| Misanthropic World Metal, Occultisme, Histoire... |
|
| Le «Printemps des peuples» (1848) | |
| | Auteur | Message |
---|
Vidar Blackeu Viking
Nombre de messages : 2711 Localisation : Dans la forêt d'Asgard Date d'inscription : 13/02/2006
| Sujet: Le «Printemps des peuples» (1848) Mer 3 Mai - 17:31 | |
| "Famille sur les barricades" (février 1848) La représentation rappelle les personnages fictifs d'Eponine et Gavroche en 1832Peinture réaliste de Honoré DaumierEn 1848, des révolutions éclatent simultanément dans plusieurs pays d'Europe et remettent en cause l'ensemble mis en place lors du congrès de Vienne. Favorisées par la crise économique de 1846-1847, ces explosions populaires sont le produit d'aspirations libérales, nationales et démocratiques. L'Italie s'agite dès 1847. Encouragés par la révolution parisienne de février, les Italiens chassent les Autrichiens de Milan et de Venise. A Rome, Mazzini proclame la république, tandis qu'à Vienne une insurrection oblige Metternich à s'enfuir et entraîne une série de révoltes nationales, qui menacent de faire éclater l'empire d'Autriche. En Allemagne, les libéraux font élire au suffrage universel un Parlement qui se réunit à Francfort. Mais, dès 1849, la réaction l'emporte partout. En Italie, les troupes piémontaises sont écrasées par les Autrichiens et une intervention française provoque la chute de la République romaine. En Autriche, le nouvel empereur François-Joseph rétablit l'ordre grâce à l'appui de l'armée. Le Parlement de Francfort est dispersé par la troupe. | |
| | | Vidar Blackeu Viking
Nombre de messages : 2711 Localisation : Dans la forêt d'Asgard Date d'inscription : 13/02/2006
| Sujet: Re: Le «Printemps des peuples» (1848) Mer 3 Mai - 17:33 | |
| L'Europe de 1848Les Révolutions en Europe en 1848 Les mouvements de 1848 visent à renverser un ordre politique établi au congrès de Vienne en 1815 par les vainqueurs de Napoléon, et maintenu grâce à différentes opérations de police dirigées, avec l'accord des autres, par l'un au moins des contractants (ainsi la France en Espagne en 1823, ainsi les forces russes en Pologne en 1830-1831). Cet équilibre européen est fondé sur une forme de providentialisme religieux et politique, qui garantit le droit des maisons royales européennes à régner sur les territoires et les peuples que l'ordre divin a attribués à leur bon gouvernement, bref, sur une pensée de la légitimité du pouvoir. Mais les aspirations des Allemands et des Italiens à se libérer de la tutelle politique, lâche mais réelle, des Habsbourgs, d'Autriche et de l'éparpillement géopolitique entretenu par ceux-ci, ont mûri dans les années 1830 et 1840. L'Allemagne Côté allemand, l'initiative est venue de la bourgeoisie d'affaires, qui milite en faveur d'un rapprochement économique des principautés entre elles et avec la Prusse: le Zollverein douanier est réalisé en 1833-1834, et dans ce mouvement se distinguent de nombreux hommes d'affaires rhénans, que l'on retrouvera à la tête des nouvelles institutions en 1848, comme Hansemann ou Mevissen. L'audience du double courant libéral et national auprès des masses populaires y est importante (en témoigne, dès 1830, le succès de la Jeune-Allemagne), mais elle est rendue problématique par les divisions du mouvement ouvrier lui-même, et par l'essor d'organisations comme la Ligue des communistes du jeune Marx, dont le Manifeste, publié précisément en 1848, atteste l'évolution vers une forme d'internationalisme. L'exaltation de la culture et du «génie» nationaux a déjà atteint son sommet en Allemagne, avec le romantisme littéraire et musical et la postérité «de droite» de l'hégélianisme. L'empire des Habsbourgs L'empire des Habsbourgs est de plus en plus écartelé par les revendications des différentes nationalités qui le composent, malgré les apparences d'ordre maintenues par Metternich. Si l'hégémonie autrichienne reste à peu près intacte dans les domaines politique, militaire et administratif, l'émancipation est en bonne voie sur le plan culturel: on voit notamment les Hongrois et les Tchèques affirmer la dignité de leur langue dans la presse et la littérature, du haut des chaires universitaires, et exalter leur histoire nationale (c'est ce que fait FrantiUack Palacky dans sa monumentale Histoire de la nation tchèque en Bohême et en Moravie, qui commence à paraître en 1848). L'Italie Parallèlement, l'Italie est le lieu d'un important débat autour de la question nationale et du refus de demeurer plus longtemps une «expression géographique», selon le mot et la volonté du chancelier autrichien Metternich. Si les coups de main de la Jeune-Italie y sont facilement réprimés, les écrits se multiplient, et différents courants s'affirment. Mazzini, héritier de Buonarroti, a abandonné, par tactique, la revendication sociale égalitariste, et reste attaché à l'idée que l'Italie peut conduire son unification par ses propres forces («L'Italia farà da sè», selon la formule de Charles-Albert). Un autre mouvement, qualifié de «néo-guelfe», et animé par l'abbé Gioberti, prétend faire du pape le guide du mouvement national, voire le chef civil de l'Italie future; il est au sommet de son influence après l'élection à la papauté, en 1846, d'un cardinal de réputation libérale, Pie IX. Enfin, les futures grandes figures du Risorgimento (Cavour, Balbo, D'Azeglio) exaltent l'idée d'une fédération dirigée par la dynastie de Savoie. Sur le plan culturel, les Fiancés de Manzoni sont salués en Italie, à partir de 1842, comme le premier grand roman «national». L'Illyrie Chez les Slaves du Sud, le mouvement illyriste, dirigé par Ljudevit Gaj, exploite le souvenir des bouleversements suscités par le Grand Empire napoléonien (les Provinces illyriennes), et s'affirme déjà aussi indifférent aux Hongrois qu'hostile aux Autrichiens. | |
| | | Vidar Blackeu Viking
Nombre de messages : 2711 Localisation : Dans la forêt d'Asgard Date d'inscription : 13/02/2006
| Sujet: Re: Le «Printemps des peuples» (1848) Mer 3 Mai - 17:35 | |
| Le souffle révolutionnaireRévolution de 1848 : la diète de Francfort La diète de Francfort, lors d'un débat présidé par Heinrich von Gagern.Conjonction des causes Le contexte général est donc celui d'une diffusion généralisée des théories libérales et des revendications nationales. Il ne suffit cependant pas à expliquer que les révolutions de 1848 se soient déclenchées à ce moment précis. La crise économique L'Europe connaît, en 1845-1847, une crise économique assez profonde, où se combinent des problèmes agricoles (intempéries, mauvaises récoltes, disettes localisées) et des phénomènes de répercussion sur l'économie industrielle, où chute la demande et où s'accroît le chômage, particulièrement dans le textile (Normandie, Silésie, Italie du Nord). La médiocrité des récoltes de céréales en 1845 et 1846 a provoqué une hausse considérable du prix des denrées alimentaires ; le prix du blé fait plus que doubler entre 1845 et 1847. Cela entraîne une baisse de la consommation de produits industriels et une crise financière, les Etats vidant leur caisse pour acheter du blé à l'Amérique et à la Russie. Ces phénomènes ont donc à la fois des caractères traditionnels (révoltes frumentaires des artisans urbains, en 1847, à Stuttgart et à Berlin) et des traits modernes : les débuts de la phase ferroviaire de l'industrialisation ont suscité des opérations financières audacieuses et une fièvre spéculative, qui conduisent à une cascade de faillites bancaires ; celles-ci affectent, par contrecoup, le reste de l'économie. Ces phénomènes sont particulièrement sensibles dans les grandes places boursières et financières que sont alors Vienne, Francfort, Karlsruhe, Paris, ou Milan - ce qui contribue à expliquer le peu d'empressement des classes bourgeoises, industrielles ou commerçantes, à défendre les autorités politiques lorsque celles-ci se trouvent menacées, au printemps 1848. Mais cette crise économique, si elle aide à ne pas trop regretter les anciens pouvoirs, lègue aussi aux nouveaux dirigeants un difficile problème, celui de la misère. Ainsi, des masses de chômeurs ont afflué dans les grandes villes et apparaîtront vite comme une menace pour l'équilibre social. Le souffle révolutionnaire La crise économique génère partout en Europe des troubles sociaux et un climat de mécontentement favorables à l'éclosion d'une crise politique: aspirations libérales, revendications sociales et volonté d'indépendance ou d'unité nationale. En France, les journées d'insurrection des 22, 23 et 24 février 1848 aboutissent au renversement de la monarchie de Juillet. Les mouvements révolutionnaires dépassent très vite la seule opposition monarchique. L'élan est donné: l'«illusion lyrique» parisienne a d'emblée un retentissement européen. L'écho est immédiat en Italie, d'autant que celle-ci était déjà agitée depuis janvier 1848 par des revendications constitutionnelles, avec pour modèle la Charte française de 1830. Le soulèvement part du royaume des Deux-Siciles - la Sicile s'est soulevée le 12 janvier, Naples le 27 - et du grand-duché de Toscane. Le régime parlementaire italien En Italie, le 14 mars 1848, Pie IX accorde une Constitution prévoyant un Sénat entièrement désigné par lui et une Chambre élue au suffrage censitaire. Rome connaît alors une effervescence comparable à celle de Paris: les radicaux, les anciens carbonari créent des clubs, des journaux, forment une garde nationale. A Turin, Charles-Albert transforme sa monarchie en régime parlementaire, en promulguant le Statuto, le 5 mars. Puis il récupère à son compte les soulèvements anti-autrichiens qui ont lieu, du 18 au 23 mars, en Lombardie (insurrection ouvrière de Milan, évacuée par les troupes autrichiennes) et à Venise (combats des artisans, pêcheurs et ouvriers de l'arsenal contre la garnison, qui débouchent sur la proclamation d'une nouvelle République de Saint-Marc par l'avocat Daniele Manin). Le Piémont se met alors à la tête du mouvement national et déclare la guerre à l'Autriche le 25 mars: ses armées, appuyées par des milliers de volontaires italiens, entrent en Lombardie pour en chasser l'occupant. La République française n'apporte à cette politique qu'un soutien de sympathie. Par ce choix essentiel, Lamartine, soucieux de ne pas effrayer le reste de l'Europe en prétendant exporter la révolution, cherche à ne pas compromettre les chances du régime français et à éviter toute dérive jacobine ou militaire comme sous la I re République. Mais ce choix est lié également aux menaces russes, très clairement formulées par les ambassadeurs de Nicolas Ier. Le projet d'une Allemagne unifiée En Allemagne, l'écho est tout aussi rapide. Dès la fin du mois de février, l'Allemagne rhénane, la Forêt-Noire, le Wurtemberg et la Bavière connaissent des manifestations d'étudiants et d'artisans (couteliers de Solingen, bateliers du Rhin mobilisés contre l'extension de la navigation à vapeur), et des violences paysannes contre les derniers vestiges de la féodalité. Il n'est pas indifférent que ces premiers troubles se produisent au cœur de la Confédération du Rhin, telle que Napoléon l'avait réorganisée en 1806-1807. Dans les villes allemandes, étudiants, bourgeois libéraux et ouvriers manifestent ensemble, se heurtant parfois à la troupe, comme à Berlin le 6 mars, et forçant les pouvoirs en place à des concessions: élargissement du droit de suffrage, liberté de la presse, constitution de ministères libéraux, notamment par Frédéric-Guillaume IV en Prusse et en Bavière peu après l'abdication de Louis I er . Mais le mouvement, en prenant de l'ampleur, débouche très vite sur la revendication nationale, et l'élection, au suffrage universel, d'une Assemblée représentative allemande est organisée. Elle se donne pour tâche d'élaborer un projet de Constitution pour une Allemagne unifiée. Le Parlement de Francfort entame ses travaux le 18 mai sans avoir beaucoup de prise sur les événements qui se déroulent sur le terrain des villes et des principautés. Les petits Etats Les députés des petits Etats, comme la Hesse ou le Palatinat, plaident pour un système fortement centralisé, doté d'une Assemblée nationale réunissant l'essentiel du pouvoir législatif; les députés des grands royaumes, comme la Bavière ou le Hanovre, souhaitent au contraire un système souple, préservant l'essentiel des droits et de l'indépendance des Etats. Après le début de la réaction dans les Etats des Habsbourgs, les discussions sur les dimensions de l'Allemagne future et le choix de la maison princière appelée à régner sur elle écarteront l'idée d'une Grossdeutschland, d'une «Grande Allemagne», incluant les territoires autrichiens germanophones, dans la mesure précisément où elle n'aurait pu aller à une autre famille qu'à celle des Habsbourgs. L'empire d'Autriche Au cours de l'été 1848, c'est la situation dans l'empire d'Autriche qui commande le destin des révolutions européennes. Or, autant l'explosion initiale a pu y autoriser de grands espoirs, autant la reprise en main s'y est esquissée rapidement. Après avoir observé avec philosophie les événements de France (qu'il jugeait irrémédiablement contaminée par le virus des révolutions), Metternich a dû s'enfuir de Vienne, le 13 mars, à la suite de manifestations rassemblant la jeunesse étudiante libérale et les milieux populaires. La chute du chancelier une fois consommée, l'entourage de l'empereur croit pouvoir se tirer d'affaire en promettant une Constitution libérale. Publié le 25 avril, le texte déçoit gravement. Il prévoit simplement d'organiser l'élection d'une Chambre basse, avec un cens réservant le suffrage aux grands propriétaires, sous le contrôle d'une Chambre haute, dominée par la haute noblesse. D'autre part, il ne fait aucunement référence aux nationalités: or, aux marges de l'empire des Habsbourgs, les événements se sont précipités pendant le mois d'avril. La Bohême À Prague, le mouvement tchèque, après avoir obtenu l'autonomie et le rattachement de la Bohême, de la Moravie et de la Silésie, s'est radicalisé: après avoir refusé de se rendre au Parlement de Francfort - et ayant donc fermé la porte à toute réunion des territoires de peuplement tchèque aux Etats allemands -, Palacky a convoqué à Prague un congrès slave. La Pologne et la Hongrie Le mouvement national polonais s'est également réveillé en Galicie autrichienne: les chefs du mouvement de 1830, émigrés à Londres et à Paris, rentrent au pays, et Cracovie se révolte le 20 avril. Enfin, la Chambre basse de Presbourg (l'actuel Bratislava) a fait adresser à Vienne un texte rédigé par Kossuth exigeant la liberté de la presse et l'émancipation définitive de la paysannerie hongroise, sur lequel est venu surenchérir le «programme du 15 mars» adopté par les étudiants de Pest. Cette révolution libérale place ainsi ses meneurs à la tête d'un ministère hongrois reconnu par Vienne, et obtient un élargissement du droit de suffrage. C'est donc l'intégrité même de l'empire des Habsbourgs qui paraît dès lors menacée. Aussi, face à un pouvoir en situation de faiblesse et arc-bouté sur ses positions conservatrices en matière électorale, les radicaux n'ont-ils pas de mal à entraîner le petit peuple de Vienne dans une immense manifestation contre la Constitution, le 15 mai 1848: réclamant le suffrage universel et un système monocamériste, ils font céder l'empereur, qui s'enfuit à Innsbruck avec la cour. L'élection d'une Constituante est prévue, et Ferdinand se trouve désormais en très mauvaise posture. | |
| | | Vidar Blackeu Viking
Nombre de messages : 2711 Localisation : Dans la forêt d'Asgard Date d'inscription : 13/02/2006
| Sujet: Re: Le «Printemps des peuples» (1848) Mer 3 Mai - 17:36 | |
| De la radicalisation à la répressionManifestations de Mars 1848 à Berlin Ces succès poussent les libéraux à étendre leurs revendications. Mais, très vite, l'autorité impériale va relever la tête. Les révolutionnaires, issus d'horizons politiques et sociaux différents, se divisent sur la conception de l'Etat et de la société à construire; les nationalités se dressent les unes contre les autres. L'échec du mouvement national italien Le premier moment marquant en est sans nul doute le 25 juillet 1848: à la bataille de Custoza, les armées piémontaises sont battues par les troupes du maréchal Radetzky. C'est la fin de l'hypothétique royaume de Haute-Italie rêvé par Charles-Albert. Cette défaite provoque paradoxalement la radicalisation du phénomène révolutionnaire en Italie. Les Constitutions libérales ne suffisent plus en effet à contenter les radicaux, exaspérés par cet échec qui augure mal de l'avenir du mouvement dans l'ensemble de la Péninsule, ni le petit peuple, réduit à la misère par des difficultés économiques qui ne font que s'aggraver - l'industrie du Nord est paralysée par la guerre, et la situation alimentaire désastreuse. La proclamation de la république Le 15 novembre 1848, après l'assassinat de son ministre Pellegrino Rossi, le pape s'enfuit à Gaète (24 novembre); le triumvirat alors mis en place et dominé par Mazzini finit par proclamer la république. À Florence, le grand-duc est chassé de la même manière. La voie choisie par Mazzini renoue nettement avec la tradition jacobine italienne: il décide de mener une politique populaire et anticléricale, en offrant aux chômeurs de grands travaux publics, en confisquant une large partie des biens de l'Eglise et en les redistribuant en lots. Mais il s'aliène ainsi les familles patriciennes de la Ville éternelle, et scandalise l'opinion catholique européenne, dont la réprobation va lourdement grever le destin de la République romaine. Le tournant pris par la révolution en Italie centrale pousse les conseillers les plus extrémistes de Charles-Albert à lui faire reprendre la guerre contre l'Autriche pour forcer la décision, et en même temps éviter de compromettre ses chances de réaliser l'unité sous son égide. Mais le Piémont est de nouveau battu, à Novare, le 23 mars 1849, et Charles-Albert forcé à l'abdication. La voie est libre pour les Autrichiens, qui envahissent les Etats pontificaux. Garibaldi, qui tente de défendre Venise, doit capituler le 22 août 1849. L'action menée par les Etats des Habsbourgs Les clivages sociaux, d'abord, ont affaibli le front de ceux qui se dressaient contre la tutelle de Vienne de l'Empire des Habsbourgs. L'intelligence du pouvoir impérial a été de savoir les attiser, tout en faisant des concessions à certaines catégories de la population, afin de défaire le front uni qui lui était opposé. Le désamorçage de la crise Ainsi, la révolte polonaise de Cracovie n'a plus pesé lourd dès lors que le gouverneur autrichien a su en détacher la paysannerie ruthène, en lui promettant l'abolition de la corvée (avril-juin 1848); l'abolition officielle et définitive du servage désamorcera le soutien que les campagnes autrichiennes pouvaient apporter à l'Assemblée nationale de Vienne (7 septembre 1848). De même, le pouvoir saura effrayer la bourgeoisie viennoise en faisant réprimer par la Garde nationale la révolte des ouvriers des Ateliers nationaux et des artisans endettés, fin août 1848. Les contradictions nationalistes D'autre part, les contradictions entre les différentes nationalités soucieuses de se libérer du même joug n'ont pas tardé à apparaître et à jouer en faveur du pouvoir central. Très vite à Prague, où Palacky a coupé d'emblée le mouvement des revendications des Allemands de Bohême; presque aussi vite en Hongrie, où Croates et Serbes, constatant que Lajos Kossuth leur refusait une représentation officielle à la Diète de Pest, ont élaboré un programme autonomiste (juin 1848). Vienne sut attiser le feu en laissant le ban (vice-roi) de Croatie, JelaIio, que Pest avait destitué, constituer une armée nationale croate. En septembre 1848, la rébellion contre les Magyars atteint la Slovaquie et la Roumanie. La Diète de Pest vit le danger trop tard, et attendit le 28 juillet 1849 pour proclamer solennellement l'égalité de toutes les nationalités en Hongrie. Le sursaut du pouvoir impérial Le pouvoir impérial avait repris l'initiative en profitant de l'agitation ouvrière pour occuper militairement Prague (12-17 juin) et empêcher que s'y tienne le congrès slave. Pendant l'été, la cour d'Innsbruck s'assure un appui qui se révélera capital, celui de la Russie; non seulement le très réactionnaire Nicolas Ier pèsera de tout son poids sur la scène internationale pour empêcher la France et la Grande-Bretagne d'apporter leur aide aux nouveaux Etats italiens, mais il alimentera les Habsbourgs en argent frais (il leur consent un prêt de 6 millions de roubles) et en troupes. L'armée autrichienne du général Windischgrätz bombarde Vienne et instaure l'état de siège dans la ville occupée, le 20 novembre. La Hongrie refuse alors son aide à la Constituante autrichienne, qui doit s'exiler en Moravie, où elle est finalement dispersée au printemps 1849. L'élimination de l'empereur Ferdinand, incapable, est décidée au profit du jeune François-Joseph, et un ministère ultraconservateur et catholique est constitué autour de Schwarzenberg. La Constitution qu'il promulgue au printemps 1849 consacre le triomphe de la réaction: fortement centralisatrice, elle réaffirme l'indivisibilité de l'Empire Dans le nouvel Etat, toutes les composantes ethniques - Allemands, Magyars, Slaves, Tchèques - se retrouvent avec les mêmes droits, mais tous soumis à un pouvoir monarchique renforcé. Reste à se retourner contre la Hongrie, qui a consommé la rupture en refusant son allégeance au nouvel empereur. François-Joseph s'assure le concours des troupes russes du général Paskevitch, qui obtiennent, fin août 1849, la reddition hongroise: la plupart des dirigeants magyars sont purement et simplement exécutés. L'échec de la révolution en Allemagne A la suite de ce sursaut de l'Empire, les Etats allemands connaissent un cheminement presque identique. A l'exemple de l'empereur autrichien, Frédéric-Guillaume IV, qui n'avait rien d'un monarque libéral, reprend lui aussi l'initiative, à l'automne 1848, contre les nouveaux pouvoirs apparus en Prusse. Prétextant des journées ouvrières d'octobre, il fait mettre Berlin en état de siège, dissoudre la Burgerwehr (garde nationale bourgeoise) et, en février 1849, le Landtag. À la place du suffrage universel, le roi impose une loi électorale dite «des trois classes» (qui restera intacte jusqu'en 1918), assurant la surreprésentation des gros contribuables et des grands propriétaires fonciers. La révolution libérale ayant été étouffée en Prusse par la monarchie militaro-administrative, le Parlement de Francfort n'a plus qu'une faible marge de manœuvre. Le refus de Frédéric-Guillaume IV Les menaces de révoltes de l'empire des Habsbourgs étant levées, le Parlement de Francfort cherche à sauver l'unité allemande en proposant la couronne d'une Kleindeutschland («Petite Allemagne», c'est-à-dire sans l'Autriche) à Frédéric-Guillaume, en avril 1849. Mais ce dernier ne peut l'accepter, d'abord parce que, roi de droit divin, il tolère mal qu'une assemblée la lui offre, ensuite parce qu'elle est assortie d'un système politique bicamériste (un Statenhaus représentant les Etats allemands, un Volkhaus élu au suffrage universel), qui ne lui laisse qu'un veto suspensif face à la puissance législative. Frédéric-Guillaume tente néanmoins de traiter directement avec les rois de Hanovre et de Saxe, mais les Etats d'Allemagne du Sud refusent de se jeter dans les bras de la Prusse (avril 1850). Des révoltes démocrates éclatent alors un peu partout dans le Sud, contre les autorités princières. La puissance autrichienne réaffirmée Mais elles sont matées par l'Autriche, qui réaffirme à cette occasion son statut de puissance tutélaire de la Confédération germanique. Bloquant la poursuite du projet d'«union restreinte» en Allemagne du Nord, Vienne contraint Berlin à la «reculade d'Olmütz» (29 novembre 1850) et à la reconnaissance de son droit à aller rétablir elle-même l'Electeur de Hesse, chassé par la populace. Le dernier vestige du rêve allemand de 1848 a vécu. Les unités nationales de l'Allemagne et de l'Italie vont pourtant se réaliser à peu d'années de distance. Mais elles s'imposeront par des voies différentes. | |
| | | Vidar Blackeu Viking
Nombre de messages : 2711 Localisation : Dans la forêt d'Asgard Date d'inscription : 13/02/2006
| Sujet: Re: Le «Printemps des peuples» (1848) Mer 3 Mai - 17:37 | |
| La Révolution française de février 1848La Barricade de la rue Soufflot , Paris, Février 1848 La monarchie de Juillet avait cru en finir avec la Révolution : la branche d'Orléans régnait en s'appuyant sur la haute bourgeoisie. Mais les derniers mois du règne de Louis-Philippe sont marqués par de profonds bouleversements qui vont aboutir aux journées révolutionnaires de février 1848, à son abdication et à la proclamation de la Deuxième République . La montée des mécontentements La monarchie de Juillet avait pris des mesures antiouvrières, telles que les interdictions du droit de grève et du droit d'association, et s'appuyait essentiellement sur la haute bourgeoisie, dont les affaires s'étaient considérablement développées. Mais l'année 1847 correspond à une crise à la fois agricole, financière et industrielle, qui touche notamment la Grande-Bretagne et la France. On enregistre nombre de faillites dans la grande industrie et une dépréciation du franc. Le mécontentement politique s'exprime lors des banquets organisés en 1847 à l'occasion des élections législatives d'août, et au cours desquels des idées de réforme sont émises. Il s'incarne également dans les grands intellectuels qui rappellent les heures glorieuses de la Révolution: en 1847 en effet paraissent l'Histoire de la Révolution de Michelet, le premier tome de l'Histoire de la Révolution française de Louis Blanc, et l'Histoire des Girondins de Lamartine. Le 2 janvier 1848, le gouvernement interdit le cours de Michelet au Collège de France. Par-dessus tout, le mécontentement est celui des classes populaires, souvent acculées à la misère. En Europe, l'heure est aux changements politiques: le 12 janvier 1848, la révolution éclate en Sicile; le 27, c'est au tour de Naples, et enfin, le 9 février, de Munich. A Paris, le banquet organisé par le Comité central des électeurs de la Seine, prévu pour le 19 janvier, est reporté au 22 février par le gouvernement, qui finit par l'interdire. Les journées de février Le 20 février, Armand Marrast, le directeur du National, invite la garde nationale, les étudiants et le peuple à manifester dans les rues le surlendemain. Mais les députés, qui craignent une émeute, se réunissent chez Odilon Barrot et proposent de mettre en accusation les membres du ministère Guizot. Celui-ci ne sait pas vers qui se tourner pour maintenir l'ordre: un régiment de dragons appelé le 22 remet le sabre au fourreau; les gardes nationaux, qu'il appelle à se rassembler devant les mairies d'arrondissement, se prononcent pour la réforme, contre Guizot et contre l'aventure révolutionnaire. C'est là le fait essentiel qui permet la révolution de février: le roi est lâché par « sa » garde nationale. Le 22 au matin, le cortège des manifestants s'est réuni au Panthéon et atteint le Palais-Bourbon. Au début de l'après-midi, l'affrontement tourne à l'émeute, notamment au quartier Latin et dans les faubourgs. Mais le soir, l'ordre est rétabli. La journée du lendemain scelle le sort du régime. La garde nationale refuse de combattre les manifestants et parfois même fraternise avec eux. A 14 heures, le roi renvoie Guizot et appelle le réactionnaire Molé, ce qui contente certains secteurs de la bourgeoisie, mais exaspère les faubourgs. En fin d'après-midi, sur le boulevard des Capucines, en face du ministère des Affaires étrangères, la troupe ouvre le feu, tuant une cinquantaine de manifestants. Dans la nuit, la nouvelle du «massacre des Capucines» se répand et enflamme Paris. Molé renonce et le roi appelle Thiers, qui demande à Bugeaud, l'un des chefs militaires les plus haïs, de rétablir l'ordre. Celui-ci échoue tandis qu'un numéro spécial de la Réforme réclame la République. Entre 12 h 30 et 13 h, Louis-Philippe abdique en faveur de son petit-fils, le comte de Paris, et quitte aussitôt les Tuileries pour gagner Londres. À 13 h 30, la foule envahit et saccage les Tuileries, pendant qu'à la Chambre, les députés de l'extrême gauche, sous l'impulsion de Lamartine, constituent un gouvernement provisoire, avec Dupont de l'Eure, Arago, Crémieux, Marie, Ledru-Rollin et Lamartine, auxquels les insurgés de l'Hôtel de Ville adjoignent Marrast, Flocon, le directeur de la Réforme, Albert, un ouvrier, et Louis Blanc, tout auréolé de son prestige d'historien populaire. La proclamation de la république La «république provisoire» est proclamée à l'Hôtel de Ville le soir du 24, mais la proclamation définitive de la république a lieu le lendemain matin. Blanqui demande qu'on choisisse le drapeau rouge; il s'ensuit une échauffourée devant l'Hôtel de Ville, mais Lamartine finit par imposer le drapeau tricolore. Le gouvernement provisoire, sous la présidence de Dupont de l'Eure, ancien membre du Conseil des Cinq-Cents, s'engage le 25 février à garantir le travail. Le lendemain, il abolit la peine de mort en matière politique, voulant par là échapper au souvenir de 1793. L'esclavage est aboli dans les colonies, et la liberté d'expression est garantie. Le principe du suffrage universel est affirmé. Le 6 mars, Michelet retrouve sa chaire du Collège de France. Les élections, d'abord prévues pour le 9 avril, sont repoussées au 23 avril. Le gouvernement est en effet désuni, mais surtout la pression de la rue, avec notamment ses chefs Barbès et Blanqui, s'accentue en même temps que le chômage s'accroît. Au milieu de cette inquiétude populaire, un enthousiasme certain réunit la population autour de l'idée républicaine: on plante des arbres de la liberté, que les curés vont bénir. Mais les élections, en envoyant à la Chambre une majorité modérée, si elles aboutissent à la proclamation solennelle de la Deuxième République et le Second Empire le 4 mai, marquent aussi l'élimination des chefs de la gauche. | |
| | | Contenu sponsorisé
| Sujet: Re: Le «Printemps des peuples» (1848) | |
| |
| | | | Le «Printemps des peuples» (1848) | |
|
| Permission de ce forum: | Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
| |
| |
| |
|