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 Les Vikings

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Blackeu Viking
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Localisation : Dans la forêt d'Asgard
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MessageSujet: Les Vikings   Les Vikings EmptyDim 9 Avr - 2:43

Vikings, ce mot du vieux scandinave, employé dans les inscriptions runiques des X e et XI e siècles et les sagas des XII e et XIII e siècles, est généralement rapproché du vieux norrois vik, qui signifie «baie». Le viking étant alors celui qui allait de baie en baie pour se livrer à la piraterie. Il a été abusivement étendu à tous les promoteurs de la grande expansion scandinave du haut Moyen Age, notamment aux Suédois qui étaient partis nouer des contacts commerciaux avec les Baltes, les Slaves et les Grecs, et qui s'appelaient peut-être eux-mêmes ainsi, et furent en tout cas appelés dans les régions qu'ils traversaient et où ils s'installaient, Rus (Russes) ou encore Vøringr (Varègues).


Les expéditions vikings

Le terme «Vikings» s'est imposé internationalement pour désigner les Scandinaves qui, entre la fin du VIII e siècle et le courant du XI e , ont quitté leur terre d'origine pour l'Europe occidentale, les plaines russes, les îles de l'Atlantique Nord, et même le continent nord-américain, afin de s'y livrer au pillage, au commerce et, parfois, pour s'y installer massivement.

L'Europe occidentale
La Chronique anglo-saxonne mentionne à l'année 793 le premier raid viking que l'Histoire ait jamais enregistré: «Cette année-là des phénomènes inquiétants se manifestèrent en Northumbrie (le principal royaume du nord de l'Angleterre) et terrifièrent les habitants; de brusques lueurs apparurent dans le ciel, de féroces dragons traversèrent les nuées, une famine s'abattit sur le pays, et, le 8 juin, des pillards païens détruisirent l'église de Lindisfarne, ravageant et massacrant tout ce qui passait à leur portée.» Alcuin, religieux anglais devenu le principal conseiller de Charlemagne, s'en fit aussitôt l'écho sur le continent: «Jamais personne n'avait ressenti en Angleterre une terreur comparable à celle que viennent d'y semer les païens: nul n'imaginait qu'une pareille incursion de gens venus de la mer fût possible.»

Les premiers raids
Le premier raid avait été entrepris par des Norvégiens, qui, ayant contourné l'Ecosse, commencèrent en 795 à agresser les populations des côtes d'Irlande, et apparurent en 799 au large du littoral vendéen, avant de pénétrer en Méditerranée par le détroit de Gibraltar. Les Danois, quant à eux, atteignirent la Frise en 810; forts du tribut de cent livres d'argent en échange duquel ils vendirent leur départ, ils revinrent peu après, en Frise de nouveau et sur les côtes sud-orientales de l'Angleterre, puis dans la Manche; ils remontèrent alors les rivières, cherchant du butin à l'intérieur des terres, aussi bien en Grande-Bretagne que dans le vaste empire franc. Le phénomène viking allait durer deux siècles.

Les raids de pillage
Plusieurs étapes dans les modes d'exploitation des pays occidentaux par les Vikings se sont succédé à des rythmes variés suivant l'origine des protagonistes et les régions concernées. Il y eut d'abord les raids de pillage, dont les principales cibles furent les lieux où s'accumulaient les richesses: les ports (Dorestad, à la tête du delta du Rhin, plusieurs fois ravagé entre 834 et 863, Quentovic, sur l'estuaire de la Canche, et Hamwich, à l'emplacement de l'actuelle Southampton, dévastés en 842); les monastères (Lindisfarne en 793, Noirmoutier en 835, Saint-Wandrille et Jumièges en 841); les faubourgs des vieilles cités qui cumulaient la fonction monastique et la fonction portuaire (Cologne, Trèves, Londres, York, Rouen, maintes fois visités, ou Paris, attaqué en 845, 857 et 885-886). Au pillage pur et simple des trésors d'églises, des fortunes de marchands, à la capture du bétail ou des êtres humains, emmenés en esclavage, se substitua la mise à tribut, parfois instituée en un véritable racket, comme en Angleterre, où fut régulièrement prélevé à partir de 865 le danegeld, «or des Danois».

Les types d'installations
Les Vikings s'installèrent d'abord pour un simple hivernage dans des réduits côtiers, ensuite à demeure, par exemple dans les îles de la Seine - Oissel face à Rouen, Jeufosse face à Mantes - d'où leurs opérations, qui perdaient le caractère strictement saisonnier qu'elles avaient eu jusqu'alors, devenaient beaucoup plus imprévisibles et du même coup plus redoutables. La vulnérabilité de leurs victimes les encouragea à se fixer dans des villes (York, à partir de 876), à en fonder de nouvelles (dès 900, Dublin et les autres villes du littoral irlandais).

Un processus de fusion
A partir de petites capitales, de véritables principautés dotées d'institutions monarchiques prirent forme, parfois d'ailleurs avec l'accord des puissances locales à bout de ressources. C'est ainsi qu'en 911, au traité de Saint-Clair-sur-Epte, le roi de Francie occidentale, Charles le Simple, donna le comté de Rouen, noyau de la future Normandie, au chef viking Rollon, contre la promesse de son baptême et l'engagement de faire la police en basse Seine sur les autres Vikings. Ainsi put être engagé, comme d'ailleurs dans le «royaume d'York» ou dans telle ou telle enclave des côtes de Frise ou de Saxe, un véritable processus de fusion qui permit d'intégrer à plus ou moins long terme cette immigration d'origine nordique dans le peuplement de l'Europe occidentale. Mais ces nouvelles entités politiques excitèrent bientôt la convoitise des monarques scandinaves, notamment danois, qui, jusque dans la première moitié du XI e siècle, prétendirent au trône d'Angleterre.

L'Europe orientale
La reconnaissance de nouveaux itinéraires de commerce détermina les Scandinaves à s'aventurer vers l'est.

L'attrait commercial
Les Norvégiens eurent leur part dans ces voyages de découverte: on a gardé le témoignage du Norvégien Ottar, qui, dans les dernières décennies du IX e siècle, longea les côtes scandinaves jusqu'au cap Nord et à la mer Blanche pour y imposer des tributs aux Lapons, et surtout pour y chasser les mammifères marins, de préférence les morses et les baleines, sources de matières premières -ivoire, os, peaux, graisse -très prisées des artisans et des consommateurs européens du temps. Ce sont les Suédois qui furent les plus audacieux dans cette quête de nouveaux contacts commerciaux. Dès le début du IX e siècle, ils s'aventurèrent sur les rivages orientaux de la Baltique, puis, atteignant les cours supérieurs du Dniepr et de la Volga, ils parvinrent à la mer d'Azov en 839, et à la mer Caspienne en 864, sur les rives de laquelle ils se heurtèrent aux musulmans. Bien que l'on signale des attaques de Varègues sur Constantinople en 860 puis en 941, les Suédois s'adonnèrent surtout à l'exploitation marchande de ces routes.

L'empreinte «russe»
Les Suédois s'installèrent de préférence dans les bourgades fortifiées (les goroda) - Staraïa Ladoga, Novgorod, Kiev - où avait commencé de se développer une véritable activité économique. Certains d'entre eux, tel le fameux Riourik, prince de Novgorod, mentionné vers 860, y occupèrent bientôt des postes de pouvoir. Le qualificatif de «russes», qui leur était attribué, fut même donné aux grandes principautés des plaines slaves de l'Est (la question de l'origine slave ou normande des premières formations étatiques russes reste très disputée entre historiens «normannistes» et historiens «slavisants»). Ils contribuèrent surtout à établir une connexion directe - esquivant l'intermédiaire méditerranéen - entre les peuples islamisés des steppes du Sud-Est européen, côtoyés depuis les bords de la mer Noire jusqu'aux rivages de la Caspienne, et ceux des mers de l'Europe du Nord. La quantité de monnaies originaires du Proche-Orient musulman enfouies sur les bords de la Baltique montre l'importance acquise au cours des IX e -XIe siècles par la route commerciale des plaines «russes».

L'Atlantique Nord
L'aventure atlantique fut avant tout l'affaire des Norvégiens. Ceux-ci, ayant utilisé les Shetland et les Orcades comme autant de bases en direction de la Grande-Bretagne, furent, dès l'aube du IX e siècle, attirés vers les Faerøer (Féroé), puis, dès les environs de 860, vers l'Islande. Les premières colonies de peuplement y furent établies à partir de 870. Une société restée originale jusqu'au XX e siècle est née en Islande.

C'est de là qu'Erik le Rouge partit en direction du Groenland, atteint en 981, et où s'installèrent bientôt quelques communautés; de là encore que Leif Eriksson («fils d'Erik») le Rouge embarqua à la découverte du mythique Vinland: les découvertes archéologiques faites à l'Anse-aux-Meadows, dans le nord de Terre-Neuve, paraissent confirmer que les Vikings furent les premiers découvreurs occidentaux de l'Amérique, même si leurs établissements n'y connurent qu'une vie précaire et éphémère. En revanche, c'est à eux que les archipels du nord de l'Ecosse, les Faerøer et surtout l'Islande, durent l'essentiel de leur peuplement. Cette dernière, qui, suivant le Landnámabók, ou Livre de la colonisation, compilé à la fin du XII e siècle, reçut peut-être une vingtaine de milliers d'immigrants au cours du siècle qui suivit sa découverte par les Norvégiens, devint un des plus vivants foyers de la culture scandinave du Moyen Age.
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MessageSujet: Re: Les Vikings   Les Vikings EmptyDim 9 Avr - 2:43

Les motivations de la colonisation

L'ébranlement des peuples scandinaves fut un phénomène si général - au point, d'ailleurs, que même si l'on parle de mouvements essentiellement danois, ou norvégiens, ou suédois, certaines bandes ont pu avoir un recrutement tout à fait composite, mêlant parfois des éléments non scandinaves comme les Frisons - qu'on lui a volontiers cherché des explications globales.

Les sociétés scandinaves
On a avancé une hypothèse climatique: la progression de la glaciation aurait chassé les Scandinaves; mais il semble au contraire que l'Arctique connut du IX e au XI e siècle une phase de réchauffement. L'hypothèse démographique - un surpeuplement - n'a été confirmée par l'archéologie que pour la seule Norvège.

Les facteurs politiques
En Norvège, en Suède et au Danemark, la société était agitée par des facteurs déstabilisants. D'abord, les VII e et VIII e siècles virent partout la montée en force d'élites aristocratiques et de puissances monarchiques nouvelles, qui tentèrent d'imposer leur autorité sur les anciennes structures claniques. Plus tard - au cours des IX e -X e siècles - et surtout en Norvège et au Danemark, s'affirma l'entreprise centralisatrice de dynasties soucieuses de faire autour d'elles l'unité de leurs peuples. Dans tous les cas, il y eut des laissés-pour-compte, voire des rebelles, qui furent contraints à l'exil. Une fois leur autorité consolidée, les nouvelles puissances monarchiques furent parfois déterminées à poser les bases d'une authentique thalassocratie; ainsi explique-t-on l'apparition, dans le Danemark de la fin du X e siècle, de gigantesques casernements strictement planifiés - à Trelleborg (Trälleborg), Aggersborg, Fyrkat, Nonnebakken -, où étaient rassemblés et entraînés les équipages nécessaires à la réalisation des ambitions colonisatrices, spécialement anglaises, des rois danois de la dynastie de Jelling.

Le facteur sociologique
Il fut sans doute très décisif: chez tous les peuples scandinaves, le double moteur de l'ascension sociale était la réputation de bravoure au combat (la mort l'épée à la main ouvrait les portes du Walhalla) et l'accumulation des richesses mobilières, particulièrement les métaux précieux, que leurs orfèvres étaient capables de transformer avec talent. Les expéditions offraient naturellement l'occasion de cette double mise en valeur.

Les contacts avec l'Occident
Les marchands occidentaux
On peut penser que les choses commencèrent dans les eaux bordières de la Scandinavie même, aux dépens des marchands-navigateurs occidentaux qui, dès le courant du VIII e siècle, avaient commencé de s'aventurer le long des côtes scandinaves de la mer du Nord et de la Baltique. Celles-ci en effet, gagnées par un processus de proto-urbanisation, avaient vu se multiplier, souvent au fond de leurs fjords ou viks, des postes de traite - à l'origine modestes et parfois même saisonniers, mais généralement appelés à un brillant avenir - comme Ribe et Haithabu (Hedeby) au Danemark, Helgö et bientôt Birka en Suède, peut-être déjà Kaupang en Norvège.

Le «processus en boule de neige»
Les Frisons et les Saxons continentaux d'abord, puis les Anglo-Saxons et peut-être les Celtes insulaires vinrent visiter les Vikings - quand ils ne contribuèrent pas à leur premier développement - avec des bateaux remplis d'un fret d'autant plus attractif qu'il consistait souvent en vin, en céréales, en pièces de monnaie et en armes. Sans doute les premiers Vikings s'exercèrent-ils sur ces cargaisons. Sans doute leur suffit-il ensuite de remonter, suivant les indications données par les Occidentaux eux-mêmes, les routes maritimes et fluviales par lesquelles leur étaient parvenues ces richesses pour en atteindre la source. Les premiers succès firent le reste: avec Lucien Musset, le meilleur historien français des Vikings, on peut alors parler d'un «processus en boule de neige».
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MessageSujet: Re: Les Vikings   Les Vikings EmptyDim 9 Avr - 2:44

Les navires vikings

Les Vikings avaient hérité de leurs ancêtres la tradition de bateaux longs conçus uniquement pour être mus à la force des bras. Ce n'est pas avant le VII e siècle, et plus probablement le VIIIe siècle, que, sans doute par contamination du modèle occidental devenu plus familier grâce aux récents contacts, les bateaux scandinaves furent dotés d'un gréement rudimentaire (simple voile carrée ou rectangulaire accrochée à une vergue hissée à un unique mât), et que la coque fut adaptée à ce nouveau mode de propulsion.

Les techniques de construction des bateaux
Les spécimens découverts à Vestfold et surtout à Roskilde montrent le génie des charpentiers scandinaves.

Une structure commune
La technique de la construction à clin était systématique: les planches du bordé se chevauchant à la manière des tuiles d'un toit, il suffisait, pour les faire tenir les unes avec les autres, de les clouer ou de les riveter solidement sur toute leur longueur, sans qu'une charpente intérieure lourde et rigide fût nécessaire pour assurer la cohésion de l'ensemble. Les bateaux vikings étaient donc légers et résistants. D'autre part, le fond plat fut pourvu d'une simple planche de quille: l'embarcation, au profil transversal en accolade, offrait à la fois stabilité et résistance à la dérive.

Les variantes
Sur cette structure commune, des variantes pouvaient intervenir selon que le bateau était destiné à la guerre, au commerce, au cabotage ou aux expéditions lointaines. Le vocabulaire des inscriptions runiques et des sagas rend compte de ces différents usages: il est question de knörr pour le gros navire de commerce, et de langskip pour le «long navire» de guerre - jamais en tout cas de drakkar (ce mot, signifiant «dragon», n'a servi dans certaines sagas qu'à désigner de grandes flottes singularisées par des figures de proue représentant cet animal fabuleux).

La maîtrise de la navigation
La maniabilité des navires
Les navires avaient, une fois gréés, une souplesse et une maniabilité supérieures à tous leurs concurrents des mers septentrionales. Leur faible tirant d'eau et leur fond plat leur permettaient de remonter très en amont les plus petites rivières, en même temps qu'ils autorisaient l'échouage sur n'importe quel haut-fond, rive ou plage alluviale ou sableuse. Grâce à leur parfaite symétrie, ces embarcations pouvaient, une fois échouées, repartir en arrière sans manœuvre contraignante, l'étrave devenant étambot et inversement. Par bon vent, elles atteignaient une vitesse d'une dizaine de nœuds (18,52 km/h) et couvraient une distance de 80 milles nautiques (près de 150 km) par jour; un important équipage à la rame pouvait toujours se substituer à la voile. On pouvait aisément y charger, et en décharger, des chevaux, ce qui permettait de prolonger l'expédition sur la terre ferme.

Les connaissances maritimes
Peut-être un pilote à l'avant du navire, en tout cas un timonier à l'arrière, occupé à manœuvrer une rame de gouverne latérale, assuraient la progression du navire, dans la mesure du possible au plus près des côtes. Mais pour maintenir son cap dans les expéditions lointaines il était nécessaire, en ces temps où l'on ignorait la boussole, d'observer la direction des vents dominants (il y avait souvent sur les bateaux une petite girouette), la forme des vagues, l'orientation des courants, les itinéraires de migration des cétacés et des oiseaux marins, la position du soleil et des étoiles: une connaissance empirique des choses de la mer et surtout l'expérience transmise de génération en génération furent les conditions indispensables du succès.

Iconographie et archéologie
On a découvert, et on continue de découvrir, de nombreuses épaves de bateaux, aussi bien dans les tombes (le voyage dans l'au-delà était censé se faire en bateau) qu'au fond des fjords: ainsi celles trouvées dans les tombes royales du Vestfold, au bord du golfe d'Oslo, à Tune en 1867, à Gokstad en 1880, et à Oseberg en 1903. En 1962, dans le fjord de Roskilde, près de Copenhague, ont été retrouvées les coques de cinq navires d'aptitude et de gabarit différents qui avaient été délibérément échoués au début du XI e siècle. Mais les épaves ne livrent presque aucune information sur les superstructures des bateaux, notamment sur leur gréement.

En revanche, une iconographie très riche - pierres gravées suédoises du VIIIe siècle, comme celles de Lärbro ou de Smiss; monnaies au type du navire du IX e siècle, comme celles de Haithabu - éclaire les étapes de l'adoption de la voilure et des équipements (mât, vergue, haubans, garcettes). Ces données ont permis la reconstitution de répliques fiables, dont les aptitudes ont été testées en mer: ainsi est-ce grâce à l'archéologie expérimentale que l'on a une idée des performances des bateaux vikings en matière de capacité de jauge, de vitesse, ou de résistance aux courants ou aux vents contraires.
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MessageSujet: Re: Les Vikings   Les Vikings EmptyDim 9 Avr - 2:44

Les conséquences en Occident

Les premiers raids vikings furent certainement désastreux pour l'Occident. Car si Charlemagne, Louis le Pieux et Charles le Chauve prirent quelques dispositions de défense côtière ou fluviale, ils ne purent rien faire devant l'imprévisibilité et la rapidité des attaques; l'armée était en effet trop lourde à déplacer. Certains ports, comme Dorestad, furent détruits et définitivement abandonnés; les circuits de communication furent démantelés; de nombreuses abbayes furent pillées et leurs précieuses reliques enlevées, quand les moines n'avaient pas eu le temps de les mettre à l'abri au terme de ces translations processionnelles dont les archives de Saint-Wandrille ou de Noirmoutier ont conservé le souvenir.

Les premiers succès occidentaux
Il fallut attendre la fin du IX e siècle pour que les Occidentaux remportent leurs premiers succès. En Angleterre, le roi Alfred de Wessex (871-899), qui avait mis le pays en défense en multipliant les fortifications dans l'ensemble de son royaume, et avait été capable de vaincre à plusieurs reprises les Vikings sur le champ de bataille, cristallisa autour de sa couronne une première conscience nationale anglaise, qui trouva un écho dans une abondante littérature et prépara le terrain à l'unité des peuples anglo-saxons. Sur le continent, la riposte la plus efficace vint des pouvoirs locaux, notamment de certains comtes, dont l'autonomie militaire accéléra le processus d'éclosion des grandes principautés territoriales ou féodales: la fortune politique des Robertiens, comtes de Tours puis de Paris et ancêtres des Capétiens, reposa en grande partie sur les succès, ou au moins sur le prestige, qu'ils acquirent, tel Robert le Fort, mort au combat en 866, dans la lutte contre les «Normands».

Le redémarrage économique
L'Occident n'attendit pas les premières victoires pour sortir de l'engourdissement économique dans lequel l'insécurité aurait pu l'enfermer.

Relance monétaire
D'opportunistes négociants avaient cherché à tirer parti de la présence des Vikings et s'étaient accrochés à leur sillage pour leur vendre des produits prohibés (armes par exemple) dont toute une législation s'évertua à interdire la traite. Certains historiens ont même considéré que, par la pratique des tributs, une bonne partie des métaux précieux jusqu'alors thésaurisés en Occident fut remise en circulation sous forme monétaire, ce qui contribua au redémarrage de l'économie marchande.

Relance artisanale
Il est certain qu'à partir du moment où ils se furent installés dans les pays occidentaux et qu'ils y eurent acquis la maîtrise de contrées entières (l'Angleterre du Nord, devenue Danelaw, «pays de la loi danoise»; le comté de Rouen, bientôt dilaté en une énorme Normandie; l'île de Man; ou encore certaines portions du littoral irlandais), les Vikings se muèrent en agents économiques. Les fouilles d'York ou de Dublin, effectuées entre 1961 et 1981, ont montré que les occupants scandinaves (installés ici depuis les environs de 900, là depuis 876) avaient multiplié les structures artisanales de bois ou de clayonnages dans lesquelles on filait, tissait, fondait le métal, tournait la céramique, travaillait l'ambre, l'os et l'andouiller.

Relance des échanges
A York notamment se développa un atelier monétaire, sans doute alimenté par les butins et les tributs, dont les frappes ont été retrouvées depuis l'Irlande jusqu'à l'Uppland suédois. Ainsi, grâce aux Vikings, l'Occident fut intégré dans un nouveau système de communications nord-européen, considérablement élargi puisqu'il s'étendait désormais de la mer Blanche jusqu'aux îles de l'Atlantique Nord. Les principaux agents de ces échanges furent les Scandinaves eux-mêmes, et surtout ceux qui s'installèrent en Occident, Vikings d'York, ou encore Normands.

La Normandie
L'histoire de la Normandie des X e -XI e siècles est celle d'une incontestable réussite.

La fusion entre Scandinaves et Francs
Les comtes puis les ducs successeurs de Rollon gardèrent, jusqu'à Guillaume le Conquérant, dans leur politique d'expansion un esprit d'entreprise et une pratique de la conscription typiquement scandinaves, en même temps qu'ils utilisèrent à leur avantage un corpus d'institutions majoritairement hérité du droit franc. Grâce à cette dualité et à la fusion réussie entre Scandinaves et autochtones, ils surent faire de leur principauté l'Etat féodal le plus puissant d'Occident.

L'héritage de l'esprit de conquête
De la même façon, on peut dire que c'est grâce à leur dynamisme et à la préservation d'un réel savoir-faire en matière de construction navale (qui a laissé beaucoup de traces dans le vocabulaire technique normand, puis français) que les Normands du XI e siècle purent se lancer dans les aventures lointaines qui les conduisirent non seulement en Angleterre, mais aussi en Italie du Sud, en Sicile et dans le Proche-Orient des croisades.

Une fois passé le premier choc, l'Occident tira donc de sa rencontre avec les Vikings une force nouvelle et un élargissement de ses horizons. En même temps, grâce à la multiplication des contacts économiques et culturels, la Scandinavie adhéra à la chrétienté occidentale.
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MessageSujet: Re: Les Vikings   Les Vikings EmptyDim 9 Avr - 2:45

Les conséquences en Scandinavie

La fuite ou l'expulsion des concurrents, et surtout la prise en main, en fin de période et seulement au Danemark et en Norvège, des expéditions par les rois n'ont pu que conforter la montée en puissance des monarchies scandinaves, d'autant qu'en prenant le contrôle des principaux lieux de traite ces dernières ont cherché à tirer un profit matériel de l'expansion viking ou varègue; celle-ci a en effet accéléré le processus de développement des villes (Ribe, Kaupang, Haithabu et Birka).

Le développement des villes
Les apports extérieurs
Au premier Haithabu, modeste poste de traite établi par les Occidentaux vers le milieu du VIII e siècle au fond du fjord de la Schlei, à la base sud-orientale de la péninsule danoise, le roi des Danois Godfried voulut substituer peu après 800 une véritable ville bâtie de toutes pièces, suivant un développement planifié, située quelques centaines de mètres au nord. Il y attira d'autorité marchands occidentaux (au premier chef frisons et saxons), slaves et danois; le port fut équipé de quais et de brise-lames, et de nombreux ateliers d'artisans y prospérèrent. A peu près au même moment, le comptoir de Birka, sur l'île de Björkö, dans le lac Mälaren, se substitua à celui, situé sur un îlot voisin, de Helgö, attirant à lui des Suédois, certes, mais aussi des Frisons, des Baltes et des Slaves; l'autorité et les intérêts du roi des Svear, devenus Sueones dans les sources franques, y étaient défendus par un préfet. A Birka comme à Haithabu arrivaient, et quelquefois étaient transformés, des produits venant non seulement de l'horizon scandinave, mais aussi d'Occident et d'Orient. C'est là que, dès les environs de 825, furent frappées, avec l'argent des rapines, les premières monnaies scandinaves, inspirées des modèles venus d'Occident.

Les activités artistiques
Les métaux précieux furent surtout convertis en bijoux et autres objets d'art. Fibules, boucles, bagues, torques, broches, appliques, amulettes, pendentifs, bracelets, garnitures de harnachement sont autant de supports sur lesquels les artisans scandinaves ont multiplié les entrelacs, torsades et figurations animalières démesurément étirées, semblables à celles que révèlent les gravures sur pierre (nombreuses dans l'île de Gotland) et les sculptures sur ivoire de morse, sur andouiller de renne, et surtout sur bois (admirablement représentées dans le mobilier de la fameuse tombe norvégienne d'Oseberg, du début du IX e siècle).

La christianisation
Entre autres offrandes funéraires, les archéologues ont retrouvé sur la poitrine d'un individu enterré au Xe siècle dans une tombe de Birka la croix du Christ en même temps qu'un «marteau de Thor» (attribut du dieu scandinave du Tonnerre).

Premières étapes
On entrevoit comment les contacts avec l'Occident ont pu amorcer la christianisation dans la Scandinavie la plus profonde. Certes le Christ fut dans un premier temps reçu comme une divinité de plus dans un panthéon qui en comprenait déjà de nombreuses: d'ailleurs un même moule de bronzier du X e siècle découvert à Trendgåarden, au Danemark, servait à la fois à la fabrication des marteaux et des croix, les uns et les autres conçus comme des amulettes. L'histoire a néanmoins retenu les efforts de Louis le Pieux pour tenter dans les années 820, comme en riposte aux raids vikings, l'évangélisation de la Scandinavie par l'envoi à Haithabu et à Birka de plusieurs missionnaires, en particulier de saint Ansgar (ou Anschaire) de Corbie, «premier apôtre du Nord». Malgré les brutales réactions païennes, une première pierre était posée.

L'adhésion des rois
La christianisation des Vikings de Rouen, d'York et de Dublin (sans parler de celle, sous influence byzantine, des Varègues de Russie), avec lesquels les contacts étaient restés multiples, et la progressive pacification, dans le courant du Xe siècle, des relations entre l'Occident et la Scandinavie facilitèrent la tâche ultérieure des missionnaires, essentiellement venus d'Angleterre et de Germanie. Suivant un processus courant dans l'évangélisation des peuples «barbares», c'est l'adhésion des rois - rois uniques désormais - à la nouvelle religion qui entraîna à plus ou moins court terme, par la persuasion ou la contrainte, l'adhésion des populations; ainsi, Harald Blåatand «Dent bleue» (vers 940-vers 985) et Sven Tveskägg «Barbe fourchue» (vers 985-1014) implantent le christianisme au Danemark, tandis que Olav Tryggvesson (995-1000) et Olav le Saint Haraldsson (1015-1030) l'introduisent en Norvège. Si ces derniers avaient découvert le christianisme à l'occasion de longs séjours en Angleterre, les deux premiers le reçurent de missionnaires allemands directement venus à Jelling, leur petite «capitale».

La construction d'églises
Sitôt baptisé, Harald fit élever une église dans l'immédiate proximité du tumulus où avait été enterré son père, le roi Gorm l'Ancien, il y fit transférer sa sépulture et dresser à proximité une grande pierre runique «en l'honneur de Gorm, son père, et de Thyre, sa mère», sur laquelle les entrelacs gravés suivant la plus ancienne tradition enchâssaient une naïve représentation du Christ. Avec la christianisation de l'Islande, contemporaine de celle de la Norvège, et avec celle, finalement sous obédience occidentale, de la Suède, réalisée par paliers jusqu'à ce que le temple d'Uppsala, haut lieu des liturgies païennes, fût remplacé par une église, c'est tout le monde scandinave qui bascula dans la chrétienté.

Vers l'extinction des Vikings
Avec la christianisation s'achevait l'ère des Vikings: si, spécialement en Suède, des pierres runiques étaient encore élevées à la mémoire de parents morts dans un lointain outre-mer, elles étaient désormais ornées d'un décor cruciforme; si, en Norvège, les sculpteurs sur bois et les architectes réalisaient encore des prodiges, c'était dans la construction et dans la décoration des églises; enfin, si en Islande une littérature écrite se mit pour la première fois à fleurir, c'était pour célébrer les hauts faits des Anciens et les bienfaits de leur conversion au christianisme.

Par les moyens de la guerre et par ceux de la paix, les Vikings avaient su créer un système de communications homogène depuis l'Atlantique Nord jusqu'à la mer Caspienne, faisant de la Baltique une autre Méditerranée, aire de rencontre entre l'Occident et l'Orient, comme le montrent les nombreux trésors monétaires des X e -XI e siècles, où les deniers de l'Ouest côtoient les dirhams de l'Est, et comme le montre surtout la découverte à Helgö, à quelques mètres l'une de l'autre dans le même niveau d'occupation des VIII e -IX e siècles, d'une crosse épiscopale venue d'Irlande et d'une statuette de Bouddha venue du Cachemire.
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