Akkad ou Agadé. Ce terme désigne un pays (la partie nord de la basse Mésopotamie), et une ville royale fondée par Sargon vers 2325 av. J.-C.; de façon plus générique, Akkad désigne le royaume puis le premier Empire sémitique fondés par le même Sargon.
Le royaume d'Akkad
Le roi Sargon
Limité d'abord à la seule cité d'Agadé - dont les ruines n'ont pas encore été retrouvées et dont l'emplacement demeure à ce jour non établi (vraisemblablement au sud de Bagdad) -, le royaume d'Akkad s'étendit rapidement à toute la basse Mésopotamie (pays de Sumer) et à une partie de la Syrie, lorsque Sargon eut vaincu le souverain d'Oumma, Lougal-Zagesi. Jusqu'à l'époque perse, Akkad resta distincte de Sumer, malgré une union avec cette dernière. Les souverains qui gouvernèrent ces deux pays portaient le titre de rois de Sumer et d'Akkad. Parmi les dynasties qui se sont succédé en Mésopotamie, celle d'Akkad est peu connue. Sans possibilité de consulter les ruines, il ne reste que celle d'étudier, soit des inscriptions, soit des textes datant des IIe et IIIe millénaires av. J.-C. S'il est impossible de connaître avec certitude la durée des règnes, nous pouvons néanmoins situer la dynastie d'Akkad vers 2325-2160.
Sargon, abandonné par sa mère prêtresse qui n'avait pas le droit d'élever des enfants, fut recueilli par un homme, porteur d'eau, alors qu'il était confié à l'Euphrate dans une corbeille de roseaux. Malgré son humble origine, il devint officier et parvint à s'emparer du pouvoir puis, après avoir vaincu le dernier roi de Sumer, à étendre sa domination sur toute la région comprise entre l'Elam et le littoral méditerranéen de l'Asie occidentale. Le royaume d'Akkad devint ainsi le premier Etat unifié d'Asie, une véritable puissance d'envergure impériale et sans commune mesure avec le système précédent des cités-Etats. Sargon fut à la fois un remarquable conquérant et un excellent organisateur. Disposant d'une armée permanente, il subjugua les populations du Zagros, s'imposa en haute Mésopotamie et poussa même jusqu'au «pays de l'argent» (Cappadoce).
A la mort de Sargon (2279), ses successeurs durent rivaliser de force et d'ingéniosité pour maintenir l'hégémonie akkadienne et préserver son héritage. Ainsi, son fils Rimoush guerroya contre les cités sumériennes de Lagash et d'Adab et mena campagne contre les Elamites. Son second fils, Manishtousou (2269-2255), poussa jusqu'au golfe Arabo-Persique, où il lança la première expédition de l'Histoire. Son petit-fils, Naram-Sin (2254-2218), réitéra, lui aussi, les lointaines expéditions de son grand-père, domina l'Amanus, ravagea Arman (Alep?) et détruisit Ebla (Tell Mardikh). Mais, malgré ces exploits, l'Empire demeura fragile. Sa prospérité même, qui excitait les convoitises, fut sans doute la cause de l'anéantissement de la dynastie des Sargonides d'Agadé et de leur empire, qui succomba, dans des conditions encore mal connues, sous l'invasion brutale des pillards descendus des montagnes orientales. Sous Sharkali-Sharri, fils de Naram-Sin, le royaume d'Akkad subit les attaques des Amorrites (Sémites venus de l'Ouest) et des montagnards descendus du Zagros. Peu après 2160, Akkad fut saccagée par les Gouti, qui dévastèrent totalement le pays, anéantirent les villes et emportèrent un immense butin dont on a retrouvé les traces jusqu'à Suse, en Elam. L'Empire sombra dans l'anarchie puis disparut vers 2125.
Une civilisation remarquable
Pour éphémère qu'il ait été, cet empire n'en a pas moins puissamment contribué à enrichir le patrimoine de l'humanité et il a laissé des traces particulièrement durables dans l'histoire de la civilisation par l'essor que les Sargonides donnèrent aux lettres et aux lois. L'akkadien, la plus ancienne des langues sémites connues, supplanta le sumérien dans les documents écrits, qui se multiplièrent dès l'avènement de Sargon d'Agadé.
L'akkadien était écrit dans le système cunéiforme dont usaient les Sumériens et qui fut appliqué à des langues variées de l'Asie occidentale. Ce système d'écriture, qui comprend plus de trois cents signes dont la plupart ont plusieurs valeurs, est extrêmement compliqué. Il resta le langage véhiculaire de toutes les régions de l'Asie occidentale soumises à l'influence des Babyloniens et des Assyriens, jusqu'à l'invasion des Perses au VI e siècle. Pendant toute cette période, l'akkadien fut communément employé, en outre, comme langue diplomatique officielle dans tous les pays du Proche-Orient, y compris en Egypte: on sait que les célèbres tablettes des archives d'Amarna, grâce auxquelles la correspondance des pharaons est si bien connue, étaient rédigées en akkadien.
L'empire d'Akkad vit également l'apparition de l'art monarchique en Mésopotamie. Peu de vestiges ont subsisté de ce trop vaste empire; les monuments qui nous sont parvenus ont été découverts à Suse, où ils avaient été transportés comme butin par les Elamites v. 1200 av. J.-C. Comme la stèle de Naram-Sin, aujourd'hui déposée au Louvre, ils ont pour thème principal la célébration des victoires royales. Les graveurs sur pierre akkadiens innovèrent par une liberté de composition qui tranchait avec les règles rigides de leurs prédécesseurs sumériens. Les gemmes gravées de l'époque d'Akkad, employées comme cachets ou comme talismans, passent pour les chefs-d'œuvre de la glyptique mésopotamienne. Les cylindres-sceaux agadéens sont significatifs à cet égard: les eaux, les poissons, les charrues, les bateaux qui y figurent témoignent de l'essor économique et agricole, et du respect des traditions sumériennes. On y retrouve les anciennes divinités que les Sargonides révéraient sous des noms nouveaux: Shamash pour le dieu Soleil Utu-Babbar; Sin pour le dieu Lune Nannar; Ishtar pour la déesse de la guerre et de l'amour Inanna. Les héros légendaires Gilgamesh et Enkidou furent plus que jamais exaltés par la littérature et l'iconographie.