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 L'entre deux-guerres (1918/1939)

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Blackeu Viking
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MessageSujet: L'entre deux-guerres (1918/1939)   L'entre deux-guerres (1918/1939) EmptyMer 3 Mai - 1:03

L'entre deux-guerres (1918/1939) Usine_en_1923
Une usine en 1923


L'entre-deux-guerres recouvre la période comprise entre la Première et la Seconde Guerre mondiale. Ces vingt années de paix ont été marquées par un bouleversement durable des rapports de force internationaux, par l'émergence des idéologies totalitaires ainsi que par des progrès techniques considérables. Cette période constitue un ensemble cohérent et homogène qu'il convient d'appréhender dans sa globalité.



Les années vingt

Elles s'ouvrent dans la douleur. Le règlement général du conflit mondial pose de nombreux problèmes. L'Europe, dans son ensemble très affaiblie, peine à se remettre de ses blessures. Le bilan est dramatique sur le plan humain et matériel alors qu'un nouveau rapport de force international voit le jour. Une nouvelle carte du continent émerge qui crée de nouvelles tensions. Le calme ne revient en fin de compte qu'au milieu de la décennie.



Après 1925, c'est effectivement l'avènement d'une ère nouvelle - celle de la sécurité collective - qui semble s'imposer au monde : la SDN, après quelques débuts difficiles trouve ses marques alors que les accords de Locarno règlent au mieux les rapports franco-allemands. L'optimisme est général et la reprise économique apparaît comme solide après les déboires qu'a connus la conjoncture économique de l'immédiat après-guerre. La crise de 1929 réveillera partiellement des tensions encore vives qui ne feront que s'exacerber.



Les années trente

Apparaissent à nos yeux contemporains comme le négatif de la décennie précédente. Les années folles avaient effectivement vu le monde renouer avec la paix et une certaine prospérité économique. Ces dernières se concluent par une crise économique d’une ampleur mondiale dont la principale conséquence sera l’exacerbation de la concurrence entre les nations : les rivalités économiques ouvrent la porte à des rancunes politiques plus anciennes, souvent nées d’ailleurs du règlement à courte vue de la Première Guerre mondiale.



Les années 1930 voient également le retour des nationalismes, tant en Europe, qu’en Amérique du Sud ou en Asie ainsi qu’un développement sans précédent des idéologies totalitaires, qu’elles soient de droite (fascisme, nazisme) ou de gauche (stalinisme). Des conflits d'envergure mondiale, mettant aux prises de grandes puissances, annoncent le pire (Guerre civile espagnole (1936), Conquête de la Mandchourie par le Japon (1931), invasion de l’Abyssinie par l’Italie (1935) alors que la Société des Nations, chargée de garantir la paix mondiale, s’avère en fin de compte impuissante.



Les années 1930 sont également les témoins d’un formidable élan intellectuel, artistique et technique qui voit s’accélérer un véritable renouveau culturel et se développer le cinéma, la radio, l’aéronautique et l’automobile. Ces années de tensions extrêmes semblent annoncer nos sociétés actuelles, marquées par la rapidité des communications, la prégnance des idéologies et la consommation de masse.
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MessageSujet: Re: L'entre deux-guerres (1918/1939)   L'entre deux-guerres (1918/1939) EmptyMer 3 Mai - 1:04

Perceptions des conséquences de la guerre


L'entre deux-guerres (1918/1939) Europe_1924
L'Europe en 1924




Le traumatisme de la Première Guerre mondiale
La Première Guerre mondiale a vu en quatre ans la transformation de l'industrie des pays belligérants vers une économie de guerre, cause en Europe d'un bouleversement général des habitudes et des mœurs. Par ailleurs, les horreurs de la guerre de tranchées et la saignée démographique imputable aux pertes militaires considérables ont traumatisé les opinions publiques, ainsi que la nouveauté et l'ampleur des moyens de destruction mis en œuvre. L'expression populaire qualifie la «Grande Guerre» de «der des ders», dernière guerre avant une paix que l'on espère durable et universelle.

Dans le camp des vainqueurs français, britanniques, italiens et américains, les classes dirigeantes recherchent comment tirer avantage à la fois de la victoire militaire sur les empires centraux, et un moyen de mettre en place une organisation militaro-diplomatique qui éviterait une nouvelle guerre.

La doctrine Wilson
Cette aspiration à la paix est étayée dès 1918 par des innovations en matière de droit international, dont l'esprit est résumé par la proclamation américaine connue sous le nom de «quatorze points du président Wilson». Selon celle-ci, le maintien de la paix est inséparablement lié au droit des peuples à l'autodétermination et à celui des minorités ethniques (telles que celles qui constituent la mosaïque de l'Empire austro-hongrois) à disposer d'un Etat national.

Les «quatorze points» postulent également la nécessité universelle de la pratique de la démocratie parlementaire en matière politique, l'organisation d'un dispositif de sécurité collective en Europe et la mise en œuvre d'une politique de désarmement par l'action de la Société des Nations. L'issue victorieuse de la guerre apparaît ainsi aux vainqueurs comme le triomphe du droit et de la morale, de la liberté des individus et de l'émancipation des peuples sur les monarchies impériales centralisatrices: le traité de Versailles officialise cette vision du monde.

L'après-guerre vue par les vaincus
La perception des conséquences de la guerre est toute différente en Allemagne et dans les autres pays vaincus (Autriche, Bulgarie, Turquie). En effet, ce n'est que contrainte et forcée que l'Allemagne - dont le commandement a été contraint de demander un armistice, alors que le territoire national n'était nulle part envahi - signe le traité de Versailles, rapidement perçu par la frange politique la plus nationaliste comme un «diktat» humiliant que le parlement de la République de Weimar, qui a succédé en Allemagne à l'Etat impérial, ratifie avant même sa signature. Par ailleurs, en vertu d'une clause spéciale du traité, rédigée dans un esprit jusqu'alors inédit en matière de droit international, l'Allemagne est obligée de «reconnaître sa responsabilité et sa culpabilité dans le déclenchement de la guerre».

Peu après, les traités de Saint-Germain (19 septembre 1919) et du Trianon (4 juin 1920), démantèlent complètement l'ancien Empire austro-hongrois, en faisant de l'Autriche et de la Hongrie des Etats indépendants, largement amputés au profit de nouvelles nations créées pour la circonstance comme la Tchécoslovaquie, la Yougoslavie, la Roumanie, ou de pays ayant pris part à la guerre du côté allié: l'Italie reçoit de l'Autriche le Trentin et la ville de Trieste, la Dalmatie est cédée à la nouvelle Yougoslavie, la Hongrie perd la Transylvanie au profit de la Roumanie et la Slovaquie est rattachée à la Bohême-Moravie dans la République tchécoslovaque.

Au même moment, dans l'ancienne Russie, livrée à la guerre civile, s'organise sous l'impulsion des bolcheviks un nouveau régime révolutionnaire, prônant la «dictature du prolétariat», qui effraie le reste de l'Europe.
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MessageSujet: Re: L'entre deux-guerres (1918/1939)   L'entre deux-guerres (1918/1939) EmptyMer 3 Mai - 1:05

L'effervescence intellectuelle


Paradoxalement, la vie artistique et intellectuelle de l'Europe d'après-guerre est riche d'une multitude de mouvements politiques et idéologiques nouveaux, où bouillonnent les aspirations les plus utopiques ou les rancœurs les plus durables.

Montée en puissance du communisme
On assiste ainsi à une montée en puissance du communisme, et une partie importante des élites et des masses européennes tourne progressivement le regard vers les événements qui président à la naissance de l'Union soviétique, le premier Etat socialiste de l'histoire.

En Allemagne
En Allemagne, sous l'impulsion d'Adolf Hitler, auteur d'un coup d'Etat avorté en 1923, l'idéologie nationale-socialiste naît à la fois de ses réflexions rédigées pendant son séjour en prison et du chaos économique qui voit l'inflation atteindre en Allemagne des sommets vertigineux - l'homme de la rue compte en milliards de marks.

Parallèlement, le cinéma et les arts allemands connaissent une période très riche, illustrée, entre autres, par les films de Murnau et de Fritz Lang, les tableaux de Macke, Otto Dix et Max Ernst ou le roman Berlin Alexanderplatz (1929) d'Alfred Döblin.

En France
En France, une sensation générale de dégoût et de malaise éprouvée par une «génération sacrifiée», inspire à Paul Valéry cette constatation désabusée: «Nous autres civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles.»

En philosophie émerge la pensée d' Henri Bergson, qui réclame pour la société technicienne un «supplément d'âme», conséquence de la faillite de la science toute-puissante du XIX e siècle: la raison n'a pas empêché les tueries de la guerre de 1914-1918; bien au contraire, la technologie nouvelle les a décuplées.

Les arts
La peinture est ébranlée sous le choc de la révolution cubiste. La littérature, en France, voit la naissance et l'épanouissement du mouvement dada, puis surréaliste, tandis que les arts italiens subissent de leur côté l'influence du futurisme, mais cette littérature et cet art radicalement «modernes» sont de moins en moins compris du grand public. Enfin naît une nouvelle sensibilité, consciente de l'absurdité de l'existence humaine, qui commence à poindre dans les écrits de Franz Kafka.

Une métamorphose de la civilisation européenne
Cette période consacre ainsi la fin d'un monde et une profonde métamorphose de la civilisation européenne. On prend peu à peu conscience que l'Europe, continent le plus civilisé, a glissé dans la barbarie et qu'en dilapidant sa richesse dans le financement de la guerre, elle a perdu sa suprématie économique mondiale au bénéfice des Etats-Unis. Dans le même temps, les premiers mouvements d'indépendance font leur apparition dans les empires coloniaux.
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MessageSujet: Re: L'entre deux-guerres (1918/1939)   L'entre deux-guerres (1918/1939) EmptyMer 3 Mai - 1:06

La crise financière de 1929


L'entre deux-guerres (1918/1939) CON_EDG_003_A
Le krach boursier de Wall Street, le 24 octobre 1929, plongea les Etats-Unis dans une grave dépression économique.



A l'automne 1929, une crise financière et économique sans précédent s'abat sur le monde. Elle naît aux Etats-Unis, puis, avec plus ou moins de retard selon les pays, elle va s'étendre au monde entier dans les deux années qui suivent. Par ses répercussions économiques (baisse des prix, faillite de nombreuses entreprises, réduction de la consommation, crise de surproduction, effondrement des monnaies et développement du chômage) et ses conséquences politiques (disparition des régimes politiques fragiles, comme la République de Weimar, et montée des dictatures et des régimes autoritaires), elle est un événement considérable de l'entre-deux-guerres, qu'elle va diviser ainsi en deux périodes égales : un après-guerre euphorique (1919-1929) et un avant-guerre lourd de catastrophes (1929-1939) : «Vous n'avez pas de beurre, hurlera Goebbels aux Allemands, mais vous avez des canons, et avec des canons vous aurez du beurre !»

Le krach boursier
Alors que les banques américaines, anglaises, allemandes et françaises sont, comme les opérateurs boursiers jouant avec les capitaux, puissantes sur le marché international, leurs déboires vont déstabiliser l'ensemble des puissances économiques. En effet, la circulation des capitaux est devenue de plus en plus autonome vis-à-vis des productions et des échanges de marchandises : l'excès de spéculation boursière et l'irrationalité des comportements des agents de bourse ont accéléré le rythme de circulation de l'argent indépendamment des opérations économiques. C'est ainsi que la valeur totale des actions cotées à Wall Street, la bourse de New York, s'est accrue de 250% entre janvier 1925 et janvier 1929, donnant l'impression d'une «prosperity» décennale ; quant aux crédits bancaires américains, ils sont passés de 550 à 6'640 millions de dollars entre le 31 décembre 1924 et le 4 octobre 1929.

Mais, lorsque personne ne veut racheter les titres dont la valeur s'écroule, les cours s'effondrent davantage, provoquant à la fois une fragilisation du système de crédit net et de l'épargne : en retirant leurs avoirs, les déposants accélèrent la panique générale, ainsi que l'atteste l'apparition brutale du «krach boursier» américain, qui se déroule les 23, 24, 28 et 29 octobre 1929 : le jeudi 24 octobre 1929, la bourse de New York connaît une activité anormale : plus de 12 millions de titres sont jetés sur le marché; le mardi 29 octobre, les transactions atteignent un chiffre record : 16 millions d'actions changent de main, et les valeurs s'effondrent, entraînant l'ébranlement des cours sur les marchés mondiaux. Cette généralisation des pertes boursières provoque des faillites considérables (2 298 faillites bancaires, aux Etats-Unis, en 1931), des paniques en chaîne, et même des vagues de suicide chez les porteurs de titres ayant ruiné par affolement leurs clients.

La panique bancaire
L'asphyxie du crédit et la contraction de la demande ont fait entrer des acteurs qui n'ont en rien su anticiper la dépression dans une spirale perverse qui s'autoentretient, et vont étrangler une agriculture et une industrie affaiblies par une chute des cours. La mauvaise gestion de la monnaie a, d'ailleurs, si l'on en croit les économistes keynésiens et les monétaristes, amplifié la crise : les mesures prises dans le cadre de politiques monétaires trop restrictives (visant à limiter la création de monnaie) dans un contexte de besoin de liquidités stimulé par une croissance importante et un essor des emprunts liés à la spéculation, ont été à contre-courant des besoins de l'économie. Pour Milton Friedman, toute baisse soudaine de la masse monétaire est en effet un facteur de «grave dépression» (toute hausse soudaine ayant des effets tout aussi néfastes, si l'on en croit la théorie quantitative de la monnaie développée par l'auteur, étant source de tensions inflationnistes). C'est ainsi que la masse monétaire nord-américaine a diminué de 30 % entre 1928 et 1929. Pour l'économiste Irving Fisher (l'inventeur de la théorie quantitative), la crise prend ses racines dans l'économie d'endettement, qui fragilise l'ensemble du système, en empêchant les régulations (supposées automatiques) des marchés financiers et monétaires.

Le rapatriement de capitaux américains (entamé avant 1929, mais accéléré à partir de cette date) mais aussi britannique ou français d'Allemagne ont accéléré la faillite d'un système fragilisé par le plan Dave de 1924, faisant entrer le pays dans une crise profonde qui affaiblit l'économie européenne, et qui facilitera la montée du nazisme. Ce rapatriement fragilise tous les systèmes bancaires, affectant durement, entre autres, la Banque d'Alsace-Lorraine, l'Union Parisienne et surtout la Banque Nationale de Crédit. Or, bénéficiant de la monnaie la plus forte du monde, toujours garantie par l'or, la France subit un contexte déflationniste et des dévaluations des autres monnaies, notamment de la livre sterling (en septembre 1931), provoquant un renchérissement du prix des biens français sur le marché mondial qui freine les exportations de la nation, creuse le déficit commercial et accentue un chômage qui atteint 400'000 personnes en mars 1933 et 1'200'000 en mars 1934 (auxquelles il faut ajouter de 1,5 à 2 millions en chômage partiel).

Mais la lecture de la crise de 1929 à travers les seuls aspects monétaires ou financiers est insuffisante.

Une crise économique profonde
De nombreux observateurs s'entendent pour constater que cette crise avait connu des signes avant-coureurs dans le textile et les articles de luxe ; ainsi, la crise industrielle se traduit-elle par une baisse importante des prix pour les entreprises les plus chanceuses, et par des faillites pour les autres. La crise peut en effet en partie s'expliquer par la coexistence de prix de gros qui s'effondrent, et des prix de détail et des salaires rigides à la baisse. Or il n'y a pas eu de réaction suffisante face à cette situation déflationniste.

En France, l'industrie n'a pas bénéficié des mesures de modernisation dont elle avait besoin, tout comme l'agriculture : elle est affectée par des dysfonctionnements dans ses marchés, et un manque d'ambition de mesures qui refusent de s'attaquer aux structures, en limitant les interventions de l'Etat à l'octroi de primes et à la réglementation de la production et des marchés. Les excellents résultats en production de blé et de vin de 1932 à 1935 et la chute des cours mondiaux, accroissent le malaise paysan déjà bien entamé : les prix de gros du blé chutent de 40% entre 1931 et 1935.

La crise de 1929 se manifeste aussi par une crise commerciale, puisque le niveau des échanges internationaux diminue de moitié entre 1929 et 1932, et n'atteint plus, en 1935, qu'un tiers du niveau de 1929. Si bien que, affaiblie par une monnaie trop forte et un marché mondial qui s'effondre, la France voit se creuser son déficit commercial (c'est-à-dire un montant d'importations de biens supérieurs au montant des exportations), qui est de 8 milliards de francs (Poincaré) en 1929, et de 11,8 milliards en 1931.

Le cercle vicieux de la déflation bloque ainsi tout espoir d'une sortie rapide de la crise.

La spirale déflationniste
La notion de déflation correspond à une conjoncture économique dans laquelle la demande se contracte par rapport au volume de biens et de services produits, provoquant une baisse des prix et des revenus. Elle caractérise donc bien la crise de 1929 (contrairement aux crises ultérieures du XX e siècle, plus affectées par l'inflation, c'est-à-dire l'accroissement durable et soutenu des prix à la consommation).

La situation déflationniste, issue de la contraction de la demande mondiale, semble largement s'expliquer par des erreurs stratégiques des différents gouvernements, qu'il s'agisse du rapatriement des capitaux, ou de la mise en place de mesures protectionnistes (par exemple, aux Etats-Unis, la loi Hawley-Smoot, du 17 juin 1930, impose des droits de douane de 52% de la valeur des importations) : en provoquant des effets de rétorsion qui font diminuer de 40% le commerce international de produits manufacturés, le repli frileux de chacun sur soi (accéléré par l'échec de la Conférence internationale de Londres, en 1933) crée les conditions idéales d'une conjoncture déflationniste préjudiciable à tous. Les autorités cherchent alors à comprimer l'activité. Ainsi le PNB américain passe-t-il de 104 milliards de dollars en 1929 à 56 en 1933, au prix de 11 à 12 millions de chômeurs.

Les efforts d'assainissement monétaire des années 1931-1933 en France n'ont pas réussi à endiguer une profonde dépression économique initiée par la panique boursière de 1929, qui apparaît plus tardivement qu'ailleurs, mais se révèle plus longue et assez violente. La politique de Laval, en 1935, en imposant une déflation brutale, va accentuer la spirale dans laquelle sombre le pays, et précipite l'accession au pouvoir d'un Front Populaire (en 1936) qui va mettre en œuvre une politique alternative et opposée (de nature keynésienne). En effet, le gouvernement Laval décide d'une baisse de 10 % de tous les salaires publics, crée des impôts nouveaux affectant les très gros revenus et les fournisseurs de guerre, et opère une révision des pensions afin d'en réduire les abus. Mais ce malthusianisme économique ne suffit pas à sortir de la dépression, et le déficit budgétaire, provoqué par un montant de dépenses publiques supérieur au montant des recettes, est à peine diminué (10 milliards en 1935, contre 13 en 1933).

Cette crise semble donc marquer la faillite d'un certain système, insuffisamment contrôlé par les autorités économiques et monétaires, et les critiques contre les Etats-Unis sont fortes.

La responsabilité nord-américaine
Selon l'économiste C.P. Kindleberger, les Etats-Unis n'auraient pas su assumer leur fonction de nation dominante, notamment en refusant de maintenir un marché ouvert (par des mesures protectionnistes peu propices aux échanges), d'assurer des prêts anticycliques (qui auraient pu limiter l'instabilité des fluctuations et leur caractère perturbateur), de mettre en place un système de change fixes (qui aurait limité l'instabilité monétaires, affectées par des déséquilibres commerciaux), de coordonner les politiques économiques (au lieu de mettre en place des mesures sans cohérence d'ensemble, et avec des effets qui peuvent être contraires) et de prêter en dernier ressort pendant la crise financière (au lieu de faire cavalier seul).

La responsabilité américaine est d'autant plus importante que les Etats-Unis produisent à cette époque un peu plus de 40 % des biens manufacturés mondiaux ; ce, alors que les prix américains servent de prix directeurs au marché mondial. De plus, les cycles économiques semblent diffuser leurs effets déstabilisants dans le monde au bout de 3 à 6 mois, en affectant d'abord l'Allemagne, puis les autres puissances.

Les contradictions économiques
La prospérité qui avait précédé le déclenchement de la crise faisait toutefois l'objet de «disparités» ou, selon la terminologie marxiste, de «contradictions». C'est le cas en particulier, aux Etats-Unis, d'une conjoncture qui ne bénéficiait qu'à une large classe moyenne mais pas aux autres acteurs de la croissance, ce qui n'assurait qu'une base de consommation fragile. Certains observateurs, tel Alfred Sauvy (1898-1986) pour le cas français, soulignent le profond déséquilibre entre le secteur des biens d'équipement, dont la croissance était rapide et considérable, et celui des biens de production ou de consommation, à croissance lente. Il semble ainsi, dans une perspective keynésienne, que l'excès d'épargne, ait provoqué une faible propension moyenne à consommer (c'est-à-dire une faible part du revenu disponible consacré à la consommation), tandis que l'investissement était trop important, par rapport à la demande. Il est alors possible de parler de surproduction partielle, par rapport à des besoins insatisfaits sur le marché.

Mais il faut avouer que cette crise est problématique, dans la mesure où elle se prête à des interprétations qui ne font pas l'unanimité : aujourd'hui encore, les auteurs ne s'entendent même pas sur l'origine - exogène ou endogène - de cette complexe crise. Seules certitudes : elle est au centre de cycles économiques (comme l'a montré Joseph Aloys Schumpeter, dans ses analyses du lien entre croissance et fluctuation) qui concentrent l'entrelacement erratique de facteurs monétaires et de facteurs économiques, dans un contexte général de déflation, et elle jette les bases d'une réflexion nouvelle sur les modes d'intervention des pouvoirs publics, et sur les principes d'une régulation des marchés.

Une phase de transition entre deux modes de régulation
Dans une approche originale, les auteurs de l'Ecole de la Régulation (dont le chef de file est Michel Aglietta) voient dans toute crise économique majeure une phase de transition entre deux modes de régulation des marchés : les agents économiques doivent s'adapter aux transformations des structures économiques, et de nouveaux besoins et de nouvelles formes d'ajustement apparaissent : la crise de 1929 apparaît alors comme celle du difficile passage d'un mode de régulation concurrentiel, caractérisant le XIX e siècle, à un mode étatique de régulation qui accompagnera le fordisme, jusqu'à sa crise au début des années 1970.

L'évolution des modalités d'intervention de l'Etat, en particulier avec la création d'un Etat providence (le Welfare State), en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis et en France, par exemple, au milieu des années 1930, semble donner raison à une telle analyse. Il s'agit en effet pour les pouvoirs publics de compenser le marché et de l'aider à assurer une régulation économique et une régulation sociale plus efficace.

Ainsi la crise n'est-elle pas à la fois un révélateur de dysfonctionnements et de tensions, et un effectueur, en offrant de nouvelles conditions de fonctionnement, d'action et de changement ?
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MessageSujet: Re: L'entre deux-guerres (1918/1939)   L'entre deux-guerres (1918/1939) EmptyMer 3 Mai - 1:07

La montée des totalitarismes


Les totalitarismes triomphent
Dans le même temps, les totalitarismes triomphent en URSS avec le durcissement très net du régime de Joseph Staline (grandes purges des années 1930), en Italie avec l'arrivée au pouvoir des fascistes emmenés par le Duce, Benito Mussolini (1922), et en Allemagne avec la nomination d' Adolf Hitler au poste de chancelier, sur un programme ouvertement antidémocratique, anticommuniste et antisémite, qui prône l'instauration d'un régime totalitaire à parti unique (1933). D'autres régimes dictatoriaux se multiplient dans les Etats d'Europe centrale.

Communisme russe, fascisme italien, national-socialisme allemand ont ainsi, malgré des différences de structure et d'idéologie, nombre de traits communs: organisation de masse, omniprésence d'un puissant «appareil» de parti encadrant étroitement la population par la contrainte, importance accordée à la propagande, destitution ou promotion rapide rendues possibles au sein de l'appareil du parti, culte de la personnalité des dictateurs. Sur le plan politique, l'Union soviétique, affaiblie par une longue guerre civile, s'efforce d'accéder à la reconnaissance internationale tout en essayant d'organiser, par le biais du Komintern, l'union des partis communistes du monde entier.

L'italie et l'Allemagne
L'Italie mussolinienne se lance dans l'aventure coloniale en Ethiopie et en Libye, et l'Allemagne nazie pratique, sous l'impulsion de son Führer, une politique aggressivement annexionniste qui cherche à effacer l'humiliation du traité de Versailles.

Dans le même temps, les autorités mettent en place en URSS et en Allemagne des camps de concentration destinés à l'internement des opposants.

La guerre est le but d'Hitler
D'autre part, la Sociétés des Nations, qu'abandonnent successivement le Japon, l'Allemagne et l'Italie, s'avère incapable de faire respecter les sanctions qu'elle vote difficilement et tardivement contres les Etats qui choisissent de régler leurs différends par la force.

Il apparaît bientôt, notamment lors de la guerre civile d'Espagne (1936-1939), que la guerre est le but d'Hitler, qui réarme massivement son pays au mépris du traité de Versailles, malgré les protestations réitérées mais jamais accompagnées d'actions militaires des démocraties parlementaires. La Seconde Guerre mondiale sera ainsi imposée aux démocraties victorieuses de 1918.
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