruines. Des mouvements de population ont lieu à l'intérieur du monde grec, où le niveau d'organisation politique et économique reste longtemps réduit dans la plupart des régions. L'écriture disparaît, ainsi que la plupart des formes d'expression artistique.

Nous connaissons cette période par la documentation archéologique, par l'étude des dialectes grecs, reflets des groupes de population, et par des éléments des poèmes homériques, l'Iliade et l'Odyssée, dont l'élaboration orale commence pendant les siècles obscurs. Les données mythiques présentées dans ces textes (guerre de Troie, retour d'Ulysse, etc.) nous ramènent donc à l'imaginaire du début du premier millénaire avant J.-C.

L'époque archaïque
Apparition des cités-états en Grèce continentale et en Asie Mineure
800 à 500 avant J.-C. A l'époque archaïque, l'écriture réapparaît en Grèce vers le début du VIII e av. J.-C. sous la forme d'une adaptation de l'alphabet Phénicien : il n'y a donc pas continuité avec le système syllabique des Mycéniens (linéaire B), disparu alors depuis près de 4 siècles.

Dès la fin du 9 e siècle av. J.-C., une intensification du commerce vers le Proche-Orient, puis vers l'Italie, conduit à l'installation de comptoirs commerciaux.

Du 8 e au 6 e siècles avant J.-C., la colonisation et des troubles sociaux. Qu'ils soient des pauvres, chassés par la misère ou l'oppression des plus puissants, qu'ils soient des cadets, privés de biens par leurs aînés, ou qu'ils soient des jeunes poussés par l'esprit d'aventure, de nombreux Grecs quittent leur cité-mère et vont fonder des colonies sur le pourtour méditerranéen : dans le nord de la mer Egée, sur les bords de la mer Noire, en Sicile, en Italie du sud, ou sur les côtes des actuelles Espagne et France (Marseille, Nice, Antibes, etc).

Le monde grec est un ensemble de cités unies par une langue, une religion et des mœurs largement identiques. Les différences de dialectes, de cultes, d'usages n'empêchent pas la communication et le sentiment d'appartenance à une civilisation commune. Les Grecs appellent « barbares » ceux qui parlent différemment. Mais ces cités ne sont pas unies voire sont en conflits fréquents.

Dans les cités archaïques, le pouvoir est détenu soit par un homme seul (monarchie, tyrannie), soit par un groupe restreint d'individus (aristocratie, oligarchie). Les troubles sociaux se développent, opposant souvent de grands propriétaires fonciers à des petits paysans. Certaines cités choisissent de régler les crises en faisant appel à un arbitre et en se dotant de lois écrites. C'est le sens des réformes de Solon, à Athènes, au début du 6 e siècle avant J.-C..

L'époque classique
L'apogée de la civilisation grecque
500 à 350 avant J.-C. A l'époque classique, fin du 6 e siècle. Les réformes de Clisthène en 508/507 av. J.-C. permettent à Athènes de devenir une démocratie, la première du monde antique.

498 avant J.-C.. Révolte de certaines cités grecques d'Asie Mineure (Ionie) contre la Perse qui domine cette région.

490-479 avant J.-C.. Les guerres médiques. Emmenés par Sparte et Athènes, les Grecs battent les envahisseurs perses (batailles de Marathon, Salamine, Platées). Athènes devient la plus puissante cité du monde grec, en s'appuyant sur une alliance maritime appelée « Ligue de Délos », qui vise à protéger les Grecs contre un retour offensif des Perses.

444-429 avant J.-C.. Gouvernement de Périclès à Athènes qui se reconstruit, après les destructions causées par les Perses en 480 av. J.-C. et s'embellit ( monuments de l'Acropole). Prospérité générale dans le monde grec. Apogée de la civilisation classique.

431-404 avant J.-C.. Guerre du Péloponnèse entre deux coalitions emmenées l'une par Sparte et l'autre par Athènes. Cette dernière est finalement vaincue et sa puissance abattue.

401-400 avant J.-C.. Expédition des Dix Mille : 10'000 mercenaires grecs abandonnés par leur employeur perse rentrent à pied d'Iran aux rivages de la mer Noire, à travers des territoires hostiles.

371-362 avant J.-C.. Luttes entre Thèbes et Sparte. Affaiblissement général des cités grecques.

L'époque hellénistique
La civilisation grecque s'enrichit d'apports venus d'Orient
350 à 27 avant J.-C. A l'époque hellénistique :

359 av. J.-C.. Philippe II devient roi de Macédoine et fait de cet Etat périphérique la principale puissance du monde grec. Il s'étend d'abord au détriment d'Athènes et de ses alliés.

338 av. J.-C.. Philippe de Macédoine écrase les Grecs, tardivement ressoudés, à la bataille de Chéronée. Début de la domination macédonienne sur la Grèce.

336-323 av. J.-C.. Epopée d' Alexandre le Grand. L'empire Perse est vaincu et l'armée d'Alexandre arrive jusque dans la vallée de l'Indus. Bâtisseur (fondateur de nombreuses cités dont Alexandrie d' Egypte est la plus célèbre), Alexandre voulut aussi rapprocher la civilisation grecque des civilisations orientales. Les territoires conquis par Alexandre s'étendent de la Grèce à l'Inde, et de la mer Noire à l'Egypte.

323-30 avant J.-C. Sur les ruines de l'empire d'Alexandre se bâtissent des royaumes monarchiques gréco-orientaux (Macédoine, Egypte, Pergame, Proche-Orient, etc). Apogée de la civilisation hellénistique.

3 e siècle avant J.-C.. Premiers rapports et premiers conflits militaires entre Grecs et Romains. Expédition du roi grec Pyrrhus, souverain d'Epire (Albanie actuelle), en Italie.

2 e- 1 er siècles avant J.-C.. Rome conquiert et soumet progressivement tout le monde grec.
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:26

L'époque mycénienne et les siècles obscurs
14e - 9e siècles av. J.-C.


Grèce antique ANT_GRE_59
La porte des Lionnes


Les premiers Grecs
Le pays semble peu fait pour retenir les hommes, avec un relief montagneux (80 % de la superficie totale) et compartimenté, et des petites plaines mal reliées entre elles. Au nord se trouvent à la fois les plus hauts sommets (plus de 2'000 m) et les plus grandes plaines (Macédoine, Thessalie). Le cœur du monde grec est baigné par la mer Egée (aucun point de la Grèce n'est à plus de 90 km de la mer), et une multitude d'îles forment comme un pont naturel reliant la Grèce centrale et le Péloponnèse à la côte d'Asie Mineure. La Crète ferme, au sud, cette véritable mer intérieure, voie principale de tous les contacts.

Le sol est aride, et le climat rude. L'agriculture, typiquement méditerranéenne, fondée sur la trilogie céréales, vigne, olivier, restera toujours précaire malgré une extension des terrains cultivés, qui, dès l'Antiquité, fit considérablement reculer la forêt. L'élevage, essentiellement ovin et caprin, s'est adapté à la garrigue.

Les ressources minières (argent, cuivre, plomb argentifère) sont faibles, et, dès l'âge du bronze, les Grecs durent aller chercher ailleurs l'étain nécessaire à la constitution de cet alliage. A l'âge du fer, les minuscules gisements des îles seront plus insuffisants encore.

Les premiers établissements humains connus remontent pourtant à près de 40'000 ans avant notre ère (en Epire, par exemple). Les habitats restent rares au paléolithique mais se multiplient à l'époque néolithique (en Grèce, du V e au III e millénaire). Au tournant des III e et II e millénaires, les hommes dans lesquels on s'accorde à reconnaître les premiers Grecs arrivent des steppes situées entre Caspienne et mer Noire, ou des hauts plateaux anatoliens. Leur langue (encore parlée trente-quatre siècles plus tard sous la forme évoluée du grec moderne) se rattache, sans contestation possible, à celle des Indo-Européens.

Le monde mycénien (2600-1200 av. J.-C.)
Parmi les civilisations helladiques qui se sont développées dans le monde grec de 2'600 à 1'200 av. J.-C., la culture mycénienne - du nom de Mycènes, l'un de ses centres les plus importants - est aujourd'hui mieux connue non seulement grâce aux remparts cyclopéens, aux tombes et aux palais mis au jour par les archéologues, mais aussi grâce aux tablettes (datées au plus tard de 1200) portant des inscriptions dans une écriture appelée « linéaire B», déchiffrées par Michael Ventris et John Chadwick en 1952.

Les Achéens
Les Achéens sont les premiers Grecs qui semblent avoir profité largement de l'expérience de la brillante civilisation minoenne développée dès le début de l'âge du bronze: ce sont des scribes crétois qui ont transformé le linéaire A, en usage dans l'île, pour l'adapter aux besoins des rois mycéniens. Les tablettes sont des archives comptables. Elles révèlent que le palais draine, pour l'accumuler dans les mains du wanax («roi»), toute la richesse des collectivités agricoles villageoises. Remarquable instrument de puissance, ce système palatial (ou tributaire) est très proche des grands systèmes orientaux (mésopotamien, égyptien). Il s'en distingue cependant par son caractère militaire fortement accusé (et probablement lié à la conquête). Les impératifs de défense (qui transparaissent, par exemple, dans la différence entre les palais crétois et les forteresses mycéniennes), la réalisation de tombes monumentales (les tholoi) et l'incroyable richesse de certaines d'entre elles (telles les dépouilles couvertes d'or de Mycènes) semblent avoir absorbé une énergie qui, ailleurs, se fait expression picturale du pouvoir d'Etat.

De l'unité à l'éclatement
C'est un faciès quelque peu atypique et fragile des grands systèmes orientaux qu'offre la Grèce achéenne. Bien que chaque centre paraisse avoir eu une existence indépendante, le monde mycénien forme un tout. Sa remarquable unité économique est mise en évidence, en particulier, par la diffusion d'une rive à l'autre de la Méditerranée (de Rhodes, Milet, Chypre aux futures Tarente et Sybaris) d'une céramique «mycénienne». L'ambre, l'obsidienne, l'étain et le cuivre - échangés contre les surplus de l'agriculture - faisaient l'objet d'un commerce à longue distance. Cette découverte du monde méditerranéen devait laisser de nombreuses traces dans le mythe grec.

Le monde mycénien se désagrège lentement, une vague de destructions atteint la majorité des palais dès la fin du XIII e siècle et provoque des migrations vers les îles du Dodécanèse et vers Chypre. Invasions (Doriens, Peuples de la mer)? Conflits internes? Catastrophes naturelles ? Autant d'hypothèses qui peut-être ne s'excluent pas. La désintégration culturelle est accélérée par de nouvelles et graves destructions vers 1125-1100. L'unité du monde mycénien est rompue, et sa dynamique de croissance stoppée; la Grèce n'est plus qu'un agrégat de petits Etats disparates, affaiblis et repliés sur eux-mêmes.

Les siècles obscurs
Les XII e et XI e siècles av. J.-C. montrent l'ampleur des changements. L'extrême dépopulation est encore accrue par de nouvelles migrations vers les côtes occidentales de l'Asie Mineure: selon les calculs généralement admis, la Grèce pourrait avoir perdu les trois quarts de ses habitants. Pendant cette période de recul, ces populations, si démunies qu'elles soient, innovent sur le plan technique: la céramique protogéométrique (maîtrisée surtout à Athènes et à Argos) utilise un tour plus rapide, la brosse multiple et le compas. De plus, elles travaillent désormais le fer, resté très rare à l'époque mycénienne, mais qui, dès le XI e siècle, devient prépondérant.

Elles subissent également de profondes mutations dans leur genre de vie (passage de l'agriculture à une économie plus largement pastorale) et dans leurs attitudes face à la mort (la crémation tend à devenir la règle, on n'inhume plus que les enfants et, peut-être, les gens sans importance). Ce sont ces populations qui devaient jeter les bases de la nouvelle société grecque: celle de la cité. C'est probablement pendant ce « Moyen Age grec » que se développe, à partir de légendes hétéroclites, l'épopée homérique.
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:27

L'époque archaïque
9e - 8e siècles av. J.-C.


La Grèce des cités
Les Grecs se caractérisent comme «ceux qui vivent en cités» , et Aristote généralise cette particularité historique en définissant l'homme comme un «animal politique». La cité, ou polis, est en fait une forme très particulière d'Etat. Elle est avant tout la communauté des citoyens qui la composent - ainsi, pour parler de Sparte, un Grec dit «la cité des Lacédémoniens» -, communauté cimentée par des cultes, régie par des lois qui lui sont propres et souveraine sur un territoire (8 400 km 2 pour Sparte, 2 650 km 2 pour Athènes, 880 km 2 pour Corinthe et, parfois, beaucoup moins). L'espace agricole (la chôra) entretient avec le centre urbain (l'asty) des liens étroits.

Cependant, les régions du Nord, comme la Thessalie et la Macédoine, les montagnes de l'Ouest (Locride, Etolie, Acarnanie) et du Péloponnèse maintiennent longtemps des formes archaïques d'économie et de société. Mais l'Etat-ethnos - c'est le nom donné à ce type de communauté assez proche encore de l'organisation tribale - ne joue pas un grand rôle dans l'histoire avant l'époque hellénistique, et les Grecs du V e siècle, «mangeurs de pains», tiennent ces peuples, «mangeurs de gland», pour des semi-Barbares.

La «polis» archaïque
La polis archaïque naît de la réunion (synoecisme) d'un ensemble de villages suffisamment proches les uns des autres pour tirer parti d'une citadelle commune. Le phénomène religieux entre dans le processus de structuration de la communauté: entre 900 et 800; les offrandes commencent à affluer sur le site des futurs grands centres religieux de la Grèce: ceux de Samos, de Pérachora et d'Argos (voués à Héra); ceux d'Erétrie en Eubée, de Thermon en Etolie, de Délos et de Delphes (voués à Apollon) mais aussi d'Olympie et de Dodone (voués à Zeus) sont parmi les plus anciens sanctuaires. Le développement de ces cultes communs - qui seront bientôt ceux de la divinité protectrice de la cité - traduit bien le progrès de l'idée communautaire.

La tradition grecque donne la date des premiers jeux Olympiques (776) comme marquant le début du fonctionnement normal des cités, et c'est effectivement dès la première moitié du VIII e siècle que s'organisent ces Etats qui, si primitifs soient-ils, témoignent déjà des fonctions embryonnaires de la cité.

L'écriture alphabétique
L'écriture alphabétique est acquise par les Grecs pendant la même période. Empruntée aux Phéniciens, elle modifie profondément les «fonctions de la mémoire» dans la cité. L'écriture accompagne et facilite la formation de l'Etat et le développement de ses institutions: un des textes de décret les plus archaïques que nous possédions (VII e siècle) provient de Drêros, en Crète; il porte déjà la formule «la cité a décidé».

Au-delà de la diversité des situations, que l'histoire ne fera qu'accentuer, la cité grecque, dès ses débuts, possède ses caractéristiques propres: une prééminence reconnue du facteur politique, un partage des responsabilités entre les citoyens, plus ou moins égaux devant les instances délibératives et exécutives de l'Etat; et par conséquent l'accès aux charges et aux honneurs de la cité. Les Grecs, par opposition au reste du monde ancien, ont pleine conscience de l'unité profonde d'un système qui reste parfaitement original dans l'histoire.

Les mutations de l'époque archaïque
Lorsque la cité entre dans l'histoire, presque partout les rois ont disparu, et leurs attributions ont été réparties entre plusieurs magistrats (archontes, polémarque et éponyme, par exemple, à Athènes). Même les deux «rois» de Sparte sont plus des généraux et des prêtres que de véritables chefs politiques. La réalité du pouvoir est passée à de petits groupes de familles aristocratiques qui se qualifient eux-mêmes d'agathoi («les bons») ou d'aristoi («les meilleurs»), par opposition aux kakoi («les méchants»), c'est-à-dire les humbles, confusion révélatrice entre les sphères de la société et de la morale! Les aristocrates monopolisent la quasi-totalité de la terre et dirigent la cité, en partie dans le cadre des institutions officielles, en partie grâce aux liens familiaux qui les constituent en «haute société» et aux généalogies prestigieuses qui, leur donnant pour ancêtres des héros ou des dieux, leur confèrent une autorité intangible.

Entre ces aristocrates et le reste de la population, plus ou moins intégrée à la cité (par le biais d'une assemblée du peuple sans grand pouvoir encore), les tensions, que certains facteurs d'évolution accentuent, se transforment bientôt en conflits ouverts.

La colonisation devait avoir des conséquences capitales pour le développement des échanges en Méditerranée: les cités de la vieille Grèce ont besoin de métaux, de blé et, au fur et à mesure que s'accroissent les richesses, de produits de luxe pour l'aristocratie, ce qui entraîne un développement de l'artisanat.

Les débuts de la monnaie
A la fin du VII e siècle, les cités grecques d'Asie empruntent la monnaie aux rois lydiens, à la richesse proverbiale, et, au cours du siècle suivant, elle se répand dans toute la Grèce. L'absence de petit numéraire laisse à penser que la monnaie n'avait qu'un faible rôle à l'échelon du commerce local; en outre, l'aire limitée de circulation des unités monétaires propres à chaque cité - avant qu'Athènes, au V e siècle, n'impose ses pièces d'argent frappées de son emblème, la chouette - interroge sur le rôle économique de la monnaie à ses débuts. Par ailleurs, la découverte de «trésors» de pièces fondues ou partagées semble indiquer que la monnaie a d'abord circulé comme objet d'échange (un poids d'argent estampillé, donc certifié) avant de devenir un étalon de commune mesure. Cette dernière fonction paraît d'ailleurs liée aux rapports nouveaux qu'instaure le développement de l'Etat (prélèvements fiscaux, fixation des amendes et des peines, rétribution de mercenaires étrangers, etc).

La thèse classique veut que cette apparition de la monnaie ait développé une richesse mobilière entre les mains de commerçants ou d'artisans constituant bientôt une «bourgeoisie» capable de mettre en péril l'ancienne aristocratie. En réalité, cette nouvelle forme de richesse menace l'aristocratie de l'intérieur: une faille apparaît, en effet, entre des nobles attachés aux valeurs foncières et fermés à toute évolution économique et une aristocratie plus ouverte ( Solon en est, à Athènes, un excellent représentant) qui se lance dans le commerce et pactise avec la valeur nouvelle de l'argent.

La réforme hoplitique
L'équilibre de la société aristocratique est également menacé par la réforme hoplitique. On appelle ainsi une modification fondamentale des conditions de la guerre: le rôle principal, jusque-là dévolu aux cavaliers (c'est-à-dire aux aristocrates, seuls capables de posséder des chevaux), passe à l'infanterie lourde, les hoplites. Ces derniers sont des hommes aisés puisqu'ils doivent fournir leur propre armure, leur casque à cimier et leur équipement (la longue lance, l'épée et le bouclier rond).

Beaucoup viennent des couches moyennes de la population et sont un contrepoids en puissance dans les luttes politiques. La panoplie de l'hoplite fait son apparition dès le IX e siècle (tombe d'Argos), mais le bouclier à double poignée semble plus tardif, et c'est au VII e siècle seulement que les peintures de vases portent témoignage sur la nouvelle technique de combat: la phalange. Alors que le combat homérique- une somme de duels entre des héros - exaltait la bravoure individuelle, la formation de la phalange implique un combat collectif, en rangs serrés. Elle impose les principes de solidarité, d'égalité dans le rang et d'interchangeabilité. La défense de la cité et de son territoire cesse ainsi d'être le privilège d'une étroite aristocratie pour devenir le fait de tous, et le dêmos (le «peuple»), plus fortement intégré, va prendre conscience de ses droits et développer ses revendications.

La crise agraire
L'évolution de l'art de la guerre rend moins justifiée et moins supportable la domination économique de l'aristocratie. Au moment même où cette dernière voit ses intérêts diverger, les tensions s'accroissent entre ceux que, en Béotie, Hésiode appelle les «gras» et les «maigres». Ces derniers, les paysans pauvres, ont vu les partages successoraux diviser encore un domaine déjà trop réduit. C'est à Athènes que nous connaissons le mieux ces problèmes agraires, auxquels Solon devait, provisoirement, mettre fin. La crise, cependant, paraît avoir affecté toutes les cités grecques au VIIe siècle. Le dêmos revendique la remise des dettes et un nouveau partage des terres (inspiré peut-être du modèle colonial). C'est de ces troubles mêmes que naissent les solutions politiques destinées avant tout à reconstituer la communauté de la cité en crise.
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:27

La naissance des régimes politiques
L'une des premières revendications du dêmos fut, dans de nombreuses cités évoluées, celle d'une législation soustraite à l'arbitraire des aristocrates, donc écrite. Ainsi s'explique le mouvement des législateurs qui prétendaient, par l'établissement de lois (nomoi), assurer le triomphe de la justice.

Ainsi firent les aisymnètes (présidents de commissions juridiques) dans les riches cités grecques d'Asie Mineure (Epimènes de Milet, Pittacos de Mytilène ou Aristarque d'Ephèse), Charondas de Catane et Zaleucos de Locres en Occident, Dracon en 621 puis Solon au début du VI e siècle à Athènes et, beaucoup plus tôt peut-être, Lycurgue à Sparte. Loi attribuée à ce dernier, la «grande rhêtra» (la Grande Loi), devait, pendant des siècles, fixer le destin d'une communauté élargie de citoyens - les «Egaux», ou plus exactement les «Pairs» - consacrant leur vie à la défense et à la politique de la cité pendant que des dépendants, les hilotes, cultivaient la terre civique et que les périèques s'autoadministraient aux marges de la cité.

La tyrannie
Ailleurs, les troubles sociaux permirent à un homme seul, souvent appuyé sur le dêmos (le peuple), d'arracher le pouvoir à l'aristocratie et d'instaurer un régime fort. Le terme de tyrannie n'implique, à l'origine, aucun jugement de valeur sur l'exercice du pouvoir, mais qualifie simplement un pouvoir absolu, établi et maintenu en dehors de toute légalité constitutionnelle. Il n'y a pas de schéma unique de la tyrannie.

Thucydide remarquait déjà un lien entre la tyrannie et l'accroissement des richesses dû aux échanges, et, à l'appui de sa démonstration, il citait Samos (avec son tyran Polycrate), Phocée (pour laquelle la tradition n'a pourtant conservé le nom d'aucun tyran) et Corinthe (avec les Cypsélides). L'exemple de Sicyone, avec la tyrannie des Orthagorides, montre comment peuvent intervenir également les facteurs ethniques, du moins avec Clisthène (grand-père du réformateur athénien), qui, à l'aube du VIe siècle, s'appuie sur le peuple dans sa lutte contre l'aristocratie.

Aux confins du monde grec, enfin, il ne fait aucun doute que la menace des Barbares accroît le besoin d'un pouvoir fort. A Samos, Polycrate se veut ainsi le champion de la lutte contre les Perses, et, à Syracuse, la tyrannie des Déinoménides joue sur le danger indigène, et plus encore carthaginois. C'est le cas de Gélon, au début du V e siècle, et, en 405, de Denys l'Ancien. Mais cette tyrannie des Déinoménides, d'ailleurs tardive, fait figure d'exception.

Le tyran «démagogue»
Le tyran «démagogue» est, littéralement, le «chef du peuple», ce qui ne signifie pas qu'il soit un démocrate. Par contre, si les institutions ne sont pas modifiées (les postes clés étant occupés par des hommes liges), le tyran, pour avoir l'appui du peuple, doit prendre des mesures en sa faveur. Les activités agricoles, artisanales et commerciales sont encouragées, et la politique de grands travaux, systématiquement développée par les tyrans (aqueducs, fontaines, ports), accroît le bien-être dans la cité. Enfin, le développement de l'Etat avec des finances qui lui sont propres (perception de la dîme sur les revenus de la terre ou de taxes sur ceux du commerce), la politique de prestige (embellissement de la ville, cour brillante) et la multiplication des fêtes religieuses, cimentent l'unité de la communauté. D'autant que les cultes poliades sont renforcés d'éléments populaires.

Une expansion de la cité correspond à la phase tyrannique (politique extérieure active, développement des échanges) et à un dynamisme accru du dêmos, en particulier du dêmos urbain. Dans le même temps, l'aristocratie, atteinte par le coup d'Etat que représente la prise du pouvoir par le tyran, est en perte de vitesse. Il ne faudrait pas croire, cependant, que la chute de la tyrannie se traduit partout par l'accession du dêmos au pouvoir. Les situations varient en fonction du temps et des cités. A Argos, après la tyrannie ancienne de Phidon, l'aristocratie récupère le pouvoir; à Corinthe, si les Bacchiades ne retrouvent pas leurs prérogatives, c'est une oligarchie modérée qui s'installe, où la richesse, bien plus que la naissance, détermine la participation aux affaires publiques; dans une grande partie de la Grèce, d'ailleurs, la lutte entre le petit nombre (les oligoi) et la masse (polloi) ne s'apaisera jamais de manière durable.

Le «dêmos»
Rares sont les cités où, comme à Athènes, le dêmos conquiert réellement le droit de se diriger lui-même. Encore faut-il remarquer qu'une expérience semblable avait déjà été tentée: une inscription (dite «Constitution de Chio» et datée du milieu du VI e siècle) donne le peuple comme auteur de la loi constitutionnelle (rhêtra) gravée sur un cube de pierre fiché sur un pieu; ce qui permettait, en le faisant tourner, d'en consulter les quatre faces. L'assemblée du peuple se réunit à jours fixes, elle rend la justice, et ses représentants, les démarques, jouent un rôle dominant dans la cité aux côtés des «rois», vestiges d'une société aristocratique qui n'est plus maîtresse du pouvoir.

Au-delà des facteurs d'évolution communs à toute la Grèce et de la crise, très générale, de la société aristocratique, l'époque classique s'ouvre donc sur une Grèce aux visages très variés.
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:28

L'époque classique
5e - 4e siècle av. J.-C.


L'époque classique, considérée comme l'âge d'or de la civilisation grecque (V e siècle-IV e siècle), va réunir toutes ses histoires particulières en un destin commun.

Les guerres médiques
Le V e siècle s'ouvre cependant sur la menace de l'expansion perse. Les cités grecques d'Asie, encerclées par l' Empire perse, ont finalement accepté la domination du vainqueur, lorsqu'une révolte, à l'initiative de Milet en 499, provoque l'appel aux cités de Grèce propre, qui ne se sentent guère solidaires. Seules Athènes et Erétrie (qui fournissent respectivement vingt et cinq bateaux) envoient une expédition et incendient Sardes, une des capitales du Grand Roi, en 498. L'Empire perse cependant reste intact, Milet est bientôt prise et saccagée, les cités d'Ionie doivent se soumettre.

Puis Darius décide d'envahir la Grèce. En 490, il soumet les îles, pille Erétrie, réduit ses habitants en esclavage et débarque en Attique, au nord de Marathon. Athènes fait face, appuyée seulement par quelques Platéens (10'000 hommes contre les 20'000 combattants du Grand Roi). Les Perses doivent reprendre la mer et leurs pertes sont très lourdes.

L'union des cités
Alors qu'Athènes se prépare activement à un retour probable des Perses par la construction d'une flotte, il faut attendre l'été 481 pour que les autres cités réagissent au danger (Xerxès, qui a succédé à son père Darius en 486, prépare alors sur terre et sur mer une offensive considérable). La volonté de résistance cependant est loin d'être unanime: certaines cités, comme Thèbes, refusent de se battre; d'autres, comme Sparte, préféreraient assurer la défense du Péloponnèse sur l'isthme de Corinthe. Finalement, le commandement des forces communes est confié à Sparte, dont l'armée est la plus puissante. Cependant, malgré la résistance héroïque du roi de Sparte, Léonidas, aux Thermopyles, l'armée de Xerxès s'avance jusqu'en Attique. Dans le même temps, sa flotte s'apprête à occuper la rade de Phalère. C'est alors que Thémistocle, par la ruse, réussit à attirer une partie de la flotte ennemie près de Salamine, où a lieu la bataille décisive (480). L'année suivante, à Platées en Béotie, le reste de l'armée des Perses est battu, et leur flotte subit, au large des côtes asiatiques, d'ultimes défaites.

Les Grecs ont conscience d'avoir remporté une immense victoire. Unies pour la première fois sous un même commandement, les cités grecques libres ont triomphé des forces imposantes du Grand Roi, l'hellénisme de la monarchie barbare.

L'hégémonie athénienne
L'alliance conclue face au danger perse ne survit pas à la victoire; celle-ci, d'abord et surtout athénienne, marque le début d'un processus qui, en quelques décennies, va faire de la cité attique la maîtresse du monde égéen.

Sparte voit avec inquiétude l'hégémonie d'Athènes se développer en Egée, et ce que l'on peut considérer comme la première guerre du Péloponnèse éclate lorsque la cité athénienne prétend contrôler une partie de la Grèce centrale et septentrionale. Le conflit s'achève en 446 en raison des multiples problèmes intérieurs rencontrés par chacune des cités.

Athènes et Sparte signent une paix conjointe de trente années mais les Péloponnésiens craignent le développement de la puissance athénienne.

La guerre du Péloponnèse
Ainsi, en 431, Athènes se voit confrontée à presque toute la Grèce continentale sauf les Argiens et les Achéens restés neutres dans le Péloponnèse ainsi qu'à la Grèce centrale.

Périclès
Périclès juge l'affrontement inévitable et le moment lui semble favorable; il est certain de remporter rapidement la victoire par une action maritime, Athènes se trouvant en position de force. La ville semble être une forteresse inexpugnable ouverte sur la mer. En fait, la résistance péloponnésienne se révèle plus forte que prévu, et Athènes est cruellement affaiblie par une épidémie de peste qui coûte la vie à Périclès (429).

Cléon le Démagogue
Cléon le Démagogue,son remplaçant, est battu à Platées (427), mais gagne à Sphactérie (425). Les Spartiates réorganisent alors leur armée et portent le combat en Thrace (424), où ils battent les Athéniens devant Amphipolis.

A la mort de Cléon, en 422, le parti conservateur et pacifiste impose Nicias; il signe, en 421, la paix qui porte son nom, prévoyant le retour aux positions antérieures pour cinquante ans.

Alcibiade
Alcibiade dirige alors la politique athénienne et conclut une alliance avec les Argiens, qui avaient été battus par Sparte à Mantinée, en 418. Alcibiade se lance alors dans l'aventureuse expédition de Sicile (415-413), qui se termine par la victoire de Syracuse et la destruction de l'armée et de la flotte athéniennes. Ce désastre provoque la défection de plusieurs alliés d'Athènes, alors que Sparte s'allie à la Perse en échange des villes d'Ionie et d'importants subsides.

Athènes exsangue
Après de graves troubles intérieurs (révolte oligarchique, Conseil des Quatre-Cents, 411-410), Athènes connaît un bref redressement et remporte quelques victoires. Le retour d'Alcibiade (407) et la victoire aux îles Arginuses (406) lui permirent de rétablir la situation. Mais, en 405, la nouvelle flotte athénienne est de nouveau détruite, à l'embouchure de l'Aigos Potamos, par Lysandre, qui met le siège devant Athènes.

C'est une Athènes exsangue et démoralisée qui poursuit la guerre. Epuisée par la famine, la ville se rend sans condition en 404. Les vainqueurs lui imposent de dures conditions: la destruction des fortifications, la dissolution de la Confédération maritime et l'instauration d'un gouvernement oligarchique, la tyrannie des Trente, appuyé par une garnison spartiate.

Les crises du IVe siècle
La guerre est un désastre, et cela autant pour Athènes que pour toute la Grèce. Sparte avait combattu pour «rendre aux cités grecques leur liberté et leur autonomie»: la première conséquence de sa victoire est le retour des Grecs d'Asie Mineure sous la domination perse (en échange de l'or qui lui avait permis de conduire la guerre). Non seulement les autres cités ont subi de lourdes pertes, mais encore les troubles intérieurs se sont nourris d'un conflit dont le caractère politique s'est progressivement affirmé: face à Athènes, rempart des démocrates, Sparte apparaît en effet comme le soutien des oligarques, où qu'ils soient.

Complots, séditions, massacres sont devenus monnaie courante selon Enée le Tacticien. Même Sparte, la victorieuse, a perdu, outre nombre de ses hoplites, un peu de son âme et, en tout cas, de l'austérité qui faisait sa force. Ses plus fidèles admirateurs (tels Xénophon ou Platon) dénonceront cet amour nouveau des richesses comme responsable de sa décadence.

Evanouissement de l'égalité entre citoyens
Mesure significative: en 400, la loi d'Epitadeus autorise la libre disposition du cléros (lot de terre cultivé par les hilotes et affecté au citoyen par l'Etat). Cette loi entérine, en fait, une évolution des mœurs: les citoyens n'avaient plus d'égaux que le nom! Le complot de Cinadon, en 397, étale au grand jour le mécontentement des «inférieurs» et, s'il échoue, il annonce les révolutions du III e siècle.

Luttes entre les riches et les pauvres, entre les aristocrates et les démocrates, des révoltes éclatent ici ou là: massacres des riches par les déshérités à Corinthe en 392; scytalisme à Argos en 370, où les pauvres assomment à coups de bâton (scytale) près de 1500 riches et se partagent leurs biens. Peut-être a-t-on exagéré cette «crise de la cité», peut-être surtout n'a-t-on pas assez remarqué que, paradoxalement, c'est la grande vaincue, Athènes, qui - vraisemblablement grâce à son régime démocratique retrouvé - évite les affrontements les plus violents.

Il n'en reste pas moins que la guerre du Péloponnèse a servi de catalyseur aux tendances dissolvantes qui menaçaient la cité; on voit, par exemple, refleurir les tyrannies qui avaient accompagné la crise de l'archaïsme: celle de Denys l'Ancien, en Sicile, dès 405; celles d'Euphron à Sicyone, de Cléarque en Asie Mineure ou, en Carie, celle de Mausole, véritable précurseur des monarques hellénistiques.

D'incessantes luttes intestines
Le IV e siècle est troublé aussi par les combats continuels que se livrent les cités les plus importantes - Sparte et Athènes bien sûr, mais aussi Thèbes - pour prétendre au commandement en Grèce: assez fortes pour conquérir l'hégémonie - au besoin avec l'aide des Perses -, elles sont trop faibles pour la conserver.

De 404 à 355, l'histoire fourmille ainsi de renversements d'alliances et de conflits plus ou moins étendus. Sparte perd bien vite la confiance des Grecs, et la paix du Roi (386), qui fait du souverain perse Antalcidas l'arbitre des luttes entre les cités, apparaît à tous comme une trahison. Sa domination, d'ailleurs, se fait vite très dure. Affaiblie par les troubles sociaux, Sparte ne peut empêcher Athènes de créer un réseau d'alliances, et le décret d'Aristotélès (377) reconstitue bientôt une nouvelle confédération maritime. Comme la première, et malgré les précautions prises (garantie de l'autonomie des cités), elle s'achèvera par une révolte des alliés (357-356).

L'équilibre un instant rétabli entre Sparte, maîtresse du Péloponnèse, et Athènes, à la tête de son empire maritime, est rompu par Thèbes, qui, d'abord entrée dans l'alliance athénienne, joue son propre jeu et remporte sur Sparte, qui ne s'en relèvera pas, la victoire de Leuctres (371). A Mantinée (362), les Thébains l'emportent de nouveau, et si la mort d'Epaminondas - il fut tué lors d'un assaut - marque la fin de l'expansion thébaine, la paix, conclue en 361, consacre l'effondrement de Sparte (elle perd la Messénie, en sa possession depuis l'archaïsme).

Une Grèce déchirée
Epuisé, le pays doit affronter le nouveau danger menaçant sa liberté: Philippe, roi des Macédoniens, est devenu, aux marges du monde grec, le chef d'un royaume puissant et bien organisé. Il a entrepris une progression lente mais sûre vers l'est (la Thrace), où depuis le Ve siècle Athènes avait des intérêts; et vers le sud, où la possession de la Thessalie lui permettra bientôt de contrôler les voies d'accès à la Grèce. Il réussit même, en 346, à entrer au conseil amphictyonique qui administrait le sanctuaire de Delphes. Alors seulement les voix isolées qui, telle celle de Démosthène, dénonçaient le danger macédonien trouvent quelque écho. Une coalition se forme qui rassemble autour d'Athènes une partie des cités péloponnésiennes et Thèbes. L'effort militaire est important mais sans espoir: Philippe, vainqueur à Chéronée (338), en Béotie, devient l'arbitre des destinées du monde grec.

La ligue de Corinthe
Elle est la conclusion d'un congrès convoqué par le Macédonien et réunissant à Corinthe toutes les cités; ce pacte d'alliance réunit la plupart des cités et des peuples de la Grèce autour de Philippe, son hêgêmon. Elle se propose de mener contre le Barbare (le roi des Perses) une guerre de vengeance et de conquête. C'est Alexandre III le Grand qui, après l'assassinat de son père, en 336, reprendra ce dessein et lui donnera l'ampleur que l'on sait. Les cités grecques, quant à elles, ont dès lors et pour toujours, perdu leur indépendance. Il est permis de se demander si ces luttes pour l'hégémonie, dans lesquelles elles s'étaient épuisées, n'étaient que l'expression de leur volonté de puissance ou si elles procédaient aussi de la conscience plus ou moins claire d'une nécessité: celle d'élargir le cadre de la cité, devenu trop exigu et inadapté.

C'est une des ironies majeures de l'histoire de constater que les Grecs, lassés par des luttes fratricides, ont donné à un souverain macédonien - et par conséquent, pour eux, un semi-Barbare - la possibilité de réaliser cette unité, puis à son fils de reprendre la lutte contre le Barbare.
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:29

L'époque hellénistique
3e - 1e siècles avant J.-C.


Grèce antique ANT_GRE_20
Alexandre III le Grand
D'après Lysippe. Paris, musée du Louvre


La Grèce au temps des conquêtes d'Alexandre
Arrivé au pouvoir en 336, Alexandre le Grand reprend la lutte contre la Perse et se lance à la conquête d'un immense Empire. Mais la Grèce participe peu aux campagnes du Macédonien. En 335, il détruit Thèbes qui s'était révoltée et réforme à son profit la ligue de Corinthe. Parti pour l'Asie, Alexandre laisse quelques garnisons en Grèce mais n'occupe pas militairement Athènes. A l'annonce de sa mort, des cités grecques groupées autour d'Athènes se soulèvent contre les Macédoniens (323-322 av. J.-C.) Cette révolte, connue sous le nom de «guerre lamiaque» se solde par un échec.

L'affaiblissement de la tutelle macédonienne
La domination macédonienne ne dure que le temps de l'unité de l'empire, car les guerres qui opposent les prétendants rivaux à la succession d'Alexandre (321-280 av. J.-C.) l'affaiblissent considérablement. Les Macédoniens doivent se contenter d'exercer un contrôle indirect sur le pays et sont relativement impuissants face aux Grecs qui tentent à plusieurs reprises de se libérer de leur tutelle.

La résistance la plus efficace à la Macédoine est le fait d'Etats qui parviennent à regrouper de grandes régions sous leur autorité - la ligue Etolienne (290 ?-189 av. J.-C.), la ligue Achéenne (280-198 av. J.-C.) et Sparte (227-221 av. J.-C.) - mais qui en arrivent aussi à se faire la guerre entre eux ou à agresser les cités récalcitrantes au combat, soucieuses de préserver avant tout leur autonomie. L'équilibre du pouvoir entre les monarchies hellénistiques donne à la Grèce un sentiment illusoire d'autonomie, mais le pays devient en réalité l'enjeu de leurs rivalités. Ainsi, le mouvement anti-macédonien est particulièrement exploité par l'Egypte.

Ces guerres de libération épuisent les cités grecques, qui tout en conservant leurs structures politiques traditionnelles, se révèlent incapables de mettre en place une cohésion nationale: la tradition républicaine ne survit que sous la forme des fédérations autonomes, telles que les ligues Etolienne et Achéenne. Favorisée par sa position géographique, sa richesse commerciale et son alliance avec l' Egypte, Rhodes est la seule cité grecque de la fin du III e siècle av. J.-C., qui joue encore un rôle actif et indépendant dans le monde égéen.

Les troubles sociaux
Tandis qu'elles perdent leur place dans les affaires internationales, les cités grecques sont confrontées à des problèmes sociaux de plus en plus graves. La conquête de l'Orient par Alexandre avait offert une solution provisoire à la crise économique du IV e siècle. Les Grecs qui avaient servi dans l'armée étaient rentrés au pays enrichis, et les nouvelles colonies orientales avaient accueilli des grecs qui ne trouvaient plus de quoi vivre dans leur pays. Un immense marché s'était alors ouvert aux exportations et la Grèce était entrée dans une période de prospérité qui dura jusque vers 280 av. J.-C. Mais après cette date, la situation économique et sociale évolue.

Les conditions qui avaient déclenché la crise du IV e siècle ressurgissent, aggravées par les guerres incessantes. La richesse se concentre aux mains de quelques-uns, et le marché des exportations se rétrécit du fait de la concurrence des nouvelles communautés gréco-orientales. Les ouvriers libres voient leur salaire diminuer; la classe moyenne - exploitants agricoles ou artisans - se paupérise également. La pratique des infanticides et des avortements se répand chez les riches comme chez les pauvres. Dans de nombreuses cités, la tension sociale s'aggrave et entraîne des conflits ouverts. Seules Rhodes et Athènes demeurent assez prospères pour maintenir le calme chez les populations les plus modestes.

Les principales revendications sociales des révoltés restent, comme au IV e siècle, l'annulation des dettes et la redistribution des terres. La seule nouveauté porte sur l'émancipation des esclaves, car leur appui est indispensable pour s'imposer face aux armées mercenaires.

Dès le début des troubles, la monarchie macédonienne défend l'ordre établi pour faire obstacle à ces mécontents, d'autant que ces derniers concluent parfois des alliances avec ceux qui cherchent à se libérer de la tutelle macédonienne. Ainsi, associée à la ligue Achéenne, la monarchie met fin au régime révolutionnaire de Sparte (221 av. J.-C.), le seul qui eût connu un succès plus qu'éphémère.

La Grèce sous la domination romaine
200 av. J.-C.- 330 après J.-C.

La conquête
N'arrivant pas à se délivrer seule du joug macédonien, la Grèce s'allie finalement aux Romains. Le conflit entre Rome et la Macédoine éclate lorsque Rome établit une tête de pont sur l'Adriatique orientale après deux expéditions contre les pirates illyriens (229-228, 219 av. J.-C.); il se transforme en véritable guerre (première guerre de Macédoine, 215-205 av. J.-C.) lorsque le roi de Macédoine, Philippe V (qui régna de 221 à 179 av. J.-C.), conclut une alliance avec Carthage. La deuxième guerre de Macédoine (200-197 av. J.-C.) fait de Rome - massivement soutenue par les Etats de la ligue Etolienne, Athènes, Sparte et Rhodes, tous ennemis de la Macédoine - la principale puissance en Grèce.

La proclamation, en 196 av. J.-C., de la liberté de toutes les cités grecques, par le général romain Titus Quinctius Flaminius est reçue avec enthousiasme. Les conquérants prennent en effet, dans un premier temps, la décision de ne pas organiser la Grèce en province romaine. Cela signifie pour les populations libérées qu'elles ne sont pas obligées de payer un tribut aux Romains ni d'accueillir une garnison, et que les tribunaux locaux conservent leur indépendance. Néanmoins, les Romains imposent des modifications territoriales aux cités grecques qu'ils ont délivrées de la tutelle macédonienne. Ils dictent à certaines des dispositions constitutionnelles et attendent de toutes qu'elles mènent une politique étrangère pro-romaine.

Une autonomie illusoire
Mais, rapidement, toutes les cités grecques, y compris celles qui avaient été neutres ou pro-romaines durant les guerres macédoniennes, prennent conscience de leur sujétion. Le sentiment anti-romain est particulièrement fort dans les couches les plus modestes de la population, car Rome, comme la Macédoine avant elle, contribue à renforcer le rôle politique des citoyens les plus riches. Ainsi, les fonctions de magistrats sont le plus souvent confiées à des propriétaires fonciers. Les Grecs apportent leur soutien à ceux qui résistent également aux Romains dans la région égéenne, c'est-à-dire à Antiochos III de Syrie durant la guerre syrienne (192-189 av. J.-C.), puis à Persée de Macédoine dans la troisième guerre de Macédoine (171-168 av. J.-C.), et enfin à Mithridate VI Eupator, roi du Pont, dans la première guerre mithridatique (88-84 av. J.-C.). En 146 av. J.-C., la ligue Achéenne se lance dans une rébellion qui se solde par un échec, aboutit à la destruction de Corinthe et à la soumission totale de la Grèce. La plupart des cités sont contraintes au paiement d'un tribut et voient leurs constitutions modifiées. Toutes les ligues sont dissoutes et les citoyens ne sont plus autorisés à posséder des biens dans plus d'une communauté.

Les conséquences
La domination romaine a des effets catastrophiques. Plus encore que les Macédoniens, les Romains brisent toute velléité d'opposition en réprimant impitoyablement leurs ennemis, comme en témoignent la destruction de Corinthe en 146 av. J.-C. et le massacre des Athéniens ordonné par Sulla en 86 av. J.-C. De plus, les dévastations se poursuivent après l'écrasement de la résistance grecque, car la région devient l'un des principaux théâtres des guerres civiles romaines, avec les batailles de Pharsale (48 av. J.-C.), de Philippes (42 av. J.-C.) et d'Actium (31 av. J.-C.).

Ce conflit est également désastreux du point de vue économique: la stratégie de Rome consiste à isoler les monarchies hellénistiques d'Orient les unes des autres et à les couper de la Grèce, brisant ainsi les liens commerciaux qui avaient été à l'origine de la prospérité de ces régions. L'effondrement de l'économie est tel qu'au I er siècle av. J.-C. la Grèce est obligée d'importer d'Italie l'huile et le vin qui, jusque-là, constituaient la quasi-totalité de ses exportations. Sous le règne d'Auguste (27 av. J.-C.-14 après J.-C.), les seules villes florissantes sont les nouvelles colonies créées par l'empereur.

La pacification
A partir du I er siècle après J.-C., Rome renonce à son hostilité vis-à-vis de la Grèce et se lance dans une politique plus conciliante. Bien qu'organisée en province romaine depuis 27 av. J.-C., la Grèce conserve quelques cités « libres» (par conséquent exemptées du paiement du tribut); d'autres le deviennent sur l'initiative des empereurs philhelléniques du IIe siècle de notre ère. A partir de cette époque, les Grecs peuvent siéger au sénat romain. Les cités détruites (Corinthe et Patras) retrouvent vie grâce à l'établissement de colonies romaines, et Auguste fonde une ville nouvelle à Nicopolis. Les centres urbains et religieux (Athènes, Olympie et Delphes) s'enrichissent de nouveaux bâtiments publics, sous l'impulsion notamment de l'empereur Hadrien (qui régna de 117 à 138 après J.-C.). Les programmes de grands travaux (le canal de Corinthe laissé inachevé par Jules César ou l'assèchement du lac Copaïs par Hadrien) témoignent du changement d'attitude de Rome. Hadrien subventionne également des festivals religieux tandis qu'Antonin le Pieux (qui régna de 138 à 161 après J.-C.) et son successeur Marc Aurèle créent des chaires de rhétorique et de philosophie à Athènes. La solidarité grecque s'exprime à nouveau par la fondation de ligues (la ligue Achéenne, l'amphictyonie de Delphes) et la création à l'initiative d'Hadrien d'une ligue panhellénique basée à Athènes, ouverte aux communautés grecques de tout le monde romain.

Le déclin des cités
Malgré l'évolution de la politique romaine, la Grèce ne parvient pas à redresser sa situation économique. Le pays est dépeuplé; toutes les richesses du pays sont aux mains de quelques privilégiés ; les exploitations d'agriculture intensive du I er siècle av. J.-C. sont transformées en pâturages. Aussi, lorsque les barbares ( Goths et Hérules) s'emparent d' Athènes en 267 après J.-C., puis dévastent le sud du pays jusqu'à Sparte, ils ne rencontrent pas de résistance significative. Au IV e siècle, Corinthe et Athènes restent les seuls centres urbains importants.
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:30

Le monde des cités


Grèce antique ANT_GRE_19
Stèle funéraire de Phainippos et Mnésarète
Réunion de famille. Marbre, style attique, vers 350 avant J.-C. Paris, musée du Louvre


La cité grecque
Les Grecs de l'époque classique, aux 5 e et 4 e siècles avant J.-C., étaient organisés en cités. Ce terme, en grec polis, désigne un Etat, avec son organisation sociale, économique, politique, religieuse et culturelle. Il en existait alors plus de 300 cités en Grèce. Elles étaient indépendantes (les Grecs utilisaient généralement la formule « libres et autonomes ») et différentes, mais toutes partageaient des valeurs communes. Les détenteurs des droits politiques étaient les politai (citoyens), dont une grande partie de la population était exclue. Ces règles d'organisation de la polis étaient désignées par le mot politeia (régime politique, constitution). La cité la mieux connue et la plus étudiée est Athènes. C'est à partir de son exemple que nous entrons dans la cité grecque.

Pour définir la cité grecque, il faut en avoir en mémoire trois éléments essentiels :
- La cité est d'abord un groupe d'hommes libres, et il s'agit bien d'hommes par opposition aux femmes. Seuls ces hommes possèdent les droits politiques ; ils constituent une communauté. Lorsqu'ils fondèrent leurs nombreuses colonies hors de Grèce au cours des 8e, 7e et 6e siècles av. J.-C., il s'agissait bien d'une partie de la cité, ses citoyens et ses règles d'organisation, qui partaient s'installer outre-mer.

- La cité, c'est ensuite la ville, désignée par le mot asty, par opposition à la campagne. La ville avec ses bâtiments civiques et religieux, installés dans des lieux choisis très précisément.

- La cité, c'est enfin le territoire autour de la ville, la campagne (chôra), plus ou moins vaste, méticuleusement occupée et balisée. C'est cette campagne qui par sa terre fait les citoyens.

Cet ensemble ville-campagne est plus ou moins strictement délimité, les confins de la cité, ses limites, ses frontières sont toujours la cité et ne sont plus tout à fait la cité, c'est une zone disputée et revendiquée, une zone mal définie et source tout à la fois de culte et de combats.

La ville
La ville (asty) s'oppose à la campagne (chôra). C'est l'espace construit par opposition à l'espace cultivé. Elle ne compose qu'un élément du territoire de la cité. Elle comporte habituellement un certain nombre de lieux bien spécifiques répondant aux fonctions politique, militaire, religieuse, économique. Elle est entourée de remparts protecteurs.C'est bien sûr Athènes qui offre, à l'époque classique, l'exemple le plus développé de la ville grecque.

L'Agora
C'est la place du marché, le lieu de rencontre. L'assemblée des citoyens peut s'y réunir faute de lieu spécifique. On y trouve des temples et autels, des sanctuaires. Les bâtiments politiques ne sont pas éloignés. A Athènes, l'Agora est le centre de la ville, entourée de portiques. La ville abrite les bâtiments publics et politiques : le siège du Conseil, les tribunaux, les gymnases, les palestres, le théâtre.

L'acropole
C'est la ville haute. Construite sur une hauteur, elle surplombe le reste de la ville, abrite des sanctuaires, parfois les plus importants, et offre un refuge en cas de besoin. Dans certaines villes, l'acropole est installée sur une colline très haute, éloignée et difficile d'accès comme à Argos ou à Corinthe ; parfois la ville propose deux acropoles : Argos encore, ou Mégare.

La campagne
La campagne (chôra), c'est le territoire plus ou moins vaste qui entoure la ville. La chôra s'oppose à l'asty et la complète en même temps : ce sont les deux éléments spatiaux, en réalité indissociables, qui composent le territoire de la cité. Dans la chôra se trouvent les terres cultivées, les fermes et autres bâtiments agricoles. Mais ce n'est pas un espace désert pour autant, les villages y sont nombreux. Elle abrite ainsi une part très importante de la population de la cité.

Elle est donc l'espace par excellence de l'activité agricole, celui du monde des paysans qui possèdent et labourent la terre, sèment et récoltent ce qui fait vivre (en partie) la cité. Le petit paysan, à Athènes en particulier, incarne l'idéal-type du « paysan-propriétaire-citoyen ». Très attachés à cette terre qu'ils possèdent, ces paysans - georgoi ou agroikoi - forment sans aucun doute une très grande majorité de la population et restent installés dans leurs villages auquel ils sont particulièrement attachés, comme l'écrit Aristophane : "J'ai la ville en horreur et pleure mon village" («Acharniens», vers 33-36). Mais une nette évolution s'opère au partir du 6e siècle et l'on voit apparaître les régisseurs qui gèrent des domaines de taille plus ou moins grande pour le compte de riches propriétaires restés en ville.

La chôra est parcourue par les patrouilles d'éphèbes, au cours de ce qui correspond à leur service militaire. Ces éphèbes sont cantonnés dans de nombreux fortins, constructions militaires qui parsèment la chôra et qui sont indispensables en cas d'attaque pour assurer la protection de la cité et offrir un premier refuge aux citoyens.

A Athènes le territoire civique est rigoureusement organisé depuis les réformes de Clisthène. Il est divisé en trois régions : la ville (asty), c'est-à-dire Athènes elle-même, la côte (paralia) et l'intérieur des terres (mésogée). L'unité de base du découpage, celui dans lequel le peuple se reconnaît et s'identifie, c'est le dème, le village avec son propre territoire, ses propres institutions (assemblée du dème). Chaque dème désigne un nombre précis de représentants à la boulè. Les trytties sont des regroupements de dèmes, non homogènes pour permettre l'éclatement des solidarités locales et assurer un relatif "mélange" des citoyens. Les tribus sont formées par l'addition de trois trytties : une de la ville, une de la côte, une de l'intérieur. C'est la tribu qui désigne les magistrats. Comme il y avait dix tribus, le nombre de magistrats est toujours un multiple de dix : 6'000 héliastes, 500 bouleutes, 10 prytanes, 10 stratèges, 10 archontes. Cette structure des tribus athéniennes est spécifique, Clisthène ayant voulu éviter des tribus à caractère clanique, habituelles dans le monde grec.

Les confins de la cité
Les parties les plus éloignées du centre de la ville forment les eschatai. Lieux extrêmes du territoire, confins de la cité, elles sont au-delà des terres cultivées, au-delà de la zone effectivement occupée par les hommes. Ce sont les régions "au bout", "à l'extrémité, "à la limite". Faites de collines élevées ou de montagnes, elles sont couvertes de forêts ou occupées par des marais. Elles sont parfois peu accessibles, laissées à l'usage des bergers, des bûcherons ou des charbonniers. Ces régions incertaines, aux frontières un peu floues, sont une zone de chasse, le domaine privilégié d'Artémis. On y trouve aussi les sanctuaires extra urbains de la cité. Lieux des espaces sauvages, limites de l'espace civilisé, elles forment ce que l'on peut nommer une "frontière anthropologique de la cité" ; la frontière politique, elle, marquée par des bornes, les hermai - piliers quadrangulaires surmontés d'une tête du dieu Hermès - se trouve au-delà. C'est aussi la région contestée, revendiquée par les voisins, objet des guerres et lieu des combats.

Le corps social
La cité grecque se définit d'abord comme une communauté d'hommes libres. Ajoutons que l'ensemble de la population se répartit suivant plusieurs types de divisions et différents statuts juridiques. La plus importante de ces divisions est celle qui existe entre liberté et non-liberté, entre liberté et esclavage. On peut dire que tout le corps social est déterminé par cette distinction. Mais d'autres coupures interviennent qui mettent en jeu les droits politiques et surtout le niveau de richesse.

La «meilleure constitution»
La cité grecque est avant tout un groupe d'hommes libres organisés "politiquement" sur un territoire. Ceux-ci ont recherché depuis les origines et à travers de nombreux conflits, ce qu'ils appelaient « la meilleure politéia possible », c'est-à-dire le meilleur régime politique, ce que nous nommons la constitution. Les constitutions se sont multipliées dans les différentes cités et chacune a pu finalement s'enorgueillir de son législateur, plus ou moins mythique, et lui vouer un véritable culte. Ces constitutions ont assuré plus ou moins largement l'accès des citoyens à l'exercice des droits politiques, et leur participation à la vie publique.

C'est à Athènes, cité la mieux connue, que s'est développée au 5 e siècle av. J.-C. une forme particulière de constitution, la démocratie : le mot est formé de deux mots grecs dêmos et cratos signifiant peuple et pouvoir. La démocratie, c'est le pouvoir exercé par le peuple. Cette forme d'organisation politique a suscité de profonds débats dès l'Antiquité. Mais il ne faut pas oublier qu'Athènes ne constitue qu'une "brillante exception". Toutes les cités grecques ne sont pas construites sur son modèle.

L'assemblée
A Athènes, l'assemblée, l'ecclésia, était ouverte à tous les citoyens. Elle se réunissait sur la colline de la Pnyx, au sud-ouest de l'Agora, spécialement aménagée à cet effet. Les séances ordinaires étaient prévues environ 40 fois par an (trois à quatre fois par prytanie). Les discussions entre historiens portent sur la fréquentation de l'ecclésia : on dispose de peu d'informations très précises, mais on estime communément qu'environ 6'000 personnes y participaient. Les archéologues ont montré par ailleurs que les réaménagements de la Pnyx à la fin du 4 e siècle av. J.-C. permettaient la venue de 13'000 personnes.

Mais si l'ecclésia possédait à Athènes son lieu propre de réunion, elle pouvait aussi se réunir ailleurs, sur l'Agora - comme c'était le cas à l'origine - dans un théâtre ou même dans tout autre lieu comme le montre le célèbre épisode de la révolte des marins et soldats à Samos en 411 av. J.-C. qui réunirent l'assemblée dans l'île pour destituer leurs stratèges (généraux) favorables aux oligarques qui avaient pris le pouvoir à Athènes. Les rôles de l'ecclésia étaient multiples : voter les décrets et les lois, élire les magistrats, décider de l'introduction de nouveaux cultes, discuter des questions financières, attribuer des récompenses honorifiques ou voter l'ostracisme, etc. Le droit de parole était libre et égal pour tous les orateurs, contrôlé grâce aux horloges à eaux (clepsydres).

Le Conseil (boulè)
C'est le conseil délibératif qui assure le bon fonctionnement de l'ensemble du système. Il est composé de 500 membres, 50 par tribu. La députation de chaque tribu fonctionne à tour de rôle, pendant un 10 e de l'année, comme bureau du Conseil (prytanie). Ces 500 bouleutes sont tirés au sort chaque année parmi les candidats et sur les listes dans chaque dème. Deux conditions pour être bouleute : avoir au moins 30 ans et ne l'avoir jamais été auparavant. Les bouleutes prêtaient serment lors de leur entrée en charge et ils siégeaient au bouleuterion, un bâtiment situé au sud de l'Agora.

Le rôle du Conseil consistait d'abord à préparer les projets de lois et décrets votés par l'ecclésia : les probouleumata. Elle avait même l'initiative de ces projets. Ensuite c'est devant elle que les magistrats devaient se présenter à leur entrée en charge et surtout rendre compte de leur activité à leur sortie de charge. Elle possédait ainsi des pouvoirs judiciaires étendus.

Les magistrats
A Athènes, la véritable direction politique de la cité est effectuée par les différents magistrats. Ils sont désignés pour une durée d'un an, soit par tirage au sort, soit par élection pour les plus importants magistrats, en particulier les commandants militaires (stratèges, cf. ci-dessous). Certaines magistratures sont renouvelables.

Les stratèges
Ils forment un collège de dix (un par tribu) et appartiennent obligatoirement à la première classe censitaire ; ils sont élus et renouvelables. Ainsi Périclès, le plus célèbre homme politique athénien du 5 e siècle avant J.-C. fut régulièrement réélu stratège de 445 à 429, date de sa mort. Les stratèges dirigent l'armée mais au 5 e siècle, ils ne sont pas que des généraux, ce sont aussi et surtout des hommes politiques. Les évolutions du 4 e siècle avant J.-C. les enfermeront dans ce rôle militaire et certains finirent par se spécialiser (stratège des hoplites, stratège du territoire, du Pirée, etc).

Les archontes
Magistrats d'origine aristocratique, ils sont les plus importants avant les réformes démocratiques. A Athènes, ils sont dix : l'archonte-éponyme qui donne son nom à l'année, l'archonte-roi, qui préside l'aréopage, le polémarque (chef nominal de l'armée), les six thesmothètes (gardiens des lois), le secrétaire. Dans la cité démocratique, ils ont perdu de leur pouvoir et de leur prestige et ne s'occupent plus que de tâches judiciaires ou religieuses. Depuis 486 av. J.-C., ils sont tirés au sort et en 456, la troisième classe du cens leur est ouverte.

L'aréopage
C'est l'ancien conseil aristocratique de la cité. Il siège à Athènes sur la colline du dieu Arès (Areios pagos en grec, d'où son nom). La colline est située au sud de l'Agora entre l'Acropole et la Pnyx. Il est formé des anciens archontes sortis de charge et qui sont désignés à vie. Il y a environ 150 aréopagites. La réforme d'Ephialte en 461 av. J.-C. ôta ses pouvoirs politiques à l'aréopage et il ne conserva qu'un rôle judiciaire secondaire. Toutefois il figure comme une sorte d'autorité morale. L'aréopage retrouve un certain lustre avec la fin de la démocratie après 322 av. J.-C..
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:32

Athènes


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Le Parthénon
Le Parthénon, temple dorique dédié à Athéna


Histoire
Dans l'histoire des Hellènes, Athènes a joué un rôle de premier plan pendant près de deux siècles. «Rempart de la Grèce» face aux Perses, selon Pindare, elle est encore l'âme de la résistance aux Macédoniens et, si elle succombe finalement à l'hégémonie d' Alexandre, elle continue d'exercer une véritable fascination sur le monde antique. Athènes reste aussi le cadre privilégié d'une expérience politique exemplaire: la démocratie. Si sa civilisation ne peut se confondre avec celle de la Grèce, elle en est sans doute l'expression la plus lumineuse. Les très nombreux documents qui nous parlent d'Athènes témoignent du rôle exceptionnel d'une cité devenue, comme le voulait le plus célèbre de ses stratèges, Périclès, «l'école de la Grèce». Rien, pourtant, ne pouvait laisser prévoir ce destin remarquable: l'Attique - le territoire de ce qui allait devenir la cité des Athéniens - est une péninsule de taille modeste, au relief montagneux.

Les origines
Protégée par sa ceinture montagneuse, et peut-être par sa pauvreté même, l'Attique est épargnée par les grandes invasions, qui, à la fin du IIe millénaire, marquent les derniers temps de l'âge du bronze. Ses habitants, probablement pour cette raison, se disent «autochtones», c'est-à-dire nés de la terre. Les Athéniens admettent toutefois que leur pays a servi de refuge à des peuples en fuite: les Pélasges, probablement venus d'Anatolie dès le III e millénaire, puis les Ioniens, au début du II e millénaire, dont ils conservent d'ailleurs la langue.

Si Athènes connaît du XI e au IX e siècle av. J.-C. un développement sans exemple, marqué par l'abondance et la qualité de sa céramique, elle demeure dans une pénombre relative lorsque, à l'aube du VIII e siècle, les cités grecques sortent des «âges obscurs». Une nouvelle forme d'Etat se développe alors: la polis (ou cité), dans des conditions encore mal élucidées mais sur lesquelles l'archéologie apporte désormais quelque lumière. Les facteurs économiques sont sans doute décisifs: passage à l'agriculture de civilisations restées jusque-là pastorales, reprise des échanges commerciaux (métaux) et, à partir de 800 environ, forte croissance démographique.

La polis archaïque naît d'un ensemble de villages suffisamment proches les uns des autres pour tirer parti d'une citadelle commune: à Athènes, la forteresse royale de l'époque mycénienne, sur le rocher de l'Acropole, va jouer ce rôle. Des regroupements locaux précédèrent certainement l'unification. Dans la structuration de la communauté, le phénomène religieux occupe une place importante: à Athènes, il se constitue autour de la déesse Athéna.

Les sources écrites, lorsqu'elles décrivent le processus de formation de la cité, renvoient au modèle classique du synœcisme (réunion de plusieurs villages en une cité) et attribuent à Thésée (dixième roi d'Athènes, selon la tradition mythique) cette unification de l'Attique.

Naissance d'une démocratie
La continuité historique entre époque mycénienne et époque archaïque se manifeste également dans les institutions: la monarchie achéenne semble avoir été affaiblie progressivement plutôt que balayée; son autorité est peu à peu réduite par le contrôle d'un conseil aristocratique siégeant sur l'Aréopage (colline d'Arès), et morcelée entre trois magistrats élus - les archontes - qui, vers 683, voient leur pouvoir limité à un an.

L'histoire athénienne des VIII e et VII e siècles est mal connue. La cité est dominée par une aristocratie guerrière remuante et les chefs des principaux genê (clans, familles), les Eupatrides (ceux qui ont de bons pères), sont maîtres de la terre et du pouvoir politique. La masse de la population constitue une sorte de clientèle, associée au sein des phratries (groupes de familles) au culte de l'ancêtre commun du génos. Entre l'aristocratie et cette paysannerie plus ou moins dépendante, un groupe de citoyens, suffisamment aisés pour se procurer la «panoplie» de l'hoplite (fantassin lourdement armé), participe, depuis le VII e siècle, à la défense de la cité. Les artisans sont encore peu nombreux et Athènes ne prend aucune part au grand mouvement de colonisation qui, depuis le VIII e siècle, étend les limites du monde grec aux rivages les plus lointains de la Méditerranée.

Les premières réformes
C'est sur un fond de fortes tensions sociales qu'Athènes paraît dans l'histoire. Lorsque, vers 630, un jeune noble, Cylon, s'empare de l'Acropole et cherche à établir la tyrannie, Mégaclès, de la famille des Alcméonides, aidé par «la foule des champs», l'en déloge et le tue. On pourrait voir dans cette tentative avortée un simple épisode de la lutte de factions entre aristocrates si Athènes n'entrait ensuite dans la voie des réformes.

Dracon
Dracon est mandaté, en 621-620, pour mettre par écrit des lois ne s'appliquant qu'aux affaires de meurtre et dont la dureté devait rester légendaire - d'où l'adjectif draconien. Mesure limitée qui, cependant, affirme pour la première fois l'autorité de l'Etat au-dessus des solidarités familiales dans le domaine de la justice, instaure un droit commun pour tous et, par là même, porte atteinte à l'arbitraire des aristocrates. Six thesmothètes (gardiens de la loi écrite) viennent alors renforcer le collège des archontes. Le monopole économique et politique des Eupatrides n'est cependant en rien attaqué, malgré une évolution économique et militaire qui le rend moins justifié et manifestement moins bien supporté. Comme les autres cités grecques, Athènes connaît une crise rurale qui déchire la société. Les mêmes solutions s'offrent à elle: soit l'arbitrage d'un législateur, chargé, dans une sorte de consensus, de mettre fin à des troubles qui risquent de dégénérer en guerre civile, soit la tyrannie, qui, dans l'évolution de la Grèce archaïque, apparaît bien souvent comme une solution transitoire aux problèmes de la cité. Avec Solon, le législateur, puis avec les Pisistratides, Athènes fera successivement l'expérience de l'une et de l'autre.

Solon
Solon est chargé, en 594-593, de refaire l'unité de la cité. Son œuvre est essentiellement celle d'un libérateur. Par la seisachthéia (la remise du fardeau), il annule toutes les créances et interdit à l'avenir la caution personnelle, donc l'esclavage pour dettes, restaurant ainsi une petite paysannerie menacée de perdre sa liberté. Solon, dans ses élégies (il est aussi le grand poète lyrique d'Athènes), se glorifie d'avoir libéré la terre et aussi les hommes, «ceux qui, en Attique même, connaissaient la servitude dégradante et que faisait trembler l'humeur des maîtres», ceux qui avaient fui, ceux qui avaient été emmenés pour être vendus à l'étranger. Réforme modérée puisqu'elle ne réalise pas l'anadasmos (nouveau partage des terres) très largement réclamé, elle ampute cependant la richesse des Eupatrides qui sans doute y ont consenti par crainte d'un soulèvement populaire et de la tyrannie.

Le dêmos
Avec cette solution apportée à la crise qui affecte le monde rural, l'originalité d'Athènes paraît bien résider dans les mesures politiques qui donnent au peuple un droit de regard sur l'évolution future. Un dêmos élargi est intégré, dans le corps civique, par des mesures politiques inscrivant la seisachthéia dans un ensemble cohérent. Les limites du dêmos sont clairement établies au sein d'une hiérarchie sociale fondée sur les revenus fonciers. Le rôle de l'ecclésia (une assemblée du peuple jusque-là peu consultée) se renforce. Solon met en place un tribunal populaire de justice (l'héliée) qui ne fonctionne encore que comme instance d'appel, mais qui, selon Aristote, devait être une pièce maîtresse de l'évolution démocratique d'Athènes.

La paysannerie se développe encore au cours du VI e siècle et, jouissant de la sollicitude du tyran Pisistrate (des prêts d'Etat, en particulier, la soustraient à l'influence des riches propriétaires), elle donnera une solide assise sociale à la démocratie athénienne. Le développement de l'artisanat est, de même, étroitement lié par la tradition au souvenir de Solon, et l'archéologie révèle à partir des années 580 un essor étonnant de la production de céramiques et des échanges. Des ruraux trouvent ainsi du travail à la ville et la classe des thêtes (citoyens non propriétaires) se développe. Vers 575, Athènes se donne une monnaie et, peu après, s'instaure l'équivalence entre la drachme et les mesures de capacité, ce qui témoigne d'un développement nouveau de la fortune mobilière.

L'extraordinaire ouverture d'Athènes vers l'extérieur a ainsi été préparée par Solon et par le compromis modéré recherché entre les intérêts contraires des Eupatrides et du dêmos. Il n'a guère réussi, en revanche, dans sa volonté de restaurer la communauté de la polis en crise puisque, très rapidement, des troubles reprennent, qui voient s'affronter des factions plutôt que des partis. Pédiens et Paraliens, loin d'opposer, comme on l'a dit longtemps, les intérêts des Eupatrides à ceux des pêcheurs et des commerçants, représentent des factions aristocratiques locales (la première plutôt ancrée sur les valeurs terriennes, la seconde plus ouverte au commerce); les Diacriens, sur lesquels s'appuie Pisistrate, regroupent les mécontents contre les nantis et s'identifient avec le dêmos.

La tyrannie des Pisistratides
Pisistrate s'appuie sur le peuple pour conquérir le pouvoir. Maître d'Athènes une première fois en 561, il en est par deux fois chassé, mais il reviendra, toujours par la ruse ou par la force, et à sa mort, en 528, ses fils lui succéderont. C'est ainsi que, tardivement, Athènes connaît la tyrannie, une tyrannie modérée qui laissera à la postérité le souvenir d'un gouvernement raisonnable. Pisistrate ne modifie guère les institutions, se dotant simplement d'une garde personnelle et confiant les magistratures à des hommes à sa dévotion. Il laisse Athènes bénéficier de l'impulsion donnée par Solon, poursuivant une politique d'équilibre social et d'affirmation de l'Etat, inaugurant une politique extérieure active et, à l'intérieur, un programme de grands travaux vivifiant pour l'économie.
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:32

Pisistrate et ses fils entretiennent une cour brillante et marquent leur volonté d'assumer le passé religieux et mythique d'Athènes (rédaction des poèmes homériques, des hymnes orphiques), d'exalter Athéna (un grand temple, l'Hécatompédon, est construit en son honneur, sur l'Acropole, et un éclat remarquable est donné aux Panathénées), mais aussi de favoriser les cultes populaires, comme celui de Dionysos. C'est autour de ce dieu que naît la comédie, genre littéraire qui marque le V e siècle. Avec les Pisistratides, Athènes connaît donc sa première période de grandeur. Cependant, après l'assassinat d'Hipparque en 514, la tyrannie d'Hippias se durcit et, en 510, ce dernier doit quitter Athènes devant l'opposition conjuguée des aristocrates et des Spartiates, ainsi que du dêmos, fortifié par le dynamisme économique d'Athènes.

Les réformes de Clisthène
Après une lutte acharnée au cours de laquelle Sparte appuie les plus durs des oligarques, Clisthène, un Alcméonide soutenu par le dêmos, fait voter en 508 une réforme radicale de la Constitution qui établit la démocratie athénienne dans ses institutions. L'espace civique athénien est remodelé, la ville incluse dans une nouvelle division de l'Attique en dèmes et en trittyes. Les citoyens sont regroupés en dix tribus dont chacune réunit trois trittyes prises dans trois zones différentes du territoire: ville, côte et intérieur. Chaque tribu offre ainsi une image réduite des intérêts multiples de la cité et ses membres, désormais désignés du nom de leur dème (et non plus de celui de leur génos), échappent plus facilement à l'emprise des Eupatrides.

Il apparaît dès lors une réorganisation politique générale fondée sur ce cadre des dix tribus; un secrétaire s'ajoute aux neuf archontes; à la Boulè, ou conseil des Cinq-Cents, les 50 représentants de chaque tribu gèrent la cité pendant un dixième de l'année (une prytanie). Dix stratèges assurent bientôt la direction des troupes de chacune des tribus, et ce commandement militaire, à l'épreuve des guerres médiques, donnera à ces nouveaux magistrats un pouvoir décisif dans l'Athènes du V e siècle. Enfin, la loi sur l'ostracisme (exil dans les dix jours et pour dix ans, sur vote de l'ecclésia, d'un citoyen jugé dangereux pour la démocratie) tente de prémunir la cité contre un éventuel retour de la tyrannie.

Le siècle d'Athènes
V e siècle av. J.-C. L'affrontement avec la Perse qui ouvre l'âge classique appartient à l'histoire de la Grèce, mais le rôle capital des Athéniens dans cette lutte inégale va faire d'eux les acteurs principaux du V e siècle.

Les guerres médiques
Athènes est, en effet, la seule cité, avec Erétrie, à porter secours aux Grecs d'Asie, révoltés contre Darius, Grand Roi des Perses. Une petite expédition brûle l'une de ses capitales, Sardes, et la vengeance de Darius s'exerce essentiellement contre les deux cités. A Marathon, Athènes fait face et, sous la direction du stratège Miltiade, ses hoplites appuyés seulement par quelques Platéens obligent les Perses à reprendre la mer en 490. Athènes a gagné seule la première guerre médique.

C'est elle encore qui, grâce à l'orientation maritime donnée par Thémistocle à la cité (création du Pirée), joue un rôle décisif dans la seconde guerre médique. Thémistocle convainc les Athéniens d'abandonner l'Attique et de combattre sur mer l'invasion conduite par Xerxès. A Salamine, où ils fournissent près de la moitié des contingents alliés, ils contraignent les Perses à la retraite en 480, tandis que leur flotte remporte encore des victoires capitales (Mycale, Sestos) près des côtes asiatiques.

Plus qu'aucune autre cité, Athènes a souffert de l'invasion: l'Attique est dévastée, la ville détruite, mais, alors que la Grèce semblait perdue, la cité nouvelle de Clisthène a montré son attachement à la liberté et c'est vers elle que se tournent, craignant un retour offensif des Perses, les petites cités des îles et de la côte ionienne. La Confédération athénienne, ou ligue de Délos (du nom de l'île où est déposé le trésor fédéral), simple alliance militaire constituée autour d'Athènes (478), devient la base de la puissance de la cité au V e siècle.

L'Athènes de Périclès
Penser à Athènes, c'est souvent évoquer ces années où, dans la plus opulente des cités grecques, les institutions démocratiques fonctionnent harmonieusement, où l'équilibre de la société paraît miraculeux, où la vie intellectuelle et artistique draine les meilleurs esprits de la Grèce. C'est évoquer aussi Périclès, maître incontesté de la cité pendant près de trente ans. Périclès, Bouzyge par son père, Alcméonide par sa mère, est l'un de ces aristocrates qui continuent de monopoliser les charges principales. Associé à Ephialtès dans la lutte qui, après les guerres médiques, oppose toujours aristocrates et dêmos, il est avec lui responsable des derniers élargissements de la démocratie. Périclès domine bientôt la vie politique et, de 443 à 431, est constamment réélu stratège. Cette autorité incontestée dans une cité où le peuple a pris en main son destin a de quoi surprendre.

La démocratie athénienne
L'ecclésia, l'assemblée du peuple, décide de tout; elle est aidée dans sa tâche par la boulè, qui doit débattre des questions soumises à l'assemblée et émettre un avis préalable. Les magistratures, collégiales et annuelles, sont étroitement surveillées par le dêmos. La stratégie constitue désormais le véritable exécutif de la cité, dépossédant l'archontat, réduit, comme l'ancien conseil aristocratique de l'Aréopage, à des attributions juridiques et religieuses. Le tribunal populaire de l'héliée (6'000 héliastes tirés au sort) juge de presque toutes les causes. Tout citoyen athénien peut donc décider du destin de sa cité à l'assemblée, siéger au tribunal, être bouleute et exercer une magistrature au moins une fois dans sa vie. Pour que cette égalité de droit ne soit pas un vain mot, Périclès accorde une indemnité de participation à la vie civique, le misthos. La démocratie s'efforce aussi d'atténuer les inégalités économiques et sociales par la pratique des liturgies (charges normalement assumées par l'Etat confiées aux plus riches des citoyens), par un système d'entraide pour les plus déshérités, par du travail pour tous.

Les contradictions de la société athénienne
Bien sûr, cette démocratie directe n'est pas parfaite. Aristophane s'est fait l'écho des critiques qui lui sont adressées par ceux qu'inquiètent ses excès. A l'inverse, on peut remarquer que, jusqu'en 400, aucun misthos (salaire) n'est donné pour la participation à l'assemblée, ou encore pour l'exercice de la plus importante des magistratures, la stratégie, que seuls les plus riches des citoyens peuvent exercer. Enfin et surtout, cette démocratie est à l'usage d'un petit nombre de privilégiés: au moment même où s'achève la conquête de la démocratie, en 451, il faut, pour être citoyen de plein droit, être né non seulement d'un père citoyen mais - et c'est nouveau - de mère athénienne. De surcroît, ni les femmes, ni les métèques (les étrangers domiciliés à Athènes), ni les esclaves, de plus en plus nombreux, ne participent à la vie politique. Cela constitue l'une des contradictions majeures d'Athènes: plus la cité s'éloigne de ses origines agraires et voit son économie s'orienter vers des activités tournées vers l'échange et le profit, plus elle fait appel aux esclaves, plus cette contradiction va croissant. Périclès disait encore que l'exercice d'un métier ne peut empêcher le citoyen de donner un avis utile à son pays. Au IV e siècle, déjà, Xénophon et Platon estiment que la seule activité compatible avec la citoyenneté est l'agriculture, et Aristote, pour sa part, juge qu'être citoyen est un métier à part entière et propose d'exclure tous ceux qui travaillent de la vie politique.

L'impérialisme athénien
En outre, cette démocratie qui veut ses citoyens les plus libres des Grecs admet l'impérialisme à l'extérieur. Thucydide ne se fait pas d'illusions: la ligue de Délos, d'alliance qu'elle était, s'est transformée en empire. Les aristocrates qui conduisent la ligue à ses débuts, non seulement lui font faire des progrès décisifs, mais répriment durement les révoltes à Naxos en 470, à Thasos en 465. Les démocrates, lorsqu'ils leur succèdent, n'agissent pas autrement: la répression à Samos en 441, conduite par Périclès, n'est pas moins sanglante, et l'établissement de colons athéniens sur les terres enlevées aux cités alliées se poursuit. Au moment même où la signature de la paix de Callias avec les Perses en 449 aurait pu rendre l'alliance caduque, Athènes impose à toutes les cités la circulation de sa monnaie et organise plus rationnellement la perception d'un tribut qui, depuis 454, n'est plus déposé à Délos mais à Athènes. Elle s'autorise à puiser dans ce trésor, destiné à la défense commune, à des fins qui lui sont propres.

Athènes, en effet, n'est pas seulement impérialiste par accident (si la ligue est née de l'initiative des alliés, leur négligence à s'acquitter du tribut explique sa transformation en empire), elle l'est par nécessité: sa démocratie vit de l'empire, et non seulement de la richesse que, grâce à la maîtrise de la mer, il lui procure, mais aussi des terres prises aux anciennes cités alliées et du phoros (tribut), enfin, qui permet de distribuer des misthoi, d'aider les plus démunis et de pratiquer une politique de prestige utile à l'économie et décisive pour cimenter la communauté tout entière.

La guerre du Péloponnèse
C'est de cette dernière contradiction que naît la guerre du Péloponnèse (431-404). La politique intransigeante d'Athènes incite les alliés à la révolte et ses prétentions à l'hégémonie dressent contre elle ses vieilles rivales que sont Sparte et Corinthe.

Le conflit, acharné, dure près de trente ans. La stratégie voulue par Périclès paraît être l'aboutissement logique d'une évolution longue de deux siècles; la ville s'était, en effet, tournée vers la mer. La création du Pirée par Thémistocle puis son développement, la réalisation des Longs Murs avaient fait de la ville et de son port une sorte d'île dont le salut dépendait de la mer et de la flotte. L'Attique abandonnée aux incursions périodiques des Lacédémoniens, la population se retranche à l'intérieur des murs et les citoyens résistent, tandis que les contre-attaques sont menées sur mer. La peste et la mort de Périclès, en 429, laissent Athènes affaiblie; la guerre se traîne avec des fortunes diverses et si la paix de Nicias, en 421, met fin pour un temps aux hostilités, celles-ci se rallument avec la désastreuse expédition de Sicile (415-413), voulue par Alcibiade. Après la perte de 12 000 citoyens, Athènes remporte encore quelques succès en mer Egée, mais est définitivement défaite à la bataille d'Aigos-Potamos en 405. L'année suivante, les Spartiates entrent dans la cité qui doit livrer sa flotte, détruire ses murailles, abandonner son empire, dont toutes les cités sauf une ont d'ailleurs fait défection.

Le déclin
La guerre a sérieusement altéré le fonctionnement de la démocratie. En 411, les oligarques sont même parvenus à renverser le régime, mais leur tentative a échoué. Les «Trente», tyrans dont la dictature est imposée par Sparte à la fin de la guerre, ne réussissent pas plus à se maintenir. Les Athéniens tiennent à leur démocratie et la restaurent en 403. Ils jouent alors un jeu habile entre les cités qui prétendent à l'hégémonie et reconstituent même, en 377, une seconde confédération maritime qui leur redonne, pour un temps, la maîtrise des mers, et qui, affaiblie par la révolte des alliés (357-355), sera disloquée par Philippe.

Le danger macédonien
Athènes doit alors affronter un danger nouveau, celui que le roi de Macédoine fait courir à toute la Grèce. Philippe II triomphe des cités coalisées à Chéronée en 338. Il se montre généreux envers Athènes: la cité conserve son autonomie, mais doit entrer dans la ligue de Corinthe, qui regroupe toutes les cités grecques sous hégémonie macédonienne.

L'Athènes hellénistique et romaine
Après la mort d'Alexandre et une tentative malheureuse de révolte (la guerre lamiaque), les Athéniens doivent, en 322, accepter d'Antipatros une garnison macédonienne et une Constitution oligarchique qui contraint les plus pauvres d'entre eux à l'exil. Dès lors, tiraillée entre les successeurs du Macédonien et caressant toujours le vain rêve d'une vengeance, Athènes n'est plus que l'ombre de ce qu'elle avait été. Le centre de gravité du monde grec, d'ailleurs, s'est déplacé vers les provinces orientales récemment conquises, et l'activité économique de la cité a décliné. Même la création littéraire s'affaiblit, et seule la comédie de mœurs reste vivante, avec Ménandre. En revanche, Athènes, où se développent les écoles épicurienne et stoïcienne, demeure le centre le plus actif de la pensée philosophique.

Les derniers feux d'Athènes
Lorsque, après la défaite de Persée à Pydna en 168, l'hégémonie de Rome se substitue à celle de la Macédoine, Athènes retrouve quelque vitalité (les Romains, en particulier, lui donnent Délos, et le Pirée tire encore profit de la destruction de Corinthe, en 146). Elle périclite, cependant, dès le Ier siècle (pillage par les troupes de Sylla en 86) et si elle bénéficie de la paix romaine et reste une cité libre et fédérée, les honneurs dont la comblent les empereurs - après les souverains hellénistiques - sont inversement proportionnels à sa faiblesse réelle. Ils témoignent cependant de l'immense prestige que conserve la cité qui domina la Grèce.

Malgré la menace des Barbares (destruction par les Goths et les Hérules au III e siècle apr. J.-C., incursions d'Alaric à la fin du IV e siècle), malgré le triomphe du christianisme devenu religion d'Etat, la cité d'Athéna reste un centre intellectuel et un pôle d'attraction pour les jeunes Grecs et les Romains fortunés. Son université ne fermera qu'en 529 après J.-C., lorsque Justinien imposera la disparition de toutes les écoles philosophiques.
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Delphes


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Le temple d'Apollon


Histoire
A partir du VII e s. av. J.-C., la ville dut son importance à l'oracle d'Apollon, qui se manifestait par l'intermédiaire de la Pythie: cette femme, assise sur un trépied installé au-dessus d'une crevasse d'où sortaient des vapeurs, rendait des oracles en termes incohérents; les prédictions étaient ensuite «interprétées» par des prêtres et présentées sous la forme de conseils. Les chefs d'Etat comme les simples particuliers consultaient l'oracle, qui joua un rôle important dans les orientations politiques des cités grecques et de leurs colonies, dont il semble avoir favorisé l'expansion. Les jeux Pythiques, célébrés tous les quatre ans, combinaient les épreuves athlétiques et les concours musicaux. Delphes, qui était le siège d'une importante amphictyonie, vit son influence diminuer au IV e s. à la suite des guerres sacrées. Attaqué par les Celtes en 279 av. J.-C., dépouillé ensuite par Sylla, Néron et les empereurs chrétiens, le sanctuaire ne joua plus guère de rôle sous la domination romaine.

Archéologie
Delphes est l'un des plus importants centres archéologiques de la Grèce. L'exploration du site commença en 1838 avec l'architecte français Laurent; elle fut reprise par les Allemands Müller et Curtius. Les fouilles systématiques furent entreprises par l'Ecole française d'Athènes, à partir de 1892 sous la direction de Théophile Homolle. Considéré comme le nombril de la Terre et le centre de l'Univers, ce fut, parmi les lieux sacrés, le plus prestigieux et le plus rayonnant du monde hellénique.

Les origines du culte remontaient au moins à l'époque mycénienne, et Apollon, dieu olympien, ne put s'y établir qu'après avoir tué le dragon Python, souvenir d'une ancienne divinité chthonienne, préhellénique. Accrochée sur les flancs du Parnasse, dans un site d'une grande beauté, la zone cultuelle comprenait le sanctuaire principal d'Apollon Pythien et, en avant de celui-ci, le sanctuaire d'Athéna Pronaia (la «gardienne du temple»), au lieu-dit Marmaria (environ 1,5 km). Ce sanctuaire comportait plusieurs monuments: l'ancien (VI e s. av. J.-C.) et le nouveau temple d'Athéna (IV e s.), la célèbre tholos en marbre (rotonde avec péristyle dorique à vingt colonnes, dont trois ont été remontées), belle construction classique (début IV e s.), et deux trésors, dont celui de Marseille, de style ionique (VI e s.). Près de Marmaria se trouvait le gymnase (IV e s.), avec sa piste et sa palestre; entre les deux sanctuaires, la fontaine Castalie, aménagée dans la gorge des Phédriades. Le sanctuaire d'Apollon était entouré d'une enceinte (VI e et IV e s.), de forme quasi rectangulaire. L'entrée principale, au sud-est, donnait accès à la Voie sacrée, qui décrivait deux virages avant d'atteindre le temple.

De part et d'autre de ce cheminement s'entassaient des trésors, des édifices commémoratifs, des ex-voto, des offrandes (statues, objets en marbre, en bronze, en or, isolés, dressés sur des colonnes ou des piliers, ou alignés sur des bases). Parmi les monuments les plus célèbres, les trésors archaïques (fin VI e s.) de Siphnos et de Sicyone, sur le premier tronçon, et après le premier virage, au «carrefour des Trésors», le fameux trésor des Athéniens, aujourd'hui reconstitué, construit après la victoire de Marathon (490). En face, le trésor des Cnidiens et la rue conduisant au trésor de Cyrène, tous deux du IV e s.

A côté du trésor des Athéniens, le bouleutérion et, derrière, le sanctuaire de la Terre et le rocher de la Sibylle (témoins de cultes primitifs). Après la «place de l'Aire», circulaire, la Voie sacrée contourne l'angle sud-est de la terrasse du temple. Contre le mur de soutènement, magnifique construction en appareil polygonal (VIe s.) couvert de plus de 800 inscriptions (actes d'affranchissement, II e s. av.-I er s. apr. J.-C.), s'appuyait le portique des Athéniens, édifié après les guerres médiques, pour abriter les trophées pris aux Perses. La Voie sacrée grimpait ensuite jusqu'au «carrefour des Trépieds», où s'élevaient le trépied de Platées, en or (victoire sur les Perses, 479), et la série des offrandes des tyrans de Syracuse. Face à l'entrée du temple subsistent encore les ruines de l'autel construit par les Chiotes (début V e s.).

Le temple d'Apollon, dont on voit quelques colonnes, est celui du IV e s. qui remplaça le célèbre temple des Alcméonides de la fin du VI e s. Il abritait la salle de l'omphalos, où officiait la Pythie. Derrière la terrasse du temple, on peut accéder par un escalier au théâtre, encore bien conservé (IV e s.), qui pouvait contenir environ 5'000 personnes, et qui forme l'angle nord-ouest du sanctuaire. Dans la partie nord-est se trouvaient plusieurs petits sanctuaires et la lesché des Cnidiens (v. 450), renommée pour les peintures de Polygnote qui ornaient ses parois. En sortant de l'enceinte par la porte du théâtre, on atteint, sur la hauteur, le stade, l'un des mieux conservés de la Grèce (IV e s.). Il pouvait accueillir jusqu'à 7'000 spectateurs.

Le musée de Delphes
Le musée de Delphes est l'un des plus intéressants de Grèce. Il offre de nombreux chefs-d'œuvre, particulièrement dans le domaine plastique: les frontons du temple des Alcméonides, la décoration des trésors de Siphnos, de Sicyone et de Cnide, les métopes du trésor des Athéniens et, pour la statuaire, le groupe archaïque de Cléobis et Biton, le fascinant aurige en bronze (v. 470), la belle colonne aux acanthes (v. 330), le sphinx ailé des Naxiens (milieu du VI e s.), le groupe de Daochos (336-332), et le célèbre Antinoüs en marbre (II e s. apr. J.-C.).
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:34

Mycènes


Grèce antique ANT_GRE_48
Masque d'or
Masques d'or de tombes royales de Mycènes


Situation géographique
Ville du Péloponnèse juchée sur une acropole rocheuse dominant la plaine de l'Argolide, Mycènes a donné son nom à la brillante civilisation qu'a connue la Grèce à l'âge du bronze. Les Mycéniens appelés «Achéens» par Homère dans l'Iliade sont, à l'origine, des tribus indo-européennes qui envahissent la péninsule des Balkans vers 2000 av. J.-C. Peuple guerrier et féodal, ils s'installent à Argos, Mycènes, et Tirynthe où ils construisent des enceintes fortifiées.

Par l'intermédiaire des Cyclades, les Mycéniens découvrent vers 1600 av. J.-C. la culture minoenne, comme en témoignent les objets trouvés dans les sépultures dites «tombes du cercle B», creusées dans le rocher à l'extérieur des murailles de Mycènes. Les Mycéniens ne tardent pas à lancer des expéditions maritimes contre les Crétois et c'est à eux qu'on attribue vers 1400/1450 la disparition de la civilisation minoenne. Néanmoins, il est probable que la grande éruption volcanique qui dévaste à la même époque l'île de Santorin a dû également contribuer à ce déclin. Avec la ruine de la civilisation crétoise et l'essor des Mycéniens, le centre d'activités de la mer Egée se déplace vers les palais de la Grèce continentale.

Une organisation palatiale
A l'époque mycénienne, la Grèce est formée de plusieurs royaumes indépendants. A Tirynthe, non loin de Mycènes, s'élève un palais fortifié et doté de casemates. D'autres édifices semblables se dressent à Pylos (sur la côte ouest du Péloponnèse), à Athènes sur l'Acropole, à Thèbes et dans le nord jusqu'à Iolcos (en Thessalie). Ces constructions luxueuses sont occupées par les classes dirigeantes, tandis que les agriculteurs et les artisans vivent dans les villages avoisinants. Rien ne prouve que de véritables villes existaient alors en Grèce continentale.

L'écriture
Pour établir leurs inventaires et tenir leur comptabilité, les rois mycéniens se servent d 'une écriture syllabique appelée «linéaire B». De nombreuses tablettes en argile utilisant ce langage ont été retrouvées dans un magasin du palais de Pylos, juste avant la Première Guerre mondiale; d'autres ont été mises au jour à Cnossos, Mycènes, Tirynthe et Thèbes. Cette écriture, déchiffrée en 1953 par le Britannique Michael Ventris, est en fait une forme ancienne du grec.

Une cité prospère
Mycènes, «surtout riche en or» selon Homère, est un centre économique et artistique très actif. Heinrich Schliemann mit au jour, en 1876, dans un ensemble de tombes dites «à fosse» («tombes du cercle A»), construites par les seigneurs mycéniens à l'intérieur des murailles, un trésor archéologique composé de bracelets et de masques en or, de tables de jeu en ivoire, d'épées incrustées et d'autres objets précieux; jamais dans l'ère égéenne on n'avait découvert autant de richesses.

Un artisanat actif
La richesse de Mycènes provient également du travail de ses agriculteurs et de ses artisans, comme en témoigne l'abondance de leurs productions. Les archéologues ont trouvé des poteries mycéniennes en Egypte, dans de nombreuses localités de la côte syrienne, dans le sud de l'Italie, en Sicile, et des objets en métal dans des lieux aussi éloignés de la Grèce que le Wessex, en Angleterre. Les tombes mycéniennes ont, pour leur part, livré d'importantes quantités d'ambre, qui était acheminé, à travers l'Europe centrale, du littoral de la Baltique jusqu'à l'Adriatique.

Un peuple de guerriers
La prospérité de la Grèce mycénienne repose aussi sans doute sur les razzias qu'effectuent les guerriers mycéniens à l'étranger. Une de ces expéditions, dirigée contre la forteresse de Troie, va constituer la trame des poèmes homériques. Il est difficile de se fier aux récits - rapportés des siècles plus tard - des héros de l'époque troyenne pour obtenir des renseignements précis sur l'époque mycénienne, mais les données archéologiques montrent que les guerriers mycéniens étaient bien équipés en armes, en armures et en chars. Selon certaines chroniques hittites d'Asie Mineure, les Egéens seraient souvent venus perturber la vie des régions côtières.

Des réalisations architecturales brillantes
Après 1440, les deux grands types de réalisations architecturales de la civilisation mycénienne sont les palais et les tholoï, tombes à coupole construites en pierres équarries et auxquelles on accède par un couloir. La plus célèbre d'entre elles, dite «trésor d'Atrée», se trouve à Mycènes. Les palais grecs, quant à eux, sont organisés - contrairement aux édifices crétois - autour d'un «mégaron», grande pièce à foyer central comportant un porche à colonnade. Cette disposition est sans doute à l'origine du plan du temple grec.

La fin de la civilisation mycénienne
Après 1300, la puissance mycénienne connaît un certain déclin. Le palais de Pylos, détruit avant l'an 1200, ne sera jamais reconstruit. Les seigneurs de Mycènes, d'Athènes et d'autres villes consolident en hâte leurs enceintes et construisent des passages secrets pour accéder aux sources d'eau potable. On tente même de fortifier l'isthme de Corinthe, mais cette défense se révèle vaine, car Mycènes tombe vers 1150. L'écriture et les arts complexes qui s'étaient développés dans l'orbite des palais mycéniens disparaissent. La Grèce se dépeuple: les hommes se cachent dans les villages de montagne ou se nomadisent; seules quelques bourgades restent habitées.

Selon l'hypothèse la plus vraisemblable, cet effondrement s'expliquerait par une suite d'incursions et d'expéditions menées par les peuples barbares hellénophones qui vivaient sur la frange balkanique du monde mycénien. Ces envahisseurs, que l'on appellera plus tard les Doriens, repoussent une partie des Mycéniens vers les côtes de l'Asie Mineure et jusqu'à Chypre. Ils occupent ensuite une grande partie de la Crète et des îles voisines, gagnant même Rhodes et le sud-est de l'Asie Mineure.

L'héritage mycénien
Avec la fin du monde mycénien, la Grèce retombe dans un état de barbarie proche de celui qu'elle avait connu vers l'an 2000 av. J.-C. Mais, elle ne perd pas pour autant tout l'acquis de cette civilisation. La céramique, par exemple, après une période de décadence, évolue du style mycénien vers le proto-géométrique qui annonce l'art grec classique. Les tablettes en linéaire B nous apprennent que l'époque mycénienne vouait déjà un culte aux principaux dieux qui formeront le panthéon grec: Poséidon, Dionysos ou Athéna. Elles mentionnent également des esclaves du nom d'Hector, comme le personnage de l'Iliade, mais la tradition épique n'en est probablement encore qu'à ses premiers balbutiements.

Ainsi, les bouleversements qui interviennent à la fin du bronze récent font disparaître de Grèce les formes d'expression artistique les plus élaborées, mais il subsiste une base sur laquelle les Grecs vont édifier leur culture: sans la civilisation mycénienne, le monde grec classique n'aurait probablement jamais vu le jour.
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:35

Olympie


Grèce antique ANT_GRE_26
Le sanctuaire d’Olympie


Histoire
Olympie en grec Olumpia , aujourd'hui Olimbia. Village de la Grèce, au pied du mont Kronion, au nord-ouest du Péloponnèse (Elide), qui s'est développé à proximité des ruines du célèbre sanctuaire voué au culte de Zeus Olympien.

Grand centre religieux de la Grèce antique, l'un des quatre sanctuaires panhelléniques, Olympie vit la prédominance du culte de Zeus après l'arrivée des Doriens (début du Ier millénaire av. J.-C.). Les anciens Grecs situaient en effet à Olympie la victoire de Zeus en lutte contre son père Cronos. A ce premier mythe s'ajoute cependant un second, celui de Pélops, fils de Tantale. Onomanos, roi de Pisa, en Elide, savait par un oracle qu'il serait tué par son gendre. Aussi imposait-il aux prétendants de sa fille Hippodamie de disputer avec lui une course de chars où le vaincu était exécuté. Comme il possédait une paire de juments que le dieu Arès en personne lui avait offertes et qui étaient douées d'une rapidité surnaturelle, il sortait toujours vainqueur de ce concours, et douze prétendants avaient déjà payé leur audace de leur vie lorsque Pélops, chef des Achéens, se présenta. Il séduisit le cocher d'Onomanos, Myrtilos, qui s'arrangea pour qu'une roue du char de son maître se détachât du moyeu durant la course. D'après une autre version de ce mythe, Pélops ensorcela par un maléfice les chevaux d'Onomanos qui s'emballèrent et se précipitèrent dans un ravin. Pélops, vainqueur, tua le roi et conquit ainsi à la fois la main d'Hippodamie et la souveraineté de Pisa.

Plus tard, Héraclès aurait organisé à Olympie les premiers Jeux en l'honneur de Pélops. C'est cet ensemble de mythes que l'ensemble des cités grecques décidèrent de célébrer à partir de 776 av. J.-C. en instaurant les jeux Olympiques. L'administration du sanctuaire et la présidence des Jeux furent d'abord assumées par la cité de Pisa, au nom de la confédération des seize villes d'Elide. En 471 av. J.-C., Pisa perdit cette fonction au profit d'Elis, qui fut alors reconnue suzeraine d'Olympie grâce à l'appui de Sparte. Les démêlés d'Elis avec ses voisins d'Arcadie et même avec Sparte, au cours des V e et IV e siècles av. J.-C., n'empêchèrent jamais la célébration régulière des fêtes.

Gouvernée par des princes habiles, la cité sacrée d'Olympie se constitua peu à peu grâce à la générosité d'une clientèle de villes et de princes. Les fêtes périodiques qui accompagnaient la célébration des cultes firent de ce lieu le rendez-vous de tout le monde grec, où, à la faveur d'une trêve sacrée, les différentes cités oubliaient un instant leurs discordes et l'hellénisme prenait conscience de son unité.

Enrichi de nombreux monuments et offrandes par la dévotion des fidèles, le sanctuaire - qui connut son apogée aux VI e et V e s. av. J.-C. - devint un véritable musée où chaque peuple grec retrouvait les souvenirs et les archives de son histoire. Olympie fit même fonction de centre diplomatique où se réglaient les affaires des particuliers et des Etats. La célébrité des concours, la solennité de la foire tenue dans le voisinage du sanctuaire, maintinrent jusqu'au déclin du monde païen la tradition du pèlerinage olympique et en firent un congrès cosmopolite d'amateurs et de curieux.

En 342 av. J.-C., le sanctuaire passa sous l'autorité des Macédoniens, puis, au II e s. av. J.-C., sous celle des Romains. Olympie, dont le déclin était alors incontestable, connut encore un dernier éclat avec les largesses des souverains hellénistiques (Philippe II fit construire le Philippeion) et des empereurs romains ( Néron et Hadrien), mais après le III e siècle, le site n'eut plus aucun rôle politique ou religieux. La foule accourait aux fêtes, curieuse, mais sceptique et irrespectueuse. Les Jeux furent arrêtés en 394 et les sanctuaires fermés (édit de Théodose Ier); après la destruction des temples païens ordonnée par Théodose II (426) le site, en ruines, fut abandonné.

Archéologie
Dès 1723, un savant français, dom Bernard de Montfaucon, puis le cardinal Quirini, archevêque de Corfou, s'intéressèrent à l'exploration d'Olympie. Ces premières études furent relayées par celles de l'historien allemand Johann Joachim Winckelmann. Des premières fouilles furent faites en mai 1829 par les membres de la Commission de Morée, Blouet et Dubois, mais ce furent des savants allemands qui reprirent le projet de fouilles scientifiques plus complètes : Ernest Curtius gagna à cette cause son élève, le prince impérial Frédéric (le futur empereur Frédéric III), ainsi que l'empereur Guillaume I er . En 1875, un traité ratifié par le Parlement grec autorisa l'Allemagne à faire les dépenses des fouilles qui, après Curtius (1874), furent reprises jusqu'en 1881 par W. Dörpfeld et E. Kunze. De nouveaux chantiers de fouilles furent réouverts en 1936, puis à partir de 1951 (découverte du Léonidaion - vaste édifice, élevé vers la fin du IV e siècle av. J.-C., grâce aux libéralités du Naxien Léonidas, pour y loger les invités de marque -, déblaiement du stade); ces travaux ont mis au jour la plupart des monuments et livré d'innombrables bronzes géométriques et archaïques et des statues (dont le célèbre Hermès de Praxitèle).

L'ensemble des édifices désigné sous le nom général d'Olympie, ne constituait pas une ville. C'était un vaste sanctuaire où les temples et les autels de diverses divinités se trouvaient réunis sous les suzerainetés spirituelles de Zeus et temporelle de Pisa, puis d'Elis. L'enceinte sacrée, l'Altis, renfermait plusieurs temples, d'anciens lieux de culte, des autels, et toutes les offrandes (trésors, pour la plupart offerts par des cités coloniales, trophées, statues, monuments commémoratifs, stèles, etc.). A l'extérieur de l'Altis se trouvaient les édifices civils: le bouleutérion (siège du sénat olympique, VI e -II e s. av. J.-C.), le prytanée (réfectoire des hôtes officiels, V e s. av. J.-C.), etc. Parmi les temples, le plus vaste et le plus fastueux était le temple dorique de Zeus Olympien (468-465 av. J.-C.), tandis que l'Héraïon était le plus ancien, l'un des tout premiers temples grecs construits en pierre (fin VII e -début VI e s.). La cella de l'Olympieion contenait la célèbre statue de Zeus, sculptée par Phidias (vers 430 av. J.-C.), la statue de culte la plus renommée de l'Antiquité. Emportée à Constantinople, elle fut détruite dans un incendie en 475 apr. J.-C.
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:36

Sparte


Sparte ou Lacédémone, en grec Spartê, ou Lakedaimôn. Ville grecque du Péloponnèse, située sur l'Eurotas, dans la plaine de Laconie, entre le Taygète et le Parnon.

Sparte fut, avec Athènes, l'un des deux grands centres politiques de l'histoire grecque. Occupée depuis le début de l'époque mycénienne, la région de Sparte fut décrite par Homère comme un puissant royaume, gouverné par Tyndare, puis par son beau-fils Ménélas. Il existe pourtant peu de certitudes concernant l'histoire de Sparte avant le IV e siècle av. J.-C., du fait du manque d'inscriptions et de l'absence d'ouvrages écrits sur leur cité par des Spartiates. La plupart des informations que nous possédons aujourd'hui proviennent d'auteurs antiques comme Hérodote ou Xénophon, qui étaient des admirateurs de la cité lacédémonienne et qui ont contribué à forger le «miracle spartiate» d'une cité militaire et égalitaire à la fois.

La naissance de Sparte
A une époque reculée, les Achéens habitaient au sud de la future Sparte, dans les bourgs d'Amyclées et de Thérapné. Après l'invasion dorienne au XII e siècle av. J.-C., la cité historique de Sparte fut constituée par synœcisme au IX e siècle (réunion de quatre ou cinq bourgades doriennes). Elle soumit d'abord la Laconie et s'assura un débouché maritime à Gythéion, puis annexa la riche plaine de Messénie, dont elle asservit la population au cours des deux guerres de Messénie (fin VIIIe puis seconde moitié du VII e siècle). Elle participa peu au mouvement de la grande colonisation, mais fonda cependant la colonie de Taras (Tarente), dans le sud de l'Italie, vers 700 av. J.-C., et sans doute quelques autres autour de la Méditerranée (Théra et Mélos en mer Egée, d'autres en Libye).

Au cours du VII e siècle, Sparte connut un brillant essor et devint le centre intellectuel du dorisme ; elle accueillit des artistes et des poètes (Alcman, Tyrtée, Terpandre) et vit fleurir la danse, la musique, le chant choral, les arts du bronze et de la céramique. Mais, au lendemain de la seconde guerre de Messénie, la cité se replia sur elle-même et commença à adopter les lois attribuées par la tradition à Lycurgue. La guerre de Messénie ayant largement étendu le territoire dominé par les Spartiates, de nouveaux lots (kleroi) furent attribués aux citoyens. C'est alors que serait apparu le souci de l'égalité au sein du peuple (démos), les Spartiates devenant dès lors des «égaux» (homoioi).

Sous l'instigation de l'éphore Chilon, Sparte s'efforça de perpétuer ses structures sociales, refusant toute innovation, s'affirmant xénophobe et allant même jusqu'à déconsidérer les activités artisanales et artistiques. Cet immobilisme, unique dans l'histoire grecque, était dû en grande partie à un raidissement de l'attitude des aristocrates, qui, toujours moins nombreux par rapport à la population, se sentaient menacés dans leurs prérogatives. Les Spartiates se firent alors les champions des régimes oligarchiques et conservateurs, et combattirent souvent les tyrannies et les Etats démocratiques.

L'Etat spartiate et ses institutions
La division de la société lacédémonienne peut s'expliquer par l'histoire même de la cité, fondée sur la puissance militaire de sa phalange hoplitique, et par l'imposition d'un ordre qui n'hésitait pas à recourir à la terreur.

Les trois classes
La société spartiate comprenait trois classes : au sommet, le petit nombre des citoyens, les homoioi («égaux») ; descendants des conquérants doriens, ils avaient le monopole du pouvoir et consacraient l'essentiel de leur existence à la vie militaire ; au nombre de plusieurs milliers au moment des guerres médiques, ils ne furent plus que sept cents au milieu du IV e siècle av. J.-C. (Ce sont eux les véritables Spartiates, le terme de Lacédémoniens désignant en grec ancien les habitants de l'Etat spartiate par opposition à ceux de la ville même.)

Les Spartiates formaient une société égalitaire de type communautaire (repas pris en commun, casernes pour les citoyens de vingt à trente ans), dans laquelle les citoyens étaient pris en charge par l'Etat dès leur enfance. Ils subissaient une première sélection à leur naissance : les plus faibles et les difformes étaient éliminés. A l'âge de sept ans, ils quittaient leur famille pour recevoir une éducation de caractère militaire (agogê). Cultivant surtout les vertus viriles, l'endurance et la bravoure, au détriment des activités intellectuelles, les jeunes Spartiates, étaient soumis à des entraînements sportifs et à des exercices physiques intensifs, qui avaient pour but avant tout de développer leurs qualités guerrières ; les jeunes filles également subissaient un entraînement physique et participaient aux épreuves sportives.

Au-dessous des citoyens, les périèques, hommes libres, habitants des campagnes environnantes, s'adonnaient surtout aux activités artisanales et commerciales, interdites aux homoioi.

Au bas de l'échelle sociale, les hilotes descendaient probablement des populations asservies (Achéens) ou conquises (Messéniens) ; ils appartenaient à l'Etat et étaient chargés de cultiver les terres des Spartiates, auxquels ils devaient payer une redevance annuelle. Ils étaient maintenus dans un état d'asservissement politique absolu, n'avaient le droit de se vêtir que de haillons, tel le fameux bonnet en peau de chien, et étaient les victimes de la cryptie, sorte de rite de passage consistant en une chasse aux hilotes pratiquée par les jeunes Spartiates. Thucydide raconte même un massacre massif d'hilotes durant la guerre du Péloponnèse : les Spartiates ayant peur d'une révolte déclarèrent vouloir affranchir ceux des hilotes qui étaient prêts à combattre les Athéniens ; les deux mille hilotes qui acceptèrent l'offre furent considérés comme les meneurs d'une éventuelle rébellion et disparurent purement et simplement (Histoire de la guerre du Péloponnèse).

Le modèle de l'oligarchie
Sparte avait un système de gouvernement unique en Grèce. Elle conciliait une double monarchie, héréditaire (un roi issu de la famille des Agides, l'autre de celle des Eurypontides), dont le pouvoir se limitait au domaine religieux et militaire, avec un régime fondamentalement oligarchique. Celui-ci était incarné par la gerousia, sorte de conseil des Anciens composé de trente membres (les deux rois et vingt-huit gérontes, choisis parmi les citoyens de plus de soixante ans). Enfin, les éphores (surveillants) étaient élus chaque année par le peuple ; ces magistrats exerçaient un droit de contrôle sur tous les citoyens, y compris sur les rois. L'assemblée du peuple (apella), qui comprenait tous les citoyens de plus de trente ans, n'avait que des pouvoirs réduits.

L'apogée et le déclin
Forte de sa puissance militaire, Sparte intervint de plus en plus fréquemment dans les affaires helléniques. A la tête de la ligue du Péloponnèse, elle imposa bientôt sa prééminence à toute la péninsule. Elle ne participa qu'avec réticence à la première guerre médique, mais accepta le commandement des forces grecques durant la deuxième phase du conflit. Ayant abandonné les profits de la victoire aux Athéniens, les Spartiates se replièrent sur le Péloponnèse, où ils durent défendre leur suprématie face à leurs anciens coalisés (Tégée, Elis), et surtout face à Argos, soutenue par Athènes, puis mater une révolte des hilotes de Messénie (464-458). Mais Sparte ne pouvait éviter tôt ou tard de se heurter à la politique impérialiste d'Athènes. Durant la longue guerre du Péloponnèse qui opposa les deux grandes cités (431-404), Sparte apparut souvent comme la seule puissance garante des libertés grecques.

La victoire de Lysandre sur Athènes permit à Sparte d'exercer son hégémonie sur l'ensemble du monde grec : elle installa partout des régimes oligarchiques sous la surveillance de gouverneurs spartiates (harmostes), vainquit une coalition d'Athéniens, de Corinthiens, de Thébains et d'Argiens à Coronée (394), et s'assura l'appui des Perses par la paix d'Antalcidas (386). Les victoires du Thébain Epaminondas à Leuctres (371), puis ses campagnes en Messénie et en Arcadie mirent fin à l'hégémonie lacédémonienne en abattant la suprématie militaire spartiate. Minée par la corruption, affaiblie par un grave manque de citoyens, Sparte ne joua plus dès lors qu'un rôle historique secondaire. Les réformes d'Agis IV et de Cléomène III (IIIe siècle av. J.-C.) pour rétablir l'ordre intérieur - redistribution des terres, suppression des éphores, intégration de périèques parmi les citoyens, libération de milliers d'hilotes - ne lui offrirent qu'un court répit. Battue à Sellasie (222) par les Achéens et les Macédoniens, Sparte passa sous la coupe de tyrans, puis fut occupée par les Etoliens (192), avant d'entrer dans la ligue Achéenne (188 av. J.-C.). Sous les Romains, Sparte eut le statut de ville libre et fédérée. Elle connut alors une certaine prospérité, jusqu'aux invasions barbares. Les ruines de l'antique Sparte se trouvent aujourd'hui près du bourg de Magula.
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Les colonies grecques


Grèce antique ANT_GRE_023


L'expansion coloniale
Les causes de l'émigration qui, en un peu moins de deux siècles, aboutit à la création d'établissements grecs sur tout le pourtour de la Méditerranée, de la Propontide à la Gaule, sont, d'une part, la sténochoria («exiguïté des terres») et, d'autre part, les nécessités d'un commerce renaissant, comme le prouvent les premiers comptoirs grecs: Al-Mina, en Orient, dès 800, les îles Pithécusses, non loin de l'Etrurie riche en fer, vers 775, en Occident. Apoikia, traduit conventionnellement par «colonie», signifie simplement «émigration» et se révèle tout à fait étranger aux notions de dépendance et de complémentarité économiques qui accompagnent la colonie au sens usuel du terme.

Dans tous les cas, les colons partent sous la direction d'un oikiste (qui, à sa mort, fait l'objet d'un culte héroïque); ils chassent ou asservissent les indigènes, ou dans le meilleur des cas (Mégare Hyblaia en Sicile) reçoivent d'eux un territoire. Ils installent alors la flamme emportée du foyer de la cité mère et les dieux garants du succès de l'entreprise (l'Apollon de Delphes, souvent consulté avant le départ, est ainsi honoré sur tous les rivages de la Méditerranée).

Mais, si les liens religieux restent forts entre métropole et colonies, aucune dépendance n'est décelable. Il arrive même que la cité nouvelle l'emporte, plus tard, en puissance et en renommée sur la cité fondatrice (ainsi connaît-on mieux Syracuse que Corinthe).

Les premières fondations
A partir de 775, les fondations concernent la Grande-Grèce et la Sicile. Mais, dès le VIIIe siècle avec la Chalcidique de Thrace, le monde grec s'étend vers le nord-est; au VIIe siècle, il gagne la Thrace, l'Hellespont, le Pont-Euxin, ainsi que l'Egypte (où un seul comptoir est concédé aux Grecs: Naucratis) et la Cyrénaïque.

L'origine des colons s'est diversifiée (beaucoup plus de Grecs des îles et d'Asie). Vers l'ouest, les Phocéens commercent en Espagne et en Gaule: en 600, ils fondent Massalia (Marseille). Les colonies ainsi créées constituent souvent de véritables laboratoires d'expériences. Le territoire agricole de certaines fondations (Métaponte) est cadastré en lots réguliers, et cette division des terres en lanières semble avoir dicté l'organisation de la ville en îlots allongés et réguliers (qui préfigurent le système dit «hippodamien», du V e siècle).

Le rayonnement des colonies
Si cette égalité dans la répartition des lots semble voulue au départ (avec une part importante de terres restées collectives), elle est vite perturbée par l'arrivée de nouveaux colons ou par la concentration foncière: au VI e siècle, déjà, les aristocrates de Syracuse portent le nom de gamoroi: «ceux entre qui on a partagé la terre».

Ces premiers cadastrages n'en restent pas moins à l'origine de l'urbanisme grec, et, en bien des domaines, le succès de ces cités, souvent plus vastes et plus riches que celles de Grèce propre, a donné des dimensions imprévues à l'hellénisme. Le prouvent l'importance historique de Syracuse ou de Tarente et le rôle de modèle reconnu par les Grecs aux législateurs des cités coloniales (Zaleucos de Locres ou Charondas de Catane). Le prouvent, plus matériellement encore, les trois aires sacrées de Sélinonte, la terrasse des temples d'Agrigente ou les trois temples magnifiquement conservés de Poseidônia-Paestum.

L'implantation grecque en Italie du Sud et en Sicile
L'implantation grecque en Italie méridionale et en Sicile est le fruit d'un vaste mouvement de colonisation, qui est d'abord le fait des habitants de l'Eubée. Vers 770 av. J.-C., ceux-ci s'installent à Ischia, puis fondent une autre cité à Cumes, en Campanie, en 757 av. J.-C. Mais peu après, les Chalcidiens, autre peuple grec originaire de la vaste presqu'île située au sud de la Macédoine, s'emparent de Cumes et entreprennent la mise en valeur des riches terres volcaniques de la chôra (territoire adjacent qui fait juridiquement partie de la cité). Ils entrent alors en conflit avec les Etrusques voisins, qu'ils arrivent à contenir. Mais le tyran Hiéron de Syracuse anéantit la flotte de Cumes, qui, peu après, est détruite par les Campaniens en 421 av. J.-C.

Par ailleurs, les Chalcidiens ont fondé, à peu près à la même époque que Cumes et Ischia, la cité plus modeste de Naxos, en Sicile. Les Chalcidiens ne sont pas les seuls à coloniser le Sud de l'Italie. En effet, dès 734 av. J.-C., les Corinthiens dirigés par Archias investissent le site sicilien de Syracuse, appelé à devenir la plus puissante des cités de Sicile. Les tyrans successifs de Syracuse, les Deinoménides Galéon et Hiéron I er , Denys l'Ancien et Denys le Jeune l'ornent de monuments imposants. En Italie méridionale, la plus puissante cité est Tarente, fondée par les Lacédémoniens (ou Spartiates).

Conquêtes et rayonnement des cités de Grande-Grèce
A partir du VI e siècle av. J.-C., les côtes de l'Italie du Sud et de la Sicile sont bordées de cités grecques peuplées et industrieuses, tirant profit de la richesse du sol alluvial des plaines côtières; elles attirent une nombreuse émigration grecque, qui peut y pratiquer les mêmes cultures que dans son pays d'origine. Lors de la fondation de toute colonie, un chef est désigné du titre de «fondateur» (oikistès) par la cité d'origine des colons, et joue un rôle essentiel: placé sous la protection des dieux, il permet aux émigrants de surmonter les épreuves.

Une vie intellectuelle brillante qui n'a rien à envier à celle de la Grèce se développe dans les cités de Grande-Grèce. Ainsi, à Crotone, en Sicile, le philosophe et mathématicien Pythagore fonde son école, et joue sur le plan politique un rôle considérable, que son école conserve longtemps après sa mort. Citons aussi la magnificence des monuments (basilique, VIe siècle av. J.-C.; temples d'Héra, de Poséïdon, IVe siècle av. J.-C.; temple de Cérès, fin du IV e siècle av. J.-C.).

La richesse et l'opulence des cités de Grande-Grèce permettent à la fois l'édification de temples grandioses, parfois marqués par l'art phénicien, notamment à Agrigente et à Pæstum, et un rayonnement artistique et intellectuel considérable. Ainsi, les cités de Grande-Grèce sont les vecteurs, en Méditerranée occidentale, de la civilisation hellénique. Foyer d'échanges avec le monde latin, qui prend peu à peu son essor, les cités de Grande-Grèce voient l'apparition des premiers écrivains de langue latine, Livius Andronicus (v. 280-207 av. J.-C.) et Ennius (239-169 av. J.-C.).
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:38

Les Phocéens


Grèce antique ANT_GRE_033_A
Alalia, aujourd'hui Aléria
Comptoir sur la côte occidentale de la Corse

Phocée (Phokaia, en grec ; aujourd'hui Foça en turc) est une ancienne cité grecque d'Asie mineure sur la côte de la mer Egée, dans le golfe de Smyrne (aujourd’hui Izmir en Turquie). Elle a été fondée entre le Xe et le VIIIe siècle av. J.-C. par des Grecs venus de Grèce continentale.



Les textes anciens donnent peu d'indications sur l'origine, les institutions et les cultes de la cité. On dit qu'elle aurait pu être fondée par l'Athénien Philogèène et que sa population aurait été composée d'Athéniens et de Phocidiens (habitants de Phocide, territoire sacré de la Grèce antique). D’après Hérodote, elle est implantée dans la région qui jouit du meilleur climat du monde, adossée à des collines au bord d'une vaste baie bien protégée.



Elle est l'une des cités de la Confédération Ionienne, dodécapole de douze cités grecques d’Asie Mineure, avec Chios, Clazomène, Colophon, Ephèse, Erythrée, Lébédos, Milet, Myonte, Priène, Samos et Téos. Mais ces cités n'ont que des liens très lâches avec leurs voisines, même quand elles sont regroupées en une ligue. Cela les placera en position de faiblesse lorsqu'il leur faudra faire face à des puissances ennemies à partir du VIIe siècle av. J.-C. (Les Lydiens, les Cimmériens, et surtout les Perses de Cyrus II à partir de 546 av. J.-C.).



Ces cités grecques d'Asie Mineure entretenaient des relations commerciales suivies avec leur principal voisin, le riche et prospère royaume de Lydie. Au début du VIIe av. J.-C., alors que des envahisseurs venus du Nord, les Cimmériens, ravageaient la Lydie et le territoire des cités grecques, Gygès le roi de Lydie, mit en œuvre une politique d'alliance et de conquête et Lydiens et Grecs s'unirent pour lutter contre leur ennemi commun. Gygès, trouva la mort au cours d'une bataille mais une fois la paix revenue, les successeurs de Gygès, rétablirent leur royaume et placèrent les cités grecques sous leur tutelle. Celles-ci continuèrent à se gouverner elles-mêmes, mais elles devaient payer un tribut, et fournir un contingent militaire en cas de besoin. D'autre part, les Lydiens furent influencés par la culture grecque.



Ces cités étaient prospères, et leur richesse augmenta encore avec le développement des relations avec les colonies qu'elles avaient créées autour de la Méditerranée. Ainsi, au VIe av. J.-C., Phocée devint la «métropole» (cité-mère) de la colonisation grecque en Méditerranée occidentale. Les Phocéens fondent successivement Massalia (Marseille) en 600 av. J.-C. en Gaule, puis Alalia (aujourd’hui Aléria), un comptoir sur la côte occidentale de la Corse, face à l’Etrurie vers 545 av. J.-C., ainsi que de puissantes colonies en Espagne.



En 546 av. J.-C., Phocée est prise par les Perses et détruite. Les riches familles de la métropole auront eu le temps de fuir et de venir se réfugier dans leurs colonies, contribuant ainsi à leur développement.
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:39

Les citoyens


Grèce antique ANT_GRE_08
Stèle funéraire de Sosinos de Gortyne
Fondeur de bronze Style attique. Dernier quart du 5e siècle avant J.-C. Paris, musée du Louvre


Les citoyens sont des hommes libres, adultes, propriétaires de la terre, détenteurs des droits politiques, ce qui signifie qu'ils participent à la vie commune. Cette participation s'exerce dans les domaines politique, militaire et religieux. Les femmes sont exclues des deux premiers plans ; en revanche elles participent pleinement à la vie religieuse.

Appartenir à la communauté des citoyens exige de répondre à plusieurs critères. Et les critères économiques ne sont pas primordiaux : ainsi la propriété foncière n'est pas une condition pour être citoyen, mais il faut être citoyen pour être propriétaire. On perçoit ainsi le fossé qui peut exister entre celui qui doit exploiter quelques hectares de terre caillouteuse et le grand propriétaire qui utilise de nombreux esclaves. La citoyenneté n'exclut pas les différences sociales : il existe parmi les citoyens des pauvres et des riches. Une fois encore, c'est le cas d'Athènes qui est le mieux connu, et c'est lui qui nous permet de mieux cerner cette appartenance à la communauté des citoyens.

Etre citoyen en Grèce
Un citoyen (politès) à Athènes est avant tout un homme libre soumis à des obligations et des contraintes politiques, religieuses, économiques, sociales et militaires qui le distinguent des autres habitants et lui assurent la suprématie. Ces droits sont avant tout le droit de propriété foncière qu'il ne partage avec personne. C'est la possession de la terre qui, pour partie, fait le citoyen. Mais pour être citoyen, il faut aussi être soi-même fils d'un citoyen et d'une femme elle-même fille de citoyen. C'est une obligation qui confère aux femmes, exclues de la vie politique, une place particulièrement importante dans la cité.

A sa naissance, le nouveau-né est présenté publiquement et inscrit sur le registre du dème. Il peut ensuite suivre les différentes étapes de son éducation jusqu'à l'éphébie : une sorte de service militaire de deux ans - après lequel il devient un véritable politès. Comme toutes les cités grecques, Athènes a été avare du droit de citoyenneté : celui-ci n'est que très occasionnellement accordé. Si bien que le nombre des citoyens n'a cessé de décroître. Il est difficile d'établir ce chiffre avec certitude : on s'accorde sur une estimation d'environ 40'000 citoyens à la veille de la guerre du Péloponnèse. Athènes n'en comptait plus que 25'000 après le conflit.

Le devoir premier du citoyen est, bien sûr, de défendre la cité comme soldat. Encore fallait-il que ses revenus lui permettent l'acquisition de la panoplie : l'équipement lourd du fantassin, l'hoplite. Cela lui permettait d'exercer pleinement ses droits politiques selon les règles de sa cité : à Athènes il siège à l'assemblée (ecclésia) ou au Conseil (boulè), il exerce les magistratures (archonte, stratège, épimélète, etc) ou rend la justice comme membre des tribunaux (héliaste).

Toutes ces activités peuvent lui permettre de recevoir une indemnité (misthos) si ses revenus ne sont pas suffisants. Mais il doit aussi s'acquitter de contributions fiscales éventuelles (eisphora) ; il faut noter que les plus pauvres des citoyens, les thètes, en étaient dispensés. Les plus riches, en revanche, étaient soumis aux liturgies, c'est-à-dire à la prise en charge volontaire de dépenses d'utilité publique, comme le financement de représentations théâtrales ou l'équipement d'une trière.

Les classes censitaires
Les citoyens athéniens - à Athènes au 5 e siècle av. J.-C. - ne sont pas "égaux", ils ne possèdent pas tous le même niveau de fortune, et cet aspect détermine une partie de leurs droits. Les réformes de Solon (archonte en 594 av. J.-C.) qui furent à l'origine de l'évolution démocratique d'Athènes, amenèrent la constitution d'un véritable système censitaire qui permettait en réalité aux plus riches de conserver la haute main sur les magistratures principales, mais donnait une grande importance aux autres citoyens dans les tribunaux et à l'assemblée.

Solon avait divisé la population en quatre classes selon le niveau de fortune, mesuré par la production agricole des terres, exprimées en médimnes (environ 50 litres) de blé :
- les pentasociomédimnes : les plus riches, ils justifiaient de plus de 500
médimnes de revenus,
- les hippeis (cavaliers) : revenu de 300 médimnes,
- les zeugites (possèdent un attelage de bœufs) : revenu de 200 médimnes,
- les thètes : les plus pauvres avec un revenu inférieur à 200 médimnes.

Les deux premiers groupes constituaient les classes privilégiées, celles à qui les magistratures étaient réservées. La richesse pouvait provenir également des gros ateliers artisanaux : fabriques d'armes, bronziers, céramistes. Leurs revenus leur permettaient de financer une trière (et donc de la commander) ou, un peu plus modestement, de s'équiper comme cavalier.

Les revenus des zeugites, essentiellement des paysans moyens, leur permettaient de s'équiper comme hoplites (soldats). Assez vite, le régime démocratique leur ouvrit certaines des magistratures.

Les thètes, la masse des Athéniens pauvres, ne pouvaient, eux, que s'engager comme rameurs dans la marine, et étaient particulièrement attachés aux différentes indemnités versées pour l'exercice de la citoyenneté.

La société athénienne
Les citoyens n'étaient, bien sûr, pas également répartis dans chacune des classes censitaires de Solon. Malgré la faiblesse de la documentation, différentes études ont pu tenter de quantifier l'importance numérique de chaque classe ; toutefois il faut bien avoir à l'esprit qu'il ne s'agit là que d'évaluations et il faut se garder de toute généralisation. Il est nécessaire, à Athènes comme dans les autres cités, de faire la part entre les riches (plousioi) ou les nantis (emporoi), peu nombreux, et les pauvres (pénêtès) ou les démunis (aporoi).

Ces distinctions traversent les catégories juridiques déjà mentionnées, comme citoyens ou métèques. Le statut social ne recouvrait pas nécessairement le statut juridique. Ce qui oppose le mieux riches et pauvres, c'est le travail, l'idée même de travail et les relations de l'individu avec le travail. Ce dernier ne peut être compris comme nous l'entendons aujourd'hui : "le travail en lui-même ne sera pas nécessairement considéré comme bon ou mauvais" (P. Vidal-Naquet) et le citoyen, s'il travaille, le fait pour lui-même, sans devoir se soumettre à un employeur car "la condition de l'homme libre est qu'il ne vit pas sous la contrainte d'autrui" ( Aristote, Rhétorique, I, 9, 1367a). Le pauvre doit travailler, le riche peut s'en passer.

Aussi la hiérarchie sociale est très complexe. La richesse provient d'abord de la terre qui reste pour beaucoup la source primordiale de revenus. Les gros propriétaires fonciers restent peu nombreux et leurs domaines ne dépassent généralement pas quelques dizaines d'hectares. Souvent, ils résident en ville et laissent leur domaine à la gestion d'un régisseur, parfois d'origine servile. C'est en ville d'ailleurs que l'on trouve bien d'autres activités qui viennent en complément, et la distinction paysan/artisan n'est pas si évidente. Quelques groupes se sont enrichis dans des activités lucratives.

On rencontre ainsi les gros artisans (fabricants d'armes, bronziers, céramistes, tanneurs, etc), les loueurs d'esclaves ou de maisons, les commerçants enrichis dans l'aventure maritime : armateurs (emporoi) ou capitaine de navire (naukléroi) et avec eux le petit groupe des financiers et banquiers. S'ils sont citoyens, ils forment les classes supérieures et peuvent exercer les magistratures ; s'ils sont métèques, ils aspirent souvent à obtenir la citoyenneté. La richesse, en effet, donne un poids social et politique considérable. Les riches citoyens peuvent sans difficulté participer aux réunions de l'ecclésia ou assurer les liturgies les plus prestigieuses. Leur nombre est étroit : la liturgie la plus onéreuse, la triérarchie (équipement d'une trière) était réservée à trois cents citoyens à Athènes.

Ces riches Athéniens sont souvent issus des vieilles familles aristocratiques, les génê, et c'est contre leurs privilèges que s'exerce le pouvoir du peuple. Dans celui-ci se reconnaissent les pauvres bien sûr, mais aussi la masse intermédiaire de la « classe moyenne ».

La pauvreté se rencontre à la campagne (petits paysans endettés, ouvriers agricoles), mais également en ville. Elle est décrite par Aristophane dans sa pièce intitulée «Ploutos» (Richesse). Le nombre des pauvres est difficile à évaluer, mais leur poids politique n'est pas négligeable : la démocratie leur vient en aide et compte sur leur intervention par l'existence du misthos ecclésiastikos (indemnité versée pour assister aux réunions de l'assemblée) ou encore par la caisse du théorikon qui offre une indemnité pour assister aux spectacles.

Quant à la « classe moyenne », c'est la masse du peuple composée surtout des petits paysans propriétaires, fermiers et aussi de la foule des boutiquiers (kapéloi) ou petits artisans urbains : ils forment la grande majorité de la population, la masse des zeugites et les plus « riches » des thètes. Ils sont toutefois difficiles à décrire tant la documentation à leur sujet reste encore lacunaire.

La citoyenneté
L es conditions d'accès à la citoyenneté restent, en pleine époque classique, très variables. Les cités oligarchiques n'admettent dans leurs rangs qu'un nombre restreint de «personnes de qualité», généralement détentrices de terres ou d'un certain niveau de revenus; les cités démocratiques dissocient au contraire la qualité de citoyen et la richesse, au grand dam des aristocrates, toujours prêts à critiquer une assemblée du peuple où dominent - cela paraît être le cas à Athènes après la guerre du Péloponnèse - cordonniers, foulons et potiers; bref, les hommes de métier. C'est peut-être cet engagement du citoyen dans la vie économique qui individualise le mieux les cités.

De Sparte - l'exemple extrême -, où le citoyen se consacre tout entier aux affaires de la cité, nourri qu'il est par la rente (apophora) du cléros que lui attribue l'Etat, avec les hilotes chargés de le mettre en valeur, aux cités où, comme à Athènes ou à Corinthe, le travail artisanal est toléré, voire bien considéré, les cités offrent une gamme variée de possibilités: à Thèbes, par exemple, la citoyenneté est liée étroitement à la possession de la terre, et l'exercice d'un métier, s'il dure quelques années, fait perdre les droits civiques.
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:40

Dans les autres cités, le cas de Sparte
Athènes n'est qu'une cité parmi de nombreuses autres. Etre citoyen dans ces différentes cités recoupe bien des aspects de ce qui existe à Athènes, mais il y a aussi de fort grandes différences, même si les droits et les institutions se ressemblent.

Les différences dépendent notamment du type de régime politique. Si les cités démocratiques semblent organisées sur le modèle athénien - on connaît ainsi le cas d'Argos dans le Péloponnèse qui présente bien des traits caractéristiques de la démocratie - de nombreuses autres cités étaient organisées sur un modèle politique tout autre, l'oligarchie. Le mot désigne le pouvoir (archê) d'un petit groupe (les oligoï). En bref, la réalité du pouvoir politique et de son exercice est réservée à une petite partie des citoyens - sans que cela signifie une monarchie ou une tyrannie. L'oligarchie limite l'accès non à la qualité de citoyen, mais à l'exercice des droits politiques, à l'attribution de la citoyenneté (politéia). Dans une oligarchie seuls quelques centaines, au plus quelques milliers d'individus, possèdent ce privilège. Ainsi les constitutions oligarchiques commencent-elles le plus souvent par une formule du genre : « Peuvent participer à la politéia ceux qui ...» ou « la politéia est attribuée à. ».

Parmi les cités oligarchiques célèbres figurent Corinthe, Marseille, Agrigente, Colophon. Mais la plus célèbre d'entre toutes, la plus controversée aussi, c'est Sparte. Elle a même exercé une véritable fascination sur les penseurs de l'époque classique comme Platon ou Xénophon, si bien qu'on peut parler d'un « mirage spartiate ».

Sparte
Bien plus qu'une oligarchie au sens strict, Sparte apparaît comme une cité égalitaire. Sa constitution, la Grande Rhétra est attribuée à Lycurgue, membre légendaire d'une des deux lignées royale de Sparte que l'on fait remonter jusqu'au 10 e ou 9 e siècle avant J.-C.. Il semble pourtant que la constitution de Sparte ne remonte qu'à la fin du 8 e siècle avant J.-C.. La citoyenneté appartient au petit groupe fermé des « égaux » ou « semblables » (Homoioi), qui se sont partagé le territoire en lots égaux, les cléroi. Pour appartenir à ce groupe, il faut être né de parents spartiates et avoir suivi la très particulière éducation spartiate, l'agôgê, totalement prise en charge par l'Etat et dont le but est de former de bons citoyens-soldats, endurcis aux épreuves de la guerre.

Ces citoyens peuvent dès lors participer à l'assemblée du peuple, l'Apella, et à l'élection du conseil des anciens, la Gérousia, qui possède le pouvoir politique réel, ou se faire élire au collège des magistrats, les cinq éphores. Chaque citoyen devait en outre participer régulièrement aux repas pris en commun, les syssities, où chacun devait apporter sa contribution en vin, orge, huile, figues ou fromage. Faute de quoi il tombait dans la catégorie des hypomeiones, les «inférieurs», les «déchus», demi-citoyens qui constituaient une vaste classe intermédiaire entre les citoyens de plein droit et les habitants de la Laconie, privés de droits.

Les cinq éphores étaient élus pour un an parmi les citoyens sans distinction d'âge ou de fortune. Ils avaient des pouvoirs étendus (guerre, armée, police, justice) et présidaient les séances de l'assemblée et du Conseil. Ils étaient des personnages très puissants, mais leur mandat n'était pas renouvelable.

L'Apella avait peu de pouvoir et se réunissait pour entériner les décisions de la Gérousia. Celle-ci était composée, outre des deux rois, de 28 membres élus à vie parmi les Homoioi de plus de 60 ans. Elle exerçait la réalité du pouvoir, proposait les lois, prenait toutes décisions, rendait la justice et contrôlait l'action des rois.

Les deux rois n'ont qu'un rôle religieux et de commandement militaire. La fonction est prestigieuse : ils appartiennent aux deux familles qui, d'après la légende, sont censées remonter à Héraclès ; leur généalogie est liée au mythe du retour des Héraclides, les descendants des enfants d'Aristodème. Parmi les plus célèbres de ces rois se trouvent Léonidas (mort glorieusement aux Thermopyles, en 480 av. J.-C.), Pausanias (accusé de trahison et mort en exil vers 470 av. J.-C.) ou Agis (qui tente de rétablir l'ancienne constitution au 3 e siècle avant J.-C.).

Dans la société spartiate, le reste de la population est composé des périèques et des hilotes. Les périèques (périoikoi) sont ceux qui « habitent autour ». Ils n'ont pas de droits politiques, mais ils sont libres, hilotes affranchis ou réfugiés politiques d'autres cités. Ils vivent de la terre, mais ils sont aussi commerçants ou artisans. A ce titre ils font partie de la communauté lacédémonienne et on les rencontre dans l'armée où ils jouent un rôle non négligeable. Ils forment un véritable « réservoir » de citoyens :le nombre de ces derniers baissant dangereusement, les rois réformateurs du 3 e siècle avant J.-C.. puisent parmi les périèques les nouveaux citoyens qui reconstituent le corps civique. Restent les hilotes, qui appartiennent à la catégorie des « dépendants », des « non-libres ».
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:42

Les femmes


Grèce antique ANT_GRE_15
Stèle funéraire : femme et enfant
5e siècle avant J.-C. Paris, musée du Louvre


L'image traditionnelle de la femme
L'image traditionnelle de la femme en Grèce est celle d'une recluse dans le gynécée, vouée aux travaux domestiques, la maîtresse de la maison, (oikos), celle que l'on représente perpétuellement avec son métier à tisser. Ses attributs sont le panier à laine, la quenouille et le miroir. C'est notamment ainsi que de nombreuses femmes apparaissent sur les vases et les stèles funéraires. Cette vision doit cependant être interprétée avec un certain recul : elle reflète un idéal et pas nécessairement la réalité vécue par les femmes.

Certes, en Grèce, les femmes restent d'éternelles mineures. Elles sont constamment sous l'emprise d'un tuteur, le kyrios, qu'il s'agisse de leur père, de leur mari, de leur oncle, de leur frère ou encore de leur fils. En conséquence leur liberté juridique et administrative est très limitée. Elles étaient exclues officiellement de toute participation à la vie politique de la cité, du débat public comme de l'exercice de fonctions politiques ou de la défense de la cité. Il faut noter cependant que le mot "citoyen" (politès) existe en grec au féminin (politis), mais il est d'un usage tardif et peu fréquent. Malgré tout, les femmes trouvaient de nombreuses occasions, en particulier à Athènes, de s'intégrer à la vie civique : par leur rôle dans la transmission de la citoyenneté, par leur place dans la vie religieuse, et dès la période hellénistique par le rôle public des reines et des citoyennes les plus aisées.

C'est surtout à travers le cas de la femme athénienne "citoyenne" du 5 e siècle avant J.-C. que l'on a envisagé jusqu'ici la situation des femmes grecques. Les textes littéraires et les documents figurés sur la citoyenne athénienne abondent en effet et ont formé cette image de la femme grecque recluse et mineure. Toutefois, l'analyse d'autres types de documents (les inscriptions sur pierre par exemple), d'autres cités (dans le Péloponnèse, en Grèce centrale, en Asie mineure), d'autres époques (le 4 e siècle et l'époque hellénistique) nuance cette image. En matière de statut des femmes citoyennes, Athènes ne constituait probablement pas un modèle pour les autres régions de la Grèce. En revanche, dans l'ensemble de la Grèce, la documentation n'offre rien ou presque sur les femmes métèques et encore moins sur les femmes esclaves.

Fille, femme et mère de citoyen
La situation de la femme à Athènes peut s'apprécier d'abord à travers le mariage et par la place qu'elle occupe dans la maison, l'oikos. C'est d'abord à la fille du citoyen que l'on s'intéresse. Dans le gynécée, la mère va éduquer sa fille pour en faire une future bonne épouse. Elle apprend ainsi à filer la laine, à tisser les étoffes, à diriger les serviteurs. Dans les familles aristocratiques, la fille apprend à lire et écrire et reçoit un enseignement plus poussé en musique et poésie ; c'est une éducation liée en partie à son futur rôle religieux. A Sparte, les filles reçoivent aussi une éducation physique, un peu à l'image de celle des garçons.

Puis vient le temps du mariage ; celui-ci est un acte fondamental, surtout depuis la loi de Périclès de 451 av. J.-C. qui précise que pour être un citoyen il faut avoir un père et une mère citoyens. En général les filles se marient jeunes, dès la puberté - parfois l'engagement peut être conclu dès l'enfance - avec un homme souvent plus âgé. Dans tous les cas, c'est le père de la jeune fille qui conclut l'engagement du mariage. Celui-ci est le statut normal de la femme et son objectif est clairement énoncé : donner des enfants légitimes. Un mariage n'est légal que s'il unit un citoyen à une fille de citoyen ; la stérilité est un motif de divorce (ou plutôt de répudiation de la femme par le mari). La cérémonie du mariage (gamos) conduit à faire changer la femme de maison : elle passe de celle de son père à celle de son époux, lui apportant une dot (proix).

Ce passage est important : la femme devient la maîtresse de la maison du mari, c'est elle qui la gère, aidée de ses servantes sur le travail desquelles elle doit veiller. Quant à la dot, elle ne devient pas la propriété du mari : il n'en a que l'usufruit. En cas de divorce, il doit la restituer.

Cela ne fait pourtant pas de la femme un être juridique complet. Elle n'a pas réellement de droit de propriété, mais elle n'en est pas totalement écartée : elle peut être source de propriété et la transmettre, mais elle n'en a ni la disposition ni la gestion. Afin que les biens ne sortent pas du cercle familial, une fille qui n'a ni frère ni descendants directs et qui devrait hériter des biens de son père (fille épiclère) se trouve obligée d'épouser son plus proche parent. La femme grecque apparaît une fois encore comme une sorte de "sous-citoyen", de citoyen frappé d'incapacité. Toutefois, plusieurs exemples sont rapportés par les sources, dès le 4 e siècle avant J.-C., de femmes - souvent des veuves - qui géraient et administraient leurs biens, parfois considérables. Un décalage existait certainement entre théorie et pratiques.

Les courtisanes
Certaines femmes possèdent une place à part dans la société athénienne, les courtisanes. On désigne sous ce terme, hétaïre en grec, non pas les prostituées, mais certaines femmes indépendantes, des compagnes, des concubines (aussi désignées spécifiquement par le terme pallakaï), vivant sous la protection d'Athéniens, parfois riches, et ayant réussi elles-mêmes à rassembler une fortune quelquefois non négligeable.

Certaines d'entre elles purent jouer un rôle important à Athènes y compris dans le domaine politique, et l'on pense ici à la plus célèbre et sûrement la plus exceptionnelle, Aspasie, la concubine de Périclès. On peut ranger dans cette catégorie les femmes métèques, venues s'établir à Athènes pour toutes sortes de raisons.

Si les plus pauvres sont effectivement des prostituées (pornai), souvent installées au Pirée, la plupart d'entre elles exercent souvent des activités en rapport avec le commerce ; elles peuvent être aussi musiciennes, chanteuses, etc. Elles participent aux banquets, manient l'argent, en bref, femmes libres et indépendantes, elles s'introduisent dans ce « club d'hommes » qu'est la cité et participent pleinement de son évolution.

Les prêtresses
La vie et les pratiques religieuses donnent à la femme grecque toute sa place au sein de la communauté civique. Mais le rôle de la femme dans la religion apparaît tout autant comme un facteur de son intégration à la cité que comme une manière de marquer son altérité et sa complémentarité vis-à-vis des hommes. Ce rôle se joue tout d'abord au sein de la maison, de l'oikos. La femme, comme maîtresse de la maison, rend un culte quotidien à Hestia, la déesse du foyer ; elle tient aussi une place primordiale dans le culte des ancêtres et dans les cérémonies et pratiques funéraires. Les fonctions religieuses de la femme prennent toute leur ampleur au cœur de la cité. Les femmes peuvent être prêtresses et participer activement aux cérémonies religieuses ; certaines cérémonies leur sont même réservées.

Prêtresses
C'est une fonction de grande importance, comparable aux magistratures. Les femmes sont principalement attachées à des divinités féminines comme Athéna, Déméter ou Artémis ; mais cette règle n'est pas absolue. Cette fonction est assurée par les femmes dans des conditions similaires à celles des hommes : à Athènes la prêtresse d'Athéna Nikè est désignée pour un an et perçoit un salaire (misthos) de 50 drachmes, et elle bénéficie de distinctions honorifiques comme la place d'honneur au théâtre. Certaines prêtresses étaient désignées à vie, telle la prêtresse d'Athéna Polias à Athènes. Les prêtresses étaient d'ordinaire des citoyennes "normales", épouses et mères de famille. Toutefois, dans certains cas, plutôt rares, la prêtrise est accompagnée de restrictions concernant la vie sexuelle. A Athènes toujours, l'épouse de l'archonte-roi, la reine, était considérée comme une prêtresse et exerçait un rôle religieux important.

Fêtes, cultes et cérémonies
Les femmes prennent part aux grandes fêtes de la cité. Lors des Panathénées, ce sont des jeunes filles qui sont chargées de la confection du péplos de la déesse (les ergastines) et de son transport vers l'Acropole pendant la procession. Au cours de celle-ci, les femmes portent divers objets du culte (eau, corbeilles, offrandes, etc).

Certaines fêtes leur étaient exclusivement réservées, comme les Thesmophories, célébrées en l'honneur de Déméter Législatrice. Comme l'indique l'adjectif accompagnant le nom de la déesse, cette fête était celle de "l'ordre social" : les épouses légitimes de citoyens pouvaient seules y participer et la cérémonie était présidée par une femme. La fonction civique de la femme, bonne épouse et de mère de citoyen, était ainsi célébrée. Seule la participation de toutes les citoyennes à cette fête garantissait la fécondité de la communauté et donc sa survie. A l'opposé, lors de certaines fêtes comme les Dionysies ou les Adonies, ce sont plutôt les femmes marginales qui étaient concernées. Les Adonies permettaient aux concubines, courtisanes et femmes métèques de côtoyer les hommes athéniens ou étrangers. Célébrées dans la "chaleur lascive de l'été" (selon les mots de Marcel Detienne), ce sont des fêtes nocturnes propices à des rencontres hors du contrôle familial.
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:43

Les étrangers


Grèce antique ANT_GRE_14
Ulysse et Achille à la cour de Lycomède
Jean-Baptiste Carpeaux (1827-1875) Ulysse et Achille à la cour de Lycomède, 1854 Valenciennes-Musée des Beaux-Arts


Les cités grecques sont confrontées en permanence à l'autre, à celui qui n'appartient pas à la cité, l'étranger (xénos). Mais l'autarcie n'existe pas et les contacts sont constants, les Grecs bougent. Ils sont marins, commerçants et les raisons de voyager sont nombreuses, en particulier les raisons religieuses : consultation d'oracles, concours panhelléniques, pèlerinages, etc. Le contact est donc permanent avec l'autre et la question de l'étranger est importante.

Les pratiques cultuelles et culturelles sont communes entre Grecs, et la conscience d'appartenir à un même peuple est réelle. Mais cela n'empêche pas de ressentir les différences, et ne pas être de la cité où l'on réside, c'est être un xénos.

Les Xénoi
Le xénos est celui qui n'appartient pas à sa cité ; c'est l'étranger, parlant grec bien sûr, mais "qui n'est pas d'ici". C'est le voyageur, l'hôte de passage, c'est aussi celui qui éveille la méfiance et parfois incite au rejet. Les Grecs, pourtant, font preuve depuis longtemps du sens de l'accueil. C'est une loi, une règle, une prescription à caractère religieux, il faut offrir l'hospitalité. Cet accueil se nomme la xénia et elle est placée sous les auspices de Zeus Xénios («Protecteur des étrangers»).

Il convient d'accueillir l'étranger de passage, lui offrir le gîte et le couvert. C'est une pratique fort ancienne que l'on rencontre dès les poèmes homériques : on se souvient par exemple de l'arrivée d'Ulysse en Phéacie. Cette tradition s'inscrit dans ce que les anthropologues ont nommé le don et le contre-don, un engagement de réciprocité qui lie entre eux les hôtes ; c'est une règle sociale très forte.

Les cités ont ressenti la nécessité de mettre au point une institution permettant cet accueil de l'étranger de passage : la proxénie. Un citoyen, résidant dans une cité, devenait le proxène d'une autre cité donnée et se trouvait chargé d'accueillir les membres de cette cité. Il bénéficiait de certains avantages réciproques, mais devait posséder les revenus suffisants. D'où venaient ces xénoi de passage ? Il y avait les hérauts venus transmettre un message, placés sous le patronage d'Hermès, dont ils portaient le caducée (kérykeion). Ils étaient inviolables, au contraire des ambassadeurs. Il y avait les théores, envoyés à travers le monde grec pour annoncer les grandes fêtes religieuses de Delphes, Olympie ou Délos. Il y avait aussi les pèlerins se rendant dans un sanctuaire comme Delphes ou Epidaure.

Certains de ces étrangers ont réussi à obtenir le droit de cité à Athènes, à devenir des citoyens athéniens. Deux conditions étaient indispensables : avoir rendu des services éminents à la cité (politiques, militaires, financiers, culturels) ; obtenir un vote de l'ecclésia avec un quorum de 6'000 votants à bulletin secret. Par ailleurs, le nouveau citoyen ne pouvait accéder ni aux sacerdoces, ni à l'archontat.

Les métèques
Ils constituent un groupe bien particulier d'étrangers à Athènes. Ce sont des hommes libres qui ont reçu le droit de s'installer dans la cité, d'y vivre et surtout d'y exercer une activité économique. La signification du mot est controversée : on y a vu le sens de ceux "qui habitent avec" (de méta «avec» et oikos «maison») on peut lire le mot dans le sens de "celui qui a changé de résidence" (de méta - en changeant).

Quoi qu'il en soit, les métèques devaient être inscrits sur le registre du dème où ils habitaient, payer une taxe, le métoikion, et ils étaient placés sous la tutelle d'un patron, un prostatès, lui-même citoyen. Les métèques étaient en outre soumis aux diverses taxes et impôts (eisphora) ainsi qu'à certaines liturgies (notamment la chorégie, le financement d'un choeur de théâtre).

Les métèques étaient surtout des commerçants, des artisans, des banquiers, des armateurs. Comme parmi les citoyens, il y avait des riches et des pauvres. En tant qu'étrangers ils n'avaient pas accès à la propriété, ni de la terre, ni de biens immobiliers. S'ils en avaient les moyens, ils pouvaient être hoplite, servir dans la flotte, mais ni commandant de trière ni cavalier. De même, ils avaient accès aux tribunaux de la cité et participaient à la religion civique sans toutefois pouvoir exercer de prêtrises ; en particulier ils participaient aux grandes Panathénées comme skaphéphores (porteurs de gâteaux et de miel) ou aux Dionysies. Les métèques pouvaient aussi être initiés aux mystères d'Eleusis. En somme ils faisaient partie de la communauté athénienne sans en posséder tous les droits politiques. Mais leur rôle économique et leur place dans la société étaient sans commune mesure avec cette absence de droits.

Comme pour le reste de la population athénienne, leur nombre reste très incertain. Il devait y avoir environ 25'000 métèques en âge de servir vers le milieu du 5 e siècle avant J.-C.. Ce nombre semble être tombé à environ 10'000 à la fin du 4 e siècle avant J.-C. L'origine des métèques est très discutée : il y avait des Grecs, des xénoi , mais on trouve aussi bien des barbares : Syriens, Lydiens, Phrygiens, etc.

Les "barbares"
Pour les Grecs, le barbare est l'autre absolu. Le mot dériverait d'une onomatopée, "br, br" signifiant une langue incompréhensible. Le barbare est en effet celui qui ne parle pas le grec, celui que l'on ne peut pas comprendre. C'est donc celui avec qui la communication fondamentale et immédiate est impossible, l'étrange étranger. Les Grecs sont entourés de barbares.

A l'origine le mot ne contient pas d'aspect péjoratif, il constate un fait. Mais certains barbares jouent un rôle plus large, celui de l'autre par excellence et le terme se charge dès le 5 e siècle avant J.-C. de connotations négatives, notamment dans le cas des Perses et des Mèdes, à la suite des guerres médiques (490-480 avant J.-C.). On leur reproche non seulement de ne pas parler la langue grecque, mais en plus d'être soumis au pouvoir despotique d'un roi et, plus grave encore, de faire preuve de démesure, hybris, ce qui est contraire à l'esprit, au sens de l'ordre que les Grecs prétendent avoir. Pourtant d'autres barbares, comme les Egyptiens, ne jouent pas le même rôle et sont mêmes considérés avec beaucoup d'intérêt ; l'enquête d' Hérodote en est un bon exemple.

Ces distinctions se renforcent avec l'émergence d'une sorte de conscience chez les Grecs d'appartenir à une communauté culturellement unie, avec ses mœurs, ses coutumes, ses traditions, ses rituels étrangers à ceux des barbares. Avec Isocrate (première moitié du 4 e siècle avant J.-C.) on aboutit à une théorie de l'infériorité naturelle des barbares qu'il faut conquérir. Et Aristote de son côté développe l'idée que les barbares sont faits pour obéir.
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:45

Les esclaves


Grèce antique ANT_GRE_12
Vase à parfum : tête d’Africain
Bronze, 2e siècle après J.-C. Paris, musée du Louvre


L'existence de l'esclavage a longtemps été considérée comme une sorte de tache sur la Grèce ancienne, singulièrement à propos d'Athènes. L'esclavage est en effet, aux yeux des modernes, en contradiction flagrante avec la conception même de ce régime démocratique. De fait, la société grecque, comme toutes les sociétés de l'Antiquité, a pratiqué l'esclavage ou des formes voisines et plus particulières de dépendance. Ce fait peut être constaté quel que soit le type de régime politique de ces sociétés, démocratie, monarchie, oligarchie ou tyrannie.

Dès l'époque mycénienne, et plus encore dans la société des poèmes homériques, nous constatons l'existence des esclaves. Mais c'est au cours de la période classique que l'esclavage prit son plus grand développement. Toutefois, on remarque qu'il n'est pas aisé à cerner, la langue grecque elle-même utilisant un vocabulaire varié, dont le terme le plus fréquent est doulos. Ce fait linguistique indique que les situations de dépendance personnelle recouvrent des aspects fort différents, du pur et simple esclave-marchandise à des situations comparables au servage médiéval. Dans tous les cas, c'est la dépendance personnelle à l'égard d'un maître, l'absence de liberté qui définit l'esclave.

Le cas athénien
On peut s'accorder sur un nombre qui oscille entre 80'000 et 150'000 esclaves à Athènes. En tout cas, il s'agit d'un nombre supérieur au nombre des citoyens. Ce qui impressionne le plus est le fait que les esclaves se rencontrent partout. Les esclaves n'ont aucun droit politique. Ils sont la chose de leur maître, un bien (ktêma) parmi d'autres, ils lui appartiennent et celui-ci fait d'eux ce qu'il veut : les faire travailler, les louer, les vendre. Toutefois il ne possède pas sur eux un droit de vie et de mort et ne peut les maltraiter impunément.

L'esclave n'est pas un « être juridique » : il ne possède rien (hormis un maigre pécule), n'a pas le droit de propriété, ne peut se marier, ne peut pas aller en justice et son témoignage n'est pas recevable. De même qu'il n'a pas de droits politiques, il ne peut généralement pas participer à la guerre, sauf dans quelques cas exceptionnels (valet d'arme par exemple) ; il ne participe pas non plus aux grands rituels religieux de la cité, qui impliquent le corps civique, mais il peut se faire initier aux mystères d'Eleusis. Ce statut se traduit, par exemple, par la quasi-absence des esclaves dans les représentations figurées.

Mais l'esclave est d'abord utile, il remplit un certain nombre de fonctions. Par principe l'esclave est voué aux besoins de son maître. Il travaille en général pour lui, mais il faut souligner qu'il n'y a pas d'activités qui soient spécifiques aux esclaves. Ces derniers pouvaient faire les mêmes choses que des hommes libres. La véritable distinction est dans les conditions de ce travail : l'homme libre pouvait disposer à sa guise de ses revenus, pas l'esclave. Ainsi sur les chantiers de l'Acropole au 5 e siècle avant J.-C. on rencontre autant d'esclaves que d'hommes libres parmi les ouvriers. Cette situation faisait qu'il était impossible de distinguer un esclave d'un citoyen pauvre, ce que déplore d'ailleurs un pamphlétaire antique.

Devenir esclave
Pour faire travailler ou simplement utiliser des esclaves pour ses propres affaires, il fallait se les procurer. Guerre, commerce, razzia et piraterie sont les meilleurs moyens de les obtenir. Tomber en esclavage pouvait être une situation fréquente. La première source d'esclaves est la guerre : les prisonniers sont alors vendus ou deviennent le bien du vainqueur, quel que soit le statut social du vaincu : Les Troyennes d'Euripide s'ouvrent sur les lamentations de la reine de Troie, Hécube, qui, vaincue, se prépare à l'esclavage. Mais on connaît des situations qui permettent aux prisonniers de racheter leur libération.

La guerre n'est pas toujours suffisante. Le commerce, aux mains des Grecs dans ce monde méditerranéen, est une autre manière de faire venir les esclaves : les Grecs les échangent avec les pirates, souvent barbares, qui sillonnent les mers. Un exemple de ce type de razzia est donné par l'écrivain Longus (2 e siècle après J.-C.) dans son roman Daphnis et Chloé. Il raconte l'arrivée brutale des pirates qui raflent hommes et animaux sur le rivage. Les captifs sont ensuite revendus sur les marchés des villes.

Il se peut qu'en Grèce la grande majorité des esclaves aient été des étrangers, surtout des barbares : des Thraces, des Scythes, des Cappadociens, des Noirs. Mais à Athènes, on a connu l'esclavage pour dette. C'est la situation des paysans pauvres de l'Attique à la fin du 7 e siècle avant J.-C., les héctémores : pas complètement esclaves, mais largement dans une dépendance personnelle à l'égard du propriétaire terrien, situation de laquelle découle la crise sociale grave qui mène aux réformes de Solon et plus tard au régime démocratique. La suppression de l'esclavage pour dettes à sans doute conduit au développement de l'esclavage-marchandise.

Des situations variées
Dans les cités, les esclaves remplissent une fonction, ils ont une utilité tant sociale qu'économique, et les citoyens pouvaient faire ce qu'ils souhaitaient de ce "cheptel humain". Le travail était bien sûr la première occupation dédiée aux esclaves. Il ne faut toutefois pas imaginer la grande masse des citoyens comme des oisifs entourés d'une multitude d'esclaves aux petits soins et travaillant pour eux. Un esclave coûte somme toute assez cher ( Xénophon évoque le chiffre de 180 drachmes, alors qu'une drachme représentait le salaire d'une journée de travail d'un ouvrier) et seuls les très riches citoyens pouvaient en posséder beaucoup. Cette position d'oisiveté n'était que l'apanage d'une toute petite portion de la population, détachée de toute préoccupation de rentabilité immédiate.

En réalité, il n'existe pas d'activités qui soient propres aux esclaves. Sauf dans les mines du Laurion (mines d'argent au sud de l'Attique) où la main-d'œuvre servile semblait être prééminente. Une situation bien évidemment plus que pénible en regard du type de travail qui était demandé. Ces esclaves devaient être fort nombreux : Thucydide évoque la « désertion de plus de 20'000 esclaves » au cours de la guerre du Péloponnèse (415-413 av. J.-C.). Tous les esclaves n'étaient pas dans cette situation.

Certains travaillaient sur le domaine de leur maître, comme régisseurs parfois ; certains avaient même accès, au 4 e siècle avant J.-C., aux métiers de la banque (comme le célèbre Pasion dont parle l'orateur Démosthène). Mais la plupart d'entre eux travaillaient dans les boutiques ou les ateliers des commerçants et artisans, parfois dans de véritables entreprises de taille moyenne : la fabrique de boucliers de Lysias - un métèque - employait 120 esclaves !

De même, chaque famille possédait un ou deux esclaves domestiques, voire plus chez les très riches Athéniens. Ici, ils jouent des rôles précis : servantes de leurs maîtresses, nourrices, valets, etc. On rencontre également des esclaves parmi les pédagogues. Il existait aussi à Athènes des esclaves publics, entretenus par la cité comme les 700 archers scythes chargés de la police !

Les autres situations de dépendance
Athènes utilisait donc de nombreux «esclaves-marchandises». Mais il existait d'autres situations de dépendance personnelle. On a souvent parlé de l'esclavage de type hilotique par référence aux hilotes de Sparte. Mais on sait qu'il existe dans de nombreuses autres cités grecques des situations de même ordre : Gymnètes à Argos, Pénestes en Thessalie, etc.

Le cas des hilotes de Sparte est le mieux connu. Ils sont esclaves de la communauté des Spartiates, esclaves de la collectivité, ils sont à la disposition de celle-ci pour mettre en valeur les terres et la nourrir. Les hilotes dépendaient d'un maître auquel ils versaient une part de la récolte. Celui-ci pouvait les utiliser comme il le voulait. Ils constituent un groupe social, se marient entre eux, ont des enfants ; c'est donc un groupe qui se reproduit par lui-même, ce qui est une différence essentielle avec «l'esclave-marchandise». Les hilotes sont attachés à la terre, ils ne peuvent s'en aller, subissent des humiliations, des brutalités, des châtiments corporels ; c'est une situation dégradante à plus d'un titre, qui traduit le profond mépris que leur vouaient les Spartiates. En fait, ils sont le résultat de la conquête : ils sont sans doute les descendants des peuples de Laconie et de Messénie conquis et soumis par les Spartiates.

Les auteurs antiques rapportent que les Spartiates se méfiaient des hilotes et en avaient une certaine peur : à chaque entrée en charge des éphores, on aurait déclaré une guerre contre les hilotes afin de pouvoir les tuer sans être souillé par un crime ! Les hilotes auraient également été considérés comme des victimes potentielles lors des crypties, cette partie majeure de l'agôgê, l'éducation spartiate : à cette occasion, le jeune Spartiate était livré à lui-même dans la nature et aurait pu également tuer des hilotes si cela était nécessaire. Toutefois, ces renseignements livrés par des auteurs antiques non-Spartiates et qui écrivent souvent plusieurs siècles après les faits relatés sont à prendre avec prudence.

En cas de guerre, les Spartiates n'ont pas hésité à enrôler des hilotes dans l'armée, surtout dans les périodes où le nombre de citoyens diminuait dangereusement. Ils leur offraient alors la possibilité d'être affranchis et de devenir dans certains cas de nouveaux citoyens, les néodamodes.
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:46

La vie quotidienne


Grèce antique ANT_GRE_38
Scène de chasse
Hydrie à figures noires Scène de chasse. Style étrusque-Ionien (Cerveteri) Paris, musée du Louvre Exécution : vers 450 av. J.-C.


La vie quotidienne à l'époque classique (5 e siècle avant J.-C.) en prenant le cas de la cité athénienne.

Le cadre de vie
Ville et campagne
La cité en Grèce antique désigne une communauté humaine ayant ses institutions et ses cultes propres, s'inscrivant dans un territoire rural (la chora) groupé autour d'une ville principale. Dans le cas de la cité d'Athènes, les 2 à 300'000 habitants (vers 432 av. J.-C., selon l'estimation de M.-C. Amouretti et F. Ruzé dans « Le monde grec antique », Paris, 1978) vivent essentiellement dans les villages et bourgades de l'Attique. La ville même d'Athènes compte 30 à 40'000 habitants. L'essentiel de la population est donc rural.

L'habitat
Il faut oublier le faste des monuments et des sites prestigieux pour évoquer le cadre quotidien de la vie dans une cité grecque. La ville basse d'Athènes est constituée de petites ruelles tortueuses, mal aérées, peu éclairées et ravinées par les eaux de pluie. Sans égouts, l'hygiène y est absente (cela facilite la propagation de la peste, qui tua Périclès en 429 av. J.-C. ). Les maisons sont basses, modestes, peu confortables. Les murs y sont si fragiles que Plutarque rapporte les exploits des voleurs préférant traverser les murs plutôt que forcer les portes. Il devait y avoir 2 ou 3 pièces minuscules, sur un niveau. L'existence d'immeubles de 2 à 3 étages est cependant attestée. Signalons enfin que le Pirée, le grand port d'Athènes, semble avoir été un exemple d'urbanisme planifié et géométrique, sous la direction du géomètre et philosophe Hippodamos de Milet.

Il devait certainement exister de plus riches demeures privées (comme l'évoquent Lysias ou Platon), mais les fouilles n'en ont pas révélé de traces probantes. On pense aussi que les plus riches devaient posséder une demeure à la campagne. Mais pour la rejoindre, il fallait suivre les chemins tortueux et peu sûrs de l'Attique qu'écumaient des détrousseurs de grands chemins (cf. la pièce d' Aristophane, «Les Oiseaux», vers 493-498). Dans les campagnes, on a aussi retrouvé trace de grands domaines agricoles (décrits par Xénophon dans l'«Economique»).

Le quotidien
Se vêtir
Le vêtement est principalement composé de rectangles de tissu dans lesquels on se drape selon des combinaisons variées de texture, de couleur, de plis et d'ornements. Des ceintures et des fibules (épingles) permettent de le tenir. Voici quelques vêtements :
- le chiton est porté par les hommes (en laine, court, sans manches) et les femmes (en lin, long, avec manches),
- le péplos est la tunique courte des femmes, en lin ou en laine, qui couvre le corps, et recouvre aussi parfois la tête,
- l'himation est un ample manteau, en général de laine blanche, dans lequel l'homme se drape,
- la chlamyde est une tunique de laine, épaisse et courte, tenue à l'épaule par une fibule. Il est porté par les soldats, les éphèbes,
- l'exomide est la tunique courante des hommes : courte, une épaule nue, ceinture à la taille.

Le soleil et la vie au grand air obligent au port d'un chapeau : pilos (bonnet) ou pétase (chapeau à larges bords) pour les hommes ; simple foulard (cécryphale) pour les femmes. Si l'habitude d'aller pieds nus est courante, lorsque qu'il faut marcher (guerre, voyage, promenade) les chaussures sont solides : les crépides ou les cothurnes ont des semelles renforcées, il existe des chaussures montantes (embas, endromis).

Les femmes, et plus rarement les hommes, portent des bijoux : colliers, bracelets, boucles, anneaux. L'attirance des femmes grecques pour les bijoux et les ornements a même conduit certains sanctuaires à rédiger des décrets réglementant strictement les tenues vestimentaires féminines.

Se nourrir
Le Grec est frugal. Petit-déjeuner et déjeuner sont pris rapidement ; le souper est le repas principal. L'alimentation se compose de pain de blé, de galettes d'orge (maza), de poisson, d'olive, d'ail, d'oignon, de fèves et lentilles en purée, de poireaux, de fromage. Les légumes frais et la viande (porc, poulet, mouton) sont assez rares et chers. Le vin est bu le plus souvent coupé avec de l'eau ; l'hydromel et le lait de chèvre sont aussi appréciés. L'usage du sel est courant.

Notons l'importance des sacrifices religieux qui accompagnent toutes les fêtes de la cité : c'est pour la plupart la seule occasion de manger de la viande ! Les hommes admis au sacrifice consommaient la viande sur place, dans le cadre de grands banquets publics, censés resserrer les liens entre les membres de la communauté civique. La participation des femmes à ces banquets est très discutée : il est probable qu'elles recevaient d'ordinaire une part de viande qu'elles mangeaient à domicile, avec leurs enfants.

Se laver
Les Grecs ont une certaine conscience de l'hygiène corporelle. Ils se lavent parfois aux fontaines publiques, mais c'est de plus en plus rare à l'époque classique. Ils préfèrent les bains publics (où ils peuvent aussi discuter), les gymnases et les palestres. Des scènes figurées d'époque classique montrent que les femmes avaient également accès à des salles d'eaux. Certains riches citoyens ont une baignoire personnelle, le pyélos, en terre cuite.

Se distraire
Les enfants s'amusent à des jeux encore largement répandus de nos jours : toupie, billes, yo-yo, saute-mouton, balançoire. Les adultes aiment les jeux de hasard (dés, osselets). Le moment préféré des hommes grecs est le banquet ou plus simplement le symposion, le moment où l'on boit ensemble après le repas proprement dit. Allongés sur des lits, les convives boivent du vin coupé avec de l'eau, écoutent les joueuses de flûtes et s'encanaillent avec les hétaïres (courtisanes) et les danseuses. A la fin, les convives sont le plus souvent ivres morts. Mais cette réunion est aussi un moment de discussion intense, d'ailleurs les philosophes en ont fait un genre littéraire proprement dit : «Le banquet» de Platon ou de Xénophon, «Les propos de table» de Plutarque en témoignent aussi. Enfin les nombreuses fêtes de la cité sont propices à des manifestations religieuses, festives, artistiques et sportives.

La vie familiale
L'enfance et l'éducation
A la naissance d'un garçon le père accroche un rameau d'olivier au seuil de sa porte (symbole civique) ; pour une fille il accroche un bout de laine (symbole domestique). Le père pouvait ne pas reconnaître l'enfant : dans ce cas il était abandonné, c'est-à-dire exposé dans un lieu public où il était laissé à la disposition du premier passant venu. Cette pratique dite de l'exposition permettait d'acquérir gratuitement de futurs esclaves. Si le père acceptait de garder le nouveau-né, la mère s'occupait de l'enfant et le nourrissait. Dans les familles aisées, l'allaitement était confié à une nourrice.

L'éducation est, dans l'Athènes de l'époque classique, le fait de maîtres payés par la famille. Dès 7 ans le grammatiste donne les rudiments (lire, écrire, compter), le cythariste enseigne la musique et le pédotribe la gymnastique. Le jeune enfant des familles aisées est suivi et assisté par un esclave, son pédagogue. L'élite des jeunes citoyens reçoit l'enseignement des grammairiens (poèmes et récits), des philosophes (dans des écoles), des sophistes (qu'il faut payer très cher !) et des professeurs d'éloquence, les rhéteurs. Si le domaine littéraire domine, l'enseignement scientifique a une place importante dans les études avancées. L'éducation idéale de l'Athénien classique (kalokagathia) est celle qui allie la beauté et les qualités physiques aux vertus morales. De 16 à 18 ans environ, le jeune Athénien accomplit son service militaire, l'éphébie.

Les jeunes Spartiates, eux, sont formés pour la guerre. Dès l'âge de 7 ans, leur éducation est entre les mains de l'Etat, et jusqu'à leur mort les hommes sacrifient tout à l'intérêt de leur cité. Entre 8 et 11 ans, ils se regroupent en bandes, commandées par les plus âgés. Ils apprennent le strict minimum au niveau intellectuel : l'essentiel est de forger son corps et sa discipline. Entre 12 et 16 ans, ils apprennent l'endurance et la discipline stricte. Après 16 ans, ils passent les rites d'entrée dans l'adolescence et leur formation devient strictement militaire. Le système éducatif spartiate, collectif et structuré, porte le nom d'agôgè.

Signalons le rôle important de la pédérastie dans les relations maîtres/élèves. L'importance de la pédérastie en Grèce antique a certainement une origine guerrière : il s'agit d'une forme poussée des liens de camaraderie militaire. Afin de forger leur caractère et leur personnalité, certains jeunes de haute lignée sont éduqués dans le cadre d'une relation homosexuelle : le jeune est l'éromène ("celui qui est est aimé") et l'adulte l'éraste ("l'amant").
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:46

Le mariage et la famille
Le mariage intervient très tôt pour les filles (souvent peu après la puberté). Il est arrangé entre les parents de la promise, ceux du garçon et le futur époux lui-même, d'ordinaire nettement plus âgé que sa fiancée. Un écart de 10 à 20 ans entre les époux n'était pas rare. Le mariage donne lieu à une procession nocturne conduisant la jeune épousée de sa demeure natale à la demeure de son mari, un banquet et des sacrifices. L'objectif premier est la création d'une nouvelle cellule familiale (oikos) que l'on souhaite féconde.

La famille, soumise au chef de famille (patriarcat), forme une cellule fondamentale dans la vie grecque tant sur le plan religieux que civique. Autant que les liens du sang, c'est la participation au culte domestique qui soude une famille.

Les activités d'une épouse et mère de famille varient en fonctions de critères sociaux et économiques. Dans les familles aisées, la maîtresse de maison dirige le foyer et les esclaves domestiques. Elle dispose avec ses filles d'appartements réservés aux femmes et aux enfants en bas-âge, le gynécée. Elle y reçoit ses amies, tisse, fait de la musique. Outre quelques achats et les funérailles d'un membre de la parenté, l'occasion principale de sortie pour les femmes aisées est constituée par les fêtes religieuses et plus particulièrement les Thesmophories, à Athènes. Dans les foyers modestes, il n'y avait probablement pas de gynécée, peu ou pas de domestiques et les femmes pouvaient être appelées à travailler à l'extérieur de leur oikos, comme marchandes ou comme nourrices par exemple. Le contrôle social exercé sur les femmes des milieux modestes était donc moins étroit que celui qui visait les femmes des classes supérieures.

Les enfants sont la principale raison d'être du couple : en cas de stérilité de la femme, le divorce pouvait être acquis ; de même, l'adoption est un recours normal. Mais les familles limitent (parfois volontairement par l'exposition des nouveaux-nés ou l'avortement) le nombre de leurs enfants, par crainte d'avoir trop de bouches à nourrir ou pour préserver le patrimoine d'un partage excessif de l'héritage.

La vieillesse et la mort
Les vieillards jouissent d'un grand respect : ils sont peu nombreux et incarnent la sagesse. Leurs fils leur doivent assistance et soutien. Cela n'empêche pas des fréquents conflits de succession et d'héritage. La mort entraîne des rites complexes et variés. Généralement on doit fermer les yeux et voiler le visage du mort, et son corps est lavé. Il est ensuite exposé pendant un ou deux jours dans sa demeure, sur un lit funèbre autour duquel les femmes pleurent et s'arrachent les cheveux (d'où l'embauche fréquente de pleureuses). Enfin le cadavre est emporté, à la tête d'un cortège formé des hommes et des femmes de sa parenté, vers une nécropole, hors de la cité, et soit brûlé sur un bûcher, soit enterré. D'autres banquets et sacrifices se déroulent durant le mois suivant la mort.

Les activités professionnelles
Les Grecs et le travail
Les Grecs semblent avoir une réelle répugnance pour le travail rétribué. Pour Hésiode, le poète des Travaux et Jours (6e siècle avant J.-C.), l'idéal est le statut de paysan-propriétaire : son travail lui permet de subvenir à ses propres besoins et ceux de sa famille. Au 4 e siècle avant J.-C., Aristote refuse même que la dignité de citoyen soit accordée à ceux qui travaillent contre salaire (Politique, III, 3, 2-4). Ainsi dans l'Athènes de Périclès, le citoyen-paysan ou le grand négociant sont considérés, mais seule la nécessité pousse un citoyen à s'adonner aux travaux manuels et au petit commerce, activités réservées aux esclaves et aux métèques.

L'agriculture
L'agriculture est l'activité noble par excellence car elle permet non seulement de satisfaire les besoins fondamentaux, mais elle enseigne en outre la responsabilité civique et elle forme enfin de bons guerriers, soucieux de défendre leur terre (Xénophon, «L'Economique»).

L'agriculture grecque, aux techniques rudimentaires (araire de bois par exemple), repose sur les trois produits méditerranéens de base : blé, vigne, olive. S'y ajoutent l'orge, la figue, le miel et l'élevage de moutons et de chèvres. La mer fournit aussi largement ses produits.

Les exploitations sont petites la plupart du temps (l'existence de quelques rares vastes domaines exploités par de nombreux esclaves est attestée). En Attique, les paysans sont citoyens. Ils travaillent les terres qu'ils possèdent, aidés de quelques esclaves. Mais il existe aussi des domaines, propriété de citoyens vivant dans la cité, et cultivés par des régisseurs. A Sparte, c'est une catégorie de population servile, les hilotes, qui travaille la terre pour le compte des citoyens.

Le commerce
Si une grande partie de la production est vendue directement par l'artisan ou le paysan, le commerce est une activité importante. Il faut distinguer en premier lieu le commerce de détail assuré par les capéloï (boutiquiers, petits revendeurs, gargotiers). Souvent accusés de fraude (malgré la surveillance des poids et mesures assurés par des fonctionnaires appelés métronomes), ils sont souvent mal considérés.

Plus prestigieux est le grand négoce assuré par les emporoï. Ce grand négoce est avant tout maritime et méditerranéen. Il se fait dans une certaine sécurité à partir du 5e siècle avant J.-C. grâce à la puissante flotte athénienne qui assure la suprématie du commerce de la cité, et représente une vraie police des mers. Le Pirée, port d'Athènes, est la plaque tournante d'un vaste commerce maritime : y arrivent le bois de Thrace, le blé d' Egypte et de Sicile, les minerais du Pont-Euxin, etc. Athènes exporte ses vases, son huile, son vin, mais doit compenser le déficit par ses drachmes d'argent qui proviennent en bonne partie, à l'époque classique, des mines du Laurion en Attique même. Les navires marchands sont des voiliers lourds et peu maniables qui naviguent au plus près des côtes (cabotage) et sont tirés au sec durant la nuit.

L'artisanat
L'Attique du 5 e siècle avant J.-C. connaît un développement considérable de l'artisanat. Ces tâches sont assurées essentiellement par des esclaves et des métèques, plus rarement par les citoyens. L'atelier est généralement de taille modeste, n'employant que quelques artisans (rares sont ceux qui dépassent les 50 employés). Même les très grands chantiers (mines d'argent du Laurion, construction navale, chantiers architecturaux) sont assurés par une foule de petits entrepreneurs. Les productions principales sont le fait des potiers, des tisserands, des tailleurs de pierres, des menuisiers, des armuriers, des tanneurs, des cordonniers.

Le travail est extrêmement technique et exige des savoir-faire pointus : d'ailleurs la frontière entre artisan et artiste n'est pas marquée dans le vocabulaire grec. L'artisan, très souvent, signe lui aussi son travail. Le travail est rythmé par le lever et le coucher du soleil ; les salaires sont bas (une drachme aurait constitué le salaire quotidien d'un ouvrier) mais les conditions de travail ne semblent pas inhumaines, sauf pour les esclaves-mineurs.

La monnaie
La monnaie supplante le troc dès le 7 e siècle avant J.-C.. Elle naît en Lydie - le royaume de Crésus -, puis atteint l'Asie Mineure et enfin la Grèce continentale mais ne s'impose réellement qu'après les guerres médiques.

La monnaie la plus répandue, la drachme antique, pèse 4,36 grammes d'argent, avec un excellent aloi (c'est la teneur en métal précieux pur : plus des 9/10 o du poids de la drachme le plus souvent). On trouve aussi des subdivisions en bronze (obole) et en cuivre, et de plus rares pièces d'or, les dariques, frappées en Perse. La monnaie athénienne (frappée avec la tête d'Athéna et la chouette) domine mais n'est pas la seule : les monnaies d'Egine ou de Cyzique sont également importantes. La frappe est manuelle : un marteau, une enclume fixe pour l'avers et un poinçon pour le revers. Notons une habitude étonnante (compréhensible si l'on songe que les habits drapés n'ont pas de poches) : la bouche fait souvent office de porte-monnaie, comme le rapporte Aristophane dans «L'Assemblée des femmes» (vers 815-822).

L'Etat et l'économie
Le gouvernement de la cité n'a guère de préoccupations économiques, au sens moderne. Mais les dépenses imposées par la montée en puissance des cités, Athènes avant tout, obligèrent l'Etat à se mêler d'économie : financement de grands aménagements, rétribution de fonctionnaires. Le financement des expéditions militaires est le principal souci de l'Etat, avec l'entretien des fortifications et, au 4 e siècle avant J.-C., l'organisation des spectacles publics.

A Athènes, les citoyens ne paient pas d'impôts (sauf très rares exceptions). En revanche, les métèques et les vaincus militaires sont taxés. Les plus riches citoyens sont sollicités pour financer les liturgies (les plus riches financent une dépense civique comme l'entretien d'une trière ou encore une représentation théâtrale, dont ils retirent une certaine notoriété et quelques privilèges).
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:47

La justice


La justice (dikê) est un des éléments de réflexion qui, dans la pensée grecque, occupe une place parmi les plus importantes ; rendre la justice appartient aux activités sociales qui mobilisent le plus les énergies. Mais comme pour beaucoup de questions touchant à la Grèce ancienne, la documentation est lacunaire sinon inexistante, sauf pour Athènes que l'on connaît le moins mal. Dans les poèmes homériques, on voit les rois détenir le pouvoir de justice, et la rendre en référence à Zeus, en conformité avec ce qu'ils imaginent être la justice de Zeus.

A l'époque archaïque, la justice dépend, à Athènes, du tribunal de l'Aréopage. Le mot signifie colline d'Arès. C'est une petite éminence qui domine l'Agora où, selon le mythe, Arès d'abord, Oreste ensuite furent jugés. Cette auguste assemblée est composée des anciens archontes sortis de charge ; elle est donc aux mains de l'aristocratie et joue aussi le rôle de conseil. Mais la justice est alors, plutôt, l'application de règles plus ou moins coutumières, religieuses ou familiales et relève de fait de la vengeance.

Trois étapes de la justice
Dracon
Dernier quart du VII e s. av. J.-C. Législateur aussi célèbre qu'obscur, est le premier à édicter un code dont la sévérité est restée légendaire. Sa législation sur l'homicide réglemente la punition des crimes de sang. Mais surtout il recherche une « justice droite » et impose l'idée de « lois égales pour le bon et pour le méchant » (c'est-à-dire pour l'aristocrate et le plébéien). Il aurait même quelque peu limité les prérogatives de l'Aréopage.

Solon
Première moitié du VI e s. av. J.-C. Il est le créateur, entre autres réformes, du tribunal de l'Héliée, ce vaste jury tiré au sort parmi l'ensemble des citoyens. Solon a aboli l'esclavage pour dette, réformé les poids et mesures et instauré un système politique démocratique, mais censitaire.

Clisthène
Au début du V e s. av. J.-C. Il confirme le rôle de l'Héliée en précisant son champ de compétence et son mode de recrutement, privant un peu plus l'Aréopage de son pouvoir. Cette évolution est menée à son terme par Ephialte (461 av. J.-C.) : il réduit le vieux tribunal au seul examen des meurtres ou tentatives de meurtres, le privant de toute compétence politique ; ce qui lui valut d'être tué. Cette évolution de la justice à Athènes accompagne en fait l'installation de la démocratie.

Pour les autres cités grecques, la documentation est bien moins précise. Les cités démocratiques étaient dotées de systèmes comparables à celui d'Athènes. Quant aux cités oligarchiques, bien souvent la justice reposait dans les mains des magistrats élus ou désignés. Il faut toutefois bien garder en mémoire la remarque de Claude Mossé : « il n'existait pas un mais des droits grecs, et par là même ce qui était "juste" ici ne l'était pas nécessairement ailleurs ».

Les tribunaux
Dans l'Athènes classique, le tribunal de l'Héliée possède une compétence très large, il est amené à connaître à peu près toutes les questions de droit qui se posent, publiques comme privées. Il est une autre forme de la manifestation de la puissance publique du dêmos, il est avec l'ecclésia et la boulê la caractéristique majeure du régime démocratique, il représente la cité tout entière.

Il est composé de 6'000 membres, les héliastes, tirés au sort parmi tous les citoyens de plus de trente ans, au nombre de 600 par tribu et sans distinction de fortune ou de classe. Cette désignation se déroulait selon un procédé fort complexe. Bien entendu, les 6 000 ne siégeaient pas tous ensemble, mais selon des jurys spécialisés et l'on utilisait même « des machines à tirage au sort » pour organiser la composition de ces jurys.

Mais à Athènes, il existait de nombreux autres tribunaux. A côté de l'Héliée et de l'Aréopage, on connaît l'existence de vieux tribunaux spécialisés dans les affaires criminelles comme le Palladion ou le Delphinion, ou encore le Phréattys (au Pirée) pour les affaires concernant les exilés. Encore au 2 e siècle après J.-C., un voyageur comme Pausanias, passant par Athènes, ne compte pas moins d'un total de 10 tribunaux différents dans la ville (Périégèse, I, 28, 5-11).

Les actions en justice
Il n'y a pas à Athènes de procureur, de ministère public ; c'est le citoyen qui se sent lésé qui tente de faire valoir ses droits et qui saisit les tribunaux. Il peut le faire par la procédure de la graphê lorsqu'il s'agit d'une action en justice concernant les affaires publiques. Si le citoyen perd son procès, il risque une amende. Il existe en particulier la procédure de graphê paranomôn lorsqu'un citoyen estime qu'une décision est contraire aux lois. Si l'accusé est condamné, il peut risquer la peine de mort.

Il existait une autre procédure dans les affaires publiques, l'eisangelia, qui visait les crimes politiques, les complots et autres trahisons ou corruptions. La boulê ou l'ecclésia étaient compétentes pour ces affaires et les condamnations à mort pouvaient être prononcées.
Dans le domaine politique, il existait aussi la procédure d'ostracisme. Le mot provient du terme ostrakon (« coquille »), le tesson de céramique sur lequel on gravait, lors du vote à l'ecclésia, le nom de la personne visée. L'assemblée condamnait à 10 ans d'exil ceux dont l'ambition paraissait démesurée et semblait présenter un danger pour la démocratie. C'était un moyen commode pour tenter d'écarter un rival politique et les actions contre Thémistocle (qui sera exilé) ou Périclès sont restées célèbres.

Dans les affaires privées aussi, le tribunal était saisi par les citoyens qui déposaient une plainte et qui tentaient de convaincre les jurés. C'est la procédure de la dikê que seuls les citoyens majeurs pouvaient intenter. Les condamnations prononcées étaient des amendes. Mais les condamnés pouvaient aussi être frappés d'atimie, la privation de la totalité de leurs droits civiques.

Dans une civilisation de la parole publique où l'art de la persuasion était essentiel, les maîtres de la rhétorique et les orateurs louaient leurs services ; ainsi Lysias ou Démosthène ont laissé des dizaines de plaidoiries. En principe l'accusé se défendait lui-même, mais il pouvait faire rédiger don discours par un spécialiste appelé « logographe » ; dans certains cas un orateur pouvait assister l'accusé en prononçant une plaidoirie complémentaire. Chacun avait droit également à la parole (selon le principe de l'isêgoria) et cette parole était mesurée par une clepsydre ou horloge à eau ; puis les jurés votaient. Le résultat du jugement pouvait être la saisie de tout ou partie des biens du condamné dont une partie pouvait revenir à l'accusateur, et l'on vit fleurir les sycophantes, dénonciateurs publics, qui espéraient tirer profit de ces démarches.
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MessageSujet: Re: Grèce antique   Grèce antique EmptyJeu 4 Mai - 16:48

La guerre


Grèce antique ANT_GRE_41
Tête de guerrier
Bronze. Vers 460 av. J.-C.


Armées et cités grecques
Au développement des cités grecques, dès le 7 e siècle avant J.-C., répond un système militaire particulier : l'armée civique. Le citoyen doit porter les armes pour défendre le territoire de sa cité contre une invasion ennemie, pour préserver les récoltes, pour protéger femmes, enfants et esclaves.

Etre soldat devient dès lors un élément de la définition du citoyen et constitue un aspect fondamental de son éducation. Sparte fournit le meilleur exemple de cette idéologie. La cité spartiate était tendue vers ce seul but : sélectionner et former les meilleurs guerriers, et ceci dès la naissance et jusqu'à la vieillesse. Les vers du poète Tyrtée («Elégies», 10) illustrent cet état d'esprit :

«Mourir au premier rang, lutter pour la patrie,
C'est le sort le plus beau digne d'un bon guerrier...
O garçons ! au combat luttez en rangs serrés,
Car la fuite est honteuse autant que la panique...
Les aînés, les anciens, dont les genoux sont raides,
N'allez pas vous enfuir et les abandonner ... »

Alors que l'Iliade et l'Odyssée ont mis à l'honneur les duels ou s'affrontaient des héros individualisés, les citoyens des nouvelles cités grecques unissent désormais leurs efforts pour défendre en commun la patrie. Egaux politiquement car tous citoyens, ils sont aussi égaux au combat, disposant d'une armure identique et s'appuyant sur une tactique de groupe, la phalange.

Les hoplites
Les citoyens-soldats grecs portent le nom d'hoplites. Ce sont des fantassins, pourvus d'un équipement de bronze comportant les éléments suivants :

* un grand bouclier rond, d'environ 90 centimètres de diamètre. Il se tient à l'aide d'un brassard, glissé dans l'avant bras-gauche, et d'une poignée fixée au bord du bouclier. Le bouclier protège le soldat du menton au haut des jambes. Sur sa face externe, il porte un emblème (oiseau, animal, Gorgone, etc), à la fois marque distinctive du combattant et signe magique destiné à détourner le mauvais œil;
* des jambières martelées dans des feuilles de bronze et adaptées sur mesure à la musculature des mollets de chaque soldat,
* une cuirasse faite d'un plastron à l'avant et d'une plaque dorsale. Les deux parties de la cuirasse sont maintenues ensemble par des fermoirs de cuir. Au bas de la cuirasse est attachée parfois une plaque supplémentaire servant de protège-ventre. Sous la cuirasse, l'hoplite porte une chemise de tissu pour se protéger du frottement et de la chaleur. Cette chemise forme une petite "jupette" au bas de la cuirasse,
* un casque à cimier couvrant l'avant et l'arrière de la tête, ainsi que les joues et l'arrête du nez,
* une lance tenue dans la main droite et une épée courte portée à la ceinture.

L'hoplite participait à double titre à la défense de sa cité : il payait lui-même son équipement, puis payait de sa personne en prenant part à la bataille.

Les hoplites combattent dans une formation spécifique, la phalange hoplitique, et selon une tactique immuable : sur un terrain si possible ouvert et plat, les hoplites se disposent en ligne sur huit rangs de profondeur, puis à un signal donné, se mettent en marche contre l'ennemi, serrés les uns contre les autres, chacun protégeant son côté droit sous le bouclier du voisin. Des joueurs de flûte marquent la cadence. Les soldats avancent «pied contre pied, aigrette contre aigrette, casque contre casque, la poitrine pressant la poitrine» (Tyrtée, «Elégies», 11, vers 29-34). Cette tactique repose sur la solidarité entre les soldats et sur une préparation militaire poussée permettant l'exécution parfaite des manœuvres. Une fois les deux armées en contact, le combat s'engage au corps à corps. Le vainqueur était celui qui restait maître du terrain, le vaincu étant contraint à la fuite.

Marathon (490 avant J.-C.), qui mit aux prises quelques centaines d'Athéniens et de Platéens contre un important détachement de l'armée perse, reste le symbole de la bataille hoplitique grecque. Les Grecs laissèrent 192 morts sur le terrain contre 6'400 Perses, selon l'historien antique Hérodote.

Dans l'Athènes classique, la grande masse des citoyens aux revenus moyens - en majorité des propriétaires terriens - s'armait comme hoplite. Les citoyens très riches, peu nombreux, étaient pour leur part invités à armer et à commander un navire de guerre, tandis que les riches entraient dans la cavalerie. Quand aux pauvres, ils formaient la cohorte des rameurs sur les navires. Aux différentes classes censitaires athéniennes correspondaient donc des fonctions militaires différentes.

Les armées hellénistiques
La phalange hoplitique subit des transformations sous l'impulsion du roi de Macédoine, Philippe II, qui impose sa domination en Grèce dès 338 avant J.-C.. Le fer fait son apparition dans l'armement hoplitique et, surtout, on adopte une nouvelle et grande pique, la sarisse (plus de 6 m de long). Efficace, elle est cependant bien difficile à manœuvrer sur un terrain accidenté. A côté de l'infanterie lourde, Philippe II développe des corps d'archers, de frondeurs ou de lanceurs de javelots, ainsi que des bataillons de cavalerie. L'armée et les techniques de combat se diversifient.

Cette évolution se poursuit avec l'introduction de l'éléphant comme arme de guerre dès la fin du 4 e siècle, l'augmentation des corps de soldats légèrement armés (tels les peltastes, porteurs d'un bouclier de peau en forme de croissant, la pelté), l'usage de machines de guerre. Avec la constitution des royaumes hellénistiques, les armées changent de dimensions : les successeurs d'Alexandre alignent souvent des dizaines de milliers d'hommes au combat.

La grande nouveauté de l'époque hellénistique réside surtout dans la disparition progressive des citoyens-soldats au profit de troupes mercenaires. C'est à des professionnels de la guerre, à des étrangers salariés, que l'on confie désormais les affaires militaires. Les causes de ce changement sont multiples : technicité des armées due à l'emploi d'armes de jet et de troupes légères, nouvelles stratégies telles la guerre de siège, longueur des campagnes militaires, distance accrue entre les cités grecques et les fronts de combat situés souvent au Proche Orient ou en Asie mineure, appauvrissement généralisé de certaines régions de la Grèce (Crète, Etolie, Arcadie) dont les habitants sont contraints de s'expatrier pour gagner leur vie comme soldats. Les théoriciens s'emparent de la réflexion sur la guerre, on voit apparaître les ingénieurs militaires. A partir d' Alexandre le Grand, la guerre devient progressivement une science technique et l'armée civique disparaît.

Villes fortifiées, défendues, assiégées
Les palais-forteresses mycéniens (Mycènes, Tyrinthe, Pylos) ont suscité l'admiration des Grecs eux-mêmes, qui attribuaient la construction de ces murailles gigantesques à des êtres légendaires, les Cyclopes. Ces citadelles pouvaient abriter des centaines de soldats en cas de siège et disposaient de réserves de nourriture et d'eau. La destruction de toutes ces imposantes forteresses vers 1200 avant J.-C. reste aujourd'hui encore une énigme.

Dès l'époque archaïque, plusieurs villes se protégèrent par des remparts. Une cité antique était constituée par un centre urbain (asty) et un territoire (chôra). Entourer de murailles le centre urbain garantissait à la population du territoire un refuge en cas de guerre, tandis que l'armée des hoplites sortait affronter l'ennemi en rase campagne. C'est exactement ce qui se passa à Athènes durant les dix premières années de la guerre du Péloponnèse (431-421 avant J.-C.). Athènes bénéficiait d'ailleurs d'un système de murailles particulièrement ingénieux : les "Longs Murs", construits entre 457 et 442 avant J.-C., protégeaient la route reliant la ville au port du Pirée, ce qui permettait de faire du commerce maritime et de ravitailler la population installée en ville, même si une armée ennemie occupait le territoire.

Dès le 4 e siècle avant J.-C., plusieurs cités cherchèrent à entourer de murailles non seulement leur centre urbain mais également leurs terres agricoles, pour assurer la survie de la population en cas de siège. L'une des enceintes grecques les plus remarquables défendait la ville de Syracuse, en Sicile, et son vaste territoire. Longue de 27 kilomètres, elle fut commencée au 4 e siècle par le tyran Denys et se poursuivit jusqu'en 212 avant J.-C..

Construire une muraille coûtait cher et nécessitait le recours à des experts, notamment pour les éléments techniques (tours, portes, poternes). Les cités y consacraient une part importante de leur budget militaire et, au besoin, n'hésitaient à faire appel à la générosité des citoyens qui savaient que leur sécurité dépendait de l'état des remparts.

Pendant l'époque archaïque et classique, les murailles constituent une protection sûre. Prendre d'assaut une ville fortifiée était alors une opération difficile, rarement couronnée de succès car les moyens disponibles étaient maigres : on ne pouvait compter que sur des échelles, des javelots enflammés lancés par-dessus les murailles ou des traîtres disposés à ouvrir les portes de la cité. La situation change à partir de la fin du 5 e siècle, avec l'invention de nouvelles tactiques comme la sape ou le bélier, et l'apparition de machines de siège sophistiquées telles la catapulte (du grec kata-peltè, "anti-bouclier") et la tour d'artillerie : l'avantage du siège revient désormais plus souvent aux attaquants qu'aux défenseurs de la cité.

La guerre navale
C'est aux Corinthiens que l'on attribue l'invention du navire de guerre grec, la trière. La tradition fait remonter son usage au début du 7 e siècle avant J.-C. déjà. La trière se présente comme un bateau effilé à trois rangs de rameurs. En se basant sur les fondations des entrepôts navals grecs retrouvées au Pirée, on estime les dimensions d'une trière à 36 mètres sur 5. Le tirant d'eau ne dépassait pas un mètre. Légère et maniable, la trière était adaptée au paysage maritime grec, à ses îles, ses criques et ses passes étroites. En revanche, ne possédant pas de quille, la trière était peu stable et chavirait facilement par gros temps. Le fond plat facilitait le halage du bateau sur terre ferme, la proue tournée vers la mer.
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