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 L'Empire d'Occident et Charlemagne

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Blackeu Viking
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MessageSujet: L'Empire d'Occident et Charlemagne   L'Empire d'Occident et Charlemagne EmptyDim 9 Avr - 2:36

L'Empire d'Occident et Charlemagne MOY_CHA_003_A
L'empire carolingien sous Charlemagne

L'Empire d'Occident est l'un des deux Etats issus du partage de l'Empire romain à la mort de Théodose (395). Il avait pour capitale Rome, alors que celle de l'Empire d'Orient était Constantinople. L'Empire d'Occident s'effondra en 476, mais fut rétabli par Charlemagne en 800 et trouva son prolongement dans le Saint Empire romain germanique.


La christianisation de l'Occident

Les premiers siècles
Sorti de la clandestinité au IV e siècle, le christianisme s'organise, et l'Eglise de Rome cherche à imposer son autorité. Elle y parvient en Europe occidentale, malgré les conflits avec les évêques. A travers les actions des moines comme par son influence sur les pouvoirs laïcs, elle imprègne d'une morale et d'une culture spécifiques la société dont elle constitue l'un des trois ordres. Elle est au cœur de toutes les tensions qui transforment le monde antique en monde féodal, et marque durablement le paysage, l'organisation du travail et les mentalités.

Le christianisme survit durant les trois premiers siècles de son histoire dans les difficiles conditions de clandestinité que lui imposent l'intolérance et les persécutions qui en découlent. Toutefois, les communautés se dotent progressivement d'évêques, autrement dit de conseillers, de gardiens de la foi (évêque vient du grec episkopos, episcopus en latin, qui veut dire «surveillant»). Sous le règne de Constantin, la tolérance s'installe et les persécutions prennent fin. En 381, l'Empire romain reconnaît le christianisme comme religion officielle. Les Eglises remplacent alors les communautés clandestines. Peu à peu émergent des évêchés influents: quatre en Orient, les patriarcats d'Alexandrie (Alexandria sur la carte), de Jérusalem, d'Antioche et de Constantinople; un en Occident, à Rome (Roma). L'évêque de Rome, à titre de successeur de l'apôtre Pierre, prend en charge la difficile mission de convertir et d'encadrer les peuples d'Occident.

En 400, saint Jérôme traduit la Bible en latin; cette traduction, la Vulgate, devient la version officielle de l'Eglise latine. Peu à peu, du V e au IX e siècle, le pouvoir des évêques de Rome s'impose dans la partie occidentale de l'ancien Empire, malgré les difficultés dues à la poussée et à l'installation des peuples germaniques. Le pape Gélase I er (492-496) affirme la primauté de l'Eglise de Rome. Ce fait marque le début de longs conflits avec l'Empire byzantin. L'Eglise est maintenant une structure hiérarchisée que Rome entend gouverner. Au cours des grands conciles des IV e et V e siècles, elle élabore les règles dogmatiques et juridiques qui définissent les formes orthodoxes de la croyance chrétienne et condamne celles qui ne sont pas en conformité avec le dogme (hérésies).

L'Eglise d'Occident après le Ve siècle
Naissance de la théologie
Les évêques exercent leurs fonctions dans des villes romaines dominantes. Dans ce contexte urbain, ils maintiennent un encadrement que les pouvoirs administratifs romains, qui s'effondrent, ne peuvent plus assurer. Les évêques sont non seulement les protecteurs des villes, enfermées dans leurs enceintes, mais aussi les interlocuteurs des pouvoirs germaniques, lorsqu'ils ont pu en obtenir la conversion et lorsque, comme en Gaule ou en Espagne, ils sont à même de se réunir en concile pour compléter la législation qui organise la vie quotidienne du clergé séculier, le «clergé dans le siècle», et dans une large mesure la vie morale des laïcs. En Occident, leurs tâches quotidiennes sont plus simples et d'ordre plus pratique qu'en Orient, où ils débattent, à Athènes, à Antioche comme à Alexandrie, les questions issues des traditions philosophiques. La naissance de la théologie a lieu en Orient. Elle est l'œuvre de saint Augustin, évêque d'Hippone (Hippo Regius), dont la pensée influencera la chrétienté occidentale pendant des siècles.

Création des monastères
A l'opposé de chrétiens qui, dès le IV e siècle, choisissent de vivre en ermites en s'isolant dans le désert, d'autres chrétiens, en Occident, vont se grouper dans des collectivités: les monastères. Au VI e siècle, un Italien, Benoît de Nursie, élabore une règle destinée aux moines, qui régit jusqu'au moindre détail leur vie quotidienne. Un principe nouveau y apparaît, l'interdiction de toute propriété personnelle: «Si quelqu'un était surpris s'adonnant à ce vice détestable , on l'avertirait une première et une seconde fois; s'il ne s'amendait pas, il serait soumis à la correction.»

C'est dans un monastère du Mont-Cassin (Italie), régi par cette règle, que naît l'ordre des Bénédictins, fondé par Benoît de Nursie et bientôt représenté dans tous les pays d'Occident. Les monastères bénédictins - où les moines sont dits «réguliers» - seront jusqu'au X e siècle des centres importants de conversion. Une autre contribution au développement de l'institution monastique est due à l'action du moine irlandais Colomban, au VI e siècle, qui fondera de nombreux monastères en Europe, jusqu'en Italie du Nord.

De nouvelles conversions
La papauté a maintenu le principe de son droit à diriger l'Eglise universelle, mais, en Orient, elle a échoué devant l'opposition coordonnée des empereurs byzantins et des patriarches de Constantinople. A la fin du VI e siècle, un évêque de Rome, Grégoire I er , donne un nouvel élan à la politique de conversion et obtient du roi anglo-saxon du Kent qu'il adhère au christianisme. Un premier évêché dépendant de Rome, celui de Cantorbéry, est fondé en Angleterre. Au VIII e siècle, le développement des relations commerciales entre l'Angleterre et l'Italie, par la vallée du Rhin, crée des conditions favorables à de nouvelles conversions, notamment chez les Francs et d'autres peuples germaniques. Les clercs formés dans les monastères anglais jouent un grand rôle dans la reprise en main de la Gaule par les Carolingiens.

L'époque carolingienne
L'autorité de Rome se renforce aux VIII e et IX e siècles, les Lombards ayant été vaincus par les Carolingiens. Mais le pouvoir pontifical commence alors à se monarchiser, à s'éloigner des réalités locales auxquelles sont confrontés les évêques, les prêtres et les moines. Sans soutien suffisant, ceux-ci ne peuvent réellement faire obstacle aux aristocrates qui convoitent les terres dont sont dotées les paroisses rurales. Pourtant clergé séculier et clergé régulier locaux jouent un rôle irremplaçable: l'appui qu'ils apportent aux Carolingiens est le plus puissant facteur d'unification de l'Occident.

L'Occident chrétien s'épanouit à l'époque carolingienne. La dynastie, soumise inconditionnellement à l'Eglise, construit des monastères: Corbie, Saint-Riquier, Tours, en France; Lorsch, Fulda, Corvey, en Allemagne. Dans les cathédrales, les évêques rassemblent, à Pâques, tous ceux qui, adultes, veulent recevoir le baptême. Peintures sur manuscrits, beaux monuments de pierre, peintures murales constituent progressivement un art original, totalement chrétien, rompant avec l'ancien art romain.

Le latin, langue unificatrice
L'un des aspects remarquables du processus d'unification de l'Occident est la généralisation de l'emploi du latin. L'effort pour retrouver un latin grammaticalement correct est poursuivi du VIIe au IX e siècle. Cet effort se traduit par la création d'une école dans chaque évêché et, dans les monastères, de centres de copie de manuscrits anciens. Au IX e siècle, le travail de copie est servi par une écriture superbe, utilisée dans tout l'Occident: la minuscule caroline. Le clergé, les nobles et les rois s'expriment en latin, tandis que dans le peuple naissent, parlées mais non écrites, des langues qui amalgament plus ou moins l'héritage latin et les expressions germaniques, et dont sont issues les langues de l'Europe moderne, non sans conflits ni difficultés.

Des frontières menacées
L'Occident n'est ni stable ni sûr de son avenir. Les guerres intérieures ne disparaissent pas, ni les désordres créés par certains aristocrates. Jusqu'à la mort de Charlemagne cependant, la violence est détournée au-delà des frontières: Saxons, Frisons, Lombards, Slaves contiennent mal cette poussée vers le nord, l'est et le sud; les troupes franques conquièrent également le nord-est de l'Espagne jusqu'à l'Èbre. Mais, au nord, les Scandinaves, encore non chrétiens, commencent une expansion vers le sud dont la chrétienté subira le choc. Au sud, les navires musulmans sont redoutés en Méditerranée occidentale. A l'est, les Slaves, qui ont fléchi un moment, entre l'Elbe et l'Oder (Odra), résistent de mieux en mieux aux offensives impériales. Et à l'est encore, à la fin du IX e siècle, réapparaît une menace grave qui concerne aussi les Slaves: celle des Hongrois venus d'Asie.
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MessageSujet: Re: L'Empire d'Occident et Charlemagne   L'Empire d'Occident et Charlemagne EmptyDim 9 Avr - 2:37

Les Mérovingiens

Les Mérovingiens tiennent leur nom de Mérovée, roi légendaire franc salien, père de Childéric I er et grand-père de Clovis, et constituent la première dynastie royale de France, qui régna pendant trois siècles (milieu du V e siècle-751).

Une royauté franque
A la mort de Clovis (511), le royaume franc, dont il fut le véritable fondateur, s'étend sur la majeure partie de la Gaule et sur une partie de la Germanie, à l'est du Rhin. Ses fils annexent le royaume burgonde en 534, occupent la Provence vers 537 et soumettent les peuples du sud de la Germanie ( Alamans, Thuringiens, Bavarois) avant le milieu du VIe s. Le royaume franc apparaît dès lors comme la principale puissance fondée sur les ruines de l'Empire romain d'Occident.

Les limites de la monarchie
La monarchie est l'institution fondamentale. Elle est moins une institution politique qu'un état de fait. Le roi mérovingien, authentique despote, jouit d'un pouvoir royal absolu. Dans les faits, pourtant, l'autorité monarchique se heurte à des limites pratiques. En effet, les moyens administratifs sont insuffisants: les cadres romains, les bureaux subsistent, mais ce sont des cadres «creux»; le palais, avec lequel le roi gouverne, est plus un instrument domestique qu'un organisme étatique. Si les anciennes cités romaines sont confiées à un comte (agent administratif, judiciaire et militaire), celui-ci n'a d'efficacité relative que parce qu'il est un compagnon du roi, un «antrustion», lié à lui par un serment personnel. L'affaiblissement des ressources de l'Etat limite également l'autorité monarchique: le système fiscal, hérité de Rome, perd peu à peu toute efficacité.

Le partage du patrimoine royal
La royauté est héréditaire dans la famille mérovingienne; le principe électif, cher aux peuples barbares, s'estompe. Le royaume est un patrimoine que l'on partage entre les héritiers: ainsi le partage réalisé en 511 entre les quatre fils de Clovis. Mais le sentiment de l'unité du royaume demeure: les lots attribués aux fils sont complémentaires; chacun a sa part des vieux pays francs et sa part des provinces particularistes; les frontières sont défendues en commun. Il arrive parfois, comme entre 558 et 561 (Clotaire I er ), entre 613 et 629 (Clotaire II), puis entre 629 et 639 ( Dagobert I ), qu'un seul roi rassemble tout le royaume.

La dynastie mérovingienne
Les quatre fils de Clovis se partagèrent le royaume, qu'ils agrandirent encore et sur lequel Clotaire I er régna de 558 à 561. Le nouveau partage entre ses fils donna naissance à trois principaux ensembles territoriaux - la Neustrie à l'ouest, l'Austrasie au nord-est et la Bourgogne au sud-est -, prétextes à rivalité entre les descendants. Clotaire II, petit-fils de Clotaire Ier et fils de Frédégonde, hérita en 613 d'un royaume réunifié après des années de luttes sanglantes entre son père, Chilpéric, et son oncle Sigebert, époux de Brunehaut. Dagobert, lui aussi, fut roi de tous les Francs, mais la dynastie, qui se maintint jusqu'en 751, était déjà en butte aux ambitions des grands du royaume.

La fusion des civilisations
Au temps des Mérovingiens s'est réalisée l'assimilation progressive des nouveaux venus et de leurs civilisations par les Gallo-Romains. L'absence de discrimination entre Romains et Francs et la conversion de ces derniers au christianisme ont facilité cette fusion.

Les classes gouvernantes
L'aristocratie gallo-romaine, le haut clergé (dans sa majorité gallo-romain) ont accepté le nouvel ordre politique et ont loyalement soutenu les souverains mérovingiens. La vassalité, les liens d'homme à homme, qui ont tant fait pour réunir les deux aristocraties, franque et romaine, ont emprunté au passé romain comme au passé germanique. Si la forme de l'Etat, la royauté, est franque, les souverains n'ont pas hésité à utiliser les cadres gallo-romains pour gouverner.

Les apports politiques et économiques
Les apports germaniques sont sensibles dans le domaine du droit; le droit romain disparaît et laisse place aux coutumes propres à chaque peuple (régime de la personnalité des lois). Le droit franc (la loi salique) est fondé sur des compositions financières minutieusement tarifées, le Wehrgeld, qui a pour but de limiter les vengeances privées. Si, dans le domaine politique, les influences franques ont été particulièrement sensibles, pour le reste, et essentiellement dans le domaine économique, la Gaule mérovingienne prolonge la Gaule romaine. L'exploitation du sol connaît de meilleures conditions qu'au Bas-Empire, et de nouvelles terres sont mises en culture; il est possible même que, dans certaines régions, le paysage rural ait été profondément modifié. La vie urbaine et les échanges s'anémient mais conservent les structures de l'époque romaine. La Gaule mérovingienne reste méditerranéenne par bien des aspects.

Le déclin des Mérovingiens
Dagobert (629-639) est le dernier Mérovingien à s'être opposé avec un certain succès aux forces de désagrégation qui minent le royaume franc; après lui, la dynastie connaît un déclin rapide.

La montée en puissance de l'aristocratie
Le déclin s'explique par la faiblesse des rois, tarés et dégénérés, qu'on appelle les «rois fainéants»; il s'explique également par la puissance accrue de l'aristocratie, dont les représentants dirigent le gouvernement comme maires du palais. Pour s'attacher des fidélités, les rois mérovingiens ont multiplié les donations de terres en toute propriété; ils ont ainsi dilapidé leur patrimoine foncier, source de leur puissance, pour engraisser l'aristocratie, qui leur dispute le pouvoir. Les rivalités entre grandes familles, riches de terres et de vassaux, accentuent les particularismes que la conquête franque, imparfaite, avait tant bien que mal masqués au cours du VI e siècle Une nouvelle géographie de la Gaule apparaît; l'idée d'unité du royaume s'atténue.

Les rivalités territoriales
Quatre entités territoriales émergent à la fin du VI e siècle: la Neustrie (Bassin parisien), où le peuplement franc est très dense; l'Austrasie, entre la Meuse et les régions rhénanes, entièrement germanique, mais où les Francs sont mélangés à d'autres peuples; le sud de la Gaule, qui se partage lui-même entre la Bourgogne et l'Aquitaine, pays où le peuplement franc est réduit. Ces deux régions, souvent divisées entre les héritiers mérovingiens, tendent à reconstituer leur unité sous la direction de ducs nationaux, à partir de la seconde moitié du VII e siècle. Les aristocrates de Neustrie et d'Austrasie, par l'intermédiaire des maires du palais, se disputent la prééminence et réduisent l'Aquitaine, et surtout la Bourgogne, à un rôle annexe. Après la mort de Dagobert (639), la Neustrie domine la situation, sous l'énergique direction du maire du palais, Ebroïn, qui périt assassiné (en 680 ou 683).

Vers l'ère carolingienne
L'hégémonie passe aux maires du palais austrasiens, les Carolingiens: en 687, la victoire de Tertry leur permet de soumettre la Neustrie. Cette victoire traduit le déplacement du centre de gravité du royaume vers le nord-est; elle est aussi la victoire de la riche campagne du nord de l'Europe sur la ville du monde méditerranéen.

En un sens, les Mérovingiens sont restés fidèles à Rome; ils sont les héritiers de l'Antiquité. La victoire des Carolingiens est définitivement établie lorsque Pépin le Bref se fait couronner roi en 751, à l'assemblée de Soissons, et dépose Childéric III, le dernier souverain mérovingien; cette victoire marque le début d'une ère nouvelle.
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MessageSujet: Re: L'Empire d'Occident et Charlemagne   L'Empire d'Occident et Charlemagne EmptyDim 9 Avr - 2:38

Les Carolingiens

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L'Empire carolingien


Des Mérovingiens aux Carolingiens
Les Carolingiens de Carolus, nom latin de Charlemagne (Carolus Magnus, «Charles le Grand»). Dynastie qui, de 751 à 987, donna douze rois à la France, de Pépin le Bref à Louis V, et à laquelle appartinrent également plusieurs empereurs germaniques et rois de Saxe, de Bavière, d'Italie, d'Aquitaine, de Lorraine ou de Provence.

De la crise mérovingienne naît au VIIIe siècle un monde nouveau dont le centre de gravité a basculé vers le nord, dans lequel les villes ne jouent plus qu'un rôle marginal, où les liens d'homme à homme médiatisent les autres types de relations, où les rares foyers de culture se trouvent dans les monastères ruraux qui se sont multipliés au siècle précédent. Dans ce contexte, Charlemagne et la dynastie carolingienne, à laquelle il donne son nom, vont faire naître un nouvel Etat d'où est sortie l'Europe moderne.

Les Pippinides
Les Pippinides - ainsi nomme-t-on les prédécesseurs de Charlemagne - apparaissent en 614, lorsque les Austrasiens appellent le roi de Neustrie contre leur vieille reine Brunehaut.

Les premiers Pépin
Le premier Pépin, dit l'Ancien ou de Landen, occupe la fonction de maire du palais d'Austrasie sous l'autorité du roi Dagobert (623-639), tandis que saint Arnoul (vers 582-vers 640) devient évêque de Metz (vers 614) avant de finir ses jours au monastère de Remiremont. Vers 680, leur petit-fils Pépin II, dit de Herstal, s'empare définitivement de la mairie du palais d'Austrasie grâce à la richesse de sa famille (un immense patrimoine foncier situé dans l'est de l'actuelle Belgique), au contrôle d'un véritable réseau monastique et au soutien de nombreux partisans. En 687, il bat les Neustro-Bourguignons à Tertry, devenant ainsi le maître de la Francie. Pauvre royaume en vérité, miné par les particularismes régionaux, menacé par des voisins turbulents: les Frisons, les Saxons, bientôt les musulmans d'Espagne. Il meurt en 714.

Charles Martel
Le «règne» du fils bâtard de Pépin de Herstal, Charles Martel (715-741), est une étape décisive dans la construction de l'édifice carolingien. Comme son surnom l'indique, Charles est d'abord un homme de guerre. Combattant redoutable et redouté, à la tête de troupes à cheval, il commence à «pacifier» le royaume et à l'étendre. Jusqu'au début du IX e siècle, la guerre offensive et victorieuse sera le véritable moteur du pouvoir carolingien. Elle renforce l'autorité centrale, elle procure les richesses (butin, accroissement du fisc, des revenus) qui permettent de payer les fidélités indispensables.

Pour tenir les pays soumis, Charles utilise ses vassaux, des fidèles qu'il installe sur des terres confisquées ou sur des terres ecclésiastiques sécularisées. Les Carolingiens considèrent en effet que l'Eglise doit servir l'Etat. Depuis que les musulmans ont fui devant lui lors de la bataille de Poitiers en 732, Charles est devenu le champion de la chrétienté. En Germanie - où les campagnes se sont étendues de 720 à 738 -, il favorise l'œuvre de christianisation de l'Anglo-Saxon Boniface, ce qui facilite la reprise en main des provinces périphériques d'outre-Rhin. Il amorce le rapprochement avec Rome, qui permettra à son fils d'accéder à la royauté. A sa mort, en 741, son prestige est immense. Certes, il n'est pas roi, mais en 737, il n'a pas jugé utile de donner un successeur au roi mérovingien.

Le roi Pépin
Le fils cadet de Charles Martel, Pépin, dit le Bref, attendra encore dix ans avant de devenir roi et de mettre fin à la dynastie mérovingienne.

Vers le coup d'Etat
A la fin des années 740, les conditions d'un coup d'Etat sont réunies. L'Alémanie, la Bavière et l'Aquitaine paraissent soumises après trois ans de campagnes (743-746). Pépin, qui a poursuivi la politique de réforme de l'Eglise amorcée dès 742, a de nombreux soutiens parmi les clercs et les moines. Dès le départ, cette réforme se développe en liaison étroite avec Rome. Lorsque, vers 749-750, Pépin décide de franchir le pas décisif, c'est donc au pape qu'il s'adresse, l'interrogeant «au sujet des rois qui en Francie n'exerçaient pas le pouvoir, s'il était bon qu'il en fût ainsi». Et le pape Zacharie répond «qu'il vaut mieux appeler roi celui qui a, plutôt que celui qui n'a pas le pouvoir». Toujours selon les Annales royales des Francs, le pape «ordonna par une prescription apostolique que Pépin fût fait roi afin que l'ordre ne fût pas troublé». Les Mérovingiens avaient fondé la légitimité de leur famille sur le pouvoir magique de leur sang; le pape substituait à celui-ci la capacité à assurer sur terre l'ordre voulu par Dieu.

Le sacre du nouveau roi des Francs
Lors de l'assemblée générale des «hommes libres» réunie à Soissons en novembre 751, Pépin est reconnu (les textes disent «élu») roi par les grands. Tel un évêque, il reçoit ensuite l'onction sacrée qui lui donne la force nécessaire pour accomplir sa mission. Cette cérémonie de l'onction, inconnue jusqu'alors chez les Francs, plonge ses racines dans la tradition biblique, reprise au VII e siècle dans l'Espagne wisigothique. Elle fonde en Francie la royauté sacrale qui va durer plus de mille ans.

Légitimation de la famille carolingienne
En 754, pour prix de son aide contre les Lombards, le pape Etienne oint une seconde fois Pépin, à Saint-Denis cette fois, en même temps que ses deux fils Charles et Carloman, assurant ainsi la transmission héréditaire du pouvoir au sein de la famille carolingienne. Pépin promet de «restituer» les territoires que l'empereur Constantin aurait jadis concédés au pape avant de partir fonder Constantinople. Ces territoires sont à l'origine des Etats pontificaux qui se maintiendront jusqu'au XIX e siècle.

Une nouvelle famille s'est donc installée sur le trône des Francs. Les guerres offensives, les réseaux de fidélité et le soutien de la papauté ont eu raison de la dynastie mérovingienne. Jusqu'à sa mort, en 768, Pépin a reconquit la Septimanie (752-759) et organisé des expéditions en Aquitaine (760-768). Il poursuit la politique engagée, pourchassant ses ennemis, réformant l'Eglise et la société, en un mot jetant les bases de l'Etat carolingien.
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MessageSujet: Re: L'Empire d'Occident et Charlemagne   L'Empire d'Occident et Charlemagne EmptyDim 9 Avr - 2:39

La conquête de l'Est

Charlemagne n'aurait pas connu le même destin s'il avait dû longtemps partager le pouvoir avec son frère cadet Carloman, à qui étaient échues en partage la Provence, la Septimanie, l'Alsace, l'Alémanie et une partie de l'Aquitaine. Charles se brouille avec lui en 769, mais, le 4 décembre 771, Carloman meurt et Charles prend possession de ses territoires.

Les armées de Charlemagne
Durant plus de trente ans, Charles va conduire ses troupes au combat, soumettant ainsi une part importante de l'Occident.

Le recrutement
Chaque année ou presque, au mois de mai, lorsque l'herbe nécessaire à la nourriture des chevaux reverdit, les hommes libres se rassemblent pour la guerre. Le service militaire est une lourde charge et s'y soustraire, comme certains le font, est un crime grave qui est puni d'une très lourde amende de 60 sous, l'hériban. Néanmoins, pour ne pas mobiliser tous les hommes libres, on a mis au point un système d'association qui permet de limiter le nombre des partants. Les plus pauvres s'associent pour n'équiper que l'un d'entre eux.

Vassalité et cavalerie
La plupart des hommes libres combattent à pied, armés de couteaux et de flèches, mais l'importance de la cavalerie grandit au VIIIe siècle: c'est elle qui fait la force des armées de Charlemagne. Seuls les plus riches des hommes libres et les vassaux chasés (c'est-à-dire qui ont la jouissance d'une terre à titre viager) peuvent combattre à cheval. Depuis le milieu du VIIIe siècle, la vassalité s'est répandue. Il s'agit d'un contrat privé liant deux hommes libres d'inégale puissance. Le vassal entre dans la clientèle d'un puissant en se recommandant à lui. Il lui promet fidélité et service. En échange le seigneur s'engage à protéger son vassal et il lui concède normalement un bénéfice foncier qui lui permet de s'entretenir et de s'équiper pour le service militaire à cheval. L'équipement coûte très cher. Le cavalier lourd est protégé par une cuirasse de cuir et de fer, la brogne, par un casque et par un bouclier; il est armé d'une lance et d'une longue épée. Les brognes sont si efficaces et si précieuses (elles valent de 4 à 12 vaches) qu'il est interdit de les exporter. L'armée carolingienne est lente à mobiliser, mais elle est bien adaptée aux guerres de conquêtes que mène Charlemagne. Celui-ci dispose d'autre part de troupes d'intervention rapide, les scarae, formées de cavaliers d'élite recrutés le plus souvent parmi les vassaux royaux.

La politique d'annexion
A l'intérieur des frontières, Charles poursuit la politique unificatrice de ses prédécesseurs. A l'égard de ses voisins, il reprend la politique d'annexion amorcée en Frise par son grand-père, Charles Martel.

L'extension du «royaume de Dieu»
Charles considère qu'il doit étendre la chrétienté occidentale et que celle-ci doit être franque. A la demande du pape, il attaque donc le royaume lombard en 773: il l'annexe en 774, et se proclame roi des Lombards. Ses autres interventions le portent en terre païenne ou musulmane, au nord chez les Saxons, à l'est chez les Avars (soumis entre 795 et 796) et les Slaves, au sud chez les musulmans d'Espagne. L'extension du royaume franc va ici de pair avec celle du royaume de Dieu.

Les méthodes
Les méthodes de Charles sont brutales. En Saxe par exemple, le ton est donné dès 772, lorsqu'il pille l'Irminsul, sanctuaire de l'arbre sacré, renversant les idoles païennes. Pendant plus de vingt ans, les Saxons vont lutter pour leur liberté et leurs croyances, les révoltes succédant aux soumissions. Pour en venir à bout, Charles fait régner la terreur sur le pays (785), imposant le baptême par le fer et le feu. Il inaugure également une politique de déportation massive des populations, ce qui lui permet de distribuer les terres libérées à ses fidèles. A ce prix, la Saxe est soumise au début du IX e siècle. L'ordre franc y règne, avec son administration, ses évêchés, ses monastères.

Echecs et protection des frontières
Charles connaît cependant des échecs ou des demi-succès. Les mêmes conquêtes sont souvent renouvelées, faute de victoires décisives. En 778, une expédition en Espagne tourne court: au retour, l'arrière-garde de l'armée tombe dans un piège tendu par les Vascons (Gascons) à Roncevaux. Charles renonce à étendre sa conquête en Espagne, tout comme il ne peut soumettre les Celtes d'Armorique. Au total cependant, la dilatation du royaume est immense dès la fin du VIII e siècle. Les frontières sont solidement gardées grâce à l'organisation de «marches», vastes circonscriptions administratives regroupant plusieurs comtés, fermement tenues en main par de puissants agents royaux, les marquis, aux compétences militaires étendues.

Le rétablissement de l'empire d'Occident
Le prestige de Charles dépasse alors largement les limites de son royaume. Il entretient des relations diplomatiques avec tous les grands de la terre, de l'impératrice de Byzance Irène au calife abbasside Haroun al-Rachid (avec qui il échangea à plusieurs reprises des ambassades entre 797 et 807), en passant par le roi des Angles ou celui des Danois.

Aix-la-Chapelle
Dans le nouveau palais d'Aix-la-Chapelle, Charles reçoit les ambassadeurs venus du monde entier. Sans abandonner les voyages et les séjours dans les résidences royales situées entre Loire et Rhin, il a voulu posséder une véritable capitale. Commencés un peu après 790, les travaux du palais et de la chapelle durent une dizaine d'années (jusqu'en 799). L'ensemble est grandiose. Nouvelle Rome et nouvelle Byzance à la fois, préfiguration de la Jérusalem céleste, Aix-la-Chapelle apparaît dès 798 comme la capitale d'un souverain hors du commun, qui a déjà fait rois deux de ses fils, qui est le maître de l'Occident chrétien ou, comme l'écrit Alcuin, son conseiller anglo-saxon, d'un empire.

Le couronnement impérial
Dans les milieux ecclésiastiques de la cour, on prépare activement le rétablissement de l'empire d'Occident. On compare Charles à Constantin I le Grand, premier empereur chrétien, et de façon encore plus significative à David. Déjà investi d'une mission divine, protecteur de l'Eglise, responsable du salut de son peuple, il doit devenir le chef temporel d'un empire chrétien. Il est couronné empereur à Rome le 25 décembre 800. Le pape a pris l'initiative de la cérémonie, utilisant le rite byzantin. A ses yeux, l'empire doit être chrétien mais aussi romain, ce qui mécontente Charlemagne. C'est à Aix-la-Chapelle, en terre franque, qu'en 813 Charles couronnera son fils Louis. L'empire de Charlemagne est un empire chrétien, mais il est d'abord un empire franc.

Charlemagne, le père de l'Europe
Au début du IX e siècle, toute menace extérieure paraît écartée, et la paix règne sur l'Empire. La guerre a été le moteur de la réussite carolingienne, la paix est maintenant au cœur du programme impérial: Charles s'intitule désormais «grand et pacifique empereur». Nourri de la Cité de Dieu de saint Augustin, il élargit alors son programme de remise en ordre de la société chrétienne afin que coïncident mieux ordre terrestre et ordre céleste. Unité dans la diversité, ainsi pourrait se résumer l'action intérieure de Charlemagne, qui peut apparaître comme le père de l'Europe. Toute sa politique va dans le sens de l'unification et de la centralisation, mais il reste pragmatique. Il maintient le système de la personnalité des lois (chacun relève de la loi de ses ancêtres), il tient compte des particularismes régionaux. L'Italie et l'Aquitaine sont élevées au rang de royaumes, que ses fils Pépin et Louis administrent sous son autorité.

La sucession
Au soir de sa longue vie - Charlemagne mourra en 814 - alors qu'il n'a plus qu'un seul fils légitime pour lui succéder, les premiers raids danois sonnent le glas de la paix caroline, annonçant les difficultés futures. Les germes de l'échec sont en place, mais nul n'en est alors conscient.

Louis le Pieux le décrié
En 814, Louis a 36 ans; il a appris son métier de roi en Aquitaine, où il est resté trente trois ans. Il s'y est illustré par ses talents de chef militaire et d'organisateur (conquête de la Catalogne et organisation de la Marche d'Espagne). Son règne s'inscrit donc dans la continuité. L'ère des grandes conquêtes étant passée, il se contente d'étendre l'influence franque sur les marges slaves et scandinaves par le biais de la christianisation, en même temps qu'il défend les frontières occidentales et méridionales contre les Normands et les Sarrasins. A l'intérieur, il mène une vigoureuse politique de redressement et de rationalisation du système politique et administratif. Dans les cercles ecclésiastiques, qui l'entourent, on approfondit la réflexion politique et religieuse. La politique de réforme de l'Eglise et de la culture amorcée par Pépin et vigoureusement poursuivie par Charlemagne porte alors ses fruits: l'influence de l'Eglise devient prépondérante, et Louis, nourri de cette réflexion religieuse, prend des mesures qui lui valent le surnom de Pieux. Mais son règne s'achève en 840 au milieu des crises suscitées dès 829 par les problèmes de sa succession.
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MessageSujet: Re: L'Empire d'Occident et Charlemagne   L'Empire d'Occident et Charlemagne EmptyDim 9 Avr - 2:39

Les constructions de Charlemagne

Une construction territoriale : l'Occident carolingien
En 46 années de règne et en 53 campagnes militaires, Charles va peu à peu réunir sous son autorité la majeure partie de l'Europe occidentale et constituer le plus vaste rassemblement territorial que l'Occident ait connu depuis l'Empire romain ; à sa mort, seules échapperont au contrôle des Francs la Bretagne et, bien sûr, l'Espagne et les îles Britanniques. Pratiquant la christianisation forcée comme instrument d'assimilation, Charles va parachever son œuvre de rassemblement en ressuscitant la notion d'empire d'Occident, perdue depuis l'effondrement de Rome, en 476, et dont le souvenir était perpétué par l'enseignement des clercs.

Tous les ans, en mars ou en mai, les hommes libres, astreints au service militaire, sont convoqués avec leur équipement à une assemblée générale : pendant que l'empereur et les grands font un tour d'horizon des problèmes concernant l'Etat, l'armée se prépare ; puis, les buts de guerre fixés, la cavalerie franque s'ébranle à la conquête d'un empire.

En Germanie, objet de ses préoccupations essentielles, Charlemagne entreprend de soumettre les peuples germaniques restés hors de la mouvance franque. Il lui faudra trente ans pour vaincre les Saxons qui, installés dans une région d'accès difficile, mènent une guerre de partisans derrière un chef célèbre, Widukind. L'armée carolingienne se révèle ici impuissante, et Charlemagne ne viendra à bout de la résistance saxonne qu'en recourant à la terreur : massacre des prisonniers ; ravage systématique du pays, notamment en 784-785 ; déportations massives, comme en 804 ; conversions forcées (de Widukind en 785). Dans le même temps, des routes et des fortins sont construits, qui permettent l'implantation de groupes francs.

A la suite de la soumission de la Saxe, la Frise, voisine, doit accepter la tutelle franque. Quant à la Bavière, elle est annexée en 788 à la suite des rébellions continuelles de son duc, Tassilon, pourtant vassal de Charlemagne. Cette unification de la Germanie met l'Occident carolingien en contact avec les Danois, les Slaves de l'Elbe, les Avars de la plaine hongroise ; ces derniers sont vaincus en 796 et leur organisation politique est détruite. Au nord, l'empereur doit faire face aux premiers raids scandinaves.

Roncevaux (778)
Dernier secteur d'intervention, l'Espagne. La volonté d'expansion de Charlemagne le pousse au-delà des Pyrénées, en 778; les circonstances sont favorables : trêve du côté saxon ; appel de petits princes musulmans du nord de l'Espagne, en rébellion contre l'émir de Cordoue. La campagne débute victorieusement par la prise de Pampelune, mais un soulèvement des Saxons oblige Charles à lever précipitamment le siège de Saragosse. Au retour, franchissant les Pyrénées à Roncevaux, son arrière-garde est attaquée et détruite par les Basques (qui habitent le nord de l'Espagne et le sud de la Gascogne, et que Charlemagne n'a jamais réussi à soumettre) et par des musulmans. L'épopée s'est emparée, en le déformant, de cet événement et a magnifié ses protagonistes, l'empereur Charles et Roland. Les annales nous apprennent qu'Eginhard, le comte du palais, et Roland, préfet des Marches de Bretagne, furent tués dans ce combat. Les textes contemporains ont minimisé ce fait ou l'ont passé sous silence ; or ce fut un véritable désastre. Mais Charlemagne revient à la charge à la fin du VIII e siècle et réussit à conquérir une partie de la Catalogne sur les musulmans : Barcelone est prise en 801.

Une construction idéologique : l'empire
La restauration de l'empire en Occident est le fait majeur du règne de Charlemagne. Il a marqué des hésitations, qui peuvent s'expliquer par l'existence de plusieurs conceptions de l'empire à cette époque :

* une idée romaine, qui fait de l'empereur le souverain suprême du monde civilisé ; mais l'empereur d'Orient incarne déjà cette idée,
* une idée religieuse, selon laquelle l'empereur est le chef temporel d'un empire chrétien, dont le véritable dirigeant est le pape ; cette idée, si elle ignore l'empereur d'Orient, les conflits entre les Eglises étant permanents, subordonne l'empereur au pape ,
* une idée de fait, l'empereur étant celui qui domine plusieurs royaumes ; c'est le cas de Charlemagne, mais alors le titre impérial se réduit à une simple dignité qui n'apporte aucun surcroît de puissance à celui qui le porte.

Le processus de restauration de l'empire se mit en route en 798 : une émeute éclate à Rome contre le pape Léon III, dont la moralité est suspectée. Le souverain pontife vient voir Charles à Paderborn et le principe d'une intervention en Italie est retenu ; l'idée d'une restauration de l'empire est probablement envisagée. Le concile décide également de restaurer l'empire et de préparer la cérémonie du sacre. Le cérémonial retenu est calqué sur celui de Constantinople, encore qu'une entorse importante y est apportée : à Constantinople le rôle du patriarche byzantin reste secondaire ; à Rome, en revanche, le pape prend l'initiative, en couronnant Charles «empereur des Romains», de « faire l'empereur ». Au dire d'Eginhard, le nouvel élu se montra d'ailleurs fort mécontent du déroulement de la cérémonie : Charles n'entendait pas dépendre de la papauté ; jusqu'à sa mort, Charlemagne va s'efforcer de corriger le sens de cette cérémonie. D'une part, tout en portant le titre d'empereur, il conserve sa titulature traditionnelle ; il est roi des Francs et roi des Lombards : sa puissance réelle vient de là et non du titre impérial. D'autre part, peu avant sa mort, il couronne à Aix son fils Louis le Pieux, signifiant ainsi au pape qu'il n'a pas à intervenir dans cette cérémonie toute laïque. Cette conception de l'empire ne survivra pas à Charlemagne, puisque Louis le Pieux redonnera au pape l'initiative de faire l'empereur.

Une construction politique : l'Etat carolingien
Charlemagne a consacré les dernières années de sa vie à l'organisation de ce Saint Empire romain d'Occident qui, malgré son nom, était bien plus germanique que méditerranéen. Sans innover en matière de gouvernement - il a repris les usages francs -, il a tenté de doter ses territoires d'une organisation étatique cohérente et unifiée. Au niveau central, il gouverne avec les nombreux courtisans et serviteurs rassemblés dans le « palais ». Les conseillers les plus importants n'ont pas nécessairement de titres auliques (c'est-à-dire caractéristiques de la noblesse de la cour impériale) ; mais les charges de comte du palais et d'archichapelain émergent au-dessus de celles, mi-domestiques, mi-politiques, de bouteiller ou de chambrier. Ce palais se déplace sans cesse, de domaines royaux en domaines royaux : les besoins de nourriture de la cour imposent cette migration, les nécessités politiques également, car dans ce vaste empire le prince doit se montrer pour être obéi. Toutefois, impressionné par Ravenne, l'ancienne capitale impériale, et par Pavie, la capitale lombarde, Charles fait édifier, à partir de 794, Aix-la-Chapelle, où il résidera de plus en plus souvent après 800.

Les décisions prises au palais sont annoncées lors des assemblées et appliquées par l'administration. On l'a dit, le départ de l'armée est annuellement l'occasion d'une vaste réunion des notables, clercs et laïcs, du royaume : les mesures élaborées et discutées par l'assemblée sont consignées dans un texte législatif, lu à tous les hommes libres présents : le capitulaire. Ce texte est transmis aux agents locaux du pouvoir, et d'abord aux comtes. Le comte, juge, percepteur des amendes et des impôts indirects (les seuls existants), et chef des contingents militaires locaux, est le représentant permanent de l'empereur dans l'un des trois cents comtés qui partagent l'empire. Des inspecteurs itinérants, les missi dominici («envoyés du maître») font des tournées pour contrôler les comtes. Aux frontières, un personnage investi de pouvoirs militaires tient parfois en main plusieurs comtés, qui forment une marche : il est le duc, ou le comte, de la marche.

Les distances et les difficultés de communication, constantes au Moyen Age, et surtout les particularismes ethniques et la structure sociale rendent fragile et peu efficace cette construction, cependant cohérente. Pour obvier aux inconvénients des particularismes, Charlemagne a érigé en royaumes satellites, confiés à ses fils, les territoires mal assimilés au monde franc, comme l'Aquitaine ou l'Italie. L'obstacle constitué par les structures sociales est plus grave : la terre est la seule richesse et la société est dominée par une aristocratie détentrice de cette richesse ; dans ces conditions, une structure politique centralisée est vouée à l'échec. Le comte, nommé et révoqué par l'empereur, ne peut être rétribué que par la concession d'une terre publique : les comtes, et cela dès Charlemagne, ont tendance à faire entrer ce bien dans leur patrimoine et à agir à leur guise.

Pour contrer ces forces centrifuges, Charlemagne use de divers remèdes : serment de fidélité imposé à tous les hommes libres ; utilisation des cadres ecclésiastiques au profit de l'Etat, l'évêque tenant dans sa cité le rôle du comte ; concessions de diplômes d'immunité aux grandes abbayes ; utilisation des liens privés de dépendance, l'empereur recevant l'hommage de nombreux vassaux, à qui il concède une terre en usufruit, et obligeant les comtes à entrer dans sa vassalité. Malgré sa volonté et son prestige, Charlemagne n'a pu que contenir ces forces de désagrégation, non les maîtriser.

Une construction intellectuelle : la Renaissance carolingienne
La création d'écoles
Pour disposer d'administrateurs compétents, Charlemagne favorisa un renouveau des études et créa l'Ecole du palais, que dirigea le célèbre Alcuin. Les nécessités religieuses l'amenèrent également à concevoir une « politique culturelle ». Celle-ci était conditionnée par la réforme religieuse que Charlemagne, concile après concile, réussit à imposer : réforme liturgique, réforme de la discipline dans les abbayes et les chapitres cathédraux. Seul un clergé instruit pouvait permettre le succès de ces réformes ; d'où les mesures « pédagogiques », si l'on peut dire, prises à l'instigation de Charlemagne et de ses conseillers : création d'écoles près des églises cathédrales et des monastères ; réforme de l'écriture, avec l'adoption de la « minuscule caroline », écriture simple régulière, lisible. Charlemagne participa aussi aux débats théologiques de son temps. Au concile de Francfort (794), il fit condamner l'iconoclasme et l'adoptianisme espagnol.

Un véritable élan vers la culture
D'une manière générale, l'empereur encouragea un véritable élan vers la culture - facilité par l'ouverture de l'empire sur des régions où la culture antique s'était conservée (Italie, Espagne, Angleterre, Irlande) -, ce qui permit, sous son règne et sous celui de son fils Louis le Pieux, l'éclosion d'une brève mais brillante «renaissance carolingienne» dans le domaine des arts et des lettres (et qui assura notamment la survie de nombreux manuscrits latins) : l'Anglo-Saxon Alcuin, le Lombard Paul Diacre, le Wisigoth Théodulf, le Franc Angilbert contribuèrent à relancer le goût pour la culture antique et, dans leurs écrits, à restaurer la langue latine.

L'architecture
La volonté d'imiter l'Antiquité marque également la renaissance artistique : le décor architectural, la sculpture sont calqués sur l'art romain. Mais on note aussi une ouverture aux influences extérieures, irlandaises dans les manuscrits à peintures, byzantines dans le décor à mosaïques. L'architecture connaît un brillant essor : les constructions religieuses obéissent aux besoins de la piété populaire (grandes églises, cryptes et déambulatoires pour abriter les reliques dont le culte se répand) ou aristocratique (Germigny, chapelle de campagne de Théodulf, chapelle palatine d'Aix, conçue pour le service divin du palais). La construction des palais d'Aix et d'Ingelheim témoigne du renouveau de l'architecture civile.

Vers la dislocation de l'Empire
Mais l'état arriéré de l'économie, la faiblesse des échanges, l'insuffisance des cadres administratifs et les invasions normandes provoquèrent la dislocation rapide d'une construction politique aussi impressionnante qu'éphémère, que l'empereur avait d'ailleurs songé à partager entre ses trois fils, avant de couronner Louis comme son héritier en 813.
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MessageSujet: Re: L'Empire d'Occident et Charlemagne   L'Empire d'Occident et Charlemagne EmptyDim 9 Avr - 2:40

La naissance de la féodalité

Le bienfait
L'une des origines du système féodal est à chercher dans la coutume des rois germaniques qui, dès l'époque mérovingienne, octroient à leurs guerriers fidèles ce que les textes latins appellent un «bienfait», en général une terre. Le bienfait (qui deviendra le «bénéfice») correspond à un service; il est personnel. Les textes sont rares, mais il y a quelques cas d'emploi du terme germanique feo (ancêtre de fief) dans le sens de bienfait. Le procédé devient fréquent à l'époque carolingienne, et Charlemagne en fera un outil de gouvernement.

Les Carolingiens
Les Carolingiens généralisent la pratique du serment: ainsi, devenu empereur en 800, Charlemagne exige-t-il en 802 un serment public de fidélité personnelle. Tous les éléments essentiels de la féodalité sont donc en place dès le IX e siècle. Pourtant, on ne peut alors parler de féodalité, et moins encore de féodalisme, car il existe alors une vraie structure d'Etat. Les Carolingiens, tant qu'ils gardent le contrôle de l'Eglise et de ses immenses domaines, tant que leurs conquêtes militaires leur permettent de satisfaire les appétits de terres de leurs guerriers, maintiennent la notion de pouvoir public: tous les hommes libres sont susceptibles de porter les armes; tous peuvent être jugés par les tribunaux publics.

Le partage du domaine public
Les successeurs de Charlemagne, au cours de leurs luttes fratricides, distribuent la terre du domaine public (le fisc) à leurs clientèles guerrières respectives: en Catalogne, on parle de «terre de fief ou de fisc» comme si c'était la même chose. Or, dans le courant du IX e siècle, ces bienfaits deviennent héréditaires; souvent, leur origine publique a été complètement oubliée. Les membres de l'aristocratie guerrière carolingienne, à commencer par les plus éminents d'entre eux, les comtes, s'approprient les lambeaux du domaine public, qu'ils considèrent comme leurs alleux. La dynastie carolingienne disparue, les rois qui lui succèdent, du moins en Francie et en Italie, ne gardent qu'une vague prééminence sur les autres puissants, due en grande partie au caractère religieux que leur confèrent le sacre et l'onction; pour le reste, ils ne peuvent se fier qu'à leurs propres fidèles et à leurs terres.

Les nouveaux représentants du pouvoir
La féodalité s'implante réellement, remplaçant l'Etat comme système capable de contrôler les rapports sociaux en gérant, de façon complètement éclatée, l'autorité publique.

Les princes
Les comtes, à l'origine fonctionnaires amovibles, voient leur titre, au IX e siècle, devenir héréditaires; certaines familles ont regroupé plusieurs comtés pour constituer des principautés: telle est l'origine des Capétiens, par exemple, qui bâtissent entre Loire et Oise un conglomérat, où le domaine public de plusieurs comtés s'ajoute aux terres arrachées aux églises et aux monastères. Mais la concurrence entre ces «princes» est féroce: des guerres incessantes les opposent, car le processus de décomposition de la puissance publique ne s'arrête pas à eux.

Les châtelains
Les princes rétribuent ceux qui les soutiennent en leur accordant des positions d'origine publique: vicomtés, garde de forteresses. Chacun de ces détenteurs d'une parcelle de légitimité si infime soit-elle, essaie d'affirmer à son tour son indépendance et de s'arroger l'exercice du pouvoir public de commandement (le ban). Dès la fin du IX e siècle, dans nombre de régions, les châtelains ont conquis leur autonomie; et les châteaux, d'abord simples constructions de bois érigées sur une motte de terre, deviennent les centres de pouvoir. Rares sont les territoires où, comme en Normandie, le comte garde le contrôle de la construction des châteaux: au début du XI e siècle, dans une grande partie de l'Europe de l'Ouest, la notion de pouvoir public n'est plus qu'un vague souvenir.

Les milites
Autour de chacun des noyaux concurrentiels de pouvoir se constituent des troupes de guerriers: il faut s'assurer des hommes en nombre, et surtout ces cavaliers qui dominent les champs de bataille. Or leur équipement est de plus en plus coûteux: la broigne, à l'origine tunique de cuir rembourrée, se couvre de plaques de métal; à partir du XIe siècle, elle est remplacée par le haubert, ou cotte de mailles; de même, le cheval capable de porter ce lourd cavalier et de manœuvrer est cher. La guerre n'est plus l'affaire de tous les hommes libres: elle est l'affaire de ceux qui sont assez riches pour s'équiper et s'entraîner, de ceux à qui, par le bénéfice puis par le fief, on donne le moyen d'être des guerriers et non des travailleurs.

Ainsi naissent ces bandes de soldats (milites en latin), qui vont bientôt devenir des chevaliers: pour se les attacher plus sûrement, on leur fait prêter hommage et serment, on en fait des vassaux; pour assurer leur entretien, on leur confie des fiefs. Le système de relations féodo-vassaliques se généralise donc au fur et à mesure que le pouvoir de commandement public éclate et s'éparpille, des princes aux comtes, des comtes aux châtelains.

Aristocratie et féodalité
L'aristocratie carolingienne a une origine publique: elle a conscience de son éminence, et, au X e siècle, seuls comtes, châtelains et membres de leurs lignages se considèrent comme nobles. Ils sont unis par un réseau complexe de relations fondé sur la politique matrimoniale et la multiplication des alliances: les familles «larges» représentent à la fois un capital et une assurance politique.

Du lignage à la noblesse
Les liens féodo-vassaliques, en se multipliant, créent peu à peu une solidarité diffuse au sein de toute l'aristocratie militaire, au-delà de la vieille noblesse. Surtout, les structures de parenté se transforment, sous l'influence de l'Eglise, mais aussi des conditions matérielles. La possession de terres (donc de fiefs), permettant de mener la vie du guerrier à cheval, est vitale pour rester membre de l'aristocratie, comme la possession et l'entretien du château (de plus en plus lourd: au XII e siècle, les donjons sont bâtis en pierre) le sont pour rester au sommet de celle-ci. Le fief étant rapidement devenu héréditaire, les familles châtelaines et chevaleresques tendent à se constituer en lignages où le nom, le fief et les terres se transmettent de père en fils aîné. Au lieu de multiplier les alliances, on va alors les restreindre, avec l'approbation de l'Eglise.

Les chefs de lignage accumulent terres et fiefs entre leurs mains: à eux les héritières sur le marché du mariage; à eux - parce qu'ils sont déjà des puissances - les fiefs encore disponibles, les fonctions prestigieuses à la cour. Montant dans l'échelle sociale, ils s'agrègent à la noblesse. Avec eux, «chevalerie» devient synonyme de «noblesse», «fief» de «terre noble». Ceux-là mêmes qui font fièrement suivre leur nom de l'épithète «noble» au X e siècle se contentent, au XII e siècle, du qualificatif de chevalier: les chefs des lignages chevaleresques forment avec la noblesse carolingienne une nouvelle noblesse homogène.

Les chevaliers errants
Mais restent les «jeunes», les fils qui attendent la mort du père pour entrer en possession de l'héritage, et les cadets, qui resteront «jeunes» toute leur vie, puisque, n'héritant pas, ils ne pourront s'établir et fonder une maison: ils forment un énorme volant de main-d'œuvre guerrière, de coureurs d'aventures violents, dont la seule chance de fortune est le coup de main hasardeux. Aucun espoir de mariage pour ces chevaliers condamnés à vieillir soldats professionnels; ils ne peuvent que rêver à l'amour défendu pour la femme qui est (ou sera) à autrui, ou aux héroïques errances. Leur peine et leurs rêves alimentent les romans du Graal et la poésie lyrique qui chante l'amour courtois, qui n'est d'abord qu'un amour interdit. Ce sont ces chevaliers qui permettent les grandes conquêtes normandes en Angleterre et en Italie du Sud, qui encadrent la poussée germanique dans les terres slaves, qui lancent contre l'islam la Reconquista puis le mouvement des croisades.

L'intervention de l'Eglise
La turbulence et la violence des chevaliers errants sont aussi un danger et l'Eglise s'attache à le canaliser. Un rituel d'appartenance et d'initiation est vite apparu dans les bandes de guerriers. L'Eglise se l'approprie, en fait un rituel chrétien comprenant veillée et prières, et prône l'idéal du miles Christi, du chevalier du Christ, protecteur du pauvre, de la veuve et de l'orphelin. Mieux même, des ordres religieux, nés en relation avec les croisades, ceux du Temple, de l'Hôpital, des chevaliers Teutoniques et bien d'autres, marient idéal monastique et idéal chevaleresque. L'attention de l'Eglise ne se limite pas à cet aspect: la domination de la féodalité sur l'ensemble de la société médiévale est dès le XI e siècle un enjeu essentiel.
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La dislocation de l'empire

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Le partage de Verdun (843)

Les conquêtes et la prospérité ont longtemps masqué les problèmes posés par une gestion centralisée appliquée à un empire de grande taille. Les guerres offensives avaient rassemblé autour du souverain conquérant les élites associées aux profits de la victoire. L'aristocratie impériale soutenait un régime qui lui procurait richesses et puissance.

L'empire assiégé et partagé
Les menaces extérieures
A partir de 840, les menaces extérieures deviennent un véritable fléau. L'empire conquérant devient alors un empire agressé. Lourde à mobiliser et à manier, l'armée franque s'avère incapable de faire face aux incursions rapides et dévastatrices des agresseurs scandinaves, hongrois (898) ou musulmans, attirés par les richesses carolingiennes.

Les luttes fratricides
Les guerres civiles qui ont opposé Louis le Pieux et ses fils, les multiples redécoupages qui en résultent, perturbent les liens de fidélité liant les grands aux souverains. Les difficultés économiques aiguisent les appétits des grands. Bien formés, les successeurs de Louis le Pieux ne sont en outre dépourvus ni de qualités ni de courage. Mais les difficultés grandissantes lézardent chaque jour davantage un édifice fragile, ce qui entraîne de profondes mutations politiques et sociales. La réponse à ces problèmes aurait dû passer par une décentralisation contrôlée du pouvoir: Charlemagne l'avait pressenti lorsqu'il avait élevé l'Italie et l'Aquitaine au rang de royaumes. Louis le Pieux taille à son tour des royaumes pour ses fils, tout en s'efforçant par l'Ordinatio imperii (817) de maintenir l'unité impériale. Mais les guerres fratricides autour de sa succession aboutissent en 843 au traité de Verdun, qui met fin à l'empire unitaire, alors partagé en trois royaumes distincts. A la mort de l'empereur Lothaire I er en 855, le nombre des royaumes est même porté à six, tandis que progressivement le titre impérial, devenu personnel et nominal, se vide de toute signification avant de disparaître provisoirement en 924 jusqu'à sa restauration, en 962, par Otton I .


La remise en cause du principe monarchique
Face aux difficultés extérieures qui redoublent dans la seconde moitié du IX e siècle, le cadre du royaume s'avère encore trop vaste pour assurer une défense efficace contre les envahisseurs. Les rois confient donc à de puissants aristocrates de grands commandements militaires qui sont à l'origine de principautés territoriales en Francie occidentale, de duchés en Germanie et en Italie.

Princes et rois
Dans les années 860, Robert le Fort, l'ancêtre de Hugues Capet, se voit ainsi chargé par Charles le Chauve de la défense de la Neustrie, entre Seine et Loire, tandis que Liudolf, le grand-père de Henri Ier de Germanie, reçoit de Louis le Germanique le duché de Saxe, dans l'orbite duquel son fils Otton attirera la Thuringe. Le poids de la haute aristocratie se renforce ainsi face aux rois. Les liens vassaliques créent désormais un écran entre le roi et les fidèles des grands. Ducs et comtes parviennent à imposer l'hérédité de leurs charges en ligne directe et ils médiatisent l'autorité publique. Le seul lien qui les relie encore au roi est ce serment de fidélité que les princes du Midi négligent même de venir prêter. L'élection royale prend alors une importance grandissante.

Ottoniens, Robertiens et Carolingiens
A partir des années 880, les grands estiment avoir le droit de choisir le meilleur roi possible, fût-il d'une autre famille que celle de Charlemagne. En 919, l'élection du duc de Saxe Henri I er comme roi de Germanie fonde la dynastie ottonienne. Vainqueur des Hongrois au Lechfeld en 955, Otton, le fils de Henri, peut rétablir l'empire en 962. En Francie occidentale, au contraire, la puissance royale ne cesse de reculer face à celles des princes. De 888 (élection d'Eudes, fils de Robert le Fort) à 936 (élection du Carolingien Louis IV), Robertiens et Carolingiens alternent sur le trône comme s'il y avait déjà deux dynasties légitimes.

L'aboutissement du processus de décentralisation
Durant le demi-siècle de restauration carolingienne qui suit (936-987), les rois perdent toute autorité sur la partie méridionale du royaume, tandis qu'au nord ils doivent compter avec la puissance du Robertien, désormais duc des Francs, avec celles du comte de Flandre, du duc de Normandie, du duc de Bourgogne ou du comte d'Anjou. Pourtant le processus de décentralisation du pouvoir apparu à la fin du IX e siècle n'est pas encore parvenu à son terme.

Dans la seconde moitié du X e siècle, les principautés territoriales sont à leur tour soumises à des forces centrifuges qui les ébranlent. Des comtes réussissent à se rendre autonomes. Bientôt vont apparaître les premières seigneuries châtelaines. L'autorité de Hugues Capet, lorsqu'il est élu roi en 987, ne s'étend guère au-delà de l'Île-de-France: à l'intérieur même de son domaine, il doit compter avec de puissants seigneurs qui lui mesurent leur fidélité.

Le phénomène demilitarisation
Cette décentralisation du pouvoir va de pair avec une militarisation grandissante. Pour résister aux invasions, les détenteurs de la puissance publique ont construit des fortifications: le moine de Saint-Germain-des-Prés Abbon rapporte dans un poème qu'en 885 le comte Eudes fit élever une tour pour défendre Paris contre les Normands. Au X e siècle, alors que les menaces extérieures sont moins vives (en 911, au traité de Saint-Clair-sur-Epte, on concède aux Normands des comtés autour de Rouen), comtes et seigneurs continuent d'en construire, cette fois pour tenir le pays et pour prévenir les attaques de leurs rivaux. Les guerres privées se multiplient autour de ces points forts. Les populations sont alors contraintes de chercher refuge à l'ombre des châteaux de bois, construits sur des mottes de terre rapportée. Ces châteaux sont gardés par des équipes de vassaux à cheval, les milites, sous l'autorité des maîtres détenteurs du ban.
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