| Misanthropic World Metal, Occultisme, Histoire... |
|
| L'Empire Sassanide | |
| | Auteur | Message |
---|
Vidar Blackeu Viking
Nombre de messages : 2711 Localisation : Dans la forêt d'Asgard Date d'inscription : 13/02/2006
| Sujet: L'Empire Sassanide Dim 9 Avr - 2:26 | |
| (Apogée de l'Empire 531-579)
Dynastie perse originaire du Fars, fondée par Ardachêr I er , vers 224 apr. J.-C., et qui succéda aux Arsacides. Cette dynastie qui, pendant plus de quatre siècles, contrôla un territoire immense, développa un art de cour somptueux, tout à la glorification de la puissance royale, entreprit de grands travaux de génie civil, et, tirant profit de sa position clé sur la Route de la Soie, mena victorieusement, pendant pratiquement toute la période, des guerres sur les fronts de l'Est, contre les Huns et les Turcs, et de l'Ouest, contre l'Empire romain.
Etablissement d'une nouvelle monarchie
Le roi Ardachêr La dernière des monarchies iraniennes, avant la conquête arabe et l'islamisation qui s'ensuivit, est à juste titre considérée comme l'une des plus brillantes périodes (224-632) qu'ait connues l'Iran. Pourtant, l'insuffisance de sources écrites, en raison de la prédominance des traditions orales encore fortes, même à cette époque tardive, et le manque de fouilles archéologiques, consacrées le plus souvent à des périodes plus anciennes, ne permettent pas de saisir complètement toute l'originalité de la civilisation sassanide.
La dynastie qui la précéda, celle des Parthes Arsacides, dut abandonner le pouvoir à la suite de la victoire que remporta Ardachêr (224-241) sur le dernier de leurs rois, Artaban IV, dans la plaine de Hormizdagân (site inconnu). Ardachêr était le petit-fils d'un certain Sâssân, (éponyme de la nouvelle dynastie), dont nous ne savons rien, si ce n'est que son nom est celui d'une divinité, inconnue par ailleurs. Son père, Pâbhagh, aurait été serviteur d'un temple du feu, situé à Istakhr dans le Fârs, et dédié à la déesse Anâhitâ.
Ayant reconquis différentes provinces du royaume parthe et la Babylonie, Ardachêr se fit couronner Roi des rois à Ctésiphon. Cette capitale, située sur la rive orientale du Tigre, près de Séleucie, demeura le lieu où se firent couronner les successeurs d'Ardachêr. Mais elle fut surtout leur résidence d'hiver, parce qu'ils lui préférèrent des lieux moins torrides, sur le plateau iranien, ainsi que dans le Fârs, auquel ils restèrent très attachés. On pense que le couronnement était suivi d'un pèlerinage au fameux temple du feu d'Adur Guchnasp, à Takht-e Soleymân (dans l'actuel Azerbaïdjan), mais seulement à l'époque tardive, puisque ce temple ne fut établi là qu'à partir du V e siècle.
Châhpuhr I La continuité avec la monarchie arsacide paraît assez évidente: le nouveau roi s'appuie sur les sept grandes familles nobles (les Kârên, Sûrên, Mihrân, etc.); les premiers rois portent des noms parthes: le nom du successeur d'Ardachêr, Châhpuhr I er (241-272), signifiant, en parthe, «fils de roi»; le bilinguisme national enfin, puisque les inscriptions du IIIe siècle sont gravées en deux langues, moyen perse (ou pahlavi) et parthe, auxquelles s'ajoute encore le grec, très employé durant toute la période hellénistique.
L'organisation de la Cour et du pouvoir n'est sans doute pas non plus très différente de celle qui était en place sous les Parthes, comme le montre un exemple significatif, celui de l'Arménie. Cette province, qui fut l'objet de convoitise et de guerres continuelles entre les Romains et les Parthes, constitue précisément la charge la plus importante sous les premiers Sassanides. Son titulaire s'appelle «Grand Roi d'Arménie», d'après la grande inscription trilingue de Châhpuhr I er , et selon l'historien arménien Agathange, qui nous apprend que le roi d'Arménie tient la seconde place dans la monarchie perse. De fait, c'est le fils aîné de Châhpuhr I er qui a ce titre et qui héritera du trône.
Dernière édition par le Dim 9 Avr - 2:30, édité 1 fois | |
| | | Vidar Blackeu Viking
Nombre de messages : 2711 Localisation : Dans la forêt d'Asgard Date d'inscription : 13/02/2006
| Sujet: Re: L'Empire Sassanide Dim 9 Avr - 2:27 | |
| Une histoire fertile en événements
IIIe au VIIe siècles av J.-C. L'histoire de la monarchie sassanide a été souvent divisée en trois périodes: les III e -IV e siècles sont caractérisés par la reconstitution d'un empire dont les limites devaient atteindre celles de la dynastie achéménide (VI e -IV e siècle avant notre ère), avec le développement de l'agriculture, de l'urbanisation - même si ce pays restera essentiellement rural - et de l'art en général.
Le V e siècle et le début du VI e montrent un certain déclin, par suite, sans doute, des difficultés apparues à l'Est avec les invasions de nomades Hephthalites, auxquels le Roi des rois dut payer tribut.
Enfin, les VI e et VII e siècles témoignent d'une renaissance, à l'initiative de deux grands règnes durant lesquels, toutefois, l'excès de luxe a peut-être entraîné la décadence. Cette décadence se manifeste à la fin de la période, avec une succession de règnes très courts qui, s'ajoutant aux conflits coûteux avec Byzance, ont facilité le succès des armées arabes.
La première secousse Il semble que deux secousses graves ont marqué cette période. La première, au V e siècle, est liée à la révolte d'un nommé Mazdak, qui prônait la communauté des biens et des femmes, et fut soutenu par le roi Kavâdh I er (488-497, puis 499-531). Ce mouvement populiste (plutôt que communiste, comme on l'a parfois défini) s'explique par les conditions difficiles que créèrent pour les classes modestes une terrible famine de sept ans et les guerres coûteuses de Pérôz (459-484) contre les Huns Hephthalites, de même que les humiliations que la captivité de ce roi et ses défaites engendrèrent chez les militaires. Le mazdakisme, en promouvant la libre disposition des femmes, s'en prenait au principe du xvaetodata, inceste ou mariage consanguin recommandé par les puissants théologiens mazdéens.
La seconde crise La seconde crise est celle qui entraînera peu à peu la chute de la dynastie. Les réformes de Khosrô I er (531-579), qui suivent la fin du mazdakisme, réduisent le rôle de la noblesse terrienne, tandis que l'extension des systèmes d'irrigation entraîne un exode rural vers les villes. Les victoires des Byzantins en Mésopotamie, l'invasion des Huns Hephthalites dans le Nord-Est et une révolte contre le pouvoir central conduisent l'aristocratie à se défaire du roi Ohrmizd IV (579 -590) en l'assassinant, alors que la tradition arabo-persane le présente comme un homme juste et bienveillant.
Le règne de Khosrô II Le dernier grand règne, celui de Khosrô II (591-628), a connu aussi bien des conflits avec Byzance: l'assassinat de l'empereur Maurice en 602 sert de prétexte au Roi des rois pour entamer une nouvelle guerre, qui conduit ses armées jusqu'à Jérusalem, où elles s'emparent des reliques de la sainte Croix, qui sont transférées à Ctésiphon. L'empereur Héraclius Ier reconquiert alors ces territoires, s'avance dans l'actuel Azerbaïdjan, où il détruit le temple du feu d'Adur Guchnasp, et récupère la Croix à Ctésiphon.
Ces désastres, en dépit ou à cause du luxe et des richesses de la Cour, ont amené le pouvoir entre les mains de toute une série de rois et de reines - deux sont connues à cette époque finale, Azarmidukht et Bôrân - jusqu'au règne de Yazdgard III (632-651), qui, devant l'avancée des armées arabes, devra s'enfuir dans l'Est iranien, où il sera assassiné, à Merv. Cette ville fut souvent un lieu de séjour pour les rois qui s'y protégeaient des incursions des nomades dans l'est de l'Iran. Avec la chute de la dynastie sassanide, la Perse perd son autonomie et sa religion nationale, le mazdéisme. | |
| | | Vidar Blackeu Viking
Nombre de messages : 2711 Localisation : Dans la forêt d'Asgard Date d'inscription : 13/02/2006
| Sujet: Re: L'Empire Sassanide Dim 9 Avr - 2:28 | |
| L'organisation de l'Empire
La grande inscription de Châhpuhr I nous fait entrevoir l'organisation de la Cour, même si le tableau brossé est sans doute incomplet. Le Roi des rois est en quelque sorte divinisé, parce qu'il se dit dieu mazdéen, de la race des dieux. Il règne sur «l'Êrân et l'Anêrân», les pays iraniens et non iraniens, une nouvelle définition de l'Empire à entendre dans un sens à la fois politique, culturel et nationaliste.
Les provinces de l'Empire La liste des provinces, au III e siècle, à la fois géographique et ethnique, va de l'ouest vers l'est. Elle commence par les ethnies les plus importantes ( Perses et Parthes), puis mentionne la Susiane (ou Elam) et la Mésopotamie, l'Atropatène (Azerbaïdjan actuel) au nord, les régions transcaucasiennes, puis, à l'est, l'Hyrcanie (Gorgân), la Margiane (Merv), l'Arie (Harat) et, au sud-est, la Carmanie (Kermân), le Sistân et le Sind (vallée de l'Indus). Le pays des Kusânas (Kouchans), qui n'est alors encore qu'un royaume vassal, ne fait pas encore partie de l'Empire: il y sera seulement intégré sous le roi Narsès, à la fin du IIIe siècle.
La Sogdiane pouvait dépendre du roi kouchan mais la Bactriane, qui était le centre vital de ce royaume, ne fut pas envahie par Châhpuhr, et certainement pas au-delà de l'Oxus (l'actuel Amou-Daria). Le roi décrit d'ailleurs ses principales campagnes à l'ouest contre Rome: victoire en Babylonie sur l'empereur Gordien, qui est tué, et paiement d'une rançon de 500'000 dinars exigée de Philippe l'Arabe; guerres en Syrie, avec la prise de 37 villes et de leurs environs; enfin guerre contre Valérien, fait prisonnier et déporté en Perside. Ces grands faits d'armes ont été immortalisés sur plusieurs fameux bas-reliefs.
La succession au trône La succession au trône est normalement dévolue au fils premier-né, avec l'accord des nobles et des grandes familles, mais ce ne fut pas toujours le cas. Certes, comme on l'a vu, ce fut bien le fils aîné de Châhpuhr qui lui succéda, mais ensuite ce furent un autre fils, Bahrâm, puis son petit-fils, et même son arrière-petit-fils: mais ce dernier ne régna pas longtemps, car toute une partie de la noblesse soutint les prétentions de Narsès, qui, en tant que «Grand Roi d'Arménie», était le second personnage de l'Empire. Le roi encore régnant pouvait s'adjoindre son successeur, instituant ainsi une co-régence. Châhpuhr I er aurait été ainsi couronné du vivant de son père, mais en ne portant, jusqu'à la mort de ce dernier, que le titre simplifié de «roi d'Iran».
Les rois possédant d'ailleurs plusieurs couronnes différentes, on peut penser que celles-ci devaient indiquer les diverses étapes de leur carrière. Mais, devenues d'un poids considérable, elles étaient alors suspendues par une chaîne en or au-dessus de leur tête, là où le roi donnait audience. Le trône royal est figuré sur l'argenterie, et dans la littérature arabo-persane: le roi est représenté assis sur une banquette, une épée devant lui entre ses jambes écartées. Les pieds du trône figurent deux animaux: deux lions, ou deux pégases, ou deux aigles. Le cérémonial du couronnement, exécuté par le chef du clergé (le Mowbadân Mowbad), semble tardif, et fut tout d'abord réservé au chef de la cavalerie (aspbed), qui, au IIIe siècle, occupe la troisième place dans la hiérarchie de l'Etat après le vice-roi et le chiliarque (qui était probablement une sorte de «Premier ministre»). Parmi les autres fonctions, moins importantes, énumérées dans les listes de Châhpuhr, figurent les «conseillers», qui ont pu jouer un rôle non négligeable (auprès de la Cour, des reines, des mages, de telle ou telle province, etc).
La haute société La haute société est divisée en quatre classes: les rois souverains (shahrdârân), qui ont en charge une province importante ou un Etat vassal; les princes et membres de la famille royale (vispuhrân), qui ne reçoivent pas de charge spéciale; les Grands (vuzurgân) et les nobles (âzâdân). Selon un texte tardif en pahlavi, la Geste d'Ardachêr, les généraux de l'armée auraient formé l'une de ces quatre classes.
Les inscriptions étant avant tout des monuments de la propagande royale, les classes moyennes et la paysannerie n'y sont pas mentionnées. Comme la division tripartite de la société, héritée des Indo-Européens, avait encore cours dans l'Iran sassanide, aux trois classes des prêtres, des guerriers et des cultivateurs, on ajouta celle des artisans. Le livre sacré des Mazdéens, l'Avesta (époque hellénistique), mentionne déjà ces quatre classes, dont chacune avait son chef.
Ces structures sociales ont dû se maintenir dans un certain équilibre, le roi veillant à ne pas laisser trop de pouvoir aux nobles ou au clergé. Celui-ci, comme se sont plu à le noter les théologiens du IX e siècle et les auteurs arabo-persans, constitue, dès le III e siècle, un contre-pouvoir fort, ou, si l'on veut, un allié de l'Etat.
La vie de Cour Comme dans toutes les Cours, l'ordre de préséance est strict et consigné dans des registres (gâhnâmag) indiquant la place des convives dans les banquets. Les sièges étaient constitués par des coussins dont le degré d'élévation signalait la place de chacun en présence du roi. Les listes pouvaient comprendre jusqu'à 600 dignitaires, les plus élevés étant évidemment les membres de la famille royale.
La Cour sassanide s'affirme par son faste, ses intrigues et ses plaisirs, même si les rois ne se prélassent pas à longueur d'année dans leurs châteaux. Ils sont souvent en campagne, vivant dans des campements mobiles au milieu de l'armée, recrutée sur place et constituée d'éléments disparates, de différentes ethnies. De même, en raison de leur goût immodéré pour la chasse, les rois demeuraient dans des pavillons ou des bâtiments légers, au milieu de réserves qu'on appelle des «paradis». Les armes utilisées à la chasse étaient les mêmes que celles qui servaient à la guerre: l'arc, l'épée et la lance en sont les principales, mais on utilisait encore la hache ou la massue. La cavalerie est la force de frappe essentielle à cette époque, et le cavalier et son cheval étaient lourdement cuirassés. Mais on montait sans étriers (invention tardive connue en Chine au V e siècle, puis diffusée à l'ouest), seulement attestés dans l'iconographie sous Khosrô II. La bataille commençait souvent par un combat singulier. L'infanterie était peu utile. Le prestige du tir à l'arc apparaît à la fois dans les inscriptions (de Châhpuhr Ier) et sur l'argenterie.
Les «paradis» Quoique bien attesté en Iran sous les Achéménides, le paradis peut avoir été créé par les Assyriens dès le IX e siècle avant J.-C. Il est surtout connu en Arménie, où les rois créèrent de grandes réserves de chasse et organisaient de fastueux banquets. Les auteurs grecs ont marqué leur admiration pour la Perse, où l'on pouvait chasser les grands fauves, lions, ours, panthères.
Le paradis est délimité par des murs: c'est un enclos, planté d'arbres, fruitiers ou non, avec des pavillons. Dès l'âge de sept ans, le jeune prince est éduqué à la chasse comme à la guerre. On chasse à pied ou à cheval, ou encore en barque quand on chasse dans les marais, habitat privilégié du sanglier. Les techniques sont diverses: en dehors des armes déjà indiquées, on emploie aussi le lasso (pour l'onagre, l'ours ou le lion), les filets et les fosses. L'argenterie fournit à ce sujet une documentation incomparable. Comme autre gibier, il y avait encore les autruches, les gazelles, les tigres, les léopards, les cerfs, les mouflons, les bouquetins, les zébus, les antilopes, etc. Le petit gibier comprenait le lièvre et le lapin, et, parmi les oiseaux, les perdrix, les faisans, les alouettes, les grues, les outardes, les canards, et même le paon, devenu plus tard «oiseau de paradis», symbole d'immortalité. | |
| | | Vidar Blackeu Viking
Nombre de messages : 2711 Localisation : Dans la forêt d'Asgard Date d'inscription : 13/02/2006
| Sujet: Re: L'Empire Sassanide Dim 9 Avr - 2:28 | |
| La civilisation sassanide
D'une manière générale, les Iraniens n'ont pas été de grands inventeurs: ils n'ont créé ni une écriture (toujours empruntée à d'autres peuples) capable de représenter adéquatement leur propre langue, ni une monnaie, sans laquelle nos sociétés modernes ne sauraient s'organiser, mais ils eurent certainement le sens de l'administration, des voies de communication, des échanges internationaux. La culture sassanide est celle de l'oralité, et, si on compare l'Iran à la Grèce, à l'Inde ou au monde juif, elle n'a laissé qu'un petit nombre de monuments écrits.
La période sassanide se caractérise également par une grande effervescence religieuse et un énorme brassage d'idées. La religion dominante des Sassanides, le mazdéisme (de l'avestique mazdâh, sage, omniscient: épithète traditionnelle du dieu suprême Ahura, «le Seigneur omniscient»), est également appelée zoroastrisme, d'après le nom de Zarathushtra (Zarathoustra ou Zoroastre), prêtre érudit qui fut au VI e siècle av. J.-C. le réformateur du mazdéisme. Institué en religion d'Etat, le zoroastrisme fut, dès le III e siècle, confronté au manichéisme, système syncrétiste et universaliste qui se propagea rapidement; dans le même temps, le christianisme se développait largement, pour aboutir au Ve siècle à la fondation d'une Eglise autocéphale, détachée de Constantinople, et dénommée aujourd'hui «nestorienne». Soupçonnés d'être les alliés de l'ennemi romain puis byzantin, les chrétiens avaient toutefois subi auparavant de dures persécutions, notamment sous Châhpuhr II et Yazdgard I er .
L'absence de textes sacrés écrits a été sans doute un handicap pour le mazdéisme, puisque les textes qui nous sont parvenus, rédigés aux IX e -X e siècles, ne sont que des bribes d'une riche mythologie ou d'un rituel très complexe, et manquent de données historiques. Si l'on considère les splendides restes de monuments, les bas-reliefs et les trésors d'orfèvrerie qui ont été conservés, on peut penser que la culture sassanide fut avant tout une civilisation de l'objet, de l'habileté manuelle, et non de l'écrit.
Le rituel du Yasna Il faut distinguer entre l'Ouest et l'Est iranien: en effet, l'iconographie religieuse, interdite et de fait inexistante dans l'Ouest, soumis au mazdéisme orthodoxe, est assez bien attestée dans l'Est, notamment dans un contexte funéraire.
Les monuments, temples du feu, sont les lieux où s'exerce le culte, mais on en connaît très peu. Le feu y brûlait, constamment entretenu par un préposé, dans des pièces entièrement closes. Surtout présent dans le Fârs, le type de temple le plus courant (attesté par les ruines d'une cinquantaine d'entre eux) comprend une coupole sur trompes d'angles reposant sur quatre piliers, entourée d'un déambulatoire. Toutefois, comme le modèle du temple du feu fut ensuite imité dans les mausolées islamiques, il est parfois difficile de distinguer parmi les ruines ce qui est sassanide de ce qui est islamique. On estime que la maîtrise architecturale, attestée dans les premiers temples d'Ardachêr I er à Firuzâbâd et de Châhpuhr I er à Bichâpur, ne sera plus atteinte par la suite. Les deux grands complexes (à Kuh-i Khwâje et à Takht-e Soleymân) sont d'époque tardive.
La cérémonie du Yasna comprend le sacrifice animal et diverses libations: l'inscription de Châhpuhr Ier nous en fournit un aperçu, indiquant que le roi faisait des réserves de moutons, de pain et de vin pour le rituel des fondations pieuses établies par ses soins pour le salut de l'âme des morts et des vivants de la famille royale. On voit ainsi l'importance de l'eschatologie individuelle dans le mazdéisme. La victime animale était étouffée ou étranglée, et non égorgée et saignée comme chez les Sémites, car si pour les Sémites le sang contient la vie, pour les Iraniens ce sont les os qui la renferment. Les diverses parties de la victime étaient ensuite offertes à différentes divinités. L'eau, qui est l'autre élément principal auquel on rend un culte, servait, avec le suc d'une plante reconnue généralement comme l'éphédra, à la préparation d'une boisson sacrée, le hôm (en avestique haoma, équivalent du soma védique), au pouvoir intoxicant et apte à procurer des extases et des visions.
Les pratiques, de la naissance à la mort D'après l'Avesta, le rituel d'initiation se ferait à l'âge de quinze ans, mais en fait c'est à sept ans (pour les Parsis de l'Inde) ou entre douze et quinze ans en Iran que l'enfant revêt la chemise sacrée (sedre) et la ceinture (kustîg), et doit connaître par cœur les prières essentielles. C'est toujours oralement en effet que se fait l'enseignement et, même pour le célébrant, le texte écrit n'a pas grande utilité.
La cérémonie de mariage ne nous est guère connue; en revanche, différents types d'union matrimoniale sont largement décrits dans la littérature juridique. Les unions consanguines devaient être fréquentes à la Cour et chez les nobles, en vue de maintenir l'héritage dans la famille et parce que l'exogamie «conduit à l'inimitié». Le rituel funéraire est cependant bien attesté: après la mort, le cadavre, devenu objet de la souillure la plus grave, doit être inspecté par un chien spécial, qui chasse le démon de la corruption, puis transporté par une corporation de croque-morts à la «tour du silence» (daxma), où il sera dévoré par les vautours. Hérodote nous apprend déjà que les Perses doivent faire décharner le cadavre par les chiens et les oiseaux. En vue de la résurrection à la fin des temps, lors de la Rénovation du monde, on recueillait ensuite les os, qui étaient placés en un endroit isolé, inaccessible aux bêtes sauvages. Les lieux de décharnement, avant qu'on ne construise, à l'époque islamique, des «tours du silence», étaient des plates-formes taillées dans le roc, qui n'ont guère laissé de traces. Les astôdân étaient des niches creusées en hauteur, destinées à recevoir les ossements. Ces chambres rupestres, très nombreuses dans le Fârs, sont parfois dotées d'une inscription mentionnant le nom du défunt, une date, et une formule de souhait «Que le paradis soit sa part!». Mais cette pratique est tardive.
Il a certes existé différents modes d'inhumation en Iran, comme l'attestent certains tombeaux, cairns, etc, et les prescriptions du Vendidad (décharnement et collecte des os) n'ont sans doute pas été suivies partout, notamment pas dans l'Est, en Bactriane, Sogdiane, Margiane et Chorasmie, en raison de l'éloignement de ces régions. Ainsi les fresques de Pendjikent offrent-elles des scènes de mutilation. Notons, surtout, les immenses ostothèques (collections d'os) qui comportent des scènes religieuses dont une représentation des six Amesha Spentas (entités abstraites divinisées qui entourent le dieu suprême Ahura-Mazdâ), pourvus de leurs attributs et figurés de manière anthropomorphique, selon les deux sexes, trois masculins et trois féminins. On connaît également la représentation du jugement de l'âme selon la doctrine mazdéenne, et celle du sag-dîd (inspection par le chien). Cette documentation très récente, inconnue à l'Ouest, est le fruit des nombreuses fouilles réalisées dans les régions d'Asie centrale de l'ex-URSS. Les régions orientales, où l'hellénisation avait été plus poussée, ont sans doute bénéficié de la rencontre entre la mythologie iranienne et l'art grec, comme en témoigne la figuration de divinités zoroastriennes sur les monnaies kouchanes, à partir de modèles grecs.
Le rituel de purification Comme les adeptes du judaïsme, les mazdéens étaient extrêmement soucieux de la pureté physique: tout ce qui provient du corps humain est impur, sang, cheveux, rognures d'ongles, excréments etc, même la salive et le souffle (le sperme, toutefois, est une substance pure). C'est pourquoi plusieurs traités - dont le Vendidad - édictent des règles très strictes, concernant les précautions à prendre, et les rituels de purification en cas de pollution: pour la femme dans ses périodes de menstruation ou après une naissance, pour quiconque a touché un cadavre (objet de pollution maximale), mais aussi pour celui qui accède au sacerdoce, de même qu'est codifiée toute purification annuelle ou périodique. Les textes déterminent aussi les amendes à payer en cas d'infraction à ces règles.
Parmi les rituels, le plus complexe (appelé barshnum) durait neuf jours et neuf nuits, dans un lieu isolé: trois chapitres du Vendidad lui sont consacrés. Si l'obsession de la pureté rituelle s'explique par la nécessité de faire reculer le Mal et de résister aux attaques des démons, il semble évident qu'elle devait conduire les mazdéens à un certain isolement social, qui les poussa peu à peu à simplifier ou à abandonner certaines pratiques trop contraignantes. La civilisation urbaine L'originalité des constructions sassanides réside dans l'introduction de voûtes monumentales et de coupoles en pierre et en argile. La brique crue fut le principal matériau utilisé. Les murs en pierre, reflets d'une influence occidentale, sont rares. C'est en effet par les prisonniers de guerre romains déportés en Iran par Châhpuhr I er et Châhpuhr II que furent construits en pierre les monuments de Bichâpur et du Khûzistan. La maçonnerie permettait un revêtement en stuc qui a donné lieu à une «exubérance décorative» propre aux Sassanides, car il a servi à orner des surfaces murales, des escaliers, de faux arcs, des saillies, etc.
Le plan cruciforme du temple du feu à coupole a été imité dans les églises arméniennes, puis emprunté par Byzance et finalement par l'Occident (voir, par exemple, l'église carolingienne de Germigny-des-Prés, près d'Orléans), ainsi que dans les mosquées, les mausolées, les palais, les madrasas de l'Orient islamisé. Les palais combinent la salle à coupole et l'iwan (grande salle voûtée ouverte sur une cour), mais cette forme fut ensuite abandonnée au profit de grandes terrasses auxquelles on accédait par des escaliers monumentaux.
Notre connaissance des villes est surtout livresque, car les archéologues se sont livrés à des prospections de surface. Mais le nombre de villes fondées ou rebaptisées d'après le nom du roi témoigne de l'importance que les monarques attachaient à l'existence de cités florissantes. Les premières ont un plan circulaire (déjà connu à l'époque parthe), puis on lui préféra un plan en damier rectiligne, notamment dans les villes de Châhpuhr Ier. Beaucoup de noms de lieux ont l'élément Êrân dans leur composition, pour marquer l'identité nationale iranienne. Ce sont les régions du Sud-Ouest et du Nord-Ouest qui semblent avoir connu le plus grand développement urbain. Les villes étaient fortifiées par des remparts avec bastions, les châteaux forts (en pierre) protégeant les frontières. Les murs de Darband (près de Bakou, en Azerbaïdjan) constituent la plus belle muraille défensive connue.
Agriculture et commerce La construction de barrages et de ponts barrages, ainsi que de grands canaux, a permis de développer la culture irriguée, surtout dans le Khûzistan. La superficie des terres cultivées fut plus grande qu'à aucune autre époque. Les produits exportables en dehors des régions agricoles (bassin de la Diyâlâ, Khûzistan et Fasâ-Dârâb) étaient les céréales, le riz et la canne à sucre. Les rois possédaient de grands domaines (dastgerd), de même que les nobles, mais la réforme de Khosrô Ier, en taxant les terres de ces derniers, fit naître une classe de petits propriétaires, les dehqân, c'est-à-dire des chevaliers récompensés par un don de fief.
Les rois encouragèrent aussi l'industrie textile: la culture du ver à soie fut introduite seulement au VI e siècle, juste avant Byzance, et sous Kavâd et Khosrô I er . Auparavant, le pays ne se livrait qu'au commerce de la soie brute. La route de la soie était alors contrôlée par les marchands sogdiens et indiens. Les contacts avec la Chine se développèrent grâce aux missionnaires nestoriens.
Peu de soieries attribuables aux Sassanides ont été retrouvées, sauf celles qui, utilisées à envelopper les reliques de saints chrétiens, parvinrent en Occident et furent conservées dans les trésors des églises. Les sources authentiques de tissus sassanides sont les textiles d'Antinoe (Egypte) et les reliefs de Taq-e Bostân (habits du roi et de ses courtisans). La prédominance du fond bleu foncé manifeste une symbolique astrale, de même que le cercle, symbole du ciel. Les signes du zodiaque sont aussi attestés, car les mazdéens étaient très intéressés par l'astrologie, intimement mêlée à la philosophie et à la médecine, ainsi qu'à la magie, comme en témoignent de nombreux bols inscrits. | |
| | | Vidar Blackeu Viking
Nombre de messages : 2711 Localisation : Dans la forêt d'Asgard Date d'inscription : 13/02/2006
| Sujet: Re: L'Empire Sassanide Dim 9 Avr - 2:29 | |
| L'art sassanide
Les mosaïques Le sol des palais, comme à Bichâpur, était garni de panneaux de mosaïque, illustrant deux sortes de scènes: courtisanes et musiciennes, ou séries de têtes masculines ou féminines sous forme de masques (dionysiaques) d'influence romaine. Les danseuses ou musiciennes, souvent nues, ont leur parallèle dans l'art local, sur l'argenterie. Ces scènes montrent que le palais était un lieu d'agrément pour le roi. Les palais comportaient également des décors en stuc, faits de rinceaux de fleurs, ou de bustes humains, de scènes de chasse, de motifs géométriques et végétaux, ou encore de divers animaux (dont le répertoire iconographique est très semblable à celui des sceaux).
La sculpture La ronde-bosse en pierre est très peu représentée (à l'exception notable d'une grande statue de Châhpuhr Ier mesurant plus de 7 m de haut). En métal, elle est un peu mieux attestée par quelques bustes royaux, non identifiables car leurs couronnes ne correspondent pas à celles des monnaies. Ces bronzes sont de la fin de la période sassanide.
Les reliefs rupestres On compte aujourd'hui jusqu'à trente-huit bas-reliefs rupestres, dont trente sont situés dans le Fârs, et six à Taq-e Bostân (Kurdistan). Ce sont peut-être les plus beaux chefs-d'œuvre de l'art sassanide. Au début de la dynastie, chaque roi fit sculpter au moins un relief, puis pendant deux cents ans il n'y eut plus rien, jusqu'à Khosrô II.
Procédant d'un art de Cour, destiné à la glorification du roi, ces reliefs sont exécutés dans un lieu isolé, sur une falaise, non destinés à des spectateurs, contrairement aux bas-reliefs romains. Différents thèmes sont illustrés: les scènes d'investiture, au nombre de neuf, où une divinité (Ohrmizd, seul ou en compagnie de Mithra ou d'Anâhitâ) tend au roi un diadème enrubanné, interprété comme le xwarrah, incarnation de la lumière divine et de la prospérité. Ardachêr fit graver trois reliefs d'investiture; en revanche, Bahrâm II, qui fit réaliser dix reliefs, n'a pas de relief de ce type. Une autre scène est celle de l'hommage rendu au roi par des princes ou des dignitaires: Bahrâm II a fait quatre bas-reliefs de cette sorte. Les scènes de triomphe sur les empereurs romains sont célèbres. Enfin, deux scènes de tournoi, et les tableaux de chasse de Bahrâm II à Sar Mashhad et de Khosrô II à Taq-e Bostân (chasse aux sangliers et aux cerfs) sont également très remarquables.
La vaisselle en métal Les pièces d'argenterie sassanide ont été rarement trouvées dans des fouilles, ce qui complique leur datation. La plupart des plats n'étaient pas destinés à la table, mais servaient de cadeaux ou d'objets d'apparat. Les autres récipients, aiguières, vases, coupes à boire, constituaient la vaisselle de la Cour. Ce n'est que par comparaison avec les reliefs, les monnaies ou les sceaux que l'on peut dater ces objets. Au début, ils sont illustrés par des scènes de chasse ou des portraits royaux; plus tardivement, par des motifs géométriques, végétaux, des animaux, des motifs dionysiaques et des danseuses et musiciennes.
Les sceaux Retrouvés en quantité considérable, les sceaux en pierres semi-précieuses (cornaline, agate, grenat, calcédoine, sardoine, onyx, améthyste, jaspe, cristal de roche, etc.) servaient à signer un document ou à authentifier une marchandise: ils étaient apposés sur des bulles, en argile crue, parfois en grand nombre, représentant autant de cosignataires. Pourvus parfois d'inscriptions (sceaux administratifs officiels ou privés), ils sont une source précieuse pour l'anthroponymie et la toponymie, de même que pour l'iconographie (large répertoire animalier et humain). | |
| | | Contenu sponsorisé
| Sujet: Re: L'Empire Sassanide | |
| |
| | | | L'Empire Sassanide | |
|
| Permission de ce forum: | Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
| |
| |
| |
|