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 La Renaissance

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Blackeu Viking
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MessageSujet: La Renaissance   La Renaissance EmptyMer 3 Mai - 2:42

La Renaissance Carte_Humanisme_Renaissance
La Renaissance en Europe



Le terme de Renaissance est l'équivalent français de l'italien rinascimento, ou rinascita: le renouveau des arts européens, lequel prend sa source, au XVe siècle, en Italie, où il est associé à la redécouverte de la littérature, de la philosophie et des sciences de l'Antiquité ainsi qu'à l'évolution des méthodes empiriques utilisées pour l'étude de ces disciplines. Mais la Renaissance, au-delà de la floraison artistique et culturelle qui lui vaut son nom, est une période capitale pour l'Europe, qui avec les Grandes Découvertes va se lancer à la conquête du monde.

La Renaissance est une notion discutée et sans doute discutable. Tous les traits caractéristiques de cette période se retrouvent en plein Moyen Age. Et pourtant, on ne peut négliger la conviction des contemporains, à la suite du peintre et critique d'art Giorgio Vasari, de vivre un véritable renouveau. La Renaissance pourrait se définir alors comme la «sensation», puis la mise en place de structures nouvelles.

Entre 1450 et 1550, l'Europe va poser les bases de son hégémonie tant économique que politique. La fin du Moyen Age a été marquée en Europe par une accumulation de fléaux: famines, guerres et retour de la peste ont mis à mal le continent. Le temps de la Renaissance est donc celui d'une reprise générale, démographique aussi bien qu'économique. Ainsi, dans ce siècle qui suit la fin de la guerre de Cent Ans, la France, qui n'avait plus qu'une dizaine de millions d'habitants, double sa population, qui retrouve ainsi son niveau démographique d'avant les crises. Les Anglais, qui sont deux millions vers 1485, atteignent les trois millions en 1550.
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MessageSujet: Re: La Renaissance   La Renaissance EmptyMer 3 Mai - 2:42

Caractéristiques de la période


L'agriculture
La «copiosité du populaire» (Seyssel) entraîne une renaissance des campagnes, durement touchées: terres incultes et villages désertés retrouvent leur animation. La production agricole, de ce fait, est en hausse. La céréaliculture traditionnelle tient toujours la première place, mais sans amélioration des rendements, à l'exception de ceux que procure une plante nouvelle: le maïs. Importé d'Amérique, celui-ci n'est pour l'heure cultivé qu'en Espagne.

Cependant, les autres secteurs agricoles se développent, qu'il s'agisse de la vigne ou de l'élevage. Ce dernier prend même une place notable dans nombre de régions, du Danemark à la Hongrie. A l'échelle du continent, la consommation de viande s'est nettement accrue depuis le XIV e siècle, avant de décroître bientôt avec les effets du «surpeuplement», qui donne la priorité absolue aux céréales. Les techniques agricoles ne sont pas modifiées en profondeur, sauf dans quelques régions de pointe, comme la Flandre, où l'on voit même s'effacer la jachère.

L'industrie
Le même redémarrage appparaît dans l'industrie, lequel accompagne une demande croissante, notamment pour le textile. Là encore, il n'y a pas de bouleversement décisif. Pour autant, les innovations sont nombreuses, plus notables sans doute que pour l'agriculture. Le symbole en est évidemment la mise au point de l'imprimerie, qui prend place parmi les grandes «industries» du temps.

De nombreux secteurs font l'objet d'améliorations techniques sensibles: la verrerie, avec la mise au point de la fabrication du verre blanc; la métallurgie, avec l'apparition du haut-fourneau. Pour l'extraction minière, charpentes, systèmes de ventilation et de pompage se perfectionnent, et la production s'envole: de 1460 à 1530, elle est multipliée par cinq pour le cuivre et l'argent en Europe centrale.

Les grands capitalistes se font de plus en plus présents dans l'«industrie», en raison de l'importance croissante des investissements. C'est à leur initiative que se développent de nouvelles formes de production. Ainsi, dans le secteur en plein essor de la draperie légère, ils délaissent progressivement les vieux centres textiles, tenus par les corporations, pour répartir le travail dans les campagnes, où la concurrence joue plus librement, ce qui permet de moindres rémunérations. Cette mutation est, à long terme, porteuse des élans - et des contradictions - de la proto-industrialisation.

Le commerce
Ce qui précède souligne le rôle décisif des oligarchies urbaines: c'est le temps du capitalisme commercial, où celui qui trafique est maître des circuits de production. La figure emblématique de la Renaissance est ici celle du grand marchand, qu'il se nomme Médicis, Fugger, Cœur ou Ruiz. Il agit au sein de firmes parfois complexes, compagnies à comptoirs, constituant une seule entreprise, ou compagnies à filiales, dans lesquelles la société mère se contente d'une participation au capital. Bien des structures restent encore archaïques, comme celles du réseau commercial constitué par la Hanse.

Nouvelles techniques commerciales
Dans le domaine du grand commerce, la «modernité» vient surtout d'Italie, où apparaissent les assurances maritimes (à Gênes, dès le XIV e siècle); alors que la Hanse n'y fera appel que deux siècles plus tard. La comptabilité en partie double prospère dans la Péninsule depuis plus d'un siècle, alors que les Fugger eux-mêmes ne l'emploient pas. Les monarchies sont plus en retard encore: la Castille, précoce en ce domaine, l'adopte en 1592 seulement.

En revanche, en matière de circulation monétaire et de crédit, la lettre de change, apparue à la fin du XIII e siècle, est largement diffusée: elle tend à devenir un véritable papier-monnaie pour les agents du grand commerce. La complexité des questions monétaires et les besoins de crédit des agents économiques, des particuliers et des Etats font que les grands marchands sont tout naturellement en même temps de grands banquiers: ils font du commerce de l'argent une branche ordinaire de leurs multiples activités.

Nouveaux pôles d'échange
La Renaissance est marquée par une vigoureuse reprise des échanges. Si la Méditerranée conserve sa primauté séculaire (le commerce oriental de Venise connaît même au milieu du XVI e siècle un regain d'activité), le commerce d'outre-mer dynamise toute la façade atlantique. L'essor est net également dans la Baltique, où la Hanse a fort à faire face à de nouveaux venus, notamment les Anglais et les Hollandais. Au cœur de l'Europe, l'Allemagne du Sud, avec ses riches cités, s'affirme comme plaque tournante du commerce.

La majorité des villes bénéficie de la conjoncture économique favorable. Cependant, les hiérarchies s'infléchissent, et de nouveaux phares apparaissent: Lyon et ses foires, Anvers et sa Bourse. Leur croissance est parfois spectaculaire, comme celle de Séville, porte de l'Amérique, dont le nombre d'habitants passe de 40'000 à 100'000, de la fin du XV e siècle aux années 1560. La domination urbaine s'accroît, mais l'Europe reste rurale.
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MessageSujet: Re: La Renaissance   La Renaissance EmptyMer 3 Mai - 2:43

Cadres sociaux


Malgré la violence du choc subi par les sociétés européennes à la fin du Moyen Age, les cadres sociaux essentiels ont résisté à la crise.

Les propriétaires de la terre
Au premier rang des propriétaires terriens figure la seigneurie. Le mode de possession par tenure, s'il recule parfois, reste très présent. Sur les réserves seigneuriales se développent fermages et métayages, et, une fois les cadres de production rétablis, les grands propriétaires prennent progressivement l'habitude de passer des baux courts, plus avantageux pour eux.

Après un temps d'exigences plus modérées imposées par le redémarrage, qui correspond approximativement au XV e siècle, la pression financière s'accroît. Ceux des ruraux qui ont pu profiter du bon «temps de l'homme rare» pour se dégager de la masse ont désormais une position bien établie. Les autres, les plus nombreux, vont bientôt se trouver de nouveau confrontés à de graves difficultés. C'est en Europe orientale que la réaction seigneuriale est la plus sévère.

Alors que les paysanneries d'Occident sont définitivement sorties du servage, et parfois depuis longtemps, celui-ci s'enracine plus à l'Est, où la densité de peuplement est faible. Pour permettre l'exploitation des grands domaines seigneuriaux, il faut à la fois fixer cette population et lui imposer de lourdes corvées. C'est chose faite en Pologne par une série de lois édictées entre 1496 et 1532. Il en va de même en Hongrie ou en Moscovie. En Pologne, la bourgeoisie urbaine elle-même perd le droit de posséder des terres.

Or la terre, qui se fait progressivement plus rare et plus précieuse en Occident, devient dans le même temps un enjeu de plus en plus disputé entre les groupes sociaux. Les seigneurs traditionnels cherchent à garder leurs domaines, les bourgeoisies urbaines pénètrent en force sur le marché, les paysans s'accrochent à leurs biens. Tous veulent bénéficier de la hausse des prix alimentaires (et ce avant même l'arrivée des métaux d'Amérique), qui assure, inégalement, des profits aux exploitants et aux rentiers du sol. Les salariés, aux ressources stagnantes, voient en revanche leur pouvoir d'achat s'éroder lentement sous l'effet de l'inflation. La prospérité de la Renaissance est socialement sélective.

La noblesse
S'il existe une culture marchande, marquée par le rôle du chiffre et de l'écrit, sensible à l'exactitude et à la mesure, nul doute cependant que le modèle social de référence ne soit le modèle nobiliaire. La noblesse est alors un groupe social relativement ouvert, en plein renouvellement, et exerce une forte attraction sur les élites bourgeoises, qu'elles soient marchandes ou au service des princes. Ici encore, la possession de terres et de seigneuries s'impose: c'est par elles, et par la pratique du genre de vie noble, que l'accession au second ordre est la plus aisée. La noblesse reste, de loin, le groupe social dominant à la Renaissance.

La hiérarchie sociale
C'est le plus souvent avec la bénédiction des Eglises et le soutien des Etats que s'affiche clairement la hiérarchie sociale, mais l'ordre n'est pas toujours assuré. Les révoltes ont des motifs divers, depuis les difficultés d'approvisionnement («grande rébeyne» de Lyon, 1529) jusqu'au refus de la fiscalité. La dimension religieuse est souvent présente: en des temps troublés par les questions de foi, les paysans du Bundschuh prônent une réforme, et les révoltés hongrois de 1514 appellent à la croisade contre le Turc. Mais les enjeux sociaux s'imposent souvent, la révolte étant vue comme un droit à la résistance de communautés qui se sentent agressées.

La lutte contre la réaction seigneuriale est une des dimensions de la guerre des Paysans (1524-1525). La question du servage et des obligations personnelles entraîne des troubles de la Catalogne à la Hongrie. En Castille, le mouvement des comuneros, la plus importante révolte urbaine du temps (1520-1521), est dirigé à la fois contre les empiétements de l'aristocratie et contre ceux du pouvoir royal. Il est vrai que le poids de l'Etat, en particulier sur les villes, se fait de plus en plus sentir.
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MessageSujet: Re: La Renaissance   La Renaissance EmptyMer 3 Mai - 2:43

Cadres politiques


En matière politique, un constat d'ensemble s'impose: les monarchies nationales prennent une place croissante. Du Portugal des Aviz, en pointe dans les Grandes Découvertes, à la Suède des Vasa, qui arrache au Danemark son indépendance dans les années 1520, la tendance est générale. Elle se fait sentir jusque dans le grand-duché de Moscovie. Affirmation identitaire et mise au pas de différentes puissances (de la Hanse aux chevaliers Teutoniques) se conjuguent.

L'Italie
A une échelle moindre, un mouvement italien d'unification conduit à la mise sur pied de quelques grandes constructions régionales (Venise, Milan, Florence, Rome, Naples). L'absence d'unité n'interdit d'ailleurs pas l'existence d'un «sentiment national». Celui-ci est net dans la péninsule italienne, où il prend sa source, au sein des élites, dans la certitude d'une supériorité culturelle.

Cependant, partout sont exaltées les cultures nationales, les langues en particulier: le castillan, le français, l'anglais, l'allemand, voire le suédois conquièrent leurs lettres de noblesse, ce qui ne peut laisser indifférentes les autorités.

L'Espagne
Dans la péninsule Ibérique, l'essentiel s'accomplit par le mariage d'Isabelle de Castille et de Ferdinand d'Aragon, en 1469. L'union des Rois Catholiques n'est certes qu'une union personnelle: les divers territoires conservent une large autonomie. Cependant, l'unification espagnole, sous l'égide de la Castille, est en marche. Elle passe dans un premier temps par l'achèvement de la Reconquista: le royaume de Grenade, dernier Etat musulman d'Europe occidentale, tombe en 1492. Le nombre des convertis récents, d'origine juive ou musulmane, pose avec acuité la question de l'orthodoxie. D'où la création, en 1478, d'une «Inquisition» spécifique: le militantisme catholique sert, parfois dans la douleur, de creuset à l'unification du pays.

L'Angleterre
Sortie vaincue du long duel de la guerre de Cent Ans, l'Angleterre plonge aussitôt dans la guerre civile, la guerre des Deux-Roses. Guerre au terme de laquelle, en 1485, émerge une nouvelle dynastie, celle des Tudors, qui consacre tous ses efforts à asseoir solidement son autorité et à disposer des moyens, financiers ou politiques, de ses ambitions. La question du divorce de Henri VIII entraîne une rupture avec Rome, la papauté étant d'ailleurs jugée incapable de mener à bien une réforme. La mise sur pied d'une Eglise nationale, dont le roi est la tête, renforce encore l'impact de la monarchie.

La France
En France, après les succès de Charles VII et la reconquête du royaume vient le temps de l'affrontement avec les dernières grandes principautés. Celles-ci, y compris la riche Bourgogne, ne sont plus de taille à s'opposer à une monarchie puissante. Louis XI et Charles VIII vont ainsi étendre leur autorité sur Dijon, sur Marseille et sur Nantes. La stabilité de la dynastie des Valois se marque par le fait que les deux successions collatérales de 1498 et de 1515 ne causent aucun trouble.
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MessageSujet: Re: La Renaissance   La Renaissance EmptyMer 3 Mai - 2:44

La mise en place des monarchies


Si le sentiment national est en progrès, il est cependant évident qu'il ne s'agit pas de la seule valeur politique du temps. Les liens d'homme à homme, même s'ils ont changé de nature par rapport au Moyen Age classique, sont toujours vifs. Il est même possible, en ces temps de clientèles et de «partis», qu'ils soient plus vigoureux encore qu'auparavant. Mais, surtout, compte la fidélité dynastique. Les souverains eux-mêmes font parfois passer les enjeux familiaux avant les enjeux nationaux. Traditionnellement suzerain, et à ce titre immergé dans le système féodal, le prince tend à devenir de plus en plus souverain, incarnation d'un principe politique en gestation: l'Etat. En la matière, l'Italie des seigneuries personnelles et des principats a peut-être montré la voie aux monarchies plus anciennes.

Le «personnel» des Etats
Autour du souverain, le Conseil, mieux tenu en main, se renforce et parfois se spécialise. Le développement du phénomène curial marque à la fois la volonté de manifester la splendeur du pouvoir et le souci d'attirer auprès de soi, pour mieux les utiliser et mieux les contrôler, les élites sociales.

Les assemblées représentatives, qui ont connu une floraison exceptionnelle à la fin du Moyen Age, subissent pour leur part des destins contrastés. Leur recul est manifeste dans nombre de pays, à l'image de la France: les Cortes de Castille et même le Parlement anglais jouent alors un rôle moindre. Cependant, dans l'Empire ou en Pologne, la place des diètes demeure très importante.

Incontestablement, les Etats (le mot prend alors son sens actuel) disposent de moyens accrus. Leur personnel s'étoffe: la figure de l'officier royal, suivant le modèle français - celui d'un agent stipendié et assez obéissant -, s'étend à l'ensemble du continent, Angleterre exceptée.

La fiscalité
Se développe parallèlement la vénalité des charges: malgré ses inconvénients, elle permet au souverain de remplir ses caisses et de s'assurer plus solidement de la fidélité de ses agents en cas de crise grave. La France et la papauté, suivant en cela l'exemple vénitien, sont les deux Etats les plus avancés dans cette voie au XVI e siècle. Il est vrai que la recherche de ressources régulières est une obsession: partout la fiscalité est en progrès, tout comme le souci de disposer librement des fonds alloués.

La France et la Castille sont à la pointe du mouvement. Devant les irrégularités et les insuffisances des prélèvements, les systèmes de crédit public se renforcent. Ils juxtaposent prêts à court terme, obtenus le plus souvent soit des proches du pouvoir, soit des marchands-banquiers, et mise sur pied d'un crédit à long terme fondé sur des rentes. Les besoins toujours accrus que représentent des opérations militaires de plus en plus coûteuses accroissent sans cesse les demandes. Le binôme guerre-fiscalité, bien rodé dès le XIVe siècle, est l'un des éléments essentiels des progrès de l'État.
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MessageSujet: Re: La Renaissance   La Renaissance EmptyMer 3 Mai - 2:44

La fin des monarchies impériales


L'équilibre entre les empires
Une fois encore, l'Italie sert de modèle. Aux velléités de Naples et de Milan de contrôler la Péninsule répondent des résistances acharnées. L'aspiration à l'unité par la force est contrée par le souci de défense des libertés locales. A partir de la paix de Lodi (1454), un véritable système d'équilibre entre les principaux Etats assure à la Péninsule une paix relative. Pour ce faire, il est nécessaire de développer une diplomatie complexe: l'Italie sert aussi de laboratoire en la matière, avec le recours aux ambassadeurs permanents, pratique bientôt généralisée en Europe. Mais ce jeu subtil, que les Etats italiens ont l'illusion d'être seuls à maîtriser, les conduit à faire appel aux puissances barbares, c'est-à-dire étrangères, pour maintenir leurs équilibres internes, ce qui leur sera fatal.

A une plus large échelle, d'autres «Barbares» progressent: au XV e siècle, les Balkans tombent entièrement sous la coupe des Ottomans. Ceux-ci sont parvenus en 1453 à prendre Constantinople, mettant ainsi un terme à la longue agonie de l'Empire byzantin. Au même moment, l'Europe orientale est marquée par l'emprise croissante des Jagellons: à la fin du XV e siècle, ces derniers règnent l'un sur la Lituanie et la Pologne, l'autre sur la Bohême et la Hongrie.

Le nouveau rapport de force politique
Mais la force des aristocraties (il s'agit d'ailleurs de monarchies électives) les empêche de forger une construction politique solide. D'autant qu'en 1526 le royaume de Hongrie s'effondre sous les coups des Ottomans à Mohács. Si l'ensemble polonais subsiste, la succession magyare et bohémienne échoit par alliance aux Habsbourgs, qui se retrouvent ainsi en première ligne face aux Turcs. Il appartient à cette nouvelle construction impériale de contenir la poussée continentale des «infidèles», lors du siège de Vienne (1529) puis en Hongrie. En Méditerranée, où Venise supporte l'essentiel du fardeau, il faudra attendre l'échec du siège de Malte (1565) et la victoire de Lépante (1571) pour voir s'inverser la tendance. Au début du XVI e siècle, les ambitions et les succès français en Italie entraînent la constitution de coalitions adverses; l'Europe assimile progressivement la notion d'équilibre, apparue dans la Péninsule. La course aux alliances est permanente.

L'échec définitif de l'ambition impériale
Lors du grand duel entre les Valois et les Habsbourgs, les puissances secondaires jouent un jeu de bascule au détriment de l'homme fort du moment: les princes italiens et le roi d'Angleterre se retrouvent ainsi contre Charles Quint au lendemain de sa victoire à Pavie (1525). On s'emploie aussi à tourner l'adversaire, les Français font des avances aux Ottomans, tandis que les Impériaux recherchent l'appui de l'Empire perse, rival des Turcs. Enfin, le recours aux «ennemis de l'intérieur» - par exemple, le connétable de Bourbon ou les luthériens de l'Empire - est fréquent. A terme, l'impuissance à vaincre éclate: jamais les victoires ne sont décisives.

Plus encore que le fruit du jeu des puissances, cela s'explique par les possibilités restreintes des Etats. Malgré de réels progrès, leurs moyens sont encore limités, particulièrement dans le domaine financier, ce qui paralyse bien des projets.

L'abdication de Charles Quint (1556) correspond à l'échec définitif de l'ambition impériale, minée avant tout par ses faiblesses internes. Elle amorce cependant le triomphe des monarchies nationales, y compris espagnole.
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MessageSujet: Re: La Renaissance   La Renaissance EmptyMer 3 Mai - 2:45

L'humanisme


La Renaissance PER_MOD_077_a
"Erasme est le phare de la nouvelle culture"


La référence antique: l'humanitas
Depuis le XIXe siècle, le terme d'«humanisme» désigne le mouvement de rénovation des lettres et de la pensée s'appuyant sur l'étude des textes antiques qui se dessina dès le XIIIe siècle en Italie et qui s'épanouit jusqu'au XVIe siècle dans l'ensemble de l'Europe de la Renaissance. Mais le mot se trouve investi de plusieurs significations, selon qu'on le limite strictement dans le temps, ou qu'on l'applique, par extension, à des états d'esprit ultérieurs, significations dont le seul point commun est de privilégier une philosophie résolument optimiste de l'homme.

L'«humanisme» rassemble, en les généralisant et en les simplifiant, des pratiques (philologie, analyse rationnelle) et des thèmes remis en vogue à partir de formulations latines: humanitas et humanores litterae. Conçue comme une réalisation, en l'homme, de sa spécificité de culture et de douceur, l'humanitas s'oppose chez les Romains à la virtus, qui épanouit les vertus mâles de courage et d'énergie. La philosophie, la poésie, toutes les formes de disciplines intellectuelles qui concourent à cet effet civilisateur sont dites «lettres humaines». Cet idéal est exprimé, par exemple, dans les traités cicéroniens et dans les écrits d'Horace. L'humanitas est donc bien notre actuelle «humanité», mais associée à l'idée de culture comme essence de l'homme, non à la compassion. C'est en ce sens que les savants qui retrouvent les textes latins peuvent s'enthousiasmer pour un idéal civil qui ne soit ni la sainteté ni l'héroïsme militaire, ces deux modèles médiévaux de perfection. Ils ne l'appellent pas «humanisme», mais «sapience», «sagesse». Cette conception lie philosophie, morale et bien-dire.

Les débuts en Italie
Le retour à l'Antiquité et à ses textes comme modèles de sagesse et de formation d'hommes dignes de ce nom s'amorce très tôt en Italie, où le développement d'élites urbaines enrichit la vie culturelle et où arrivent bientôt, fuyant l'avancée des Turcs, des réfugiés grecs porteurs de manuscrits et de traditions exégétiques; ces réfugiés auront pour protecteur un théologien byzantin rallié au parti de l'Union des Eglises, le cardinal Bessarion, qui sera un fervent défenseur de l'hellénisme en Occident. Avec la redécouverte des manuscrits grecs et latins, la multiplication des traductions - qui ouvre des champs de lecture depuis longtemps inaccessibles -, l'apprentissage systématique des langues anciennes allié à une exigence de pureté grammaticale nouvelle apparaît un état d'esprit qui, sautant par-dessus la période médiévale, désormais jugée ignorante, vise à renouer avec une époque prestigieuse. Le nouvel idéal se répand grâce à l'invention de l'imprimerie, au développement définitif des villes, à la création massive d'universités, au développement des institutions administratives et judiciaires. Savoir parler, savoir penser, savoir vivre sont conçus comme des éléments d'une même formation et peuvent faire l'objet d'une éducation systématique, s'opposant ainsi aux vertus nobiliaires, considérées comme innées. Des métiers apparaissent, liés au professorat, à l'édition, à la réflexion sur la vie en société. Un réseau d'éditeurs-libraires et de philologues préparant les éditions de textes s'implante dans les grandes villes, souvent constitué en dynasties.

Les princes protègent historiographes, juristes et poètes, qui, en retour, contribuent à asseoir leur prestige personnel, et par là même leur pouvoir. Les Médicis, à Florence, jouent un rôle exemplaire: Ficin rassemble les humanistes, parmi lesquels Bembo, Politien et Pic de La Mirandole, en une académie, avec la protection de Cosme de Médicis, dont le petit-fils Laurent fonde la Bibliothèque médicéenne; sous leur égide, Marsile Ficin traduit Platon et les platoniciens tardifs. Les papes eux-mêmes encouragent toutes sortes de recherches sur les traditions textuelles et religieuses - y compris des audaces que les Eglises locales censurent, comme à Cologne, où le tribunal ecclésiastique veut condamner l'hébraïsant Reuchlin, qui s'est opposé à l'autodafé de livres juifs, alors que le pape emploie des bibliothécaires juifs à la traduction de la kabbale.


La propagation en Europe
L'humanisme se répand en Europe, tout d'abord en Rhénanie, de l'Allemagne à la Hollande, région la mieux pourvue en villes, riche en échanges culturels et première zone d'expansion de l'imprimerie et des foires aux livres. Le collège trilingue de Louvain est le premier de ce type. Erasme est le phare de la nouvelle culture, encore très liée à la religion: ses éditions des Pères de l'Eglise, ses Dialogues et ses Adages, son Eloge de la folie (1511), ses réflexions sur le christianisme, sur la formation des princes chrétiens le posent en maître à penser de l'Europe. Une abondante correspondance le relie aux lettrés de tous les pays.

L'humanisme pénètre en France grâce à la cour pontificale d'Avignon, où séjournent au XIV e siècle Pétrarque et Boccace. Déjà à la cour de Charles V, puis à celle des ducs de Bourgogne, des traducteurs ont fait redécouvrir la philosophie antique (la Politique et l'Ethique d' Aristote), l'histoire romaine (Tite-Live). Les guerres d'Italie amplifient la communication culturelle, l'impulsion décisive venant de François I, roi lettré, qui décide une véritable importation de professeurs et d'artistes, puis, poussé par Guillaume Budé, fonde le Collège des lecteurs royaux, collège trilingue où seront enseignés le latin, le grec et l'hébreu.

Mais le mouvement existe aussi en Europe de l'Est, encouragé en Hongrie par le roi Mathias Corvin; les Polonais nobles parlent latin couramment quand les seigneurs de France en sont encore aux rudiments.

En Espagne, le grand défenseur de l'humanisme est le cardinal Cisneros, qui fonde l'université trilingue d'Alcalá de Henares, d'où sortira la première Bible polyglotte. Mais, après une génération enthousiaste, les querelles religieuses enveniment le mouvement, les disciples d'Erasme sont pourchassés.

L'Angleterre est plus tardivement touchée, sans doute en raison de son instabilité politique au XV e siècle. Mais, au XVI e siècle, tout s'accélère: le chancelier Thomas More et sa célèbre Utopie (1516) préparent la voie à l'art élisabéthain.

Humanisme et individu
Vers 1530, le renouveau et l'expansion intellectuels semblent fédérer la culture européenne. La confiance dans le progrès humain, dans la civilisation, dans la capacité humaine à embrasser la connaissance caractérise une philosophie optimiste et conquérante inspirée du platonisme, dont le symbole serait Pic de La Mirandole et ses connaissances en ce «beau rond de sciences qu'on appelle encyclopédie». La multiplicité des curiosités, le mélange entre rationalisme et magie, l'absence de spécialisation par la diversité des talents unissent les gens de religion et les artistes ( Léonard de Vinci), les lettrés (tels Rabelais et les auteurs de la Pléiade) et les philosophes scientifiques ( Bacon). Des sciences nouvelles apparaissent - philosophie politique, géographie, cosmologie - et la pensée historique fait des progrès décisifs.

Simultanément, les XV e et XVI e siècles sont une période de relative prospérité et d'ouverture des groupes sociaux dans la montée de monarchies renforcées, grâce à quoi savants et artistes rencontrent une réussite individuelle valorisant l'esprit de découverte, les capacités techniques et mentales: l'humanisme est un auxiliaire de l'invention de la notion d'individu.

Les résistances à l'humanisme
Cette montée irrésistible ne va pourtant pas sans rencontrer des résistances.

Le mépris des nobles
Tout d'abord, un fond de mépris de la part des nobles: en italien, le plus ancien emploi de umanista désigne le professeur de langues anciennes, avec une connotation péjorative («pédant», «grammairien»), et longtemps ce modèle aura besoin de la protection des princes pour s'imposer dans les cours. Le prix de cette protection est le conformisme social des premières générations, auxiliaires d'une centralisation du pouvoir princier, avant que les nobles n'atteignent à une culture minimale effective (le Livre du Courtisan, de Baldassare Castiglione, publié en 1528), les lettrés choisissant eux-mêmes entre érudition pure et littérature.

La méfiance des universités
En un deuxième temps, les résistances viennent des universités, et surtout des facultés de théologie, qui s'aperçoivent que l'esprit d'examen engendre la critique religieuse (comparaison de l'Eglise primitive avec l'Eglise moderne) et juge de l'authenticité des vieux parchemins (la Donation de Constantin sera dénoncée comme faux par Lorenzo Valla). Si le grec doit faire douter des traductions le plus en usage, on assimile vite son apprentissage à une pensée subversive. Même chez les humanistes, des doutes surgissent sur l'usage que le monde chrétien peut faire de la pensée païenne, et Erasme réprimande fortement les lettrés romains qui, selon lui, s'éloignent du christianisme. L'éclosion de la Réforme contribue à faire du savoir un enjeu: la liberté de penser, sitôt découverte, est réfrénée par la censure. Face à une Eglise qui suspecte tout, la réaction des lettrés est aussi de défendre leur cause (parfois jusqu'au bûcher, comme Etienne Dolet) et de diffuser leurs découvertes, même contestataires: travaux des philosophes padouans sur Aristote, découvertes de Copernic, tentation d'une religion syncrétique.

La paresse des mondains
En un troisième temps, la résistance - passive - vient des mondains: un peu de culture, soit; mais un excès d'érudition entraîne une grande fatigue intellectuelle, et n'est bon que pour les pauvres, les professeurs, les subalternes.

La postérité de l'humanisme
A la fin du XVI e siècle, le public commence à imposer des mutations culturelles qui sont l'héritage de l'humanisme déjà transformé.

Le système éducatif se trouve nettement rénové hors des universités, et surtout sous l'impulsion des Jésuites. Le programme du père Possevino est encore à la base des études de lettres quatre siècles plus tard. Il est définitivement acquis que la culture est latinisée et pétrie de citations. L'exemple en est Montaigne, pour qui le modèle romain régit toute réflexion et pour qui la vie intellectuelle s'oriente vers une morale personnelle et sociale.

La postérité de l'effort originel pour comprendre les textes et les analyser se manifestera dans la grande érudition, critique - des philologues français Joseph Juste Scaliger et Isaac Casaubon au Flamand Juste Lipse -, collectionneuse - avec Jean Mabillon (De re diplomatica, 1681) et Pierre Daniel Huet, qui publie en 1685 Ad usum Delphini, édition des classiques destinée au fils de Louis XIV - et marginalisée hors des lettres humaines, qui se scinderont en sciences et en belles-lettres.

La postérité des idées est plus floue, d'abord parce qu'elles n'ont jamais été très homogènes, si ce n'est dans un relatif optimisme à l'égard de la pensée et de la raison humaines, malgré tous les démentis pratiques. Le début du XVII e siècle connaît un humanisme chrétien, voire un humanisme dévot, qui intègre cette version optimiste à la religion de la Réforme catholique, avec saint François de Sales et, toujours, les Jésuites. Puis la vague pessimiste et moraliste, contrepoids d'une vague mondaine et libertine, recouvre le tout. S'agit-il pour autant d'«antihumanisme»? On l'a dit à propos de Pascal et de la morale janséniste du XVII e siècle, qui donne à l'homme une condition irrémédiablement pécheresse et n'encourage aucune résistance critique à des institutions elles-mêmes faillibles. En réaction, la philosophie des Lumières, malgré d'innombrables différences, notamment de rationalisme, renouera avec la confiance dans le progrès et avec l'affirmation des valeurs primordiales libératrices.

A strictement parler donc, l'humanisme est le mouvement restreint dans le temps où les langues anciennes sont des instruments de rénovation qui excitent une nouvelle culture, qui, elle, va s'exprimer dans les langues vulgaires avec un acquis érudit, diffusant une philosophie chrétienne optimiste.
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MessageSujet: Re: La Renaissance   La Renaissance EmptyMer 3 Mai - 2:46

Les nouveaux savoirs


La révolution de l'imprimerie
Jusqu'au XV e siècle, les livres étaient écrits à la main sur du parchemin et coûtaient très cher. Vers 1450, l'Allemand Gutenberg imagine un procédé permettant de reproduire grand nombre de fois un texte ou une gravure. Il met au point l'emploi de caractères de métal et l'utilisation de la presse à vis. A la fin du XV e siècle, toutes les grandes villes européennes ont leurs imprimeries. On en compte plus de cinquante à Lyon. Dans développe. Peu à peu, le livre imprimé devient accessible à tous ceux qui savent lire.

Savants, ingénieurs et érudits
Aux XV e et XVI e siècles, un puissant élan intellectuel s'étend à toute l'Europe. Des savants remettent en question les idées et les croyances traditionnelles.

Copernic ose affirmer que la Terre n'est pas le centre de l'Univers et qu'elle tourne autour du Soleil. Galilée le confirme, en observant le ciel avec sa nouvelle lunette astronomique. Il est condamné par l'Eglise. Léonard de Vinci, peintre, sculpteur, architecte, ingénieur et astronome, le type même du savant au savoir universel.

Des érudits, tels Pic de La Mirandole, Machiavel et surtout Erasme cherchent à élever l'esprit humain et engagent au désir d'apprendre.

La critique de la tradition
Le mouvement intellectuel qui se produit en Europe aux XV e et XVI e siècles rompt avec la tradition médiévale, fondée sur la science religieuse. On reprend l'étude des textes de l'Antiquité qui accordent plus de place aux sciences de l'homme et portent en eux un savoir que l'on veut redécouvrir. On réapprend le latin classique, le grec et l'hébreu pour lire directement ces textes sans passer par les traductions, souvent erronées.
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L'art de la Renaissance en Italie
1420 - 1503



La première Renaissance, ou Quattrocento, se développe en Italie au XV e siècle avec notamment Donatello en sculpture, Brunelleschi en architecture et Masaccio pour la peinture. Ces artistes cherchent à créer des formes artistiques à l'unisson de l'apparence de la nature. Dans le domaine de l'architecture, Brunelleschi crée le type Renaissance avec l'audacieuse coupole de Santa Maria del Fiore qui préfigure celle de Saint-Pierre de Rome, chef-d'œuvre de Bramante et de Michel-Ange.

Celle-ci appartient à la seconde Renaissance, qui se développe à Rome à partir de 1494, sous le mécénat des papes. Dans les domaines de la peinture et de la sculpture, les noms de Raphaël, de Léonard de Vinci et de Michel-Ange sont souvent associés pour évoquer l'art de la Renaissance à son apogée.

Le nouveau statut de l'artiste
L'accroissement de la sensibilité au savoir classique (notamment au naturalisme d' Aristote) entraîne ces approches révolutionnaires que sont l'observation et l'étude directes du monde naturel. Aussi les thèmes profanes prennent-ils une importance croissante pour les artistes, auxquels le regain d'intérêt pour l'Antiquité offre un répertoire de sujets empruntés à l'histoire et à la mythologie gréco-romaine. Les modèles proposés par l'art et l'architecture antiques font également naître de nouvelles techniques artistiques ainsi qu'un désir de recréer les formes et les styles de l'art classique.

Le nouveau statut de l'artiste, désormais considéré non plus comme un simple artisan mais comme un créateur, recherché par les mécènes - pour la plus grande gloire desquels il œuvrera - et respecté pour son érudition et son imagination, est à la fois la conséquence et la cause première du développement de l'art renaissant. A l'instar du rôle social de l'artiste, les attitudes devant l'art connaissent une mutation. L'art est prisé non seulement parce qu'il véhicule l'enseignement social et religieux, mais encore parce qu'il constitue un mode d'expression personnelle qu'il convient de juger selon des critères esthétiques.

Trois phases dans la Renaissance en Italie
Bien que la Renaissance italienne connaisse une évolution continue, on y distingue traditionnellement trois grandes phases: le Quattrocento, la maturité classique et une phase tardive qui voit se développer une tendance privilégiant la virtuosité technique, la «manière», d'où son nom de maniérisme. Les historiens d'art ont tendance à détacher cette dernière époque de la Renaissance proprement dite et à y discerner de nombreuses tendances concurrentes et divergentes.

Certains spécialistes font coïncider le début de la Renaissance avec l'apparition sur la scène artistique de Giotto, au début du XIV e siècle; d'autres considèrent comme des phénomènes isolés les prodigieuses œuvres qu'il réalise dans une veine naturaliste. En effet, selon les tenants de cette seconde thèse, le style Renaissance proprement dit ne voit le jour qu'auprès de la génération d'artistes en activité à Florence au début du XV e siècle.

1. Le Quattrocento
Les membres éminents de la première génération d'artistes de la Renaissance - Donatello dans la sculpture, Filippo Brunelleschi en architecture et Masaccio pour la peinture - présentent de nombreuses caractéristiques communes. Leur pensée repose avant tout sur la foi dans les fondements théoriques de l'art et sur la conviction selon laquelle évolution et progrès sont non seulement envisageables, mais encore indispensables pour que les arts vivent et acquièrent de l'importance. Outre la source d'inspiration qu'ils y trouvent, ils révèrent dans l'art antique le témoignage de tâtonnements qui conduisirent au succès les grands artistes du passé. Soucieux de reconstituer le processus créatif plutôt que de se borner à l'imitation des œuvres parachevées de l'Antiquité, les artistes du Quattrocento cherchent à créer des formes artistiques à l'unisson de l'apparence de la nature et de leur expérience du caractère et du comportement humains. C'est animés d'un esprit de recherche approfondie et méthodique qu'ils relèvent le défi que leur lance la représentation précise tant du volume, du poids et du mouvement des formes plastiques que des nouvelles données picturales que constituent la perspective et les valeurs de la lumière et des couleurs.

La recherche rationnelle est donnée comme la clé du succès; aussi s'efforce-t-on de découvrir les lois exactes des proportions et pour l'architecture et pour la représentation du corps humain, et de systématiser le rendu de l'espace pictural. Tout en observant minutieusement les phénomènes naturels, ces artistes sont enclins à déduire des règles générales à partir d'apparences spécifiques. Par ailleurs, ils s'attachent à transcender la transcription directe de la nature pour insuffler des qualités idéales et immatérielles à l'art, qui se trouve ainsi doté d'une beauté et d'une grandeur plus éclatantes et plus durables que la nature elle-même. Ces caractéristiques - le rendu de formes idéales au détriment de l'apparence réelle et l'idée selon laquelle le monde physique est le véhicule ou l'expression imparfaite de la beauté, spirituelle par excellence -, resteront au cœur de l'évolution de l'art de la Renaissance italienne.

Le terme de «Quattrocento» désigne la quasi-totalité de l'art du XV e siècle. Berceau de la pensée artistique de la Renaissance, Florence demeure parmi les foyers d'innovation incontestés. Vers 1450, une nouvelle génération d'artistes, au nombre desquels on compte les maîtres Antonio del Pollaiolo et Botticelli, occupe le devant de la scène florentine. D'autres villes italiennes, telles que Milan, Urbino, Ferrare, Venise, Padoue et Naples, seront des concurrentes de taille en ce qui concerne l'apparition d'élans novateurs. Les œuvres de Leon Battista Alberti à Rimini et à Mantoue se situent à la pointe de la création architecturale de ce nouvel humanisme; les peintures d'un Andrea Mantegna à Padoue reflètent une synthèse personnelle de la perspective linéaire, du goût des antiquités et de la technique réaliste, tandis que le classicisme poétique d'un Giovanni Bellini illustre l'ascension de l'école vénitienne.

A la fin du XV e siècle, le caractère révolutionnaire des premières conquêtes du style Renaissance s'efface devant un consensus sur des notions de base, telles que la proportion, le contrapposto (attitude d'une statue, appelée également «hanchement contrarié», dans laquelle le poids du corps repose sur une jambe, l'épaule correspondante étant légèrement relevée) et la perspective linéaire; aussi de nombreux artistes se mettent-ils en quête de moyens d'expression personnels dans le cadre de ce répertoire stylistique et technique communément admis. Le Quattrocento ne représente pas, comme on l'a affirmé, les prémices imparfaites, quoique nécessaires, de l'art de la Renaissance classique, mais une période autonome d'un grand mérite intrinsèque. Rétrospectivement, la peinture du Quattrocento semble cependant être en mal d'une figuration qui soit éminemment convaincante, tandis que le rendu des émotions humaines est encore schématique plutôt que réaliste. En outre, la valeur de chaque élément d'une œuvre d'art donnée reste souvent disproportionnée par rapport à l'ensemble de la composition.

2. La Renaissance classique
L'art de la Renaissance classique recherche quant à lui une synergie dans le cadre de la représentation picturale ou de la composition architecturale, en accroissant l'intensité dramatique et la présence physique de l'œuvre d'art et en canalisant ses énergies pour atteindre à un équilibre. Reposant avant tout sur son unité - équilibre obtenu de manière intuitive, étrangère à la connaissance rationnelle ou au savoir-faire technique -, le style de la Renaissance classique est voué à se disloquer dès que l'un des éléments de la composition se trouve privilégié.

Ce style classique, qui ne s'étend que sur une courte période (vers 1495-1520) est le fait de quelques artistes de génie, au nombre desquels comptaient Léonard de Vinci, Bramante, Michel-Ange, Raphaël et Titien. L'Adoration des Mages (1481), laissée inachevée par Léonard de Vinci, est une composition picturale dont l'équilibre sera surpassé par celui de la Cène , la fresque qu'il réalisera à l'église Santa Maria delle Grazie, à Milan, de 1495 à 1497. Bien qu'il se livre aux expériences les plus diverses, tant d'ordre esthétique que technique (et parfois malheureuses, ce qui vaudra justement à cette Cène de se dégrader très rapidement), Léonard est considéré comme le parangon des théoriciens de la Renaissance, dans la mesure où son art est empreint d'une inlassable quête des lois régissant les différents phénomènes naturels.

Dans un style différent, Michel-Ange est la figure même de l'artiste doté d'un génie solitaire. L'universalité de ses talents transparaît dans le tombeau de Jules II (vers 1510-1515), à Saint-Pierre-aux-Liens, à Rome; la chapelle des Médicis (1519-1534), à Florence; la voûte (1508-1512) et la fresque du Jugement dernier (1536-1541) de la chapelle Sixtine; la coupole de la basilique Saint-Pierre (commencée en 1546). Toutes ces créations représentent des chefs-d'œuvre inimitables dans les domaines de la sculpture, de la peinture et de l'architecture. D'un tempérament radicalement différent, Raphaël évoque dans ses peintures de madones et dans ses fresques non des forces écrasantes mais une harmonie sublime et une beauté gracieuse et lyrique.

3. La Renaissance tardive et le maniérisme
L'évolution de l'art de la Renaissance italienne connaît une rupture nette après le sac de Rome (1527), qui tarit temporairement la source de mécénat représentée jusqu'alors par cette ville, et contraint les artistes à se rendre vers d'autres foyers culturels d'Italie, de France et d'Espagne. Déjà avant la mort de Raphaël, en 1520, des tendances allant à l'encontre du courant classique avaient commencé à se faire jour dans l'art romain.

Le Pontormo, le Parmesan et le Rosso Fiorentino, qui comptent parmi les premiers maniéristes, donnent naissance à un style qui trouvera sa plus parfaite expression dans l'œuvre de Giorgio Vasari et de Jean de Bologne. Le maniérisme est un mouvement esthétique qui prise des formes très raffinées de grâce et d'élégance - la bella maniera, ou style, dont le mouvement tire son nom. Bien que l'on retrouve les caractéristiques fondamentales de la Renaissance tardive chez de nombreux artistes, cette période, dominée par le maniérisme, fut sous le signe de l'individualité de l'artiste - qualité qui trouve sa pleine expression dans les dernières œuvres de Michel-Ange.

On se mit à mesurer l'accomplissement artistique avant tout à l'aune de la virtuosité individuelle déployée, et l'émulation suscita une compétition fondée sur l'éclat des réalisations individuelles. L'affectation des maniéristes et leurs efforts pour égaler, sinon surpasser, les grands maîtres qui les ont immédiatement précédés sont les symptômes d'une maturation quelque peu excessive, très éloignée de l'âge d'or de la découverte qui était le fondement premier du concept de Renaissance.
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MessageSujet: Re: La Renaissance   La Renaissance EmptyMer 3 Mai - 2:47

L'art de la Renaissance en Europe du Nord



On n'a pas encore tranché la question de savoir si le concept de Renaissance qui s'applique à l'Italie peut à juste titre caractériser l'art de l'Europe du Nord antérieur à l'année 1500. Les artistes septentrionaux du XV e siècle sont encore loin de puiser l'essentiel de leur inspiration aux sources classiques, et ne manifestent guère plus de goût pour les systèmes théoriques et abstraits de représentation caractéristiques de l'art italien. Si les transformations radicales qui affectent les traditions artistiques des pays du Nord au cours des XV e et XVI e siècle ne sauraient être comparées au phénomène italien, on les désigne néanmoins par le terme de Renaissance en raison de correspondances chronologiques.

La peinture flamande et hollandaise
Le terme même de «primitifs flamands» désigne en théorie des artistes dont le style précède celui de la Renaissance, c'est-à-dire encore puissamment ancrés dans le gothique: c'est dire toute l'ambiguïté qu'il y a à parler de Renaissance en Flandre et aux Pays-Bas. Jan Van Eyck, fut, de l'avis de tous, le premier à exploiter pleinement les ressources de cette technique nouvelle qu'était la peinture à l'huile. Dans son chef-d'œuvre, le retable de l'Agneau mystique (1432) de la cathédrale Saint-Bavon de Gand, et dans ses portraits, tels qu'Arnolfini et sa femme (1434), représentés le jour de leur mariage, il extrait la quintessence de ce procédé pour rendre les menus détails, les textures délicates et les jeux de lumière.

L'énigmatique Maître de Flémalle (que l'on tend à identifier à Robert Campin, maître à Tournai en 1406) sacrifie tout autant au réalisme éloquent et minutieux de la peinture flamande. Dans ses deux œuvres les plus célèbres, la Nativité dite de Dijon (vers 1420) et le Retable de Mérode (vers 1426), le Maître de Flémalle n'est pas sans rappeler Van Eyck en ceci qu'il allie le regard direct et neuf qu'il porte sur la nature à des compositions symboliques complexes, prêtant une certaine profondeur aux objets profanes qu'il intègre à ses scènes religieuses.

Dans une veine plus réaliste, Rogier de La Pasture, dit Van der Weyden, qui fut peut-être élève du Maître de Flémalle, doit sa renommée à ses portraits et à ses retables, tels que la Descente de Croix (1439-1443) ou le triptyque de l'Adoration des Mages. Il excelle à donner à ses compositions un caractère monumental et une charge émotive sans précédent. Ce fascinant génie au tempérament particulier exercera une influence considérable sur de nombreux artistes des générations suivantes, notamment Dieric Bouts. Gérard de Saint-Jean, quant à lui, se fait une spécialité de scènes nocturnes tout en délicatesse qui témoignent d'une grande maîtrise des jeux de lumière, tandis que le style de Hans Memling est caractérisé par une atmosphère langoureuse et délicate. Les œuvres de Gerard David ont un caractère plus austère et plus monumental.

Le plus grand maître de la fin du XV e siècle, Hugo Van der Goes, œuvre à Gand et à Bruges. Son Retable Portinari (1475-1477), qui représente la Nativité, est une œuvre capitale: il répond à une commande pour l'église San Egidio de Florence; alors que les peintres flamands offrent une certaine résistance à l'italianisme, de nombreux artistes italiens admireront ce retable et s'ouvriront au réalisme pittoresque et haut en couleur de la peinture à l'huile qui se développe en pays flamand.

Tandis que le Brabançon Jérôme Bosch, avec les fantasmagories du Jardin des délices (vers 1503-1504), reste l'interprète d'un univers encore médiéval, Bruegel l'Ancien se situe, par la recherche d'équilibre qui anime ses compositions, dans l'esprit de la Renaissance. Mais c'est Jean Gossart, surnommé Mabuse (vers 1478-1535), qui introduit aux Pays-Bas le maniérisme, qu'il combine avec la tradition nordique à travers madones ou sujets mythologiques, suivi dans cette veine maniériste par Bartholomeus Spranger (Hermaphrodite et Salmacis, vers 1581).

L'Allemagne
L'art allemand du XV e siècle est dominé par une pléiade d'écoles locales indépendantes. Puisant largement aux sources du style gothique international, l'art allemand subit une influence hollandaise qui s'accroît au fil du siècle. Le peintre et sculpteur Hans Multscher (Retable de Wurzach, 1437; Retable de Sterzing, 1456-1459) réunit dans une synthèse typiquement allemande les canons gothiques, l'observation naturaliste et une fascination insolite pour les aspects brutaux du comportement humain. A Bâle, le peintre Konrad Witz (polyptyque du Miroir du salut, vers 1435; Sainte Catherine et Sainte Madeleine, vers 1445) crée un style austère et monumental qui doit quelque peu à Jan Van Eyck; quant à Martin Schongauer, élève de Van der Weyden, il se distingue par la sensibilité de ses peintures (la Vierge au buisson de roses, 1473) et par la délicatesse de son burin (séries de gravures de la Passion du Christ et de la Parabole des Vierges folles), dont Albrecht Dürer s'inspirera par la suite.

Et c'est bien sous le signe de ce Dürer qu'est placée la Renaissance allemande. L'éblouissante et incomparable maîtrise dont il fait preuve dans ses gravures sur bois transforme à jamais les arts graphiques. La fascination de Dürer pour le monde, sa curiosité des théories et des principes fondamentaux qui régissent la nature et son désir d'exprimer les diverses beautés de celle-ci sous une forme monumentale et idéale sont autant de traits qu'il partage avec les artistes italiens. Ce sont d'ailleurs ses deux voyages en Italie, où il rencontre des personnalités artistiques comme Giovanni Bellini, qui feront naître chez Dürer un style personnel.

L'œuvre de Matthias Grünewald - contemporain de Dürer -, dont la plus parfaite expression est le polyptyque du Retable d'Issenheim (1515), déborde d'une charge expressive que traduisent des formes humaines déchirantes et des palettes de couleurs vives et éclatantes. L'aspect visionnaire et irrationnel de l'art de Grünewald, fermement ancré dans le monde médiéval, est l'un de ces nombreux échos du passé qui résonneront chez les générations suivantes d'artistes allemands. Dürer et Grünewald doivent affronter la tourmente spirituelle et intellectuelle suscitée par la Réforme, qui, malgré l'ampleur de ses conséquences religieuses et sociales, ne donne curieusement naissance à aucune forme artistique d'une originalité indiscutable.

Les relations de Dürer avec les idéaux de la Renaissance italienne sont à ce point personnelles qu'aucune école reconnue ou tradition n'apparaît dans son sillage. L'école du Danube - dont les figures dominantes, Cranach l'Ancien à ses débuts, Albrecht Altdorfer et Wolf Huber, témoignent d'un extraordinaire éveil de l'intérêt pour la peinture de paysages - n'est-elle qu'une constellation informelle de maîtres? Bien que d'une grande diversité, ils sont en fait animés par la même tendance à extraire la quintessence des tendances anticlassiques du gothique tardif.

Peintre d'un talent et d'une perspicacité considérables, Holbein le Jeune fait à l'origine partie de l'école d'Augsbourg, qui rivalise d'importance avec l'école de Nuremberg. Il exercera par la suite à Bâle et en Angleterre, où il deviendra peintre officiel de la cour de Henri VIII, affinant un art du portrait d'une grande perspicacité psychologique, qui rappelle à de nombreux égards les travaux effectués à la même époque en France et en Italie.
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MessageSujet: Re: La Renaissance   La Renaissance EmptyMer 3 Mai - 2:47

L'art de la Renaissance en France


L'art français du XV e siècle, à l'instar de l'art allemand, subit de plus en plus nettement l'influence de l'école flamande. Le peintre Jean Fouquet - auteur du Diptyque de Melun (vers 1452) et de plusieurs portraits, dont celui de Charles VII (vers 1450-1460) - et Enguerrand Quarton - à qui l'on doit une Vierge de miséricorde (1452) et la célèbre Pietà de Villeneuve-lès-Avignon (vers 1454-1456) - se montrent cependant également sensibles à l'art contemporain italien. En introduisant dans leurs œuvres des éléments de clarté et de stabilité, ils parviennent à une fusion, unique en son genre, du poids de la tradition et du dessin réaliste tenant d'un art du portrait où transparaît le vécu personnel.

A l'aube du XVI e siècle, les styles italiens jouissent d'une très grande popularité en France, où se rendent des artistes qui œuvreront pour François I: Léonard de Vinci, le sculpteur et orfèvre Benvenuto Cellini - auteur, notamment, de la somptueuse Salière de François Ier et d'un haut-relief en bronze, la Nymphe de Fontainebleau -, le Primatice, le Rosso Fiorentino et Nicolo Dell'Abate. Les artistes français n'ayant dans un premier temps assimilé que d'une manière relativement superficielle les caractéristiques de la Renaissance italienne, il s'ensuit des ruptures de style saisissantes dans des formes artistiques encore inspirées du Moyen Age, comme en témoignent des constructions de styles mélangés, tel le château de Blois (1515-1520), qui intègre des éléments d'ornementation monumentale italiens à une architecture gothique flamboyante.

La construction des colossaux châteaux de Chambord et de Fontainebleau, à la décoration exubérante, redonne vie à l'architecture. L'atelier royal, installé au château de Fontainebleau, devient un foyer important, connu sous le nom d'école de Fontainebleau, qui, par l'élégance affectée et les fantaisies complexes dans lesquelles elle associe la sculpture, la peinture et l'architecture, représente l'âge d'or du maniérisme français.

Au milieu du XVI e siècle percent un grand nombre de maîtres français talentueux, dont l'architecte Philibert Delorme, qui réaffirment un style classique fondé sur la mesure et les proportions. Le peintre François Clouet crée pour le portrait de cour un style extrêmement soigné et sensuel. La sculpture est dominée par les figures de Germain Pilon (gisants de marbre de Henri II et de Catherine de Médicis pour la basilique Saint-Denis; les Trois Grâces, monument funéraire du cœur de Henri II) et de Jean Goujon (fontaine des Innocents, qu'il dote de cinq grandes figures de nymphes, 1549; tribune des Caryatides, au Louvre, 1550). Le plus parfait chef-d'œuvre est peut-être le groupe de Diane chasseresse, réalisé pour le château d'Anet, et dont la figure féminine est généralement tenue pour un portrait de Diane de Poitiers. Si on ne peut formellement attribuer cette sculpture à Jean Goujon, de nombreuses caractéristiques permettent d'écarter, en particulier, le Primatice ou Cellini: avec cette œuvre, la Renaissance a trouvé une expression authentiquement française.
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MessageSujet: Re: La Renaissance   La Renaissance EmptyMer 3 Mai - 2:48

L'art de la Renaissance en Espagne



Le cas de l'Espagne est très particulier. Si, comme le reste de l'Europe, elle est, à la fin du XVe siècle, envahie par des artistes étrangers - architectes, sculpteurs sur pierre ou sur bois flamands, bourguignons, allemands ou français -, elle voit survivre une tradition artistique pendant toute cette période: l'art mudéjar, qui se manifeste en architecture, particulièrement dans le travail du bois, où les artisans mauresques excellent. Ainsi, sous le règne des Rois Catholiques, les artistes se tournent encore fréquemment vers cet art hybride, hispano-mauresque, et hésitent encore entre les formes anciennes et les nouvelles. C'est ainsi que le gothique s'attarde. D'origine bruxelloise, Enrique Egas conçoit les plans de la dernière grande cathédrale gothique d'Espagne, celle de Salamanque, dont la construction, commencée en 1512, sera plusieurs fois interrompue et reprise dans le style initial, alors que celles de Grenade et de Málaga sont déjà élevées dans le style Renaissance.

Dès la fin du XVe siècle s'est constitué un style renaissant typiquement espagnol, dit «plateresque» en raison de son exubérance décorative rappelant le travail de l'orfèvre (platero, en espagnol). Son équivalent portugais est le style «manuélin», contemporain du règne de Dom Manuel (1495-1521), qui dote le Portugal d'un répertoire iconographique évoquant les grands voyages maritimes, à base de cordages, de sphères armillaires et d'algues enchevêtrées. Le plateresque sera le style d'un Lorenzo Vázquez au collège de Santa Cruz, à Valladolid, ou d'un Gil de Siloé, originaire d'Anvers (ou d'Orléans?), pour la riche décoration sculptée de la chapelle du Connétable, commencée en 1482 dans la cathédrale de Burgos.

A Salamanque, la façade de la Casa de las Conchas - construite au début du XVIe siècle pour un chevalier de l'ordre de Saint-Jacques - est ornée d'un décor de coquilles en relief, portes et fenêtres étant surmontées d'écussons entourés d'une ornementation très fouillée. Toujours à Salamanque, l'université présente sur sa façade une décoration disposée comme un retable, dont les panneaux, au lieu de renfermer des scènes sacrées, sont ornés d'écussons, de médaillons ou d'arabesques florales. Ce style s'assagit quelque peu avec les travaux de Rodrigo Gil de Hontañón, au palais de Monterrey, à Salamanque, et à l'université d'Alcalá de Henares (1541-1553), son chef-d'œuvre. Opposé à la richesse décorative plateresque, l'esprit géométrique de la Renaissance italienne est introduit en Espagne par l'architecte, peintre et sculpteur Pedro Machuca, formé à Florence.

En 1524, celui-ci commence à Grenade le palais de Charles Quint (que terminera son fils Luis), à côté de celui des rois maures, à l'Alhambra. Son patio circulaire s'inscrit à l'intérieur d'une construction de deux étages où l'ordre ionique se superpose à l'ordre toscan. A la même époque, Charles Quint fait appel à Alonso de Covarrubias pour élever le somptueux alcázar de Tolède, rectangulaire, avec un étage supérieur pourvu de loggias, et quatre élégantes tours d'angle.

Mais tous ces édifices royaux seront bientôt éclipsés par le palais-panthéon de Philippe II: commencé en 1563 par Juan Bautista de Toledo, l'Escurial est achevé en 1567 par Juan de Herrera, grand admirateur de l'Italien Vignole. Herrera orientera de manière durable l'architecture espagnole vers les formes sévères qu'il impose à l'Escurial: on retrouvera ses façades sans sculptures et ses tours d'angle jusqu'en pleine période baroque.

En Espagne, la sculpture n'est pas en reste, notamment avec les œuvres sur bois du très maniériste Alonso Berruguete (vers 1488-1561). Son père, Pedro, bien que formé à Urbino, est un peintre encore très fidèle à la tradition gothique. Ce sont Fernando Llanos et Fernando Yáñez de La Almedina qui introduisent la Renaissance picturale en Espagne. Tandis que Charles Quint et son épouse Isabelle de Portugal se font peindre par Titien, le style maniériste du portraitiste Juan de Juanes, très influencé par Raphaël, s'oppose à celui d'Alonso Sánchez Coello, formé dans les Flandres. Mais c'est de Crète que viendra, en passant par Venise, l'un des trois plus grands maîtres de la peinture espagnole, avec Vélasquez et Goya: vers 1575 s'installe à Tolède Dhominikos Theotokopoulos, dit le Greco.
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